Le Jardin des Confitures : Une Histoire Gourmande et Savoureuse

Gourmandes et savoureuses, les confitures cachent une belle et longue histoire qui vaut la peine d’être écoutée. Nous avons aujourd'hui l'habitude de voir nos tables se garnir de délicieuses confitures au petit déjeuner ou à l'heure tant attendue du goûter. Mais cette tradition n'est pas si vieille, car pendant plusieurs siècles les confitures ont été un mets de luxe.

Les Premières Formes de Conservation des Fruits

Nous savons aujourd’hui, grâce à de brillants témoignages, que l’Antiquité connaissait déjà quelques méthodes de conservations des fruits grâce au sucre. Pline l’Ancien, en bon naturaliste qu’il était, évoque au livre XV de son Histoire naturelle les différents types de fruit et leur conservation en les faisant cuire au miel ou au vin de raisin. Plus tard au IV siècle, c’est au tour de l’agronome Palladus de mentionner des recettes de fruits cuits dans son ouvrage le De Re Rustica. Bien que ces premières formes de confitures soient bien loin de celles que nous connaissons, elles marquent toutefois les débuts de ce que sera la confiserie.

Le Moyen Âge et l'Électuaire

A l’époque médiévale, c’est sous le nom de ‘électuaire’ que nos confitures réapparaissent. Issu du latin ‘eleucterium’ désignant les médicaments à lécher, les confitures font partie intégrante de la pharmacopée de l’époque. Seuls les apothicaires tenaient le commerce du sucre de canne récemment découvert lors des Croisades par l’intermédiaire du monde arabe. Ce qui s’appelait jadis le ‘saccharum’ était alors une denrée rare et extrêmement couteuse que seuls les aristocrates pouvaient s’octroyer le plus souvent sous la forme de confitures délicatement concoctées.

Les seigneurs de jadis, grands mangeurs de gibiers et autres volailles en pâtés, n’avaient guère que les fruits pour se prémunir des maux dus à la consommation excessive de viandes. Les légumes qui poussent en terre, n’étaient dignes que de la classe paysanne, tandis que les fruits cueillis sur les arbres étaient l’apanage des aristocrates. Et c’est pour conserver ces fruits qu’ils étaient transformés en confitures épicées car l’on considérait, à juste titre, que les épices facilitaient la digestion de ces repas gargantuesques.

Nostradamus, Confiturier Méconnu

C’est donc avec la même intention médicale que le plus célèbre des confituriers rédigea son ouvrage à succès, Le traité des fardements et des confitures paraît en 1555. Nostradamus, en effet, est plus connu pour ses prédictions que pour son intérêt pour la confiserie. Mais c’est avec plaisir qu’il posa sur le papier de nombreuses recettes de fruits cuits au miel ou au sucre, chacune ayant une propriété individuelle.

L'Arrivée des Fruits Exotiques

Avec l’ouverture du commerce vers l’Asie et l’Amérique grâce à l’installation de comptoirs, l’Europe voit arriver sur ces marchés de nombreux fruits exotiques tel que l’ananas. Ces fruits cultivés dans les zones tropicales ne se conservaient pas longtemps sous le climat européen. Pour palier à cela, les Hollandais les premiers eurent l’idée de confire ces fruits dans du sucre. Ainsi, la coutume de cuire les fruits dans un sirop de sucre ou de miel se répandit rapidement et fit le bonheur de nombreux gourmands.

La Démocratisation de la Confiture au XIXe Siècle

Mais il faut attendre la découverte des méthodes industrielles d’extraction du sucre de betterave au XIXème siècle pour que les confitures fassent leur apparition dans les chaumières. C’est en 1811 que Benjamin Delessert et Jean-Baptiste Quéruel mettent au point un moyen d’extraire le sucre de la betterave avec les encouragements de Napoléon Ier. Depuis lors, les confitures se démocratisent et deviennent la gourmandise des petits et le plaisir des grands. Le terme “confiture” trouve son origine dans le mot français “confire”. Ce qui signifie “cuire dans du sucre” ou “confire dans du sucre”.

