Philosophie, sagesse orientale, méthode de développement personnel, les valeurs du bouddhisme influencent de nombreux courants contemporains. Plutôt qu’une religion, le bouddhisme est considéré en Occident comme une sagesse flexible dans laquelle chacun puise ce qui lui convient. Part notable de la vie quotidienne, l’alimentation est sans doute l’un des aspects de nos vies que le bouddhisme a le plus investi.
Principes Fondamentaux et Interprétations
Quand on parle de régime bouddhiste, il est important de reconnaître que chaque croyant choisit de s’alimenter comme il le fait, conformément à ses croyances religieuses. Leurs choix alimentaires ne sont pas simplement une mode ou une méthode pour perdre du poids, mais font plutôt partie de leurs pratiques culturelles et religieuses.
La tendance de nombreux bouddhistes à suivre un régime végétarien découle du principe d'ahimsa ou de non-violence qui est au cœur de la religion. Ce principe appelle les adeptes à faire le moins de mal possible et à éviter de tuer inutilement. Il appartient à chaque individu de décider ce que cela signifie pour lui et son régime alimentaire.
Au lieu de devenir végétariens, certains bouddhistes choisissent de privilégier la prévention du gaspillage alimentaire plutôt que le végétarisme. De son vivant, le Bouddha a simplement limité sa consommation de viande, mais ne l’a pas totalement bannie.
Au chapitre 8 du Laṅkāvatāra Sūtra, le Bouddha discute de la consommation de viande. Il conseille à ceux qui ont atteint des niveaux supérieurs d’illumination de s’abstenir complètement de viande. Il donne plusieurs raisons de le faire.
- Premièrement, dans le bouddhisme, les êtres vivants sont des réincarnations, donc consommer tout être vivant reviendrait à consommer un être cher ou une autre personne.
- Deuxièmement, manger de la viande suscite la peur chez les autres êtres. Si une personne est connue pour consommer des porcs, les autres porcs auront peur lorsqu’ils verront cette personne arriver.
- Une autre raison invoquée pour ne pas manger de viande est que la consommation de viande contredirait l’enseignement du Bouddha et susciterait le doute chez les spectateurs.
Le Bouddha cite également l’odeur nauséabonde de la viande crue et de la viande cuite comme une raison de s’abstenir de manger la chair des animaux. Il poursuit en évoquant l’inquiétude mentale et les mauvais rêves que font les personnes qui mangent de la viande comme une autre raison de s’abstenir.
Diversité des Pratiques Alimentaires
Contrairement à ce que beaucoup peuvent croire, tous les bouddhistes ne s’abstiennent pas de manger de la viande. En Chine, environ 18 % de la population s’identifie comme bouddhiste. Cependant, seuls 4 % environ de la population suivent un régime végétarien.
Si de nombreux bouddhistes tibétains suivent un régime végétarien sans viande, ce n’est pas le cas de tous. En raison de la rareté des produits frais dans certaines régions, certains adeptes peuvent manger de la viande à condition que l’animal n’ait pas été tué expressément pour leur consommation et qu’ils n’assistent pas à l’abattage.
Ceux qui suivent un régime bouddhiste zen ou shojin ryori s’abstiennent de consommer de la viande ainsi que d’autres saveurs fortes comme l’ail et l’oignon.
Il existe un large éventail de raisons pour lesquelles un bouddhiste peut consommer de la viande, que ce soit à l’occasion ou dans le cadre de son régime alimentaire habituel. Certains bouddhistes consomment de la viande en raison du manque de produits frais en saison dans leur région. D’autres reconnaissent la souffrance qui accompagne la production de fruits et de légumes dans les fermes industrielles et choisissent de consommer de la viande provenant d’animaux qui n’ont pas été expressément tués pour leur consommation.
Les pratiques alimentaires des adeptes du bouddhisme varient en fonction des croyances personnelles et de l’interprétation des enseignements religieux. De nombreux bouddhistes choisissent de suivre un régime végétarien pour éviter de faire souffrir les animaux. Ce choix est conforme à la croyance bouddhiste en l’ahimsa, qui consiste à ne pas faire de mal.
La consommation d’alcool et d’autres drogues n’est pas strictement interdite, car si la clarté d’esprit a été atteinte, la consommation d’intoxicants n’aura pas le même effet que pour les autres. Bien que renoncer à l’alcool ne soit pas strictement interdit, sa consommation est mise en garde et doit être limitée. Comme c’est le cas pour l’abandon de la viande, le fait de ne pas boire d’alcool a été associé à un certain nombre de bénéfices pour la santé, notamment une meilleure fonction cérébrale.
