L'histoire et la recette de la brioche de mariage

Remonter aux origines de ce gâteau traditionnel écossais n’est pas chose aisée car on ne possède qu’un fragment de légende du XVIe siècle et quelques faits réels du… début du XIXe siècle. Il faut donc relier les deux époques.

La légende de Mary Stuart

La légende a trait à Mary Stuart, reine d’Écosse. On raconte que « n’appréciant pas les cerises confites dans la pâtisserie de son cuisinier, celui-ci les remplaça par des amandes » - des amandes broyées pour l’intérieur et des amandes blanchies pour dessiner une double couronne sur le dessus, en hommage à sa double reine - l’amande, typiquement méditerranéenne, étant depuis la nuit des temps symbole de bonheur et de fertilité.

14 août 1561, Marie, reine de France, jeune veuve du roi François II, quitte définitivement son Royaume pour rentrer en Écosse. Née et redevenant Mary Stuart, elle vient prendre possession du trône d’Écosse qui lui revient de droit car elle avait été déclarée reine, le 14 décembre 1542, six jours après la mort de son père Jacques V. Elle n’était qu’un nourrisson. La gestion du royaume ayant été confiée à des régents, tels sa mère, Marie de Guise, puis un de ses cousins après le décès de celle-ci, on l’envoya grandir en France, à l’âge de six ans à la cour des Valois. Marie de Guise ayant choisi de privilégier l'alliance du royaume d'Écosse avec la France catholique, la fameuse Auld Alliance. Aussi, en 1548, Mary Stuart, promise en mariage au dauphin François, est-elle élevée à la française, avec les enfants du roi Henri II et de son épouse Catherine de Médicis.

L'influence de Catherine de Médicis

En effet, Catherine la florentine qui aimait la bonne chère et les mets délicats, venue d'Italie en 1533 pour épouser le dauphin Henri, se fit accompagner « d’une ribambelle de cuisiniers, confiseurs et pâtissiers qui enseignent aux rustres français l'art du raffinement de la table » et qui donneront rapidement naissance à la gastronomie française. Ainsi introduisit-elle à la cour de France des légumes inconnus jusque là mais aussi une large palette de produits sucrés comme les macarons, les sorbets tutti frutti, la frangipane, les gelées de fruits, les marrons glacés et la fameuse brioche de Noël de tradition médiévale : le panettone. Confectionné avec de la farine de blé, de la levure, des œufs, du beurre, des raisins secs et divers fruits confits, il contient tous les éléments de base qui constitueront le nourrissant… Dundee Cake.

L'histoire du Dundee Cake

Ville au nord est de l’Écosse, Dundee est à 100 km d’Edimbourg, sur l’estuaire de la Tay. Janet Keiller, à la tête d’une petite manufacture de marmelade d’oranges amères - créée en 1797, qui deviendra Keillers, marque emblématique des spécialités écossaises - y met au point et commercialise avec son fils James ce qu’ils baptiseront le Dundee cake. Ils n’inventèrent pas la recette ; elle était devenue classique auprès des familles aristocratiques - tout le monde ne pouvant pas s’offrir de la farine de blé (on ne cultivait que l’orge et l’avoine), des fruits confits, des amandes, du sucre de canne et des raisins, produits d’importation inabordables.

Devenue classique, mais comment ? Il faut donc se pencher sur un phénomène insoupçonné : l’édition à succès dès la fin du XVe siècle, en Grande-Bretagne, de livres de cuisine, confiserie, conserve et distillation et même d’économie ménagère et de diététique. Souvent écrits par des femmes et provenant de recueils familiaux appartenant à l’aristocratie, à la gentry, mais aussi à l’entourage royal, ce que les imprimeurs utilisaient comme argument de vente. Certains de ces recueils furent des best-sellers et réimprimés de nombreuses fois. Il en existait déjà sous Elisabeth Ire et même quelques-uns à la fin du Moyen Âge. Au cours des siècles, les recettes de cuisine ne sont jamais perdues pour tout le monde !

