Enquête sur la Consommation Alimentaire en France

La consommation alimentaire en France est un sujet complexe, influencé par une multitude de facteurs tels que l'inflation, les préoccupations environnementales et les habitudes de vie changeantes. Mesurer précisément la consommation alimentaire des ménages est primordial, particulièrement lorsqu'elle évolue de façon exceptionnelle.

Évolution de la Consommation Alimentaire

Depuis 2020, la consommation alimentaire a varié de façon exceptionnelle en volume, c’est-à-dire après correction de l’effet de l’inflation. Elle a d’abord augmenté fortement durant les confinements mis en place pour lutter contre la pandémie de Covid-19, la consommation à domicile se substituant aux dépenses à l’extérieur, les cafés et restaurants étant fermés.

Puis, après un bref retour à la normale, la consommation a baissé de manière inédite, face à une hausse marquée des prix alimentaires en sortie de crise sanitaire, exacerbée par le déclenchement de la guerre entre la Russie et l’Ukraine en 2022. Ces évolutions sont mesurées à un niveau très détaillé dans les comptes nationaux annuels, disponibles dans leur version provisoire dès le mois de mai suivant la fin de l’année d’intérêt.

Pour mesurer la consommation alimentaire mensuelle (hors tabac), l’Insee s’appuyait principalement jusqu’ici sur l’enquête mensuelle sur le commerce de détail de la Banque de France. Celle-ci fournit des séries de consommation en valeur, issues des déclarations de chiffres d’affaires d’acteurs du commerce de détail.

L’utilisation d’un unique indicateur en valeur dans les étalonnages-calages des comptes trimestriels conduisait à stabiliser sur l’année en cours les parts des différents produits dans les dépenses alimentaires en euros courants, en ignorant les différences d’évolutions entre produits, pouvant provenir d’évolution contrastée des prix ou de recomposition du panier de consommation.

Nouvelles Méthodes de Mesure

Les données de caisse de la grande distribution alimentaire constituent une source particulièrement riche pour mesurer et analyser l’activité et la consommation de ce secteur. Les données de caisse sont transmises quotidiennement à l’Insee par les entreprises du secteur de la grande distribution alimentaire.

Afin de produire des indices d’évolution par produit à partir des données de caisse, il est nécessaire d’attribuer à chaque denrée alimentaire un code de la nomenclature de produits française. On a recours ici à un algorithme d’apprentissage permettant une classification automatique des libellés.

À partir des évolutions mesurées dans les données de caisse par produit, il devient alors envisageable d’enrichir et d’affiner la méthodologie d’estimation de la consommation alimentaire au niveau de la nomenclature en 129 postes. Pour certains produits tels que les conserves de fruits ou légumes ou les huiles, la grande distribution alimentaire capte l’essentiel des achats.

L’utilisation de cette nouvelle source d’information issue notamment des données de caisse dans les comptes conduit à réviser significativement la consommation de produits alimentaires, notamment sur les mois les plus récents. Compte tenu de l’actualité du sujet, le choix a été fait d’accélérer la mise au point de cette nouvelle méthode et de la mettre en œuvre dès les publications des comptes du 3e trimestre 2023.

Impact de l'Inflation sur les Budgets Alimentaires

En pleine crise agricole et à l’heure d’une inflation galopante, les interrogations sur le modèle de consommation actuel se multiplient, et notamment sur la place des grandes surfaces. À l’heure où l’inflation alimentaire atteint des niveaux historiques (+20% en moyenne sur les deux dernières années), obligeant les Français à adapter leur façon de consommer, au moment où l’on s’interroge sur la manière de faire évoluer notre modèle de consommation vers davantage de durabilité, nous avons souhaité nous arrêter sur l’un des derniers endroits où se retrouvent tous les Français pour faire leurs courses : les grandes surfaces.

L’inflation demeure un point de crispation majeur chez les Français, 92% se déclarent inquiets quant à cette dernière. Chez les plus modestes, cette crise sévit particulièrement. Parmi ces Français, le budget alimentaire mensuel moyen est passé d’environ 311 euros en 2023 à environ 346 euros cette année.

