Dans la pratique de l’Islam, il y a plusieurs préceptes alimentaires qui dictent ce qui est permis (halal) et ce qui est interdit (haram). Parmi les interdictions les plus connues et discutées figure celle concernant la consommation de porc.
Fondements scripturaires de l'interdiction du porc
Le Coran, livre sacré des musulmans, établit clairement les règles alimentaires dans plusieurs versets. Parmi les plus pertinents à l’interdiction de la consommation du porc, nous trouvons :
Sourate Al-Baqarah (2:173) :« Il vous est seulement interdit la chair d’une bête morte, le sang, la chair de porc, et ce sur quoi on a invoqué un autre nom que celui d’Allah.
Les hadiths, enseignements et traditions du Prophète Muhammad (paix soit sur lui), complètent et expliquent souvent les enseignements coraniques. En conclusion, l’interdiction de la consommation de porc en Islam repose sur des fondements scripturaires solides du Coran et des hadiths du Prophète Muhammad (paix soit sur lui). C’est une pratique qui va au-delà de simples restrictions alimentaires, englobant des dimensions spirituelles, sociales et culturelles importantes pour les musulmans.
Interprétations et justifications de l'interdiction du porc
« Les musulmans ne mangent pas de porc parce que le Coran l’interdit à cinq reprises», explique Önder Günes, porte-parole de la Fédération d’organisations islamiques de Suisse (FOIS). Pour les Musulmans l’interdit de manger du porc est selon Malek Chebel le plus massif et le plus ancien.
Les animaux morts, le sang, la chair du porc, tout ce qui a été tué sous l’invocation d’un autre nom que celui d ‘Allah, les animaux suffoqués, assommés, tués par quelque chute ou d’un coup de corne ; ceux qui ont été entamés par une bête féroce, à moins que vous ne les ayez purifiés par une saignée ; ce qui a été immolé aux autels des idoles ; tout cela vous est défendu. Cependant un autre verset (XVI, 115) introduit une exception à cet interdit : « Il vous a été interdit la bête morte, le sang, la chair du porc et tout ce qui a été immolé à un autre Dieu qu’Allah.
On a longtemps pensé que c'était pour des raisons sanitaires, mais la vraie raison serait plus complexe. On peut connaitre le caractère mauvais d’une chose de plusieurs manières. En effet, la viande de porc contient un parasite qui est la trichinellose ou trichinose. En autre, le porc contient de nombreux virus et parasites. Ce qui nous prouve à nouveau l’illicéité du porc en raison du tord qu’elle cause au corps.
Le cochon est réputé répugnant, ce qui n’est pas exactement la même chose. On dit généralement qu’il sent mauvais (khanz) ; et d’une personne dont l’odeur corporelle paraît trop forte, on dit qu’elle sent mauvais comme un cochon (khanz bhal alouf). Mais ces propos résultent assez rarement d’une expérience personnelle de l’odeur du cochon. En ce sens, le dégoût ne résulte que d’une absence d’apprentissage du goût dont on ne saurait exagérer la portée.
Le porc dans d'autres religions
Pour les Juifs, cette interdiction est fondée sur deux passages de l’Ancien Testament :
- Livre du Lévitique 11:7-8 « Vous ne mangerez pas le porc, qui a la corne fendue et le pied fourchu, mais qui ne rumine pas : vous le regarderez comme impur. Vous ne mangerez pas de leur chair, et vous ne toucherez pas leurs corps morts : vous les regarderez comme impurs.
- Livre du Deutéronome 14:8 : « Vous ne mangerez pas le porc, qui a la corne fendue, mais qui ne rumine pas : vous le regarderez comme impur.
L'interdiction de l'alcool en Islam
Au contraire de l’interdiction du porc, l’interdiction de l’alcool peut être considérée comme éthique, en ce sens qu’elle ne renvoie pas à une classification arbitraire mais à la crainte des substances actives. Anthropologiquement, elle ne peut être interprétée que dans cette perspective ; et relève de la même catégorie d’attitude que les interdictions successives du café dans l’Empire ottoman (Carlier, 1990). Il s’agit, en fait, de quelque chose comme l’interdiction d’une « drogue », ce que nous pratiquons aussi (e.g. Becker, 1985) mais sans utiliser la religion, sinon l’un de ses substituts fonctionnels : la science médicale.
Pratiques et intermittences
La pratique est bien sûr fort loin de suivre la proscription. Dans l’immigration, de nombreux Musulmans mangent du porc, de la charcuterie principalement, et davantage encore boivent de l’alcool. Cet irrespect de la règle ne découle pas, comme on pourrait le croire, de l’acculturation. Boire de l’alcool, est une chose courante au Maghreb.
Les gens qui boivent de l’alcool et mangent du porc, il faut y insister, n’ont pas le moins du monde le sentiment de cesser d’être des musulmans. On imagine, en général, les Musulmans pratiquants comme faisant preuve d’une inaltérable constance. En fait, on peut boire et cesser de boire, manger du cochon et cesser d’en manger, avoir cessé de manger du cochon et s’y remettre, perdre le goût de l’alcool et le retrouver.
Une autre façon de s’en abstraire, consiste bien sûr à manger de la nourriture contenant du porc ou de l’alcool, en feignant d’ignorer qu’il y en a. Cette ruse est assez satisfaisante et apporte un soulagement à la gourmandise.
Considérations sociales et identitaires
Une troisième objection à trait à l’assertion assez répandue selon laquelle la pratique des interdits alimentaires permettrait aux immigrés de marquer leur identité, leur conscience de groupe. Elle méconnaît qu’aucun Musulman, dans l’immigration ou hors de l’immigration, ne considère qu’il cesse d’être musulman, s’il mange du cochon ; ainsi convient-il de ne pas surestimer l’enjeu identitaire de cette prescription.
Ceci dit, cette interprétation peut partiellement être défendue dans un cas spécifique d’acculturation, où respecter les interdits sert à s’affirmer réactivement comme communauté ethnico-religieuse. Mais cette affirmation ne va pas loin, puisque au lieu de reprendre l’attitude des Musulmans élevés dans leur culture d’origine (ceux-ci ne lient pas l’appartenance à l’islam au respect des proscriptions), les personnes qui utilisent les interdits alimentaires sélectionnent les critères distinctifs élaborés par la société dont ils veulent se distinguer.
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