Les colorants alimentaires sont utilisés depuis des siècles pour améliorer l'apparence des aliments et des boissons. Ils sont couramment ajoutés aux produits transformés pour leur donner des couleurs attrayantes et uniformes. Cependant, leur sécurité a souvent été remise en question.
La Tartrazine et la Transparence Temporaire de la Peau
Une étude révèle que la tartrazine, un colorant alimentaire courant utilisé par exemple dans les Doritos, rend la peau et les tissus conjonctifs temporairement transparents sous la lumière rouge. Le colorant laisserait notamment pénétrer la lumière en modifiant l’indice de réfraction des tissus, et ce, de façon réversible et sans provoquer de dommage.
En effet, chaque matériau transparent possède un indice de réfraction, qui se traduit par le rapport entre la vitesse de la lumière dans le vide et sa vitesse lorsqu’elle traverse le matériau. Lorsqu’elle traverse des matériaux ayant des indices de réfraction différents, elle se courbe. Les techniques utilisées actuellement pour rendre les tissus transparents consistent généralement à éliminer les lipides et ne laisser que des gels aqueux laissant passer la lumière sans qu’elle se disperse.
Des chercheurs de l’Université de Stanford ont découvert que la tartrazine modifiait l’indice de réfraction de l’eau dans les tissus au taux idéal. La tartrazine absorbe la lumière bleue et ralentit la vitesse de la lumière dans le milieu en réduisant l’écart d’indice de réfraction entre l’eau et les lipides des tissus.
Pour explorer son hypothèse, l’équipe a rasé puis imbibé la peau de l’abdomen, des membres postérieurs et le cuir chevelu d’une souris sous sédation. Après quelques minutes, la peau a viré au rouge, indiquant qu’une grande partie de la lumière bleue a été absorbée et qu’elle était devenue transparente à la lumière rouge. Par ailleurs, le colorant n’a pas altéré les tissus et le processus est entièrement réversible.
La technique de coloration proposée par Hong et son équipe comporte des limites. Par exemple, étant donné que la fenêtre d’absorption du colorant se situe entre le rouge et l‘orange, la plupart des marqueurs fluorescents ne sont pas visibles. D’autre part, le colorant ne permet pas de s’aligner avec l’indice de réfraction de l’hémoglobine, qui est à la fois différent de celui de l’eau et des lipides. Néanmoins, la technique ouvre la voie à de nombreuses opportunités médicales et de recherche.
Risques et Réglementations des Colorants Alimentaires
Des études ont montré que certains colorants artificiels peuvent poser des risques pour la santé. Les colorants naturels sont généralement considérés comme plus sûrs que les colorants artificiels. Une étude célèbre de 2007, connue sous le nom d'étude Southampton, a suggéré un lien entre la consommation de certains colorants artificiels et une augmentation des comportements hyperactifs chez les enfants.
Aux États-Unis, la FDA régule les colorants alimentaires en exigeant des tests de sécurité rigoureux avant leur approbation. En Europe, l'EFSA est responsable de l'évaluation de la sécurité des colorants alimentaires. L'EFSA publie des avis scientifiques et établit des limites maximales de résidus pour chaque colorant.
Exposition Professionnelle aux Colorants et Pigments
L’exposition permanente des travailleurs à des colorants et pigments induit des effets pathologiques variés et certaines molécules, les amines aromatiques et sels métalliques notamment, peuvent avoir une grave toxicité. Par inhalation sous forme de poussières ou par contact cutané, les colorants et pigments peuvent être responsables de pathologies respiratoires, de cancer des voies urinaires et du poumon, d’effets nocifs sur les globules rouges, d’effets cutanés allergiques...
Les colorants sont en général des substances organiques alors que les pigments sont souvent des composés minéraux (sels métalliques) : les colorants sont utilisés en solution, leurs molécules sont dispersées dans le milieu qu'elles colorent et les teintures sont absorbées par le support, alors que les pigments sont des solides pulvérulents utilisés en suspension, mélangés avec des liants avant leur application sur les surfaces. Les colorants issus de la chimie organique sont de loin les plus nombreux, et sont responsables, pour certains d’entre eux, d'eczéma, urticaire, et d’asthme et peuvent libérer des substances cancérigènes.
Des oxydes de métaux sont utilisés pour colorer le verre, les peintures, les encres, la céramique, les plastiques : cadmium, chrome, cuivre, nickel, cobalt, manganèse, étain, titane, tungstène, zinc, plomb, fer ...
Pour la coloration du papier, on utilise des pigments soit inorganiques soit organiques (par exemple azoïques et phtalocyanines) et du noir de carbone. Les dermatoses (maladies de peau) professionnelles sont fréquentes dans la coiffure et elles sont reconnues en maladies professionnelles. Le paraphénylènediamine (PPD) et ses dérivés restent les colorants capillaires les plus sensibilisants (eczémas de contact allergique).
