Le mot « kascher » est entré dans le langage courant, mais à l’origine, c’est un terme hébreu qui désigne les aliments que les Juifs ont le droit de manger.
I. Le Porc dans l'Ancien Testament : Une Interdiction Multifacette
L'interdiction de consommer du porc dans l'Ancien Testament est un point central de nombreuses discussions théologiques et historiques. Présente dans le Lévitique (11:7-8) et le Deutéronome (14:8), elle ne se limite pas à un simple interdit alimentaire. L'approche particulière à la généralité se révèle essentielle pour comprendre la complexité de cette prescription.
A. Aspects Spécifiques de l'Interdiction
Le Lévitique au ch.11 stipule, parmi toutes les règles par lesquelles le peuple hébreu se rend saint, différent des autres peuples, et se « met à part » pour servir Dieu, la liste des animaux purs ou impurs, propres ou impropres à la consommation (voir aussi Deutéronome ch.14). La liste des animaux purs que l’Eternel donna à Israël établit une séparation entre lui et les nations païennes. Dieu enseigne par là à son peuple qu’il vit dans un monde dégénéré où il ne faut pas suivre ses tendances naturelles et sa propre sagesse, mais obéir aux ordonnances que l’Eternel a données.
Voici ce qui est dit dans Lévitique 11.4-8 :« Mais vous ne mangerez pas ceux qui ruminent seulement ou qui ont seulement le sabot fendu : le chameau, la gerboise, ou le lièvre, qui ruminent, mais n’ont pas le sabot fendu ; vous les considérerez comme impurs. Vous tiendrez aussi pour impur le porc, qui a bien le sabot fendu, mais qui ne rumine pas. Vous ne mangerez pas la viande de ces animaux, vous ne toucherez même pas leurs cadavres ; vous les tiendrez pour impurs ».
Détaillons les aspects spécifiques avant de les replacer dans un contexte plus large.
- Impureté rituelle : Le porc est déclaré "impur" (ṭāmē' en hébreu), entraînant une impureté rituelle non seulement pour celui qui le consomme, mais aussi pour celui qui le touche (Deutéronome 14:8). Cette impureté nécessitait des rites de purification, soulignant l'importance symbolique de l'interdit.
- Raisons biologiques invoquées : Le texte biblique justifie parfois l'impureté du porc par son incapacité à ruminer et à avoir les sabots fendus (Lévitique 11:7). Cette justification, bien que superficielle à première vue, possède des implications plus profondes. Elle sert de critère de classification des animaux propres et impropres à la consommation, reflétant une conception antique de la pureté et de l'ordre cosmique.
- Contexte culturel et sanitaire : L'interdiction du porc, outre son aspect religieux, pourrait avoir eu des fondements sanitaires. La consommation de viande mal cuite ou infestée de parasites était un risque réel dans l'Antiquité. Les règles d'abattage et de préparation des animaux propres, plus strictes, contribuaient à la prévention de maladies. Le porc était déjà considéré comme impur dans l’antiquité par beaucoup de peuples, comme les Égyptiens, Arabes, Phéniciens, Syriens, parce qu’il se complaît dans la bourbe, se repaît d’ordures et que sa chair mal cuite transmet des maladies.
- Dimension symbolique : Au-delà des aspects biologiques et sanitaires, l'interdiction du porc porte une charge symbolique importante. Le porc, animal souvent associé à la boue et à l'impureté dans le monde antique, symbolise peut-être une transgression des limites sacrées, un écart par rapport à l'ordre divin.
B. Le Rôle de la Loi Mosaïque
L'interdiction du porc s'inscrit dans le cadre plus large de la Loi mosaïque, un ensemble de prescriptions régissant la vie des Israélites. Cette loi, au-delà de ses aspects pratiques, visait à structurer la communauté israélite et à la distinguer des peuples environnants. L'observance de ces règles, dont l'interdiction du porc, était un marqueur d'identité religieuse et un signe d'allégeance à l'alliance divine.
II. Le Nouveau Testament et l'Abrogation de la Loi Cérémonielle
L'avènement du christianisme marque un tournant significatif dans l'interprétation de la Loi mosaïque. Jésus, tout en insistant sur l'importance de l'amour et de la compassion, modifie la perception des interdits alimentaires. L'approche particulière vers la vision générale est ici cruciale.
A. L'Emphase sur la Pureté Spirituelle
Jésus met l'accent sur la pureté spirituelle, prioritaire sur la pureté rituelle. Ses paroles et ses actes montrent une volonté de dépasser les prescriptions légales rigides de l'Ancien Testament. Il s'oppose à une compréhension légaliste de la religion, déplaçant le centre de gravité vers la relation personnelle avec Dieu et l'amour du prochain. En effet, Jésus déclare que ce qui rend l’homme impur, c’est ce qui sort de son coeur ! (Marc 7,14-23).
