L'origine et la tradition de la galette des Rois

La galette des rois est bien plus qu’un simple dessert : elle incarne une tradition française, ancrée dans les célébrations de l’Épiphanie. Chaque début d’année, elle réunit familles et amis autour d’un moment convivial, où gourmandise et symbolisme s’entrelacent.

Qu'est-ce que l'Épiphanie ?

L’Épiphanie, célébrée le 6 janvier par les catholiques et le 19 janvier par les orthodoxes, est une commémoration religieuse en hommage à l’arrivée des rois mages à Bethléem. Elle serait l’une des plus anciennes fêtes du christianisme.

Le mot Épiphanie vient du grec Επιφανιος, qui veut dire apparition. L'Épiphanie est une fête catholique marquant la nuit où les Rois mages, venus d’Orient guidés par une étoile, auraient apporté des présents jusque dans la crèche de Bethléem où se trouvait l’enfant Jésus.

Dans l’évangile selon Matthieu, dans lequel les rois mages sont cités pour la première fois, il n’y a aucune description précise, pas même de prénoms. Il faudra attendre le manuscrit d’un chroniqueur italien, Jacques de Voragine, au 13e siècle, pour lire leurs noms, inspirés des continents dont ils provenaient. Gaspard, Melchior et Balthazar auraient été guidés par une étoile, selon l’évangile de Matthieu, jusqu’à l’enfant Jésus.

Selon l’évangile de Matthieu, Gaspard, Melchior et Balthazar auraient suivi une étoile pour être guidés jusqu’à l’enfant Jésus et lui apporter des présents riches de sens : l’or pour évoquer la royauté de Jésus ; l’encens pour sa divinité et la myrrhe pour son humanité.

Aujourd’hui, il n’y a pas de certitude sur le fait que les rois mages étaient bien trois, ni même qu’ils aient réellement existé. Comme l’explique le journal La Croix, « bien des biblistes mettent en doute la véracité de cette séquence. [...] Une invention littéraire de l’évangéliste pour rappeler aux juifs devenus chrétiens que l’enfant de Bethléem était le roi non seulement du peuple d’Israël, mais des nations païennes, autrement dit que le salut s’adresse à tous ».

Dans cette histoire de Rois mages, il n’y a ni galette ni fève !

L'origine païenne de la galette

Cette tradition de la galette des Rois, qu’on appelle l’Epiphanie, en référence à la visite rendue par les trois Rois mages à Jésus Christ à sa naissance, en Judée, n’est, à la base, pas religieuse. C’est l’Eglise qui se l’est appropriée au XIVe siècle.

Cependant, l’origine de la galette n’aurait rien de religieux et remonterait sans doute aux Romains qui fêtaient les « Saturnales » après la mi-décembre. Elle serait plutôt un hommage aux Saturnales de l’époque romaine. Ces grandes fêtes en l'honneur de Saturne, le dieu romain du temps, avaient lieu entre fin décembre et début janvier.

Dans l’Antiquité, les Romains célèbrent en décembre la fête des Saturnales. À l’époque, cette journée était très spéciale puisque les esclaves étaient invités à partager un gâteau avec les Romains. À l’occasion de ces fêtes, un repas était partagé entre les maitres et les esclaves.

Tacite, historien du Ier siècle, évoque la tradition du « Roi du jour » : un banquet au cours duquel maîtres et esclaves partagent un même repas. À cette occasion, une fève (haricot) est dissimulée dans un gâteau dont l’aspect rond et doré symbolise déjà le soleil.

S’ils tombaient sur la fève dans le gâteau, ils devenaient « Princes des Saturnales » et avaient le droit d’obtenir tout ce qu’ils souhaitaient pendant une journée. On tirait déjà les Rois lors des Saturnales, des fêtes en l’honneur du roi Saturne. Celui qui tombe sur la fève devient le « Prince des Saturnales » ; il a le droit d’exaucer tous ses désirs pendant une journée, devenant le roi d’un jour.

C’est une période de trêve où la puissance des maîtres sur leurs esclaves était suspendue. On s’offrait alors des présents et on partageait ensemble les arts de la table. Cette fête est l’occasion d’abolir toutes barrières sociales, notamment entre maîtres et esclaves.

Nous devons également la tradition de la plus jeune personne présente choisissant à qui ira la prochaine part, en allant sous la table, aux Saturnales. La coutume romaine qui voulait inviter le plus jeune enfant sous la table pour désigner les parts perdure de nos jours, dans certaines familles.

Avec les années, les fêtes et célébrations du solstice d’hiver se sont confondues. Aujourd’hui, le point commun entre ces différentes commémorations reste le partage.

L'évolution de la tradition au Moyen Âge

Au Moyen-Age, la tradition a évolué avec la fête des Fous. Celui qui trouvait la fève, un haricot blanc, dans le gâteau, devenait le roi du festin. C’est un enfant qui allait se placer sous la table et désignait le destinataire de la part de galette des Rois. Aujourd’hui, le principe est identique : le gagnant devient roi et doit choisir sa reine. Ou inversement.

