Le Gâteau des Rois : Histoire et Origine d'une Tradition Gourmande

Solidement implantée dans le calendrier, dans la foulée des fêtes de fin d’année, la tradition de la galette des rois comporte son lot d’anecdotes historiques méconnues. Si cette pâtisserie est aujourd’hui inscrite au panthéon de la gastronomie française, son origine est un peu oubliée de nos jours.

L'Épiphanie et les Rois Mages

Si elle est mangée tout au long du mois de janvier, la galette se déguste généralement autour du 6 janvier, date du « jour des Rois » ou Épiphanie, une fête chrétienne. La galette des rois est dégustée généralement autour du 6 janvier, date de L’Épiphanie, la fête chrétienne de l'adoration des rois mages devant l’enfant Jésus. Elle fait référence à la visite des rois mages venus à Bethléem auprès de l’enfant Jésus, douze jours après Noël et la naissance de ce dernier.

Selon l’Évangile de Matthieu, Gaspard, Melchior et Balthazar auraient suivi une étoile pour être guidés jusqu’à l’enfant Jésus, afin de lui rendre hommage et lui apporter des présents en guise de respect : l’or pour évoquer la royauté ; l’encens la divinité et la myrrhe pour la souffrance rédemptrice de l’Homme. En souvenir de cet événement, les chrétiens partagent une pâtisserie, dans laquelle est dissimulée une fève.

Selon l’évangile de Matthieu, Gaspard, Melchior et Balthazar auraient suivi une étoile pour être guidés jusqu’à l’enfant Jésus et lui apporter des présents riches de sens : l’or pour évoquer la royauté de Jésus ; l’encens pour sa divinité et la myrrhe pour son humanité.

Dans cette histoire de Rois mages, il n’y a ni galette ni fève !

Symbolisme de la Galette

« La galette des Rois est ronde pour évoquer le soleil (le Christ est la lumière du monde) et l’univers (le Christ Dieu de l’univers) ; la couronne rappelle quant à elle les Rois mages et la royauté divine du Christ, la fève désigne sa venue cachée, rappelle Marie-Odile Mergnac dans son ouvrage Petite histoire de nos fêtes en France.

Ce fameux gâteau, résumé d’un cours de théologie à lui seul, existe au moins depuis le XIIIe siècle (on l’évoque comme coutume déjà ancienne dans un texte rédigé à Amiens en 1311). »

Origines Païennes et Romaines

L’origine de la galette est bien plus ancienne : elle remonte à l’époque romaine. Dans l’Antiquité, les Romains célèbrent en décembre la fête des Saturnales. A l’occasion de ces fêtes, un repas était partagé entre les maitres et les esclaves.

Tacite, historien du Ier siècle, évoque la tradition du « Roi du jour » : un banquet au cours duquel maîtres et esclaves partagent un même repas. À cette occasion, une fève (haricot) est dissimulée dans un gâteau dont l’aspect rond et doré symbolise déjà le soleil. On glissait alors une fève (un haricot) dans un gâteau dont l’aspect rond et doré symbolisait le soleil.

Celui qui tombe sur la fève devient le « Prince des Saturnales » ; il a le droit d’exaucer tous ses désirs pendant une journée, devenant le roi d’un jour. Cette fête est l’occasion d’abolir toutes barrières sociales, notamment entre maîtres et esclaves.

La Fève : Symbole de Fécondité

Dès l’Antiquité, la fève (de haricot blanc ou autre légumineuse) est choisie comme élément caché dans la galette, car c’est l’un des premiers légumes à pousser après l’hiver. La fève était l’un des symboles du solstice d’hiver car c’est le premier légume qui pousse au printemps.

Cette graine est un symbole de fécondité, car elle porte en elle le germe de la future plante. On ne pouvait trouver mieux pour célébrer Saturne, Dieu romain dédié à l’agriculture ! Au Moyen-Âge, la tradition perdure, la fève étant l’un des aliments les plus consommés en Europe.