B. L'Interprétation Paulinienne
Paul, figure majeure du christianisme primitif, développe cette idée de l'abrogation de la loi cérémonielle. Il affirme que la foi en Jésus-Christ libère de l'observance des prescriptions alimentaires de l'Ancien Testament (Romains 14:1-23; 1 Corinthiens 8:1-13; Galates 2:15-16). Cette libération ne signifie pas une négation des valeurs morales sous-jacentes à la Loi, mais une transformation de la perspective religieuse.
C. Absence d'Interdit Explicite dans le Nouveau Testament
Il est important de noter l'absence d'interdit explicite concernant la consommation du porc dans le Nouveau Testament. Le silence des textes ne doit pas être interprété comme une approbation implicite, mais comme un signe de la nouvelle liberté chrétienne, libérée des contraintes rituelles de l'ancienne alliance.
III. Perspectives Historiques et Culturelles
L'évolution de la pratique chrétienne concernant la consommation du porc est également influencée par des facteurs historiques et culturels. L'approche particulière vers la vision générale nous permet de comprendre l'interaction entre la théologie et le contexte socio-culturel.
A. L'Influence des Cultures Environnantes
La diffusion du christianisme dans des régions où la consommation du porc était courante a certainement influencé les pratiques alimentaires des chrétiens. L'adaptation à l'environnement culturel a conduit à une assimilation progressive de cette pratique, sans pour autant engendrer de conflit majeur avec les principes théologiques.
B. La Diversité des Pratiques Chrétiennes
Même au sein du christianisme, des divergences de pratiques subsistent. Certaines communautés chrétiennes conservent des pratiques alimentaires spécifiques, inspirées de l'Ancien Testament, tandis que d'autres adoptent une approche plus libérale. Cette diversité reflète la richesse et la complexité de la tradition chrétienne.
C. Considérations Sanitaires et Économiques
L'élevage du porc, au fil des siècles, s'est développé et a pris une importance économique considérable dans de nombreuses régions. Les progrès en matière d'hygiène alimentaire ont également contribué à minimiser les risques sanitaires liés à la consommation de porc, renforçant son intégration dans les régimes alimentaires.
L’une des raisons principales pour lesquelles nous, chrétiens, consommons du porc réside dans les enseignements de Jésus-Christ lui-même. Notre Seigneur a apporté une vision révolutionnaire de la pureté spirituelle, bouleversant les conceptions anciennes. Cette parole profonde a été interprétée comme une levée des restrictions alimentaires de l’Ancien Testament.
Le Nouveau Testament, en particulier les écrits de Saint Paul, affirme que nous, chrétiens, ne sommes plus sous la Loi mosaïque et ses prescriptions cérémonielles. Il est crucial de comprendre que l’interdiction du porc dans l’Ancien Testament faisait partie des lois cérémonielles, distinctes des lois morales comme les Dix Commandements.
Toutefois, Jésus a enseigné que la vraie sainteté aux yeux de Dieu va bien au-delà du contenu de son assiette, qu’elle concerne les desseins secrets de nos cœurs, et non ce qu’on mange ou ne mange pas. La bible précise bien que « le royaume de Dieu, ce n’est pas le manger et le boire, mais la justice, la paix et la joie, par le Saint-Esprit » (Romains 14:17).
De manière générale, et en vertu de leur foi, les chrétiens ne sont pas tenus de s’abstenir de manger du porc. Ceci dit, la majorité des branches du christianisme n’ont pas de restrictions alimentaires strictes comme celles que l’on trouve dans d’autres religions, telles que l’islam ou le judaïsme.
Pour les Juifs, cette interdiction est fondée sur deux passages de l’Ancien Testament :- Livre du Lévitique 11:7-8 « Vous ne mangerez pas le porc, qui a la corne fendue et le pied fourchu, mais qui ne rumine pas : vous le regarderez comme impur. Vous ne mangerez pas de leur chair, et vous ne toucherez pas leurs corps morts : vous les regarderez comme impurs. »- Livre du Deutéronome 14:8 : « Vous ne mangerez pas le porc, qui a la corne fendue, mais qui ne rumine pas : vous le regarderez comme impur.
« Les musulmans ne mangent pas de porc parce que le Coran l’interdit à cinq reprises», explique Önder Günes, porte-parole de la Fédération d’organisations islamiques de Suisse (FOIS). Le verset 173 de la sourate 2 est particulièrement clair à ce sujet: « Certes, il vous est interdit la chair d’une bête morte, le sang, la viande de porc et ce sur quoi on a invoqué un autre qu’Allah ».
Pour les Musulmans l’interdit de manger du porc est selon Malek Chebel le plus massif et le plus ancien. Selon Vanessa Rousseau, dans son livre Le Goût du sang, la suppression de l'interdit du sang semble liée à l'organisation et à la mise en place progressive du calendrier alimentaire liturgique.
Néanmoins le Christianisme n'a pas toutes ces restrictions puisque Dieu a dit à Pierre dans une vision dans laquelle apparaissaient tous les animaux de la Création : « Tue et mange ». De cela ressort également que rien n'est impur pour le chrétien. Il peut tout consommer, et ne doit s'interdire aucun aliment, d'après cette vision : « Ce que Dieu a déclaré pur, toi, ne le considère pas comme impur ».