La "Crufiture": Une Innovation Récente

La “cruefiture” quant à elle est une confiture préparée sans cuisson. Cette nouvelle génération de confitures, dépourvue de cuisson, de gélifiants et de conservateurs, offre une alternative rafraîchissante et innovante aux confitures traditionnelles. L’histoire de la “crufiture” remonte à 2011, lorsque Fabrice Krencker a entamé ses recherches. Ce succès est le fruit de trois années de recherche, en partenariat avec des étudiants du pôle agro-alimentaire de l’Université de Haute Alsace, l’association régionale Alsace Innovation, la Banque publique d’investissement (BPI France) ainsi que les laboratoires de l’Aérial (Strasbourg) et du Cétam (centre d’étude apicole de Moselle).

La Méthode de Préparation de la Cruefiture

La méthode pour préparer de la confiture crue fascine, car elle laisse la nature faire son travail. “Le mélange, constitué de 50% de fruit et 50% de sucre (comme pour les confitures de nos grands-mères), est étalé sur un plateau. Ce mélange n’est pas pasteurisé (produit cru), ce sont le soleil et le vent qui évaporent naturellement l’eau en excès.

  1. Couper les fruits et ajoutez le sucre : Commencer par couper les fruits en morceaux et étalez-les au soleil. Ensuite, saupoudrer du sucre sur les fruits.
  2. Laisser le soleil agir : Le processus se déroule sans intervention humaine.
  3. Attendre ou intervenir : Cependant, Fabrice Krencker préfère attendre environ sept heures pour que le processus se déroule naturellement. Toute fois, une alternative consiste à aider le processus en écrasant les fruits à la fourchette.

Lorsque ces étapes sont correctement suivies, la confiture crue peut être conservée pendant plusieurs mois. Cette méthode unique permet de préserver la saveur naturelle des fruits et offre une durée de conservation prolongée.

La Cruefiture de Plantes Sauvages Comestibles

La cruefiture de plantes sauvages comestibles représente une fusion passionnante de la nature et de la gastronomie. En effet, elle se démarque par sa capacité à créer des confitures 100% gratuites. Grâce à l’utilisation de plantes sauvages comestibles et les éléments naturels comme le soleil et le vent. Elle offre une opportunité unique de récolter les trésors de la nature pour créer des confitures délicieuses.

La Confiture en Libre-Service : Une Initiative Locale

Dans leur cuisine, affairés à la confection des derniers pots de confiture de prune de l’arbre de leur jardin, Mélissa, Nicholas et Matthieu, trois colocataires qui les proposent en libre-service et à prix libre, sur le bord de la route à la sortie de Sucé-sur-Erdre. La semaine dernière, nous étions tombés sur une petite cahute qui propose des confitures en libre-service, à prendre et à emporter au prix qu’il vous plaît, sur le bord de la route à Sucé-sur-Erdre. Nous nous sommes régalés d’un pot de prune-mélisse mais, comme un livre auquel il manque les dernières pages, restait un mystère : qui se cachait derrière ces petits pots « faits avec amour » ?

Alors nous avons glissé un petit mot et un numéro dans la boîte à sous et, comme des gamins, avons attendu que le téléphone sonne. Et joie, il y a eu ce message : « Bonjour, je suis Mélissa, une des trois de la coloc de six qui vend des confitures… ». Vite, vite, se rendre à cette maison, une grande bâtisse derrière la cabane à pots et rencontrer, sous l’arbre à prunes magique qui a donné près de 100 kg de prunes et 200 pots, Mélissa, Nicholas et Matthieu, les trois chevilles ouvrières de la confiture et de l’opération.

« J’ai vu ça lors d’un voyage aux Pays-Bas », raconte Mélissa, costumière. « En libre-service, c’est assez commun au Danemark et dans les pays scandinaves. On s’est fait voler la cagnotte une fois, mais c’est quelqu’un qui devait avoir besoin de 5 € ! », dit, sans amertume aucune, le trio qui a récolté de quoi mettre du beurre dans les épinards, alors que le but était juste de payer le sucre des confitures . « Ça nous a surtout permis de rythmer l’été, de concrétiser un projet ensemble, nous qui ne nous connaissons que depuis quatre mois, et de créer du lien avec l’extérieur. Faites tous pareil !