La Frangipane : Une Invention Italienne

Aujourd’hui, la recette traditionnelle de la galette est à base de crème frangipane (un tiers de crème d’amande, deux tiers de crème pâtissière). Elle devrait son nom au comte Cesare Frangipani, qui aurait offert la recette à Catherine de Médicis au XVIe siècle, en cadeau de mariage lors de ses noces avec le futur Henri II.

Dans la tradition franciscaine, on fait toutefois remonter son origine au XIIIe siècle, en l’attribuant à Jacqueline de Septisoles, jeune veuve du noble romain Graziano de Frangipani, et proche de François d’Assise, à qui elle avait pour habitude d’offrir des gâteaux aux amandes.

Galette ou Gâteau des Rois ?

Si dans les trois quarts de l’Hexagone on mange de la galette, on préfère le gâteau des rois dans le sud de la France. En Provence, point de galette des rois, c’est un gâteau des rois que l’on partage le 6 janvier pour fêter l’épiphanie ou l’arrivée des rois mages devant Jésus qui vient de naître.

Le gâteau des rois est un gâteau, plus ou moins dense ou brioché. Le gâteau des rois typiquement provençal est une brioche à la fleur d’oranger, recouverte de sucre, décorée de fruits confits. La forme ronde de la brioche symbolise le chemin des Rois mages, et les fruits confits les pierres précieuses qu'on retrouve sur leur couronne.

La galette à la frangipane est aujourd’hui la plus consommée dans l’Hexagone. Composée de crème aux amandes entourée de pâte feuilletée, elle s’est imposée peu à partir du XVIe siècle, suite à une querelle entre pâtissiers et boulangers.

A Paris, au 15ème siècle, le gâteau des rois aurait été l'objet d'une guerre féroce entre les boulangers et les pâtissiers : ces deux corporations voulaient chacune obtenir le monopole de la vente de ce gâteau symbolique. Ce sont les pâtissiers qui gagnèrent et François Ier leur accorda donc le monopole de la vente du gâteau des rois.

À l’époque, les deux corporations se disputent le monopole de la vente du fameux gâteau des rois, fabriqué à partir d’une pâte au levain. Ils en appellent au roi de France, François Ier, qui tranche en faveur des premiers. Qu’à cela ne tienne, les boulangers contournent cette interdiction en remplaçant le gâteau par une galette à base de pâte feuilletée !

Mais d’autres recettes ont perduré dans certaines régions, en fonction des traditions. Ainsi, dans le sud de la France, on mange toujours le gâteau des rois, sorte de brioche en forme de couronne agrémentée de fruits confits. En Franche-Comté, la galette bisontine est un gâteau à base de pâte à choux, aromatisée à la fleur d’oranger. Autre exemple, dans les Flandres, cette pâtisserie est composée de pâte briochée fourrée d’une crème au beurre aromatisée au rhum ou au kirsch. On trouve un gâteau similaire, appelé Nourolle, en Normandie…

Une Tentative d'Interdiction à la Révolution

Au moment de la Révolution française, certains parlementaires ne voient pas la galette des rois d’un bon œil. On la remplaça alors par une galette de la Liberté, aussi appelée galette de l’Égalité, sans fève ni roi.

En 1792, un député de la Convention, Pierre-Louis Manuel, propose à l’Assemblée l’interdiction de la fête des Rois, sans succès. L’année suivante, L’Épiphanie change de nom : « C’est aujourd’hui la fête de la liberté ; ce jour, autrefois, était consacré à la superstition et au royalisme ; les prêtres seuls fêtaient le jour des Rois ; aujourd’hui, tous les vrais patriotes vont fêter un jour qui est devenu la fête des sans-culottes », explique à la tribune un député jacobin. Le gâteau est ainsi rebaptisé galette de l’Égalité et ne contient pas de fève.

