La consommation de la viande de cochon est proscrite dans plusieurs religions, notamment chez les musulmans, les juifs et les chrétiens d’Éthiopie. Mais pourquoi a-t-on à un moment de l’histoire décrété que cette viande était impure ? Dans notre société contemporaine, l'alimentation représente bien plus qu'une simple nécessité biologique. Elle est un reflet culturel, une affirmation de l'identité et, pour beaucoup, un acte spirituel.
Parmi les nombreuses pratiques alimentaires dictées par les croyances religieuses, l'interdiction de manger du porc chez les musulmans est sans doute l'une des plus connues. Mais pourquoi cette viande est-elle proscrite ? Quels sont les fondements de cette interdiction et en quoi cela influence-t-il la consommation alimentaire des adeptes de l'islam ?
Les fondements religieux de l'interdiction
L'interdiction pour les musulmans de consommer du porc repose sur des fondements religieux clairs et précis. Cette prohibition puise ses origines dans le Coran, le livre sacré de l'islam, qui est la source principale des lois et des pratiques pour les musulmans. Par exemple, le verset 173 de la sourate 2, Al-Baqarah, énonce : "Il vous est interdit la chair de la bête morte, le sang, la chair de porc, et ce sur quoi un autre nom que celui d'Allah a été invoqué." Allah stipule ici que consommer du cochon est un acte impur. Le sang et la chair de cet animal sont donc considérés comme haram, c'est-à-dire interdits.
Il est crucial de comprendre que pour un musulman, la viande doit être halal, c’est-à-dire licite selon les lois islamiques. Le processus de préparation de la viande halal exige que l'animal soit abattu selon un rite particulier, où le nom d'Allah est prononcé.
Verset du Coran interdisant le porc
L'interdiction de la consommation de porc est mentionnée dans plusieurs versets du Coran. L'un des versets principaux à ce sujet est le suivant :
"Vous sont interdits la bête trouvée morte, le sang, la chair de porc, ce sur quoi on a invoqué un autre nom que celui d'Allah, la bête étouffée, la bête assommée ou morte d'une chute ou morte d'un coup de corne, et celle qu'une bête féroce a dévorée - sauf celle que vous égorgez avant qu'elle ne soit morte - et celle qu'on a immolée sur les autels, et qu'il vous est aussi interdit de chercher à deviner par l'astrologie le sort des coupelles (destinées au partage des viandes) : voilà une iniquité. Aujourd'hui, ceux qui désespèrent de la religion se désespèrent de vous en avoir dégoûtés.
Ce verset, ainsi que d'autres dans le Coran, souligne l'interdiction de la consommation de porc pour les musulmans. La justification de cette interdiction est principalement basée sur les principes de pureté rituelle et de respect envers les commandements divins.
Autres justifications de l'interdiction
Outre la dimension religieuse, l'interdiction de consommer du porc chez les musulmans est également justifiée par des motifs spirituels et hygiéniques. Dans l'islam, chaque règle a une signification spirituelle qui aide les fidèles dans leur quête de pureté et de piété. Historiquement, l'islam et d'autres religions comme le judaïsme, qui proscrit également la consommation de porc, ont intégré des pratiques alimentaires qui favorisaient l'hygiène et la santé.
Il est également intéressant de noter que, dans certaines régions et époques, le porc était porteur de maladies ou difficile à élever de manière saine. Ces facteurs ont consolidé l'idée de son impureté et ont servi à justifier son interdiction.
D’ailleurs, c’est intéressant parce qu’on a un discours qui est mis sur une difficulté faite sur ce que mange le porc. On considère que le porc mange des choses suspectes.
Une revendication identitaire
Pour beaucoup d'historiens ayant travaillé sur la question, le refus de consommer du porc est une façon, pour les juifs d'abord et les musulmans ensuite, de se distinguer des autres. Une sorte de revendication identitaire, même si le mot est anachronique.
À un certain moment, des villages israélites auraient décrété qu’ils ne mangeraient plus de porc, pour se démarquer de leurs voisins philistins, mais aussi pour s’affirmer en tant que peuple, avec une identité et des habitudes alimentaires communes.
Le cochon serait un moyen de se distinguer, également pour les chrétiens. Puisque les juifs refusent de manger du cochon, il faut donc que les chrétiens en mangent, manière de dire haut et fort (trop fort parfois) ce qu'ils sont et d'où ils viennent.
Impact culturel et économique
L'interdiction de consommer du porc a également des répercussions culturelles et sociales significatives. La consommation de viande halal est ainsi devenue un marqueur identitaire fort, particulièrement dans les sociétés où les musulmans sont en minorité. De plus, cette pratique alimentaire influence les interactions sociales et peut parfois poser des défis, notamment dans des contextes multiculturels.
L'impact de cette interdiction va au-delà du simple aspect religieux et culturel. Elle a également des implications économiques et commerciales importantes.