Le lien, c’est Martine qui leur a apporté de la rhubarbe de son jardin du Petit-Nay, dont ils ont fait la « Martinade » ; ce sont aussi ces anonymes qui ont déposé un panier de courgettes, des concombres, un savon artisanal, du tilleul… Et tous ces pots reçus (trop) et petits mots, à présent collés sur le frigo. Écrit sur un papier à lettres rayé : « Merci pour votre confiture qui est extra, car pas trop sucrée. Étant diabétique elle me convient très bien. Une habitante du Port-aux-Cerise ( un quartier de La Chapelle-sur-Erdre, Ndlr). » « Très sympa votre initiative ! Très bonne la confiture !

Les autorisations dans tout cela ? « On a fait sans. Tout serait devenu compliqué sinon ! C’est une désobéissance mignonne », dit, dans un clin d’œil, Matthieu, conseiller d’orientation qui a quitté son poste pour un CAP boulangerie à la rentrée, mettant en pratique sa théorie du « quittez le couloir où vous êtes, prenez les portes sur le côté ».

C’est aussi l’histoire aussi de cette confiture mitonnée par le poète polonais Stanislaw Jerzy Lec (chez Payot), dont la recette est accessible à tous : « Avec les rêves aussi on peut faire des confitures. Il suffit d’ajouter des fruits et du sucre.

A la sortie de Sucé-sur-Erdre en direction de la chapelle-sur-Edre, la cabane à confiture de la coloc et ses bientôt derniers pots de prune.

Pour faire une bonne recette de confiture de prunes, déjà, bien secouer le prunier !

L’armoire à gratuité remplacera la cabane à confitures quand il n’y en aura plus. Des objets, livres, bouquins… à prendre.

Le Jardin des Confitures d'Isabelle Clérot

Installée à Vritz, Isabelle Clérot, plein pot au Jardin des Confitures. C’est beaucoup de bonheur…et le hasard des rencontres qui m’ont amenée à entrer en compétition dans la catégorie « artisanale », pour la région Loire-Atlantique-Vendée où je suis arrivée en tête, en début d’année. J’ai installé mon laboratoire à la Bourmauderie où je fabrique des confitures. Oui, sauf les fruits exotiques, que je ne peux pas produire ici, mais que je sélectionne avec soin. Actuellement, je suis en pleine récolte de mûres sauvages, car chez moi, pas de chimie, ni dans les bassines de cuivre ni dans le jardin, je n’utilise que des produits naturels.

La fin de l’été est le moment idéal pour faire les provisions de l’hiver : pêches, poires, groseilles, prunelles sauvages ou prunes… stimulent l’imagination et me permettent d’inventer des recettes originales auxquelles je peux ajouter des épices et des aromates. Pour les 50 ans de mariage de mes beaux-parents, j’ai ainsi « inventé » cinquante recettes de confitures différentes !

La Confiture au XVIIe Siècle : Un Plaisir Gourmand

A l'aube du XVIIème siècle, les confitures quittent résolument le registre médical pour accéder à la table des gourmets. Le sucre est en effet devenu plus accessible, les fruits sont de plus en plus appréciés et les aristocrates s'intéressent à l'arboriculture. En 1600 paraît un ouvrage intitulé "Théâtre de l’agriculture et mesnage des champs". Son auteur n’est autre que le pionnier de l’agronomie, Olivier de Serres. Il passe en revue les différentes manières de préparer les fruits, mais aussi des légumes variés, et le sucre. "La cassonade est meilleure que le sucre fin, ayant regard à la dépense" et il faut "bonne eau de fontaine ou de puits". Olivier de Serres s’attache à la préparation des écorces d’orange, poursuit avec les pois et fèves, les artichauts, les laitues et les concombres - mis en saumure au préalable. Pour lui, "la bonne confiture ne se fait pas hâtivement". Il délivre ses conseils pour "refaire la confiture mal faite", "retirer le sucre des vieilles confitures".

S’il porte le titre prestigieux de Valet de chambre du Roi - en l’occurrence Louis XIV - Nicolas de Bonnefons œuvre aussi en tant qu’agronome. En 1651, il publie "Le jardinier français" : un ouvrage de jardinage qui connaîtra une réelle popularité dans la seconde moitié du XVIIe. Pour les poires, il conseille les variétés suivantes : Muscadille, Gros Muscat, Blanquet, Petit Rousselet. Abricots, pêches, coings, cerises, noix… subissent ainsi l’expertise de Nicolas de Bonnefons : "Les cerises que l’on voudra confire seront choisies les plus grosses, mieux nourries et non tournées.

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