Ah ! Le bif pris entre deux tranches de pain bis Et le bon gros gigot d’agneau ou de brebis… L’aile et la cuisse du poulet sont un délice A rousiller comme un bâtonnet de réglisse ; C’est bon le jambon cru de Bayonne ou de Jean Caby (hé oui, comment peut-on s’appeler Jean Au moment où tous les enfants s’appellent Blaise, Irma, Zoé, Jules ; Qu’à Dieu ne lui déplaise.)
Vous me voyez écrire un peu n’importe quoi Et je vous imagine avec un air narquois : Où veut-il en venir ? Il nous parle de bête Et il diverge vers un vers qui nous embête. Rimer pour rimer n’est pas une fin en soi Et un sujet sans queue ni tête nous déçoit.
Je reviens donc à mes moutons et à mes chèvres Qui font l’objet de mes soucis et de mes fièvres ; Je connais ces gens-là : ce sont des animaux Dont les lèvres n’ont ni rires, ni cris, ni mots, Le mufle fouillant - à longueur de journée - l’herbe Et le bec cherchant le ver de terre superbe ; Il paraît (soi-disant, c’est à vérifier) Qu’ils occupent leur temps à se fortifier La panse, le gésier, la joue, l’aile et la cuisse Pour l’unique et seule raison que l’homme puisse Les dévorer tués, vivants, rissolés, crus…(Or, même après avoir bu, je n’y ai pas cru)
La Représentation de la Viande dans la Société
Le cochon de Gaston serait donc de la viande Et de la carne une vache exquise normande ! Ces morceaux de barbaque informe dans les plats Bomberaient l’estomac des ventres les plus plats Quand pois, aubergines, carottes et salades Redonnent la santé perdue par les malades…
Ma petite Marie m’a dit : « Un animal Est dans une basse-cour à l’abri du mal Et s’est entouré dans son champ d’une clôture En harmonie avec son amie la nature ; Tu le vois arriver en bande au Mac Donald : « On est prêt, on veut voir le patron Romuald ; Avez-vous aiguisé la lame au sacrifice Pour notre amour propre et pour votre bénéfice ? »
L’espèce qu’on dépèce avant le restaurant (Et même à la maison) ne provient pas D’Oran, Ni d’Iran, ni d’ailleurs, mais d’une grande usine Spécialisée aux produits de la cuisine ; Maintenant, comment ça pousse… Je n’en sais rien ; Mais, dis papa, c’est quoi, être végétarien ? »- C’est admirer le cerf, le porc noir, l’âne et l’oie Et laisser la bidoche au vautour qui tournoie. Au début, les humains savaient ce qu’il voulaient Et à la fin, sans faim, ils mangent des poulets.
J’ai des pommes, du blé, des navets, des cerises Et jamais mon foie ne traversera de crises.- Papa, encore, ai-je droit au fromage, au lait ?- Bien sûr ! Et aux œufs durs, à la coque et mollets Dans une ratatouille élaborée à Nice Pendant que paît au champ Alice, ma génisse.
Réflexions d'un Célibataire Face à la Viande
Le moment est venu où la viande tiède et rose, sentant l'eau, écoeure. Sept heures sonnent. Le célibataire cherche la table où il se place d'habitude dans sa gargote coutumière et il souffre de la voir occupée déjà. Une première vision l'obsède tandis qu'il regarde, sans le lire, le journal qu'il a tiré de ses poches. Il se rappelle une jeune fille qu'il aurait pu épouser il y a dix ans, il se voit avec elle, mangeant de robustes viandes et buvant de francs bourgognes, mais le revers se montre aussitôt et alors se déroulent devant son esprit chagrin les étapes d'un affreux mariage.
Il s'imagine assister au sein de sa nouvelle famille, à l'échange persistant des idées niaises et aux interminables parties de loto égayées par l'énumération des vieux sobriquets qu'on donne aux chiffres. Il se voit aspirant après son lit et supportant, une fois couché, les attaques répétées d'une épouse grincheuse ; il se voit, en habit noir, au milieu d'un bal, l'hiver, arrêté dans le somme qu'il préparait par le coup d'oeil furieux de sa femme qui danse ; il s'entend reprocher, une fois rentrés, la maussade attitude qu'il a tenue dans le coin des portes, il s'entend tout d'un coup enfin traité justement par le monde de cocufié... Ce sont les fallacieux rosbifs et les illusoires gigots cuits au four des restaurants qui développent les ferments du concubinage dans l'âme ulcérée des vieux garçons. La viande blanche est le poème à la coque du jour.
La Poésie Instantanée
Depuis le début de la semaine, il s’agit en effet d’inventer un texte poétique avec pour seule contrainte celle du chronomètre. Trois minutes, pas une de plus pour imaginer un texte. Ne croyons toutefois pas que le poème écrit reflète l’humeur du jour. Et vous ? Je me demande qui en 2024 écrit encore de la poésie… pas forcément pour la publier, mais pour soi-même ou pour ses proches… Offrez-vous des poèmes ? Pas forcément des poèmes d’amour, mais également des poèmes à vos amis ? C’est vrai que recevoir un poème n’est pas toujours aisé. Je me souviens au lycée quand j’avais offert à la belle D.F un recueil de textes illustrés pour elle, elle les lut puis… me les rendis tout en me disant les avoir aimés… Il en fut de même des années plus tard quand envoyant des textes à Colette Magny, elle me les renvoya: “je connais le prix des photocopies” avait-elle dit dans sa lettre. Elle ajoutait qu’elle ne se permettait pas de donner son avis sur mes textes.
Lamartine et son Aversion pour la Consommation de Viande
Lamartine est connu pour son aversion envers la consommation de viande. Dans La chute d'un ange (Septième vision. Le prophète), il aborde le sujet avec force et talent :
"Or ces hommes, enfants ! pour apaiser leur faim, N'ont pas assez des fruits que Dieu mit sous leur main; Leur foule insatiable en un soleil dévore Plus qu'en mille soleils les bois n'en font éclore. En vain comme une mer l'horizon écumant Roule à perte de vue en ondes de froment : Par un crime envers Dieu, dont frémit la nature, Ils demandent au sang une autre nourriture; Dans leur cité fangeuse il coule par ruisseaux ! Les cadavres y sont étalés en monceaux. Ils traînent par les pieds, des fleurs de la prairie, L'innocente brebis que leur main a nourrie, Et, sous l'œil de l'agneau l'égorgeant sans remord, Ils savourent leurs chairs et vivent de la mort ! Aussi le sang tout chaud dont ruisselle leur bouche A fait leur sens brutal et leur regard farouche. De leurs cœurs que ces chairs corrompent à moitié Ils ont comme une faute effacé la pitié, Et leur œil qu'au forfait le forfait habitue Aime le sang qui coule et l'innocent que l'on tue. Car du sang de l'agneau qui suce l'herbe en fleur À celui de l'enfant il n'est que la couleur : Ils ont à le verser la même indifférence; Ils offrent l'un aux sens et l'autre à la vengeance, À la haine, à l'amour, à leurs dieux, à la peur. Pour le verser plus tiède en se perçant le cœur Ils aiguisent le fer ennemi de la vie, Le fer qui fait couler le sang comme la pluie, En haches, en massues, en lames, en poignard. De l'horreur de tuer ils ont fait le grand art, Le meurtre par milliers s'appelle une victoire : C'est en lettres de sang que l'on écrit la gloire;"
Le poète fait ensuite le lien entre la violence des abattoirs et celle des champs de bataille, où les peuples sont anéantis en se mettant sous la férule de tyrans sanguinaires.
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