Vous souffrez de compulsions alimentaires ? Vous n'êtes pas seul. Il est essentiel de comprendre ce trouble pour mieux le gérer et retrouver un rapport sain avec la nourriture.
Définition de la compulsion alimentaire
D’après le Larousse médical, la compulsion alimentaire est « une des formes les plus répandues de compulsion (un trouble du comportement caractérisé par une envie irrésistible d'accomplir certains actes, à laquelle le sujet ne peut résister sans angoisse). Elle se traduit par une impulsion soudaine à absorber un aliment donné en dehors des heures habituelles des repas, souvent en dehors de toute nécessité métabolique et de la sensation de faim qui en découle. »
Le dictionnaire ajoute d’ailleurs que « les compulsions alimentaires entraînent souvent un sentiment de culpabilité. Elles ne sont anormales que lorsqu'elles sont répétitives et poussent le sujet à une recherche active des aliments. Elles peuvent aller jusqu'à la boulimie, dans laquelle le sujet est régulièrement pris d'une envie irrépressible de nourriture, dont il absorbe des quantités massives.
La fringale compulsive ou compulsion alimentaire, nommée « craving » en anglais, est une envie incontrôlable de manger de toute urgence un aliment « plaisir » pour obtenir un réconfort immédiat. Elle devient pathologique dès lors que les aliments sont absorbés sur un temps très court, sans réelle sensation de faim, sans arriver à s’arrêter, et souvent en grande quantité. Il y a cette notion de perte de contrôle.
Une compulsion est une envie de manger souvent incontrôlable et pressante, se traduisant par une ingestion importante de nourriture sur une courte période de temps. Bien sûr, chaque personne est unique, donc ce que je vais partager ne s’applique pas forcément à tous et toutes !
Hyperphagie boulimique : Qu'est-ce que c'est ?
En effet, les compulsions ne suffisent pas à poser un diagnostic d’hyperphagie boulimique. Selon ces critères, l’hyperphagie boulimique se caractérise par des crises alimentaires récurrentes, durant lesquelles une quantité de nourriture significativement plus importante est consommée en un temps limité par rapport à ce qu’une personne pourrait « normalement » ingérer.
En effet, l’hyperphagie boulimique se caractérise par des crises récurrentes (au moins 1 jour par semaine pendant 6 mois) durant lesquelles une grande quantité de nourriture est ingérée, sur des temps courts et avec un sentiment de perte de contrôle.
Pour être diagnostiqué avec l’hyperphagie boulimique, ces crises doivent survenir en moyenne au moins une fois par semaine pendant une période de trois mois. Il existe différents degrés de sévérité de l’hyperphagie boulimique, allant du léger à l’extrême, en fonction du nombre de crises par semaine. Un hyperphage léger se caractérise par une à trois crises par semaine, tandis qu’un degré sévère ou extrême implique respectivement de quatre à sept ou plus de huit crises par semaine.
Ces degrés de sévérité sont également déterminés en fonction de la durée et de la fréquence des crises sur une période de trois mois.
Causes des Compulsions Alimentaires
Les mécanismes sous-jacents des compulsions alimentaires sont multiples.
Stress, anxiété, fatigue, émotions difficiles, mal-être…Les compulsions alimentaires peuvent avoir plusieurs causes : stress, anxiété, fatigue, mal-être, émotions difficiles, baisse d’estime de soi, dépression, manque de sommeil… Elles peuvent aussi être le symptôme d’un trouble du comportement alimentaire (TCA).
Voici les principales causes identifiées :
- Restriction alimentaire : Les compulsions alimentaires sont souvent le symptôme d’une restriction, qu’elle soit quantitative ou cognitive. Faire un régime amaigrissant, qu’il soit très restrictif ou non, est difficile à tenir sur la durée.
- Besoins non comblés : Lorsque l’on a faim ou envie de manger, c’est que le corps a un besoin à combler (énergétique, nutritionnel ou émotionnel).
- Émotions difficiles : Beaucoup de personnes qui souffrent de compulsions alimentaires ont une tendance à anesthésier leurs émotions désagréables (stress, anxiété, peur, vide…) par la nourriture.
- Déséquilibre pondéral : Ainsi, les compulsions alimentaires peuvent être liées à votre poids corporel et constituer une réponse adaptative à un état de sous-poids relatif, même si vous ne vous considérez pas comme « maigre », ou très mince.
Comme si le cerveau n’avait plus qu’un objectif : manger. Si l’on décide de lutter, ce besoin ne disparaît pas et le cerveau développe une focalisation sur les aliments, qui peut devenir une véritable obsession, pouvant être responsable de compulsions alimentaires.
Or ce contrôle mental sur son alimentation (appelé « restriction cognitive ») n’est pas en mesure de tenir face aux besoins du corps ! Et pour cause, cela demande du contrôle pour suivre des règles externes plutôt que ses sensations alimentaires et ses envies.
