Alors que de plus en plus de Français prennent conscience de l'impact environnemental de leur alimentation, nombreux sont ceux qui décident de réduire leur consommation de viande. En France, entre 25 et 30% de notre empreinte carbone est liée à notre alimentation, avec une forte contribution du secteur de l'élevage.
L'Impact de la Production de Viande sur l'Environnement
La production de viande n’est pas sans impact sur l’environnement, son bilan carbone est même lourd. Dans un rapport publié en 2023, l’organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a estimé que ce secteur émettait environ 6,2 milliards de tonnes d’émissions d’équivalent CO2 (Gt éq-CO2) par an, soit 12 % du total des émissions liées aux activités humaines, et près de 40 % de l’ensemble des émissions liées aux activités agroalimentaires.
Dans le détail, c’est la production bovine (viande et lait) qui génère le plus d’émissions : avec 3,8 Gt éq-CO2 par an, elle représente 62 % du total des émissions dues à la production animale. Selon le rapport, 60 % des émissions totales du secteur proviennent d’émissions directes, notamment de méthane. Ce gaz, au pouvoir réchauffant près de 30 fois supérieur à celui du CO2, est principalement émis par les ruminants - boeufs, mais aussi agneaux, moutons et chèvres - en raison de leur système digestif particulier.
Pour le porc et la volaille, c’est surtout leur alimentation qui a un impact, en raison de l’épandage d’engrais azotés et de pesticides sur les cultures. "On a besoin de produire beaucoup de céréales, protéagineux, oléagineux, parce qu’on a beaucoup d’animaux à nourrir. Et la production animale provoque également d’autres dégâts sur l’environnement, comme la pollution de l’eau et des sols - liée aux déjections animales, aux engrais azotés et aux pesticides - ou la surconsommation d’eau. Mais aussi la déforestation."
33 % de la surface terrestre du monde sont consacrées à la culture ou à l’élevage (IPBES, 2019) et 80% de la déforestation est due à l'agriculture (FAO, 2015), principalement en raison du développement de la culture de soja destiné à nourrir le bétail. Selon notre Rapport Planète Vivante de 2018, 75% des espèces de plantes, amphibiens, reptiles, oiseaux et mammifères ayant disparu depuis l’an 1500 après J.-C.
Le Poulet : Une Alternative Plus Durable ?
Souvent recommandé dans nos assiettes en raison de sa « faible » empreinte carbone, le poulet est-il pour autant la « meilleure » viande face au réchauffement climatique ? Les uns le savourent en famille le dimanche midi, les autres le dégustent en brochettes sur un barbecue. Quand il s’agit de viande, le poulet est un peu la star de nos assiettes. En 2022, les Français en ont même mangé en moyenne plus d’un par mois et par personne, un record en Europe.
À titre d’exemple, un kilo de poulet génère moins d’un kilo de CO2 équivalent contre presque 2 kg de CO2 équivalent pour le porc et 30 kg pour le bœuf, détaille un rapport d’évaluation mondiale des émissions de gaz à effet de serre, publié par l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture en 2023. « Il n’y a pas photo, à ce niveau-là, le poulet est effectivement la viande la plus performante », reconnaît Pierre-Marie Aubert.
Conditions d’élevage, conséquences sur l’écosystème, pollutions locales… Si l’impact environnemental de la volaille est multiple, il est en réalité surtout lié à une caractéristique : son alimentation composée en grande partie de soja. En 2019, « 87 % du soja utilisé en Europe [servait] à l’alimentation animale, dont près de 50 % pour la volaille, 24 % pour les porcs, 16 % pour les vaches laitières, et 7 % pour les bovins », pointait un rapport de Greenpeace intitulé Mordue de viande.
