Les crêpes, un plat délicieux apprécié dans le monde entier, ont une histoire riche et diversifiée. Bien qu'aujourd'hui traditionnellement rattachée à la Bretagne, la crêpe possède en réalité des origines aussi vastes qu'est grande sa popularité.
Origines Anciennes des Crêpes
La crêpe n’est pas une invention très récente. L’origine de la crêpe remonte à 7000 ans avant Jésus Christ ! À cette époque, on ne disait pas encore crêpe. Elle ressemblait plutôt à une grosse galette épaisse. Cette galette était faite avec une sorte de mixture pâteuse, obtenue par écrasement de diverses céréales et ajoutée à de l’eau. À l’époque, une pierre plate bien chaude servait de « casserole ».
Pour trouver les premières traces de la spécialité, il faut remonter loin dans le passé. Car si l'on considère la crêpe comme une galette réalisée à partir de céréales, son histoire est liée à celle de l'arrivée du pain, vers 14.000 avant JC, date à laquelle des premières traces du plat ont été retrouvées en Jordanie actuelle. Plus tard, durant l'Antiquité, les Romains continuent de confectionner des galettes, notamment les légionnaires, payés en grain.
L'Évolution de la Crêpe à Travers les Siècles
Au fil des siècles et des évolutions techniques et culturelles, les crêpes ont connu diverses transformations qui ont contribué à leur popularité actuelle.
- Dès que la meule à grains est apparue, vers 500 av. J.-C., les hommes ont pu produire de la farine à partir de différentes céréales. Cela a permis de créer des pâtes liquides ou semi-liquides qui pouvaient être facilement étalées sur une surface plate pour obtenir des galettes fines et régulières.
- L’utilisation du beurre pour la cuisson des crêpes remonte à l’époque médiévale, où il était réservé aux classes supérieures car coûteux à produire.
- L’expression “faire sauter les crêpes” est apparue au XVIIe siècle, lorsque l’on réalisait des galettes épaisses que l’on faisait sauter pour les retourner et permettre une cuisson homogène des deux côtés.
- Au fil du temps, les garnitures utilisées pour agrémenter les crêpes se sont diversifiées, passant des simples ingrédients locaux (miel, confiture, jambon, fromage) aux associations plus élaborées et exotiques (fruits tropicaux, épices, mets raffinés, etc.).
Les premières traces de la crêpe moderne font leur apparition dans un ouvrage publié au XIIIème siècle, comme le rapporte dans une vidéo de vulgarisation historique publiée sur YouTube Thibault Gagnage, de la chaîne Histoire Appliquée. À cette époque, le chevalier anglo-normand Walter de Bibbesworth écrit Le Tretiz, un recueil de poèmes destiné aux enfants de la noblesse pour leur apprendre le Français. Dans ce texte, son auteur évoque, lorsqu'il mentionne différents plats, des "crispes". Dérivé du latin crispus, qui renvoie à un élément ondulé, ce terme est la première mention des crêpes modernes.
Plus tard, vers la fin du XIVe siècle, le Ménagier de Paris est publié. Cet ouvrage, écrit par un bourgeois de l'époque à destination de son épouse, comporte des principes et préceptes, mais également des recettes. Parmi ces dernières, on retrouve une recette de crêpes, "à la mode de Tournay". Les ingrédients? De la farine des œufs, du beurre, de l'huile, et du vin blanc.
La Crêpe en Bretagne : Une Histoire d'Amour
La crêpe, ou galette, apparût en Bretagne vers le 13ème siècle suite à la culture du sarrasin rapporté de croisades en Asie. D’abord au sarrasin, elle a au début de notre siècle été transformée pour donner la crêpe que l’on connait de nos jours, grâce à l’arrivée de la farine blanche de froment.
Alors que la crêpe devient au fil des siècles un plat très apprécié par l'ensemble de la population, de par sa simplicité et son faible coût, des régions en font progressivement leur spécialité. Notamment en Bretagne, où la crêpe, ou galette selon le territoire, peut se préparer à base de sarrasin. Elément constitutif de la gastronomie bretonne, le blé noir a historiquement toujours été très apprécié, car il restait abordable même en période de famine, comme le rapporte l'historien Erwan Le Gall dans un article paru en ligne.
Le sarrasin a supplanté principalement l'avoine dans l'agriculture bretonne en raison de son adaptation à leurs systèmes de culture. Dans les terres bretonnes, souvent pauvres, les agriculteurs pratiquaient des périodes de jachère longues pour laisser le sol se reposer. Après cette période, une céréale était plantée pour préparer le sol à la culture principale du blé ou du froment. Contrairement à l'avoine qui était plantée au printemps, le sarrasin pouvait être semé à l'automne précédent, utilisant ainsi efficacement la période initialement réservée au défrichement. Cela signifie que le sarrasin s'intégrait dans le cycle agricole sans nécessiter une période supplémentaire dédiée, agissant comme un bonus dans le système de culture.
