La consommation mondiale de viande a considérablement augmenté depuis les années 1990, surpassant la croissance démographique. Les régimes alimentaires évoluent, influencés par l'amélioration des revenus et l'urbanisation. Dans les pays à revenus élevés, la consommation de viande se stabilise, voire diminue, en raison de changements de comportements alimentaires.
Tendances Mondiales de la Consommation de Viande
L'Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a alerté dès 2006 sur le risque que fait peser cette hausse de la demande sur la sécurité alimentaire mondiale. Selon les projections de la FAO, la consommation mondiale de protéines carnées aura augmenté de 9 % en 2032 par rapport à 2022 (+43 millions de tonnes). Cette augmentation devrait être principalement le fait des pays asiatiques (+26 millions de tonnes), notamment la Chine, et des pays du continent américain (10 millions de tonnes).
- Les Américains (du Nord et du Sud), les Australiens ou les Européens ont doublé leur consommation de produits animaux depuis 50 ans et mangent 2 fois plus de protéines d’origine animale que la moyenne mondiale.
- En Chine, la consommation de viande par habitant (65 kg en 2022) a quadruplé en 40 ans.
- La population indienne en revanche reste très faible consommatrice de viande (environ 5 kg/habitant/an), pour partie pour des raisons culturelles ou religieuses.
L’augmentation globale constatée concerne majoritairement la consommation de volailles, d’une part car c’est une des viandes les moins coûteuses et d’autre part car les volailles sont considérées par les consommateurs comme des produits sains, faciles à cuisiner et peu émetteurs de gaz à effet de serre. Enfin, la viande de volaille n’est pas soumise à des interdits religieux, contrairement au porc ou au bœuf.
Situation en France
En France, après une baisse au début des années 2010, la consommation individuelle de viande connaît une très légère hausse depuis quelques années. C’est le résultat de la hausse de consommation des populations jeunes, en particulier de viande hachée, qui contrebalance le changement de régime de certaines populations pour des motivations diverses (par ex., environnement, bien-être animal) et l’augmentation d’une population âgée moins consommatrice. La proportion des différentes viandes, elle, se modifie, « en faveur des viandes de volaille ; celles de bœuf et des « autres viandes » (abats, équidés, lapins, gibiers) diminuent depuis le début des années 80 », comme le souligne le service de la statistique et de la prospective du ministère de l’Agriculture.
Production et Consommation de Lait
La consommation de lait est en forte augmentation à l’échelle mondiale : +1,7 % par an environ sur la dernière décennie. La moyenne mondiale de 118 kg équivalent lait/habitant/an en 2022 cache une forte hétérogénéité : environ 40 kg équivalent lait en Chine, 115 en Inde, et 285 en France. « En Europe, nos besoins intérieurs plafonnent et nous sommes devenus le premier exportateur mondial de produits laitiers, avec 36 % du total des exportations en valeur en 2022 », souligne Vincent Chatellier, de l’unité Structures et marchés agricoles, ressources et territoires (SMART), à Rennes. L’UE à 27 produit environ 150 millions de tonnes de lait par an, ce qui la situe au 2e rang mondial, derrière l’Inde (200 millions de tonnes par an).
Pertes et Gaspillages Alimentaires
Les pertes et le gaspillage surviennent tout au long de la chaîne alimentaire, les premières sur les phases de production primaire, récolte, transformation et distribution, le second lors de la vente au détail et de la consommation par les ménages. Ils n’englobent pas les cultures destinées à l’alimentation animale ou à la production d’énergie. Les données pour évaluer ces phénomènes sont encore insuffisantes ; cependant une estimation globale de près d’1/3 de la production alimentaire est retenue par la FAO, avec 14 % de pertes et 17 % de gaspillage.
Production de Viande Bovine dans l'UE
À contre-courant des tendances observées à l’échelle mondiale, la production de viande bovine de l’Union européenne continue de diminuer. L’Union européenne pèse de moins en moins lourd sur le marché mondial de la viande bovine. De fait, l’évolution de la production européenne va à contrecourant de ce qu’on observe à l’échelle mondiale, a expliqué Caroline Monniot, économiste au GEB-Idele.