Comme pour la plupart des aspects du régime alimentaire suivi par les adeptes du bouddhisme, les attitudes à l’égard du jeûne et de la façon dont il est pratiqué varient d’une personne à l’autre. Cependant, de manière générale, le jeûne est considéré comme un acte volontaire qui doit être accompli de sa propre volonté, avec des conseils et une supervision. Pour de nombreux membres de la communauté bouddhiste au sens large, le végétarisme est également considéré comme une forme de jeûne.
Bien que cela ne soit pas obligatoire pour suivre le régime bouddhiste, s’abstenir de viande et suivre un régime végétarien est très populaire parmi les adeptes de la foi. La suppression de la viande a été associée à plusieurs avantages pour la santé, notamment une diminution du risque de maladie cardiaque.
Considérations Éthiques
L’une des principales considérations éthiques est que manger conformément aux principes bouddhistes réduira la quantité de souffrance engendrée par nos habitudes alimentaires. Il s’agit d’une considération centrale dans la pensée bouddhiste sur l’alimentation. Même lorsque de la viande est consommée, un animal ne devrait idéalement pas être tué dans le but exprès d’être mangé par l’adepte.
Une autre considération éthique consiste à manger des aliments de saison et indigènes à une région. Choisir des fruits et des légumes qui se sont développés pour prospérer dans l’écosystème est une bonne façon de soutenir l’environnement et la faune indigène. Dans la tradition bouddhiste, ces aliments saisonniers et locaux sont également considérés comme les plus appropriés.
Composantes du Régime Alimentaire Bouddhiste
Suivre un régime dérivé des idées exprimées dans le bouddhisme peut s’avérer difficile si l’on est habitué à un régime occidental traditionnel.
- Les fruits sont fréquemment consommés, en particulier ceux qui poussent naturellement à proximité et qui sont de saison. Cela correspond à la croyance selon laquelle les aliments fournis par la terre à un moment donné sont ceux qui doivent être consommés pour garantir les meilleurs résultats en matière de santé et de religion.
- Les céréales sont consommées sous diverses formes, notamment le riz et les nouilles. D’autres recettes utilisent le pain comme base pour d’autres ingrédients. L’idée principale est de mettre l’accent sur une alimentation simple.
- Les légumineuses sont un autre choix populaire pour les bouddhistes. Elles peuvent être utilisées de diverses manières, notamment dans les ragoûts.
- Des huiles saines sont fréquemment consommées par les adeptes de la foi bouddhiste et peuvent être utilisées pour cuisiner ou assaisonner les repas.
- Les légumes constituent la plus grande partie du régime alimentaire de nombreux bouddhistes, en particulier ceux qui suivent un mode de vie végétarien.
Variations et Adaptations
Le bouddhisme n’a pas de régime alimentaire spécifique que tous les adeptes doivent suivre. Il demande simplement de réduire les dommages causés aux êtres vivants et de privilégier la clarté d’esprit. Les bouddhistes qui suivent un régime végétarien ne mangent pas d’œufs ni de volaille. Bien que cela ne soit pas strictement interdit par les enseignements bouddhistes, beaucoup de ceux qui suivent la religion bouddhiste choisissent de ne pas manger de viande afin de ne pas faire souffrir les animaux.
De nombreux adeptes du bouddhisme choisissent de ne pas consommer de saveurs fortes, comme l’ail et l’oignon, ainsi que d’autres épices fortes, car on pense qu’elles obscurcissent la capacité à méditer le plus efficacement possible.
Le déjeuner des bouddhistes peut être extrêmement varié selon les personnes. Indépendamment des spécificités, les déjeuners ont tendance à être simples et comprennent principalement des légumes et parfois un féculent ou une céréale, ou un produit laitier.
Le bouddhisme est une question d’adaptabilité et change d’un endroit à l’autre. Les adeptes les plus stricts en Thaïlande peuvent ne prendre qu’un ou deux repas par jour, tandis que ceux de Chine en prennent généralement trois. Le plus important est peut-être que les adeptes mangent suffisamment pour entretenir leur corps et leur santé. À cette fin, une collation peut être tout aliment qui aide à atteindre cet objectif.