Le 6 janvier 1794, le comité révolutionnaire de Paris dénonce les pâtissiers qui vendent encore des galettes le jour de L’Épiphanie. « ne peuvent avoir de bonnes intentions. Même plusieurs particuliers en ont commandé sans doute dans l’intention de conserver l’usage superstitieux de la fête des rois… ». Les forces de police sont sommées de saisir toutes les galettes dans la capitale.

Pourtant, la tradition séculaire est tenace, et la Révolution a d’autres choses plus importantes à gérer que d’interdire une pâtisserie ! C’est ce qui sauva la galette à la fin du XVIIIe siècle. Depuis le Moyen-Âge, la tradition de la galette a imprégné la culture française et inspiré de nombreux artistes.

La Fève en Porcelaine : Une Invention pour Éviter la Triche

À partir du Moyen-Âge, la dégustation s’est accompagnée peu à peu d’une autre tradition, celle du « Roi boit ». La coutume de l’élection du roi est aussi attestée à partir du XIVe siècle, le Roi devait alors payer une tournée à la table, on parlait alors du « roi boit ».

Mais certains rois avares qui voulaient éviter de payer la tournée générale, avalaient la fève. Elle consistait pour celui qui avait trouvé la fève à offrir à boire à tous les convives autour de la table ! Certains resquilleurs, pour éviter de payer leur tournée, avalaient la fève afin d’éviter l’addition…

Petit à petit, le haricot est remplacé par une pièce - beaucoup moins digeste ! - afin d’éviter la triche. C’est ainsi que serait née la fève en porcelaine, moins évidente à avaler.

Quant aux fèves en porcelaine, les premières apparaissent à partir de 1874. En 1875 arrivent les fèves en porcelaine de Saxe puis, en 1913, celles qui sortent des ateliers de Limoge.

L’Allemagne est à cette époque un grand producteur de porcelaine et c’est tout logiquement qu’au XIXe siècle la plupart des fèves trouvent leur origine en Saxe et en Thuringe, avant d’être produites en porcelaine de Limoges au début du siècle suivant.

La Fabophilie : L'Art de Collectionner les Fèves

Si les premières fèves sont d’inspiration religieuse, avec des représentations de personnages de la crèche ou des angelots, progressivement, l’étiquette religieuse de la fève disparaît pour laisser place à une fête plus traditionnelle. Par la suite, on vit apparaitre des animaux et des symboles de chance (fer à cheval, trèfle…)

Quant aux fèves publicitaires, elles arrivent au début du XXe siècle, on les attribue à un certain Monsieur Lion qui a créé une fève en forme de lune où était inscrit le nom de son commerce.

Et les thématiques évoluent ; les fèves peuvent évoquer la chance (trèfle, fer à cheval), mais aussi des animaux ou des objets du quotidien, voire des symboles républicains (bonnet phrygien). Aujourd’hui, les sujets sont très variés, entre l’actualité, les personnages de BD, dessins animés et films à la mode, ou encore la publicité…

Chaque année, près de 5 000 fèves différentes sont créées en France pour la fête des rois, déclinées en une multitude de séries variées, qui font le bonheur des fabophiles, les collectionneurs de fèves, ayant même leur association nationale ! Au cours du XIXe siècle, la véritable fève (graine de haricot) a peu à peu été remplacée par des personnages en porcelaine.

Traditions Étrangères

En Espagne, on profite du « Jour des trois Rois » pour échanger les cadeaux de Noël puisque, originellement, ce sont les rois mages qui apportèrent des présents, 12 nuits après la naissance de l’enfant Jésus.

En Italie, l’Épiphanie est aussi l’occasion de recevoir ou non des cadeaux et quelques gourmandises : une sorcière issue du folklore italien, la « Befana », profite du 6 janvier pour apporter des sucreries aux enfants sages, et… du charbon aux autres !

En Allemagne, la tradition de l’Épiphanie est musicale ! Il est coutume de voir, dans les régions à dominante catholique comme la Bavière, des « Sternsinger », ou « chanteurs à l’étoile » : ces jeunes choristes déguisés en Rois mages passent de maison en maison, munis d’un bâton de pèlerin surmonté d’une étoile.

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