Les Pays-Bas, Pionniers Européens de la Viande Cultivée

Les Pays-Bas se positionnent comme un acteur clé dans le développement de la viande cultivée, avec des recherches actives depuis plus de 20 ans et des entreprises prêtes à commercialiser leurs produits.

Recherche et Développement aux Pays-Bas

Les universités d'Amsterdam, Utrecht, Eindhoven et Maastricht jouent un rôle central dans la recherche sur la viande de culture, explique Rolf Schuttenhelm pour le média "NU". En 1999, le chercheur néerlandais Willem van Eelen a d’ailleurs obtenu le premier brevet pour la production de viande de culture.

Entreprises Néerlandaises en Pointe

Les Pays-Bas comptent depuis quelques années deux entreprises qui travaillent sur les premiers produits destinés au grand public.

Meatable

Basée à Delft, Meatable a mis au point une technologie permettant d'extraire des cellules souches des cordons ombilicaux de vaches pour ensuite les cultiver en laboratoire. « Là, ils se transforment en muscles et en graisses dans des conditions artificielles et se multiplient jusqu'à obtenir un produit qui n'est en fait pas différent de la vraie viande ». La société a levé au printemps 47 M EUR qu’elle souhaite investir dans ses capacités de production.

Mosa Meat

De son côté, Mosa Meat a réussi en 2013 à fabriquer le premier hamburger cultivé dont le goût s’est révélé peu différent d’un hamburger traditionnel. Toutefois les coûts élevés de la recherche poussent l’entreprise à chercher à industrialiser sa production pour « rendre les produits à base de viande cultivée aussi bon marché, voire moins chers, que les produits à base de viande traditionnels ». L’entreprise a en ce sens récemment annoncé avoir levé 85 M USD auprès d’investisseurs.

Perspectives de Commercialisation

Les deux sociétés prévoient de bientôt (2023 pour Mosa Meat) commercialiser leurs produits, dans un premier temps à petite échelle avant d’être « largement disponibles » dans de nombreux supermarchés et restaurants quelques années plus tard. Outre la prévention de la souffrance animale, les entrepreneurs y voient de nombreux avantages environnementaux.

Soutien Politique et Réactions du Secteur Agricole

Le sujet a aussi su convaincre certains membres de la classe politique comme Walter Manders, porte-parole de l'agriculture et de la santé du parti VVD dans les États provinciaux du Noord-Brabant. Il s’est exprimé en faveur de la viande de culture y voyant une opportunité pour l’alimentation des habitants du Nord-Brabant et pour le maintien de l’activité agricole dans la région. Sa position a toutefois soulevé de vives réactions du secteur agricole comme celle de Mari van Genugten.

Autorisation des Dégustations et Ambitions Pionnières

Pour l'heure néanmoins, il s'agit d'un domaine qui est encore loin de faire l'unanimité. Le gouvernement néerlandais vient toutefois de franchir une étape importante, saluée par les start-up nationales spécialisées dans le domaine comme Meatable et Mosa Meat. Jusqu'alors, elles n'avaient pas le droit de faire goûter leurs produits.

La dégustation de viande, de poisson et de fruits de mer cultivés en laboratoire est désormais autorisée dans le pays, « une excellente nouvelle pour les Pays-Bas », estime Krijn De Nood, cofondateur et P.-D.G. de Meatable. Les législateurs ont établi un code de bonnes pratiques en collaboration avec ces entreprises et avec le représentant du secteur, HollandBIO.

Avec cette décision, les Pays-Bas confirment leur ambition de devenir pionniers dans le secteur. Aux Pays-Bas, c'est l'organisation Cellular Agriculture Netherlands, mise en place par le gouvernement, qui sera chargée de superviser le code de pratique pour les approbations de dégustation.

« Mosa Meat utilisera ces dégustations contrôlées pour recueillir des commentaires précieux sur ses produits et pour sensibiliser les principales parties prenantes au rôle que l'agriculture cellulaire peut jouer pour aider l'Europe à atteindre ses objectifs en matière de souveraineté alimentaire et de développement durable », explique Maarten Bosch, P.-D.G. de Mosa Meat.

Avantages et Défis de la Viande de Synthèse

La viande de synthèse nécessite moins d'eau et de nourriture que l'élevage traditionnel et élimine toutes les souffrances infligées au bétail. Cependant, des recherches et des réglementations supplémentaires sont nécessaires pour résoudre certains défis techniques liés à sa production.

L’industrie européenne de la viande cultivée fait un grand pas en avant. En effet, le gouvernement des Pays-Bas a adopté une motion visant à légaliser l’échantillonnage des produits de viande cultivée. La motion, proposée par les partis D66 et VVD, a été adoptée à la Chambre des représentants cette semaine, rendant légalement possible l’organisation d’échantillonnages publics de produits à base de viande cultivée.

Le pionnier néerlandais de la viande cultivée Mosa Meat, qui a mis au point le premier burger de bœuf cultivé au monde en 2013, a récemment reçu une subvention de 2 millions d’euros pour faire progresser l’agriculture cellulaire et introduire le bœuf cultivé sur le marché européen. L’approbation réglementaire de la viande cultivée sur le marché de détail de l’UE est, d’une part, un processus clairement défini, mais, d’autre part, susceptible d’être long.

« Avec une utilisation minimale de l’eau, des terres et des émissions de gaz à effet de serre et beaucoup moins de souffrance animale », a déclaré Tjeerd de Groot, du parti D66, à RTL Nieuws.