Concrètement, 79% des sondés ont arrêté de consommer certains produits car ils sont désormais trop chers : la viande (76%), les produits alimentaires transformés (74%) ou encore le poisson (71%). 82% des sondés jugent par ailleurs que depuis la hausse des prix, il est plus difficile de nourrir correctement leurs enfants.

Diversité des Comportements de Consommation

Tout l’objectif de cette note est de montrer l’importance de démoyenniser la lecture nationale de la consommation alimentaire. Car l’aborder en passant par le prisme de la moyenne nationale, c’est passer à côté de la diversité des pratiques de consommation qui jalonnent notre territoire.

Ce travail a abouti à un découpage de la France en douze « parties » que nous avons appelées « conso-styles territoriaux », en référence aux travaux de Bernard Cathelat sur les « conso-styles » dans les années 1980. Aucune contrainte géographique n’a été intégrée à la réalisation de cette typologie. Ainsi, les conso-styles ne forment pas des territoires contigus et des points de vente se trouvant à différents endroits dans le pays peuvent se retrouver dans un même conso-style.

Les douze conso-styles territoriaux constituent ainsi une nouvelle grille de lecture pour synthétiser la France de la consommation alimentaire tout en restituant sa diversité. C’est, par conséquent, un bon outil au service de l’activité économique des acteurs de la grande consommation pour s’adapter au plus près aux spécificités de leur territoire.

Amplitude de Consommation

Comme nous l’avons déjà évoqué, les conso-styles permettent de démoyenniser la consommation nationale. Prenons le cas du champagne. La consommation nationale de champagne, c’est-à-dire le poids que représentent les ventes de champagnes dans le total des ventes des grandes surfaces, constitue notre base 100.

En réalisant ce même exercice au sein de chacun des magasins de grandes surfaces des douze conso-styles, nous pouvons établir que le champagne est très largement sur-consommé dans les magasins « hyper urbains cosmopolitains » (conso-style présentant le plus haut niveau de revenu) avec un indice de 147 (comprendre, une consommation de 47% supérieure à la moyenne nationale). À l’inverse, c’est dans les magasins du conso-style « familles à la campagne » que le champagne est le plus sous-consommé avec un indice de 69 (comprendre, une consommation de 31% inférieure à la moyenne nationale).

Ce qu’il est important de noter, c’est que l’amplitude de consommation peut évoluer dans le temps. Ainsi, l’hétérogénéité de la consommation de champagne se renforce avec le temps. On peut y voir ici l’impact de la forte inflation qui oblige une partie des Français, les plus contraints financièrement, à faire des choix et à se passer de certains produits.

Circana a pu démontrer que les produits les plus arbitrés par les Français face à la forte hausse des prix étaient ceux qui n’étaient pas au cœur de l’assiette et à forte valeur d’achat, de nature à faire grimper très vite le montant du panier de courses. Le champagne cumule typiquement ces deux attributs puisqu’il s’agit d’une boisson avec un prix d’achat moyen de 24 euros.

Facteurs Explicatifs des Écarts de Consommation

Si les Français s’y retrouvent pour beaucoup encore pour faire leurs courses, leur consommation n’y est pas si uniforme. Grâce à un outil de cartographie inédit, Emily Mayer, directrice des études à l’Institut Circana, évalue tant la multiplicité des comportements de consommation que leur changement, vers davantage d’individualisation, au cours des dernières années dans une note de l’Observatoire Marques, imaginaires de consommation et politique de la Fondation.

Bien entendu, hiérarchiser les facteurs explicatifs de l’amplitude de consommation n’est pas évident tant l’interdépendance entre chacun est fort. Néanmoins, nous avons pu établir, parmi les facteurs étudiés, que les deux facteurs les plus explicatifs des écarts de consommation au total des produits de grande consommation étaient le niveau de diplôme et le degré d’urbanité.

Commençons par les fruits secs. Nous parlons ici des dattes, abricots secs, noisettes, amandes ou encore noix. La consommation de ce type de produits est très hétérogène au sein des différents conso-styles et l’écart à la moyenne s’amplifie encore au cours des quatre dernières années. La surconsommation des fruits secs dans le conso-style « quartiers bourgeois » se renforce quand ils sont toujours largement sous-consommés dans le conso-style « héritage ouvrier ».