Le cheptel européen continue en revanche de baisser depuis 2017, « après une phase de consolidation entre 2013 et 2016, liée notamment à la fin des quotas laitiers » : - 6 % de vaches en cinq ans, - 9 % en quinze ans, laitières et allaitantes confondues. Avec moins de disponibilités à abattre, la production de viande bovine de l’UE-27 s’est réduite de 2,5 % entre 2021 et 2022, tombant à 6,6 Mtéc (millions de tonnes-équivalent-carcasse). Une baisse moins importante que celle de la production, ce qui « réduit l’autosuffisance de l’UE-27 », pointe l’Idele. Et là encore, une évolution à contresens de la tendance mondiale : en hausse depuis soixante ans, la consommation mondiale de viande bovine devrait encore progresser de 4 % d’ici à 2031, selon la FAO.
Ces dernières années, les flux mondiaux de viande bovine, portés par les géants américains et océaniens, sont de plus en plus importants : 18 % des volumes produits étaient exportés en 2022, contre environ 12 % dans les années 2000. En six ans, ils se sont particulièrement intensifiés vers l’Asie, avec « d’énormes flux » des pays du Mercosur vers la Chine et de l’Amérique du Nord vers le Japon et la Corée, et une reprise des flux australiens vers la Chine en 2022. Ils ont progressé vers le Royaume-Uni (+13 %), en lien avec la hausse de la production irlandaise.
Échanges Intra-UE et Importations
L’UE apparaît de plus en plus marginale dans le commerce entre grands bassins mondiaux. En revanche, les échanges intracommunautaires de viande bovine ont nettement repris après s’être contractés en 2020, représentant 37 % des volumes abattus en 2022 (35 % en 2019) et avec des échanges croissants de viande désossée.
Les trois quarts de ces échanges de viande bovine au sein de l’UE ont été assurés par six pays en 2022. En tête, les Pays-Bas (521 ktéc exportés), qui fournissent de la viande de veau, de la viande d’autres États membres découpée aux Pays-Bas et de la viande sud-américaine arrivée à Rotterdam et « difficile à tracer ». Suit la Pologne (409 ktéc), dont les flux concurrencent la France sur ses marchés mais dont la production s’érode « faute de veaux à engraisser ». Présente sur le marché français mais aussi sur nos marchés d’export, notamment italien, l’Irlande a expédié 262 ktéc au sein de l’UE-27 en 2022. Et les flux espagnols (230 ktéc), qui nous concurrencent vers l’Italie et le Maghreb, sont passés devant les flux français (224 ktéc).
En parallèle, l’UE-27 s’est remise à importer de la viande bovine en 2022 des pays tiers, après un ralentissement dû à la pandémie et à la fermeture des structures de restauration (qui consomment surtout des viandes importées) : les importations ont rebondi de 25 % en un an, avec une hausse significative des achats au Royaume-Uni, à l’Argentine et aux USA.
Perspectives d'Avenir
Au niveau mondial, la production de viande bovine est attendue « quasiment stable » en 2023 avec une hausse pour la Chine, « le grand retour de l’Australie », le Brésil et la Chine toujours présents, qui contrebalanceraient le « fort retrait » des USA. Côté UE, la Commission prévoit une baisse de la production d’1,6 % par rapport à 2022, plus marquée que celle de la consommation (- 1,3 %).
Les exportations de viande européenne vers les pays tiers sont attendues stables par rapport à 2022. « Les flux intra-UE continuent de se reprendre et cela devrait continuer », note Caroline Monniot, en lien avec la hausse de la consommation en restauration au détriment des achats au détail. Les importations devraient augmenter de 5 % d’une année sur l’autre. La consommation moyenne par habitant de viande bovine diminue également, de 24,3 kg-équivalent carcasse (kgec) par habitant en 2019, à 23,6 kgec en 2020.
Principalement destinées à la restauration hors domicile (RHD), elles ont été fortement touchées par les mesures sanitaires mises en place dans le cadre de la lutte contre la Covid-19 (confinements, baisse d’activité dans la restauration collective, limitation des flux touristiques). Si l’Europe ne rivalise pas avec les États-Unis ou le Brésil, le premier exportateur mondial, elle fait tout de même partie des principaux producteurs de viande bovine.
Diversité de la Production Européenne
Pour autant, « on a une grande diversité de produits en fonction des régions d'Europe. On ne produit pas tous tout à fait la même chose », explique Caroline Monniot. « Dans les îles britanniques, on va retrouver beaucoup de génisses et de bœufs. » Le veau de boucherie est, quant à lui, principalement produit dans cinq États membres : les Pays-Bas, la Belgique, l’Allemagne, la France et Italie. En revanche, l'Espagne produit beaucoup de bovins jeunes, des bovins âgés de 8 à 12 mois.