Plus tard, ces ouvrages furent rédigés par des cuisiniers accomplis, se considérant comme des artistes et souvent formés et inspirés par… les Français au XVIIe siècle qui avaient eux-mêmes assimilé les enseignements des Italiens. Ainsi Robert May cuisinier formé en France qui travailla auprès de grandes familles très riches et écrivit Le cuisinier accompli, demeurant la bible de maintes maîtresses de maison.

Recette de la brioche de mariage

Ingrédients nécessaires pour 6 personnes :

  • 225 g de farine tamisée
  • 170 g de beurre salé
  • 140 g de sucre de canne
  • 45 g d’écorces d’orange amère très fines
  • 300 g de raisins de Corinthe
  • 150 g de sultanines (de Smyrne)
  • 4 œufs de plein air
  • deux cuillères à soupe d’amandes broyées
  • une cuillère à café de levure
  • un zeste d’orange douce finement râpé
  • le jus d’un citron pour la conservation
  • une quarantaine d’amandes blanchies pour la décoration
  • une pincée de… magie personnelle

Préparation :

  1. Beurrer un moule à cake rond en métal de 20 cm de diamètre ; y verser la préparation, aplatir le dessus et protéger par du papier sulfurisé.
  2. Enfourner pour 2 heures ; à mi-cuisson disposer les amandes blanchies en deux cercles concentriques sur le dessus la pointe vers le haut et ré-enfourner.
  3. Avant la fin des 2 h insérer la pointe d’un couteau, si elle est humide, laisser encore quelques minutes.
  4. 5 minutes avant la fin de la cuisson badigeonner le dessus avec du lait très sucré afin de créer un glaçage.

Indiscrétion royale : il semblerait que la reine Elisabeth (la nôtre) apprécie particulièrement le Dundee cake à l’heure du thé.

Raisins secs : un ingrédient clé

Connus et appréciés depuis la plus haute Antiquité, ils furent « découverts » par les habitants des contrées septentrionales à l’époque des croisades, dès la fin du XIe siècle. La conquête de Constantinople et de la Terre Sainte permirent une expansion massive du commerce de la région, puis aux siècles suivants, aux Anglais de développer des alliances avec les Grecs, de s’installer dans les îles ioniennes pour organiser eux-mêmes le commerce du raisin sec vers l’Angleterre et les pays du Nord, de s’associer aux très dynamiques Vénitiens et de se montrer indispensables à l’économie méditerranéenne.

L’engouement des Anglais, des Écossais et des Irlandais pour les raisins secs ne s’est jamais démenti puisqu’ils en sont encore de nos jours les premiers consommateurs européens**, dans les trois catégories : celle qu’ils nomment « raisins », issus du muscat, séchés naturellement sur la vigne ; celle qu’ils nomment « sultanas » raisins dorés sans pépins, séchés à la chaleur artificielle qui laisse le fruit moelleux et légèrement acidulé et enfin celle appelée « currants » (altération de Corinthe) : noirs, très petits, sans pépins et au goût intense mais doux. Les habitants de ces pays prirent l’habitude d’en agrémenter leurs pâtisseries - ce qui permet d’économiser le sucre - comme les scones, les buns, les cakes régionaux et bien sûr les puddings.

Ce fruit modeste qui fut donc une belle découverte est un concentré rare d’énergie et de nutriments indispensables à la santé. Un trésor à lui seul qui renferme 70% de fructose ; des oligoéléments : fer, cuivre, manganèse et potassium ; des vitamines du groupe B ; des isoflavones, éléments nécessaires au système sanguin ; des antioxydants, pour la vue et le cerveau ; des acides aminés pour la libido ; de l’acide oléanolique pour les dents ; de la catéchine pour l’appareil cardio-vasculaire et, bien sûr, des fibres douces pour les intestins.

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