Les Alternatives Végétales à la Viande
Plusieurs études ont montré que les viandes végétales présentaient un impact environnemental moindre par rapport à la viande classique. Plus que la viande végétale elle-même, c’est la culture de légumineuses qui entrent dans sa composition, qui présente un intérêt. « C’est une plante qui a pas mal d’intérêt. Globalement elle a besoin de moins d’eau et de moins de pesticide, parce qu’elle est plutôt résiliente sur les maladies et les ravageurs. Surtout, c’est une plante qui arrive à capter l’azote de l’air et à le fixer dans le sol, contrairement aux autres plantes qui nécessitent un apport extérieur d’azote […], donc ça permet de générer moins de gaz à effets de serre ».
Selon une étude réalisée par HappyVore, un steak végétal émet 31 fois moins de CO2 qu’un steak de boeuf. Pour 100 grammes de porc produits, 7,6 kilos de CO2 sont émis dans l’atmosphère. Pour la même quantité de pois, ce chiffre descend à 0,44 gramme. Ces "simili-carnés," des reproductions végétales de tranches de jambon, lardons, escalopes de poulet et autres, sont de plus en plus présents dans les supermarchés.
Recommandations pour une Consommation Plus Durable
Pour réduire l’impact de l’élevage sur l’environnement et freiner le réchauffement climatique, il apparaît nécessaire de diminuer sa consommation de viande. Sans prôner le végétarisme ou le véganisme, le directeur de recherche en politiques alimentaires au sein de l’Iddri recommande avant tout de réduire sa consommation de viande par jour à 90 grammes maximum.
Le Programme national nutrition santé 2019-2023 recommande au consommateur des régimes limitant la viande rouge (- de 500 g/semaine) , les produits laitiers (2/jour) et la charcuterie (- de 150g /semaine) et augmentant la part de légumineuses et légumes secs (au moins 2 fois par semaine) et de fruits et légumes (5 par jour), naturellement riches en fibres. Ces recommandations intègrent pour la première fois le développement durable et les modes de production en conseillant de privilégier des aliments de saison, provenant de producteurs locaux et si possible « bio ».
En effet, la quantité de viande consommée par habitant en France représente deux fois la valeur de la moyenne mondiale. Nicole Darmon, directrice de recherche honoraire à l’INRAE, membre de la SFN et experte en nutrition santé, explique : « Les travaux menés par la Société Française de Nutrition (SFN) et le Réseaux Action Climat (RAC) montrent qu'il est possible de maintenir un apport optimal en nutriments en diminuant de moitié la consommation de viande et en complétant les apports protéiques par des sources végétales (céréales, légumineuses, oléagineux) qui sont également vectrices de nutriments favorables à une bonne santé (fibres, vitamines (dont B9 et béta-carotène), minéraux (fer, magnésium, zinc et potassium) et polyphénols) ».
L'étude incite donc le PNNS à mieux prendre en compte les enjeux environnementaux, comme le font déjà les programmes de recommandations alimentaires en Espagne, au Danemark ou aux Pays-Bas. « La plupart des autres pays européens, notamment ceux qui ont intégré les enjeux environnementaux dans leurs recommandations de consommation alimentaire, recommandent eux aussi de limiter la consommation de viande, mais indiquent des quantités maximales plus faibles », relate en ce Nicole Darmon.
Ainsi, selon les pays, les quantités maximales recommandées sont « de l’ordre de 300 à 630 grammes par semaine, et cette limitation inclut non seulement la charcuterie et les autres viandes transformées mais aussi souvent la volaille. » À titre d’exemple, les Pays-Bas recommandent un maximum de 500g par semaine toutes viandes confondues, l’Espagne 375g et le Danemark 350g. L’étude recommande quant à elle de ne pas dépasser les 450 g par semaine, toutes viandes confondues.
Tableau Comparatif des Émissions de Gaz à Effet de Serre
Voici un tableau comparatif des émissions de gaz à effet de serre par type de viande :
Type de Viande | Émissions de CO2 équivalent par kg |
---|---|
Boeuf | 30 kg |
Porc | 2 kg |
Poulet | Moins de 1 kg |
Steak Végétal (HappyVore) | 31 fois moins qu'un steak de boeuf |
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