Jean-Philippe Zermati, médecin-nutritionniste et co-fondateur du Groupe de Réflexion sur l’Obésité et le Surpoids (G.R.O.S) explique ainsi : « Chaque fois que le système volontaire exécutif tente de prendre le contrôle sur les systèmes de régulation physiologiques, la machine s’emballe et se rebelle. Quand le contrôle mental s’oppose à des besoins psychophysiologiques et aux envies qui les expriment, les pensées de nourriture deviennent une préoccupation centrale et le comportement alimentaire devient aberrant et anarchique.
Parfois, les compulsions alimentaires peuvent être dues à une autre raison : on peut avoir besoin de se remplir, sans même rechercher de plaisir. L’objectif n’est alors plus de se réconforter, mais de s’assommer pour ne plus rien ressentir.
Ce comportement alimentaire pourrait s’apparenter à un comportement automutilatoire : l’objectif est de se faire mal physiquement pour s’anesthésier émotionnellement.
Conséquences des Compulsions Alimentaires
La conséquence de la compulsion alimentaire, qui augmente notablement l'apport calorique quotidien, est la prise de poids. Chez certaines personnes, les compulsions alimentaires sont ponctuelles et disparaissent rapidement, sans avoir de conséquences importantes sur le corps et la santé. Mais pour d’autres, à long terme, elles peuvent entraîner une prise de poids rapide, une addiction au sucre, mener au surpoids ou à l’obésité, et par conséquent favoriser le risque de maladies cardiovasculaires, d’hypertension artérielle et de maladies cardiaques.
Les compulsions alimentaires peuvent avoir des répercussions sur la santé physique et mentale. Les compulsions alimentaires révèlent souvent un déséquilibre et un besoin de retrouver un équilibre alimentaire et émotionnel.
Conséquences métaboliques : la compulsion se fait le plus souvent au dépens d'aliments sucrés-gras (petits gâteaux), gras-sucrés (chocolat), gras-salés (fromage).
Conséquences mentales : la compulsion génère plaisir et culpabilité, dépendance et trouble de l'humeur, instabilité et troubles du sommeil.
Comment Gérer les Compulsions Alimentaires
Comment arriver à gérer les pulsions alimentaires ? Voici nos conseils pour les appliquer sans tarder et retrouver un rapport apaisé avec les aliments « à risque ».
Il est important de noter que les compulsions alimentaires ne sont en aucun cas un signe d’échec ou de faiblesse. Elles doivent être perçues comme des signaux de notre corps, nous indiquant qu’il y a quelque chose à examiner, à explorer et à comprendre.
Voici quelques stratégies pour gérer les compulsions alimentaires :
Stratégies Diététiques
- Rétablir un bon rythme alimentaire : Il n’y a rien de pire pour générer des pulsions que de sauter un repas ou de trop l’alléger : l’organisme a besoin d’un apport énergétique réparti tout au long de la journée.
- Éviter les régimes trop restrictifs : Trop se priver provoque des fluctuations de la glycémie qui déclenchent les fringales et des carences en vitamines et minéraux responsables du stress et des baisses de moral.
- Faire la paix avec les aliments "doudous" : Aussi, pour éviter les débordements, mieux vaut les mettre de temps en temps au menu et les savourer.
- Miser sur le magnésium : En manquer favorise les baisses de régime et l’anxiété, donc les pulsions.
- Inviter toutes les familles d’aliments à votre table : Des viandes, poissons, œufs et laitages, qui sont riches en protéines de qualité au pouvoir satiétogène ; Des féculents, qui apportent des glucides complexes, notamment à index glycémique modéré ; Des matières grasses, qui renferment des vitamines et des acides gras essentiels à l’équilibre nerveux ; Des fruits et légumes, riches en fibres et micronutriments, qui rassasient et boostent l’organisme.
- Prendre conscience de ses compulsions : (A quel moment de la journée arrivent-elles? Qu'est ce qui les déclenche? Quelles sont les pensées qui arrivent?
Approches Psychologiques et Comportementales
- Techniques de relaxation : Respiration profonde, sophrologie, méditation, cohérence cardiaque, hypnose, pleine conscience… De nombreuses techniques existent pour canaliser rapidement les émotions et favoriser un meilleur équilibre psychique sur le long terme.
- Thérapie : Ainsi, n’ayez pas peur de faire appel à un psychologue, un psychiatre ou même un nutritionniste.
- Trouver une « alternative plaisir » : Voir un film, faire du shopping, aller chez le coiffeur, pratiquer un sport, préparer une recette, peindre, chanter… Peuvent procurer autant de plaisir qu’une tablette de chocolat.
Autres Conseils Utiles
- Redonner au sommeil une place centrale : Pour limiter les pulsions, il faut donc aussi renouer avec des nuits suffisamment longues (8 heures) et réparatrices.
- Rester entouré : Difficile de se goinfrer compulsivement devant les autres !
Autorisez-vous à relâcher la pression dans tous les domaines, pas seulement la nourriture (travail, famille, sport…). Les pulsions sont souvent l’expression inconsciente d’une personne qui essaie de tout contrôler. Pour casser le cercle vicieux pulsions-culpabilité-pulsions, il faut savoir être indulgent envers soi-même.