« En Italie, on produit beaucoup de taurillons, mais aussi de plus en plus de génisses. Mais ce ne sont pas les mêmes génisses que dans les îles britanniques, puisqu’en Italie on est sur des génisses qu'on appelle en France "à l'italienne", c'est-à-dire élevées et engraissées comme des taurillons. » Un autre pays mérite également d’être mis en lumière : la Pologne, qui a « beaucoup accru sa production dernièrement » et qui prend de l’importance au sein de l’Union européenne.
« En ce qui concerne les flux de viande, presque 40 % des volumes abattus dans l'Union européenne sont échangés entre États membres, ce qui est considérable. » D’autant que cette part tend à augmenter. En 2010, seuls 35 % des volumes étaient échangés alors qu’en 2019, ils représentent 39 %. Certes, « on observe une petite stagnation, mais finalement en 2019, ça a baissé de seulement 0,7 % alors que la production européenne avait baissé de 1 %. Donc on continue à accroître la part de ce qu'on échange entre États membres. »
Impact des Scandales Sanitaires et du Brexit
Des scandales sanitaires ont éclaté en Pologne notamment, ce qui a freiné certains flux. « Tous les débouchés n'ont pas été touchés, mais il y a eu quand même une réduction des flux polonais vers certains États membres. » En 2019, le Royaume-Uni se préparait également au Brexit, ce qui a conduit à une réorientation des flux irlandais, alors même que 50 à 60 % des volumes partaient habituellement vers le Royaume-Uni. Le pays s’applique à développer ses marchés vers d’autres pays, y compris vers les pays tiers.
Principaux Exportateurs Intra-Européens
Si on s’intéresse de plus près aux flux intra-européens de viande bovine, « on remarque cinq principaux exportateurs qui, à eux seuls, fournissent 70 % des volumes échangés ». Par ailleurs, « on échange entre États membres dix fois plus de viande bovine que ce qu'on peut échanger avec les pays tiers ».
Position de la France
Finalement, « la France est un petit joueur dans ces échanges intra européens, avec ses 208 000 téc expédiées ». Mais certains pays sont devenus de très gros exportateurs, à l’instar de la Pologne. Certains pays sont à la fois très importateurs et très exportateurs, comme c’est le cas pour les Pays-Bas. « Ils importent et réexportent, mais produisent aussi beaucoup de veaux de boucherie destinés à l'exportation vers les autres États membres ». Mais on retrouve aussi la France dans cette catégorie.
La Filière Bovine en France
Dans l’univers des viandes, la viande bovine n’apparait qu’à la troisième place des viandes consommées en France. La France est le 1er pays européen producteur de viande bovine. La filière bovine regroupe environ 210 000 exploitations détenant 19 millions de bovins, dont environ 58 % d’origine allaitante et 42 % d’origine laitière. En Europe, la consommation de viande bovine est d’abord d’origine laitière pour 70 % des volumes. La France fait exception en raison de la densité de son élevage de race à viande. Notre consommation est majoritairement issue du troupeau allaitant (à 56 %) et 44 % de la viande consommée vient des vaches de réformes laitières.
70 % des morceaux de viande proviennent des femelles laitières ou de race à viande, notamment des vaches de réforme, c’est une autre particularité du marché de la viande. Les mâles sont peu consommés en France en raison d’une viande trop claire. La France recherche des débouchés pour ses animaux mâles. Heureusement, les consommateurs italiens et grecs aiment la viande rosée et offrent un débouché pour les jeunes bovins gras, donc engraissés en France.
Le solde commercial de la filière bovine française est toujours très positif de plus d’1 milliard d’euros. Nos exportations sont en direction de l’UE, surtout l’Italie. Nos importations proviennent essentiellement des pays du nord de l’Europe, sous forme d’arrières de vaches laitières principalement. Les tonnages abattus représentent 1,27 millions de tonnes. La production couvre 93 % de la consommation intérieure soit 23 kg par an et par habitant et 27 % de l’ensemble des viandes consommées. La consommation de boeuf haché frais et surgelé ne cesse de progresser et représente environ 40 % de la viande bovine consommée. Cette évolution de la demande des consommateurs français améliore la valorisation de la carcasse.
Depuis toujours, le marché du boeuf est très déséquilibré. En plus de consommer principalement des femelles, nos préférences alimentaires se portent sur les morceaux arrières, la viande à griller, considérée comme plus noble.
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