Le Végétarisme dans le Bouddhisme Tibétain
L’une des valeurs centrales du bouddhisme est la reconnaissance que tous les êtres sensibles souhaitent éviter la souffrance et cherchent le bonheur, tout comme les humains. Par conséquent, un pratiquant bouddhiste développe progressivement une conscience de l’interconnexion entre tous les êtres et un respect pour la vie sous toutes ses formes.
La tradition tibétaine, particulièrement dans les textes du Mahayana, insiste sur l’importance de la bodhicitta, le désir de libérer tous les êtres sensibles de la souffrance. Il est important de souligner que dans le bouddhisme tibétain, le végétarisme n’est pas une règle rigide. Certains maîtres tibétains, y compris dans le passé, ont consommé de la viande en raison des conditions difficiles du Tibet, un environnement où les végétaux étaient rares. Cependant, même dans ces circonstances, les bouddhistes sont encouragés à ne jamais tuer eux-mêmes des animaux et à développer la conscience de la vie animale comme étant précieuse.
D’ailleurs, dans les enseignements de nombreux maîtres contemporains, il est conseillé d’éviter autant que possible de manger de la viande ou du poisson, surtout celle des petits animaux. L’idée est que, bien qu’ils soient petits, ils possèdent une vie et une conscience, et leur souffrance, tout comme celle des grands animaux, compte.
Voici quelques raisons pour lesquelles les bouddhistes tibétains choisissent d'adopter un régime végétarien :
- Développer la compassion: Refuser de consommer de la viande est une pratique directe de la compassion. En prenant conscience de la souffrance des animaux, on renforce sa propre capacité à ressentir de la bienveillance pour tous les êtres sensibles.
- Accumuler du mérite: Dans le bouddhisme, éviter de causer du tort à autrui permet d’accumuler du mérite, qui est perçu comme une énergie positive aidant à progresser sur la voie spirituelle.
- Cultiver la non-violence: Être végétarien aide à pratiquer la non-violence, non seulement envers les humains, mais envers tous les êtres sensibles.
- Purification de l’esprit: Dans certains textes bouddhistes, il est dit que la consommation de viande peut avoir un impact négatif sur l’esprit, en contribuant à des émotions perturbatrices telles que la colère ou l’agitation.
Certains grands maîtres tibétains modernes, tels que le 14ème Dalaï-Lama et le Karmapa Ogyen Trinley Dorje, ont encouragé le végétarisme parmi leurs disciples. Le Dalaï-Lama lui-même a tenté de devenir végétarien et mange aujourd’hui très peu de viande, tandis que le Karmapa a adopté un régime entièrement végétarien.
L'Exemplarité et les Règles Monastiques
Contrairement aux ascètes solitaires, peu visibles, les "moines" bouddhistes (bhikkhu) doivent être vus et se rendre visibles : non seulement parce que, le bouddhisme reposant entièrement sur la motivation personnelle, on ne peut convertir par la force mais bien seulement par, mais aussi parce que d’autres communautés religieuses sont présentes dans les mêmes lieux et qu’il existe une très réelle concurrence entre elles.
L’exemplarité devient ainsi la clé de voûte de la pratique monastique et vise à l’équilibre entre les conventions du "monde" et les exigences propres à la sainteté bouddhique "supra-mondaine". Le bhikkhu se doit, à la fois, d’être content de tout - puisqu’il pratique la vertu du contentement (et c’est d’ailleurs une interprétation étymologique possible du terme bhikkhu) - mais aussi de contenter les donateurs auxquels il enseigne et dont il dépend.
Les vinaya [les recueils de "règles monastiques"] fixeront donc les usages à respecter pour satisfaire, à la fois, les exigences du milieu environnant et les exigences propres à l’enseignement bouddhique. Ainsi, par exemple, le vinaya précise-t-il qu’il existe dix chairs absolument "interdites". Sont ainsi exclues du régime carné : la chair humaine et celle d’animaux nobles ou royaux - éléphant, cheval, lion, tigre et panthère -, celle d’animaux impurs et répugnants comme le chien et la hyène, ainsi que l’ours et le serpent.
Plus caractéristique du bouddhisme - bien qu’il s’agisse d’un trait commun à tous les mouvements ascétiques - est l’obligation de respecter le précepte de non-violence (ahimsa). Il s’exprimera aux travers de règles extrêmement contraignantes.