Le Premier Steak Cultivé et les Avancées Actuelles

Les caméras du monde entier ont fait le déplacement. Nous sommes à Londres, le 5 août 2013. Sur scène le professeur néerlandais Mark Post, de l’université de Maastricht, vient de cuire un steak haché. Il en coupe un morceau et le déguste. Si la scène - on ne peut plus classique- est scrutée par les caméras c’est parce que ce steak a été créé entièrement en laboratoire à partir de cellules prélevées sur une vache. On parle alors d’une nouvelle manière de nourrir les gens.

Dix ans plus tard, cette viande n’est pas encore dans nos assiettes européennes, mais il y a eu des avancées. A Singapour, la commercialisation de la viande in vitro est autorisée depuis 2020, une première mondiale ; aux Etats-Unis on s’en rapproche et en Europe la recherche a fait un pas de géant. Pour le constater il faut se rendre aux Pays-Bas, état pionnier en Europe, depuis le fameux steak de 2013, pensé et créé à l’Université de Maastricht. En toute logique, c’est ici, à proximité du campus que Mosa Meat, 165 employés, a installé ses bureaux et sa recherche et développement. Ici, on travaille essentiellement sur la viande de boeuf.

Processus de Production

Pour accéder aux laboratoires, il faut montrer patte blanche, aucune caméra, aucune photo n’est autorisée : la concurrence est rude dans le secteur et aucun dossier de commercialisation n’a encore été déposé ; même si le principe de la viande cultivée est connu.

Tout commence par une biopsie sur une bête vivante. On prélève un petit morceau de muscle dont on va extraire des cellules souches, capables de se multiplier et surtout de se changer en n’importe quelle autre cellule. On les place ensuite, en laboratoire, dans un bioréacteur rempli de vitamines, de sucres et d’acides aminés, un environnement propice à leur multiplication.

Mais ce n’est pas fini, les scientifiques sont désormais capables de les différencier : ils peuvent choisir si ces cellules seront des cellules de graisse ou de muscle. A la fin, on obtient des morceaux de tissus proches de la viande hachée ou de la texture d’un yaourt.

Investissements et Perspectives d'Avenir

Pour l’heure aucun consommateur européen n’a encore goûté cette viande in vitro, ou « de culture », terme préféré par les industriels. Comme pour tous les nouveaux aliments, il faut déposer un dossier auprès de l’Autorité européenne de sécurité des aliments, qui statue sous deux ans pour une possible commercialisation. Personne n’a encore franchi ce cap mais les investisseurs y croient. Mosa Meat a déjà levé plus de 85 millions d’euros ; des financements du gouvernement néerlandais, des fonds d’entreprises privées comme Aoste spécialisée dans la charcuterie ; et même de Leonardo Di Caprio ; l’acteur est prêt à utiliser son image pour Mosa Meat.

Car les dirigeants ont des arguments : « La consommation de protéines augmente dans le monde et avec notre viande, vous ne tuez plus les animaux, vous émettez moins de méthane et vous consommez beaucoup moins d’eau que pour l’élevage conventionnel, » explique Peter Verstrate le cofondateur ; « mais ce n’est pas fini, en créant du muscle et de la graisse nos produits auront plus de goût que les options végétales. Notre objectif c’est de faire un produit qui plaît et qui va donner envie aux consommateurs de revenir. »

Il faudra aussi créer un produit abordable. Le tout premier steak de 2013 a coûté 280 000 euros ! C’est pour cela que le gouvernement investit : 60 millions d’euros pour toute la filière avec pour but de développer un écosystème avec des cursus et des fournisseurs locaux. L’objectif c’est de devenir le centre de gravité de la viande cultivée en Europe. Car le pays fait face à une crise de son agriculture très intensive et très polluante. On compte 11 millions de cochons, 4 millions de vaches, et 100 millions de poulets, pour 18 millions d’habitants. L’azote est devenu un problème majeur, il faudrait qu’un tiers des exploitations arrête son activité et qu’un autre tiers se reconvertisse.

La viande cultivée apparaît donc pour le gouvernement comme une solution pour diversifier les protéines et le modèle des éleveurs.

Engagement des Éleveurs et Acceptation des Consommateurs

100 kilomètres plus au nord, à Rhode-Saint-Oude, Leon Moonen fait le tour du propriétaire. Dans l’une de ses granges il sait déjà qu’il installera des bioréacteurs géants, d’ailleurs il a déjà fait faire les plans. Il travaille étroitement avec l’industrie, l’objectif à terme c’est de faire des prélèvements et de développer les cellules directement à la ferme. Très emballé par le projet, il a déjà commencé les croisements chez ses animaux - des vaches Limousines avec des Highland Cattle. Il veut faire des tests et savoir quelle espèce donnera la meilleure viande cultivée. Impossible pour l’instant de chiffrer combien il gagnerait avec cette activité mais cela pourrait être très incitatif.

Il reste désormais à lever un dernier point, l’adhésion des futurs consommateurs. Qui, pour manger cette viande de laboratoire ? « Des clients qui voudraient diversifier leur apport en protéines, qui seraient déçus par les options végétales et que nous séduirions avec notre goût de viande, » avance-t-on chez Mosa Meat.

Mais il ne faut pas se tromper, les chances de faire bonne impression sont ténues. Alors Meatable, start-up spécialisée dans la viande cultivée de porc a choisi de se lancer à Singapour, un plus petit marché, qui pourra servir de test avant une expérience européenne. « Nous voulons faire connaître notre produit dans des restaurants de chefs. » Et ce produit c’est une saucisse végétale à laquelle ils ont incorporé du « porc cultivé » pour lui donner plus de goût. On est encore (très) loin des côtes de porc ou de l’entrecôte du futur.

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