En Bretagne, un des berceaux français de la spécialité, on utilise le blé noir ou sarrasin pour la galette salée (Haute-Bretagne) et le blé tendre pour la crêpe sucrée (Basse-Bretagne). Toutes deux ont fait leur entrée dans le répertoire culinaire local à partir du Moyen Age, même si elles accompagnaient depuis plus longtemps encore le rituel religieux de la Chandeleur, inauguré en 472 par le pape Gélase Ier.
La Distinction entre Crêpe et Galette en Bretagne
Dans le pays breton, en gros du Trégor jusqu’à Lorient et englobant tout le Finistère, on ne parle que de crêpes et pas de galettes. C’est soit une crêpe de froment faite avec du lait ou une crêpe de blé noir avec de l’eau. Elle est cuite sur une billig. Certains mettent un peu de blé noir dans le froment.
Dans le Pays gallo (Ille-et-Vilaine, est des Côtes-d’Armor et du Morbihan), la tradition est autre. La crêpe est, ici, un produit épais et de courte conservation. Quant à la galette, cuite sur une billig, elle est faite de blé noir, d’eau et de sel.
En Haute-Bretagne, les galettes sont traditionnellement un peu plus épaisses, ce qui influe sur les outils utilisés pour leur préparation. Pour retourner ces galettes épaisses, on utilise un spanell ("spatule" en breton) mais généralement plus large et plus solide pour s'adapter à l'épaisseur des galettes. À l'inverse, en Basse-Bretagne, où les crêpes sont très fines et parfois de grande taille, les spanells employés sont plus grands pour manipuler ces crêpes larges et délicates.
La Chandeleur et les Crêpes
Tous les ans, le 2 février, les Français mangent des crêpes. La raison de cette tradition est la Chandeleur. La fête de la Chandeleur vient du latin populaire candelarum, issu de festa candelarum, expression qui signifie la « fête des chandelles« .
La Chandeleur tombe chaque année le 2 février, soit exactement 40 jours après Noël. C'est un jour très apprécié des familles puisqu'il est de coutume de préparer des crêpes pour les déguster ensuite. Mais, avant d'être une tradition populaire, la Chandeleur est une fête religieuse qui tire ses origines de plusieurs civilisations.
Les Romains mangaient des crêpes pendant les Lupercales, fêtes de la fécondité qui avaient lieu au début de fevrier et qui saluaient, à la fois, le retour du printemps et la promesse de la moisson future.
Selon d’autres théories, le dieu Pan était célébré à la Chandeleur par les Grecs qui allaient dans les rues et défilaient avec des flambeaux. Finalement, pour un petit nombre de personnes, la Chandeleur prend ces origines dans la culture celte. Afin de remercier le soleil de faire pousser le blé, les Celtes auraient réalisé des crêpes pour sa ressemblance de forme et de couleur avec l’astre solaire. En effet, les Celtes préparaient des crêpes pour célébrer le soleil. Pour eux, le soleil était celui qui offrait le blé, et donc qui apportait la nourriture. Les crêpes seraient donc réalisées pour représenter le soleil et le remercier d’apporter le blé.
Crêpes et Superstitions
Il est dit que faire sauter une crêpe de la main gauche en tenant une pièce dans la main droite apportera grande fertilité. Les femmes qui parviennent à réaliser ce saut vivront rapidement la maternité. Leur grossesse sera paisible, et leur bébé naîtra en bonne santé.
Si l’on met de côté les superstitions, il convient de penser qu’à l’époque, faire des crêpes était surtout un bon moyen de consommer le blé de l’année bientôt écoulée qui commençait à être trop vieux pour le pain.
Variantes Mondiales des Crêpes
Si les crêpes sont un emblème de la cuisine française, et plus particulièrement bretonne, elles ont aussi inspiré de nombreuses variantes à travers le monde.
Dans le monde, on retrouve divers types de galettes, telles que les tortillas en Inde, la crêpe "mille trous" en Afrique du Nord, ou l'injera en Éthiopie.
Les crêpes telles qu’on les connaît en France possèdent bon nombre d’équivalents à l’étranger. Le pancake américain est une déclinaison plus épaisse de la crêpe.
L'Importance Économique de la Crêpe en Bretagne
Le poids économique du secteur de la crêpe n’est pas négligeable. Entre 3.500 et 4.000 personnes vivent de la crêpe dégustation en Bretagne. Il faut rajouter les marchands ambulants, plus difficiles à recenser, et les fabricants de crêpes à emporter.
Tableau Récapitulatif des Éléments Clés de l'Histoire de la Crêpe
Période/Région | Caractéristiques |
---|---|
7000 av. J.-C. | Origine des galettes épaisses à base de céréales |
Antiquité Romaine | Galettes confectionnées par les légionnaires |
XIIIe siècle | Premières mentions de "crispes" en France |
XIVe siècle | Recettes de crêpes dans le Ménagier de Paris |
XIIIe siècle | Introduction de la crêpe en Bretagne avec le sarrasin |
Aujourd'hui | Diversité des crêpes et galettes dans le monde |
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