La question du lien entre la consommation de viande rouge, de charcuterie et le risque de cancer est un sujet de préoccupation et de débat public. Plusieurs études et organisations de santé se sont penchées sur cette question, aboutissant à des conclusions importantes pour la santé publique.
Évaluation du Potentiel Cancérogène par l'IARC
L’IARC (International Agency for Research on Cancer ou CIRC : Centre International de recherche sur le cancer - l’une des agences de l’OMS) a rendu publique le 26 octobre 2015, une synthèse de la monographie sur l’évaluation du potentiel cancérogène de la consommation de viande rouge et de produits carnés transformés. En 2015, un groupe d’experts du CIRC a classé :
- La consommation de viandes transformées comme cancérogène pour l’homme (Groupe 1).
- La consommation de viandes rouges comme probablement cancérogène pour l’homme (Groupe 2A).
L’IARC a inscrit la charcuterie au rang des produits certainement cancérogènes (catégorie 1).
Preuves Scientifiques et Rapports d'Expertise
De nombreux rapports d’expertise scientifique internationaux et français ont établi un lien entre la consommation de viandes rouges ou de viandes transformées (incluant la charcuterie) et le risque de développer un cancer. En France, une expertise collective coordonnée par l’Institut National du Cancer (INCa) en 2015 confirmait le résultat de ces évaluations, en concluant à une augmentation du risque de cancer du côlon-rectum associée à la consommation de viandes rouges ou de charcuteries. Dès 1997, le World Cancer Research Fund (WCRF) et l’American Institute for Cancer Research (AICR) ont évalué à plusieurs reprises les niveaux de preuve des associations entre consommation de viandes rouges et viandes transformées et risque de cancer. Leur dernier rapport publié en 2018 juge que l’augmentation du risque de cancer colorectal associée à la consommation de viandes transformées est « convaincante ».
Mécanismes Impliqués
Plusieurs mécanismes peuvent expliquer l’augmentation du risque de cancer associée à une consommation excessive de viandes rouges et charcuteries. Parmi les principaux, on peut citer en premier lieu l’excès de fer héminique (fer contenu dans l’hème, structure chimique trouvée notamment dans l’hémoglobine, et très présent dans les viandes rouges). Celui-ci génère un stress oxydant qui oxyde les graisses (lipides), formant des composés cancérogènes. Ensuite, les composés N-nitrosés liés à l’emploi de sels nitrités pour conserver les viandes transformées entraîne la formation de composés génotoxiques (c’est-à-dire toxiques pour l’ADN).
De même, les sels nitrités présents dans certaines charcuteries entraînent, au cours de la digestion, la formation de composés N-nitrosés qui sont génotoxiques. En 2010, un groupe d’experts du CIRC a classé comme probablement cancérogène pour l’homme (Groupe 2A) les nitrates (issus de l’activité agricole) et les nitrites (agent de conservation en salaison) ingérés.
Par ailleurs, le chauffage excessif au cours de la cuisson peut lui aussi mener à l’oxydation des lipides et à la formation de composés génotoxiques. Ainsi, en 1993, un groupe d’experts du CIRC a conclu qu’un composé néoformé au cours de la cuisson (2-amino-3-methylimidazo[4,5-f]-quinoline) est probablement cancérogène pour l’homme (groupe 2A). De plus, en 2018, le dernier rapport d’expertise du WCRF et de l’AICR conclut à un niveau de preuve suggéré pour l’augmentation du risque de cancer de l’estomac par le mode de cuisson au grill et au barbecue de la viande et du poisson.
Consommation et Recommandations
La consommation quotidienne de charcuteries en France est nettement inférieure aux 50 g de référence de l’IARC. La consommation de produits de charcuterie en quantité raisonnable a tout à fait sa place dans le cadre d’une alimentation équilibrée. On y apprend notamment qu’il est recommandé de limiter la consommation de charcuteries à 150 g par semaine et celle de viandes rouges à 500 g par semaine. Cette limitation doit s’inscrire dans le cadre d’une alimentation équilibrée et diversifiée, c’est-à-dire riche en fruits et légumes, donc en antioxydants.
En 2019, Santé publique France a publié les nouvelles recommandations nutritionnelles destinées à la population adulte française. Elles ont pour objectif d’aider les adultes à faire de meilleurs choix alimentaires et à adopter un mode de vie plus actif. Ces recommandations sont concordantes avec celles de l’INCa.
Consommation de viandes rouges et charcuteries en France
En France, par rapport aux repères établis par Santé publique France, 32 % des 18-54 ans mangent trop de viandes rouges (plus de 500 g/semaine) et 63 % mangent trop de charcuteries (plus de 150 g/semaine). En 2014, la moyenne de consommation de viandes rouges chez les adultes de 18 à 79 ans vivant en France est de 47 g/jour soit 329 g par semaine. Elle est plus importante chez les hommes (428 g/semaine) que chez les femmes (239 g/semaine). La consommation moyenne de charcuteries est de 27 g/jour soit 189 g par semaine, 239 g chez les hommes et 146 g chez les femmes.
Alternatives et Précautions
La viande rouge comme blanche apporte du zinc et des protéines bien assimilables par l’organisme. Il est possible de remplacer la viande par d’autres sources de protéines tels que les œufs ou le poisson. Il est toutefois nécessaire de prendre quelques précautions car les apports en fer et vitamine B12 ne seront pas couverts. De plus, il faut consommer plus de poissons, œufs ou légumineuses pour espérer assimiler la même quantité de protéines.
Ainsi, pour diminuer les risques de surconsommation et obéir à tous nos besoins, il est recommandé de varier et de diversifier les sources de protéines en alternant, viande, volaille, œufs, poisson, coquillages et crustacés. Pour diminuer encore les risques, la préparation de la viande prend toute son importance.
En Cas de Traitements Médicaux
Pendant les traitements, les enjeux ne sont pas les mêmes. En fonction de la localisation de la maladie, du traitement reçu, le goût peut être modifié, la déglutition difficile, l’appétit très réduit, la fatigue est souvent très présente. L’anémie est un effet courant de la chimiothérapie. Ainsi, un apport en vitamine B12 et en fer via la viande rouge est recommandé pendant les traitements.
Outils et Ressources pour s'Informer
En cas de consommation excessive de charcuteries ou de viandes rouges, il est recommandé de réduire autant que possible la taille des portions et la fréquence de consommation, de privilégier la volaille et en alternant dans la semaine avec du poisson, des œufs et des légumes secs. Plus généralement, plusieurs outils déployés par Santé publique France sont disponibles pour faciliter la mise en pratique des recommandations nutritionnelles : le site mangerbouger.fr, avec notamment « La fabrique à menus », propose des idées de menus de saison variés pour manger équilibré toute la semaine en accord avec les repères nutritionnels.
Le Nutri-Score, logo à 5 couleurs apposé sur la face avant des emballages, informe les consommateurs sur la qualité nutritionnelle des produits. De « A » pour les produits les plus favorables sur le plan nutritionnel à « E » pour les produits les moins favorables.
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