En cas de compulsions dues à une recherche d’anesthésie émotionnelle, un psychiatre ou un psychologue formé aux TCC est le professionnel le plus indiqué.
Troubles du Comportement Alimentaire (TCA)
On dénombre dans la classification internationale du DSM-5 plusieurs grandes catégories de troubles du comportement alimentaire. Les plus courants sont l’anorexie, la boulimie et l’hyperphagie boulimique. Ces affections complexes engendrent généralement une grande souffrance chez les patients, c’est pourquoi elles nécessitent une prise en charge adaptée, le plus tôt possible.
Voici les principaux TCA :
- Anorexie mentale : Il s’agit d’une restriction alimentaire visant une perte de poids significative.
- Boulimie : La crise boulimique correspond à l’ingestion d’un volume alimentaire largement supérieur à la normale en un temps limité, de moins de 2 heures en général, de manière compulsive ou ritualisée.
- Hyperphagie boulimique : L’hyperphagie boulimique, ou accès d’hyperphagie, se présente sous la forme de crises de boulimie incontrôlées et récurrentes, sans comportements compensatoires.
Valoriser les petites victoires : diminuer par deux le nombre de ses crises, c'est déjà très bien. La compulsion alimentaire est une conduite addictive : 9 malades sur 10 veulent s'en sortir et 8 " craquent " au cours de la thérapie !
Comme je disais plus haut, ces compulsions ont une fonction protectrice : elles nous aident à faire face à des émotions difficiles ou à des besoins non satisfaits.
Ces compulsions témoignent souvent d’un dysfonctionnement sous-jacent. J’aime bien dire qu’elles sont une lumière rouge sur un tableau de bord.
Les compulsions alimentaires sont un sujet complexe qui mérite d’être exploré en profondeur. Faires-vous aider par une personne qualifiée si ce n’est pas déjà le cas.
Le Trouble Alimentaire en Psychanalyse et Psychothérapie
La question du trouble alimentaire, c'est déjà une question de trop ou de pas assez. Trop de kilos, trop de poids, trop loin de l'image que je souhaiterais, pas assez de motivation, pas assez bien. En-dessus ou en deça d'un seuil idéalisé, c'est entre manque et surplus que nous pouvons poser l'hypothèse d'un corps qui n'a pas ou plus la capacité de sentir de se réguler et de se satisfaire de ce qui est réellement suffisamment bon pour lui.
Entre pulsion de vie et pulsion de mort, le trouble alimentaire oscille entre destructivité et toute puissance du corps. Un corps qui se détruit, un corps dont la jouissance va au-delà de sa propre destruction. Parfois oui il faut détruire pour reconstruire mais le danger de maigreur ou de surpoids va entrainer le corps dans des conséquences médicales souvent lourdes où le processus de reconstruction se heurtera au limites du réel.
Participant au processus de maturation, le lait tiède et doux va lui donner la sensation d'un apaisement du corps mais cependant être nourrit ne suffira pas. Les cas d'hospitalisme ont montré que les seuls soins de nourrisage et d'hygyiène ne permettent pas l'épanouissement du bébé ; ils doivent être renforcés par une autre contenance que l'aliment seul. Le regard, la voix, l'odeur de la mère et le toucher de la peau avec les carresses qui accompagnent la tétée sont essentielles au bon développement de l'enfant, lui donnant encore la sensation d'unité et de fusion mère-enfant mélée déjà quand même de ce qui n'est pas lui mais qui le contient encore.
Les expériences précoces du nourrissage font partie du développement psycho corporel et psycho affectif de l'enfant, à la notion de soi et de l'autre, entrainant une différenciation progressive et supportable parcequ'elle sera justement normalement progressive. Comment se séparer lorsqu'on n'a pas déjà été ensemble ? La sensation d'insécurité ne lui permettra pas de vivre l'objet de jouissance comme pouvant être absent à postériori s'il n'a pas été présent en amont.
Le trouble alimentaire englobe donc des problématiques diverses, principalement liées à ces noeuds archaiques. Ce sont des désordres alimentaires qui sont les marqueurs extérieurs des désordres psychiques intérieurs et parfois cachés du conscient.
Ce processus est régressif car nous avons tous connus ce fonctionnement à un moment donné de notre enfance.
Le fantasme oral d'engloutissement, le fantasme anal de rétention-controle sont dans l'alimentation des tentatives de régulation et des mécanismes défensifs du psychisme. Manger n'est plus un plaisir, le corps est agréssé.
C'est ce déni que l'on retrouvera chez l'adulte de ne pas vouloir voir les choses en face. C'est aussi la phase de l'omnipotence.
La problématique paternelle s'exprime ici aussi avec un lien à questionner sur l'oedipe, la fuite de la sexualité (arrêt des règles également dans l'anorexie), comme compromis pour éviter l'impasse de la castration et d'un couple père-fille impossible. La relation est à questionner en tous cas.
Lorsqu'on aborde le trouble alimentaire en psychothérapie, il parait opportum en tous cas de se demander ce qui s'est passé dans la relation et ce qui a coincé.
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