La consommation de produits bio épouse le même schéma. Déjà extrêmement hétérogène structurellement, la surconsommation du bio s’accentue encore sur les quatre dernières années dans le conso-style « hyper urbains cosmopolitains ». Le diplôme explique 50% des écarts de consommation de bio en grandes surfaces, suivi par l’urbanité et seulement ensuite le revenu.

Autre exemple significatif, les eaux plates en bouteille. La surconsommation dans les conso-styles « grands ensembles populaires » et « hyper urbains cosmopolitains » se renforce quand la sous-consommation reste de mise dans le conso-style « tradition agricole ». Cette fois-ci, nos études montrent que c’est le critère d’urbanité qui explique majoritairement cet écart très fort de consommation, qui donne le sentiment que « la France des villes » aurait moins confiance dans l’eau qui coule de ses robinets que « la France des campagnes ».

Dans le cas des infusions, la consommation se polarise avec une surconsommation dans le conso-style « hyper urbains cosmopolitains » contre une sous-consommation dans le conso-style « héritage ouvrier ». Dans ce cas, c’est le revenu qui joue sur cet écart.

Consommation Alimentaire et Grande Distribution

Quantifier avec les conso-styles la diversité des comportements de consommation des Français et son accentuation dans le temps illustre le mouvement d’individualisation des comportements de consommation. La consommation de « communion », celle où la majorité des Français se retrouve autour d’un même type de produits, devient de plus en plus rare. Les consommations sont multiples et le sont toujours plus.

Cet état de fait représente un enjeu encore plus fort pour la grande distribution que pour tout autre commerce alimentaire. En effet, le modèle s’est construit sur la nécessité de vendre au plus grand nombre des produits relativement identiques. Si elle devient la norme, la diversification des comportements de consommation dessert néanmoins la croissance des marchés.

Dans une optique de stimulation de la croissance des marchés en grande distribution, les marques de l’alimentaire peuvent agir sur ce mouvement de démoyennisation de la consommation. Des leviers existent pour le limiter, voire le contrer.

Produits Alimentaires Responsables

Les produits alimentaires responsables doivent gagner en crédibilité et susciter la confiance face à une offre pléthorique. Une multitude de labels et allégations ont en effet vu le jour depuis 15 ans autour de la santé, l'origine, l'éthique, l'écologie.

La prolifération des labels et allégations brouille cependant la lisibilité de l'offre et dilue la crédibilité des allégations. Il devient dès lors urgent de repenser les stratégies afin de rassurer les Français et répondre aux nouvelles attentes en matière de produits alimentaires responsables.

Analyser les caractéristiques de 7 marchés clés : Bio, signes d'origine et de qualité, équitables nord / sud, équitable France, végétariens, allégations santé et environnementales : l'enquête dessine avec précision les contours de 7 marchés de l'alimentation responsable.

Cet observatoire propose une cartographie détaillée des différents profils de consommateur pour chacun des labels, ainsi que des réfractaires. Elle analyse les traits communs et les lignes de fracture, les motivations à l'achat et les véritables attentes des Français envers les labels.

L'étude analyse les circuits de distribution préférés des amateurs de labels et la complémentarité entre les circuits. Elle permet également d'identifier les leviers de croissance pour recruter de nouveaux consommateurs.

L'enquête établit un classement des 36 labels et allégations alimentaires, mais aussi des principales applications d'information nutritionnelle (Nutriscore, Yuka, Siga, etc.) en fonction de leur niveau de notoriété et de confiance.

Tableau Récapitulatif des Évolutions de la Consommation Alimentaire

Période Évolution de la Consommation Alimentaire Facteurs Influents
Confinements Covid-19 Forte augmentation Fermeture des restaurants, consommation à domicile
Post-crise sanitaire (2022) Baisse inédite Hausse des prix alimentaires, guerre en Ukraine
Tendances récentes Individualisation des comportements Niveau de diplôme, urbanité, revenu

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