Comparaison avec d'autres religions
Pour mieux appréhender cette interdiction, il est pertinent de comparer l'islam avec d'autres religions qui partagent des restrictions alimentaires similaires. Le judaïsme, par exemple, interdit également la consommation de porc dans ses lois alimentaires. Dans les deux religions, ces restrictions sont perçues comme un moyen de se rapprocher de Dieu et de vivre en accord avec ses commandements.
Interdiction du porc dans le judaïsme
Pour les Juifs, cette interdiction est fondée sur deux passages de l’Ancien Testament :
- Livre du Lévitique 11:7-8 « Vous ne mangerez pas le porc, qui a la corne fendue et le pied fourchu, mais qui ne rumine pas : vous le regarderez comme impur. Vous ne mangerez pas de leur chair, et vous ne toucherez pas leurs corps morts : vous les regarderez comme impurs.
- Livre du Deutéronome 14:8 : « Vous ne mangerez pas le porc, qui a la corne fendue, mais qui ne rumine pas : vous le regarderez comme impur.
Raisons potentielles de l'interdiction
Bien malin celui qui pourra vous livrer une explication définitive. Car les historiens sont partagés. On est rapidement surpris par la quantité d'hypothèses qui circulent dans la littérature scientifique ou sur les blogs. La plus populaire veut que cette interdiction soit uniquement imputée à des motivations sanitaires.
Les archéologues ont des hypothèses, et une des hypothèses, c’est qu’à un certain moment, un certain groupe de population décide de se distinguer des autres et adopte des lois qui vont le différencier de tous les autres. Et parmi ces règles, puisque les autres mangent du cochon, eh bien nous, on n’en mange pas.
Une explication économique voudrait que les sociétés de l’âge de bronze aient tout simplement privilégié d’autres animaux, comme le bœuf ou le mouton. Justement, ces deux animaux produisent du cuir ou de la laine en plus de leur viande, ce qui permet des échanges, favorise le commerce et donc l’expansion.
Le cochon, tabou durant l'Égypte ancienne ?
Dès l'Égypte ancienne - donc bien avant l'apparition des trois grands monothéismes -, le cochon aurait eu une mauvaise image. Dans les Textes des sarcophages du Moyen Empire, le cochon est accusé d'un « crime cosmique » : il a blessé l'œil du dieu Horus, dieu de la Lune. Ses phases d'obscurcissement sont alors interprétées comme des blessures infligées par ses ennemis. Or, le porc est justement l'un des avatars de Seth, dieu du chaos et du désordre. Résultat ? L'animal aurait été jugé impur et banni des temples et des rituels.
Beaucoup soutiennent que c'est ici que l'interdiction du porc chez les juifs trouve sa source. Mais à partir de cet épisode, on a bâti une aversion de toute l'Égypte antique pour cet animal. En réalité, il n'y avait pas d'interdiction de consommation. On peut dire que c'est un animal qui n'est pas valorisé et très rarement donné en offrande. Mais il était tout de même consommé.
Viandes autorisées et interdites en Islam
Viandes autorisées (halal)
Les musulmans mangent de la viande de chèvre, de bœuf et de poulet parce que ce sont des produits halal. Ce terme signifie "autorisé", son opposition est la nourriture haram.
- Chèvre
- Bœuf
- Poulet
Viandes interdites (haram)
En Islam, la consommation de certaines viandes est interdite. Les principes qui déterminent les viandes autorisées (halal) et interdites (haram) sont basés sur les enseignements du Coran et de la Sunna (tradition prophétique).
- Porc (chair de porc)
- Viande d'animaux égorgés au nom d'un autre qu'Allah
- Bête morte (Maitah)
- Sang
- Animaux morts par des causes naturelles
- Animaux étranglés, assommés ou morts d'une chute
Le porc et la santé
Il existe des raisons médicales de renoncer à la consommation de porc. Les porcs nourris de déchets, particulièrement dangereux, ont probablement été à la source de l'exclusion du porc des religions juives et musulmanes.
Dans l'alimentation actuelle, le porc et la charcuterie représentent aussi la plus grande source de sel, qui est devenu l'un des trois ennemis prioritaires pour la santé publique. Un autre problème est le risque d'hépatite virale liée à la consommation de foie de porc.
Par ailleurs, l'élevage de porc, en concentrant les animaux, déclenche des épidémies parfois invisibles. Ainsi, en Europe, il est maintenant établi que ce sont les élevages de porc qui sont à l'origine des épidémies d'infections au staphylocoque doré, en particulier en Hollande.
Enfin, il existe des formes d'allergie au porc extrêmement dangereuses. En effet, certains patients reçoivent des valves issues de porc pour remplacer leur valve cardiaque déficiente.
Tableau récapitulatif : Interdictions alimentaires liées au porc
Religion | Base de l'interdiction | Justifications potentielles |
---|---|---|
Islam | Coran (Sourate Al-Baqara, verset 173) | Impureté rituelle, hygiène, obéissance à Dieu |
Judaïsme | Ancien Testament (Lévitique 11:7-8, Deutéronome 14:8) | Pureté rituelle, distinction identitaire |
TAG: #Porc