On s'intéresse moins à ce qui est mangé qu'à la façon de manger, et surtout à celui qui mange. Ainsi, la viande est perçue comme un aliment à éviter pour les moines d'un point de vue symbolique. En effet, selon la théorie des humeurs de l'Antiquité : « La chair de l'animal représente, dans la médecine gréco-romaine comme dans l'imaginaire germanique, une source de force et de violence, comme si le mangeur s'appropriait la vitalité de la bête : raison pour laquelle les moines, qui cherchent à contrôler leur vigueur en adoptant une alimentation surtout végétale, renoncent à la viande. »
Les interdits alimentaires font partie des dispositions de l’alliance que Dieu a conclue avec Israël. Mais en Jésus-Christ, l’alliance s’étend à tous les hommes, et les règles et signes qui marquaient cette distinction entre juifs et non-juifs deviennent caduques.
La liste des animaux purs que l’Eternel donna à Israël établit une séparation entre lui et les nations païennes. Dieu enseigne par là à son peuple qu’il vit dans un monde dégénéré où il ne faut pas suivre ses tendances naturelles et sa propre sagesse, mais obéir aux ordonnances que l’Eternel a données.
Le porc était déjà considéré comme impur dans l’antiquité par beaucoup de peuples, comme les Égyptiens, Arabes, Phéniciens, Syriens, parce qu’il se complaît dans la bourbe, se repaît d’ordures et que sa chair mal cuite transmet des maladies.
Se conduire comme un pourceau signifie se comporter en pêcheur. Alors que l’animal était considéré par l’Église comme l’incarnation de l’un des attributs de Satan, pourquoi au Moyen Âge, le cochon occupait-il une place essentielle dans la consommation de viande ?
Malgré toutes ces références négatives, la consommation du porc n'a jamais été interdite par l'Église, car elle repose sur une doctrine et des pratiques caractérisées par le refus de tout interdit alimentaire absolu. La consommation du porc est même devenue, au fil du temps, une dimension importante de l’identité chrétienne par opposition aux autres religions.
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"On a l’interdit qui est dans les textes juifs", explique Youri Volokhine, égyptologue, "tu ne mangeras pas de porc parce que… puis d’autres animaux à côté, les explications ne sont pas très claires, donc finalement, on ne sait pas pourquoi. Dans l’islam, c’est pareil, on ne mange pas de cochon parce que c’est interdit point final."
La mauvaise réputation du cochon est en fait antérieure à l’islam et au judaïsme. Elle remonte à l’Égypte ancienne, il y a 4 000 ans. Dans leur mythologie, le cochon a plutôt une mauvaise image. Les Égyptiens considèrent que le porc mange des choses suspectes.
On peut difficilement le déplacer en troupeau sur de longues distances, il est donc plus adapté en milieu urbain que rural. Le cochon, lui, aurait été relégué aux catégories les plus pauvres de la population et finalement frappé d’une interdiction religieuse.
À cette époque, les Israélites, les ancêtres du peuple juif, cohabitent près d’un peuple ennemi : les Philistins. À un certain moment, des villages israélites auraient décrété qu’ils ne mangeraient plus de porc, pour se démarquer de leurs voisins philistins, mais aussi pour s’affirmer en tant que peuple, avec une identité et des habitudes alimentaires communes.
Pour Max Price, "cela suggère, qu’il y a là un changement de regard sur le porc, qu’il y a un choix conscient, ou au moins certaines différences culturelles qui existent entre ces deux peuples très proches géographiquement. Mais ils choisissent de manger une nourriture très différente. Et l’un de ces peuples finit par transcrire ce tabou dans un livre religieux."
Ce tabou du cochon sera repris par les musulmans et inscrit dans le Coran. Le sens et l’application de ce tabou a en réalité beaucoup varié, selon les époques et les contextes. Par exemple, Philon d’Alexandrie, un philosophe juif du 1ᵉʳ siècle de notre ère, affirmait que les Juifs ne mangeaient pas de porc car leur viande était trop riche et succulente, et que les juifs devaient s’en priver pour se rapprocher de Dieu.
Dans l'Ancien Testament, l'interdiction de manger du porc (Lévitique 11.7 ; Deutéronome 14.8), fait partie de la Loi mosaïque.
Chez les Juifs, manger des viandes sacrifiées aux idoles étaient une abomination interdite par la loi (Actes 15.21). Pourquoi en serait-il autrement pour la viande de porc ?
Tableau récapitulatif des dates clés
Date | Événement |
---|---|
9000 ans av. J.-C. | Début de l'élevage et de la consommation de porc |
1200 av. J.-C. | Différence notable de consommation de porc entre Israélites et Philistins |
Ier siècle ap. J.-C. | Enseignements de Jésus-Christ sur la pureté spirituelle |
IVe siècle ap. J.-C. | Développement de la doctrine chrétienne et pratiques religieuses |
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