Le vinaya interdit en effet aux bhikkhu de produire eux-mêmes leur nourriture : ils ne peuvent ni cuisiner ni jardiner, car de telles activités risqueraient de les exposer à détruire des êtres sensibles. Il leur est même interdit de procéder à la cueillette, ce qui les prive ainsi de l’auto-suffisance alimentaire dont bénéficiaient les ascètes forestiers.
Les bhikkhu, poussant la vertu de contentement jusqu’à n’exprimer plus aucun "désir personnel", se placent ainsi en dépendance totale des maîtres de maison et doivent se contenter, strictement, de ce qui "tombe" dans leur bol à offrandes. Ils ne sont pas des mendiants pour autant…. Car le vinaya leur interdit aussi expressément de rien demander à qui que ce soit (hormis à des parents directs) de ce qui constitue les quatre "nécessités" (nourriture, habillement, logement et médicaments) dont ils doivent se contenter.
Dans le premier cas, ils cheminent dans les villes et les villages, à pas lent, en s’arrêtant devant chaque maison ; il leur est cependant interdit de rester stationnés plus que quelques instants, au risque de faire croire qu’ils mendient… Le chemin qu’ils empruntent changeant tous les jours, nul ne peut savoir à l’avance où ils passeront et la nourriture reçue, normalement, n’a donc pas été cuisinée à leur intention : il s’agit de la pitance préparée par et pour les maîtres de maison, qu’on ampute incontinent d’une portion quand l’occasion d’effectuer un don "bienfaisant" se produit.
Dans ce cas, tout particulièrement, une nouvelle injonction s’applique qui manifeste une caractéristique cette fois spécifique du seul bouddhisme : l’attention portée à l’intention (cetanâ) à l’origine de l’acte est l’un des fondements essentiels de la doctrine bouddhique. S’il est dix viandes strictement interdites, c’est donc que toutes les autres sont a priori autorisées, mais le bhikkhu qui en recevrait doit néanmoins "éviter" de manger de la viande dont il a vu, dont il sait ou dont il peut soupçonner qu’elle provient d’un animal intentionnellement abattu pour son repas.
Pour lui, chaque acte a sa motivation propre et, selon la formule consacrée, le Buddha est "celui qui établit des distinctions". C’est pourquoi le Vinaya distingue si précisément les manières adéquates de "recevoir la nourriture", quand d’autres textes préciseront, de leur côté, les manières adéquates de "se nourrir".
À chaque repas, les bhikkhu sont d’ailleurs invités à réciter une stance introductive - véritable exercice spirituel préparatoire - qui déclare : "Ces offrandes de nourriture que nous allons consommer maintenant, avec attention, ne le seront pas par jeu, ni pour leur goût, ni pour prendre du poids, ni pour la beauté du corps, mais simplement pour l’entretien de ce corps par ingestion d’un aliment, pour le maintenir en bonne santé, afin de pouvoir suivre la vie sainte, et en réfléchissant ainsi : ‘Je vais détruire les anciennes sensations de faim et n’en produirai pas de nouvelles [du fait d’avoir trop mangé]. Ainsi s’effectuera la libération de l’inconfort physique et il sera possible de vivre à l’aise’…".
Tableau Récapitulatif des Préceptes Alimentaires Bouddhistes
Précepte | Description | Justification |
---|---|---|
Ahimsa (Non-Violence) | Éviter de causer du tort à tous les êtres vivants. | Principe central du bouddhisme, basé sur la compassion et la non-souffrance. |
Végétarisme (Non Obligatoire) | Adoption d'un régime sans viande pour minimiser la souffrance animale. | Expression de la compassion et du respect pour la vie. |
Modération | Manger avec conscience et éviter l'excès. | Maintenir l'équilibre entre le corps et l'esprit, éviter l'attachement aux plaisirs sensoriels. |
Aliments de Saison et Locaux | Privilégier les aliments qui poussent naturellement dans la région. | Soutenir l'environnement et la faune locale, consommer des aliments adaptés aux besoins du corps. |
Éviter les Intoxicants | Limiter la consommation d'alcool et d'autres substances qui obscurcissent l'esprit. | Maintenir la clarté mentale pour la méditation et la pratique spirituelle. |
Intention | Être conscient de l'origine de la nourriture et éviter de consommer des aliments dont l'animal a été tué spécifiquement pour soi. | L'intention derrière l'acte de manger est aussi importante que l'acte lui-même. |
TAG: #Viand