Mesures de Prévention en Milieu Professionnel
Cette large utilisation des colorants et pigments dans l’industrie et l’artisanat nécessite, par des mesures de prévention appropriées, de réduire toutes ces expositions pour diminuer fortement les risques professionnels associés :
- Substitution des produits les plus nocifs
- Mise en place d’une organisation du travail adaptée (installations automatiques, machines fermées étanches)
- Aménagement des postes et des lieux de travail (systèmes d’aspiration de poussières et de fumées, ventilation)
- Équipements individuels de protection adéquats
- Respect des règles d’hygiène au travail
- Information et formation à la sécurité des opérateurs
- Surveillance médicale renforcée
La ventilation et l’aération des lieux de travail jouent un rôle essentiel pour limiter la concentration de l'ensemble des poussières dans l'air ambiant et les évacuer des lieux de travail, de façon à respecter les valeurs limites fixées par les réglementations et éviter ainsi les conséquences sur la santé des travailleurs.
Pour empêcher les projections, les déversements ou la contamination de l’atmosphère du lieu de travail par les poussières de colorants et pigments, il faut avant tout disposer d’ateliers convenablement conçus. Le process des grandes imprimeries, verreries, papeteries, tanneries ... industrielles est mécanisé et automatisé, ce qui réduit considérablement les risques.
L'Érythrosine (E127) : Un Colorant Rouge Controversé
Interdire l’érythrosine, c’est ce que demande la principale association de consommateurs aux États-Unis. En France, ce colorant rouge est peu utilisé dans les aliments mais présent dans de nombreux médicaments. L’argumentaire est simple et imparable : la FDA elle-même a interdit l’érythrosine dans les cosmétiques et les médicaments appliqués sur la peau, il y a 30 ans, en raison de risques d’allergie et de perturbations de la thyroïde (inductions de cancer chez les rats).
En France, l’usage alimentaire est très restreint : il n’est autorisé que pour les cerises. En revanche, on trouve de l’érythrosine dans de très nombreux médicaments, par exemple pour colorer les gélules en rouge.
Le Dioxyde de Titane (TiO2) : Un Autre Additif à Surveiller
Vous y découvrirez peut-être aussi du dioxyde de titane, autre additif alimentaire et autre colorant (blanc pour sa part), aussi soupçonné d’être cancérogène, qui a été banni des aliments mais n’est toujours pas interdit dans les médicaments. Le TiO2 entre dans la composition d’une grande variété de produits finis tels que des peintures, des cosmétiques (crèmes solaires, dentifrices…), mais aussi des médicaments, des produits alimentaires ou des produits de construction (bâtiment et travaux publics).
Sous forme micrométrique, les poussières de dioxyde de titane sont source d’irritations oculaires et d’irritations mécaniques des voies respiratoires. Depuis août 2016, la forme nano des particules de dioxyde de titane est inscrite à l’annexe VI du Règlement européen relatif aux cosmétiques. Elles sont autorisées sous formes micrométrique et nanométrique.
Dans le secteur du BTP, la présence de TiO2 sous forme pigmentaire se retrouve principalement dans les formulations de peintures et d’enduits de signalisations de la route. La forme nanométrique a été introduite pour exploiter ses propriétés photocatalytiques transférables au produit dans lequel il est incorporé.
Suite à une analyse approfondie de l’ensemble des données de toxicité disponibles, l’Agence en avril 2019 recommande une VTR chronique par inhalation pour la forme P25 du TiO2-NP de 0,12 µg.m-3. Chez les personnes exposées par voie respiratoire, le dioxyde de titane sous forme nanoparticulaire (TiO2-NP ) peut engendrer une inflammation pulmonaire susceptible d’entraîner dans certains cas la cancérogénèse.
Tableau Récapitulatif des Colorants Alimentaires Mentionnés
Colorant Alimentaire | Utilisation | Risques Potentiels | Réglementation |
---|---|---|---|
Tartrazine | Aliments transformés (ex: Doritos) | Transparence temporaire de la peau sous lumière rouge | Approuvé par la FDA (USA) |
Érythrosine (E127) | Cerises confites, médicaments (colorant pour gélules) | Allergies, perturbations de la thyroïde (études sur les rats) | Interdit dans les cosmétiques et médicaments appliqués sur la peau (USA) |
Dioxyde de titane (TiO2, E171) | Aliments, cosmétiques, médicaments, peintures, produits de construction | Irritations oculaires et respiratoires (sous forme micrométrique), inflammation pulmonaire (sous forme nanoparticulaire) | Forme nano inscrite à l'annexe VI du Règlement européen relatif aux cosmétiques |
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