La fève : un symbole de fécondité

A l’occasion de ces fêtes, on glissait alors une fève (un haricot) dans un gâteau dont l’aspect rond et doré symbolisait le soleil. Dès l’Antiquité, la fève (de haricot blanc ou autre légumineuse) est choisie comme élément caché dans la galette, car c’est l’un des premiers légumes à pousser après l’hiver.

La fève était l’un des symboles du solstice d’hiver car c’est le premier légume qui pousse au printemps. Cette graine est un symbole de fécondité, car elle porte en elle le germe de la future plante. On ne pouvait trouver mieux pour célébrer Saturne, Dieu romain dédié à l’agriculture !

Au Moyen-Âge, la tradition perdure, la fève étant l’un des aliments les plus consommés en Europe.

La tradition de la galette des rois aujourd'hui

Comme chaque début d’année, voici venu le temps des galettes des Rois et des fèves, en forme de personnages célèbres, de héros de dessins animés, de smileys ou de santons. La tradition veut que le plus jeune des convives file sous la table et désigne qui mangera chacune des parts.

Traditionnellement, la galette des rois est partagée en autant de parts qu’il y a d’invités plus une. Cette part en extra est appelée la « part du bon Dieu » ou « la part des absents », pour celui qui est parti à la guerre ou à la pêche et n’est pas rentré à temps. A l’origine, on gardait la part jusqu’à son retour pour dire qu’on a pensé à lui.

Maintenant, la galette des rois est une tradition familiale et une excuse gourmande pour se réunir entre amis. Je ne sais si c’est la tendance individualiste ou la gourmandise outrancière mais…où que j’aille pour tirer les rois, il reste rarement une part! Le chanceux qui tire la fève devient le roi et peut choisir sa reine. A l’époque des Romains, « ce roi d’un jour pouvait alors distribuer des ordres ou des gages ».

La coutume de l’élection du roi est aussi attestée à partir du XIVe siècle, le Roi devait alors payer une tournée à la table, on parlait alors du « roi boit ». Mais certains rois avares qui voulaient éviter de payer la tournée générale, avalaient la fève.

En 1875 arrivent les fèves en porcelaine de Saxe puis, en 1913, celles qui sortent des ateliers de Limoge. Par la suite, on vit apparaitre des animaux et des symboles de chance (fer à cheval, trèfle…). Quant aux fèves publicitaires, elles arrivent au début du XXe siècle, on les attribue à un certain Monsieur Lion qui a créé une fève en forme de lune où était inscrit le nom de son commerce.

La frangipane : une invention italienne ?

Aujourd’hui, la recette traditionnelle de la galette est à base de crème frangipane (un tiers de crème d’amande, deux tiers de crème pâtissière). Elle devrait son nom au comte Cesare Frangipani, qui aurait offert la recette à Catherine de Médicis au XVIe siècle, en cadeau de mariage lors de ses noces avec le futur Henri II.

Quant à la frangipane, on la devrait au comte Cesare Frangipani, qui aurait donné la recette qui porte son nom à Catherine de Médicis.

Dans la tradition franciscaine, on fait toutefois remonter son origine au XIIIe siècle, en l’attribuant à Jacqueline de Septisoles, jeune veuve du noble romain Graziano de Frangipani, et proche de François d’Assise, à qui elle avait pour habitude d’offrir des gâteaux aux amandes.

Diversité des galettes régionales

Si l’on parle de galette des rois , il serait réducteur de penser à une seule recette uniforme. Ce dessert se décline en plusieurs versions, souvent influencées par les traditions et les goûts régionaux. Dans le nord de la France, la galette classique est celle à la frangipane . Elle se compose de pâte feuilletée dorée et croustillante, renfermant une crème d’amande riche et parfumée.

Aux pommes, aux poires ou encore au chocolat… on trouve une multitude de galettes des rois ! Et vous, comment préférez-vous la galette des rois ? Si vous en dévorez cette année, faites surtout attention à ne pas vous casser les dents sur la fève.

Mais Nadine Cretin raconte aussi dans le livre « les Noëls des provinces de France » qu’il existe diverses recettes de galettes.

Voici un tableau récapitulatif des différentes galettes régionales :

Région Type de galette Description
Paris Galette parisienne Pâte feuilletée fourrée à la frangipane (crème d’amande et crème pâtissière) ou simplement de crème d’amande
Nord (59) Galette des rois dunkerquoise Pâte à brioche garnie d’une crème au beurre aromatisée au rhum
Franche-Comté Galette franc-comtoise (ou bisontine) Pâte à choux aromatisée à la fleur d’oranger ou au rhum
Normandie (Manche, 50) Galette des rois normande Pâte briochée avec douze petites boules correspondant aux apôtres
Sud de la France Gâteau des rois Pâte à brioche aromatisée à la fleur d’oranger, avec des gros grains de sucre et/ou des morceaux de fruits confits
Guyane Galette guyanaise Pâte sablée sucrée garnie de crème de coco, de crème pâtissière ou de confiture de goyave, d’ananas ou de banane au miel

Si dans les trois quarts de l’Hexagone on mange de la galette, on préfère le gâteau des rois dans le sud de la France. Composée de crème aux amandes entourée de pâte feuilletée, elle s’est imposée peu à partir du XVIe siècle, suite à une querelle entre pâtissiers et boulangers.

La galette de l'Élysée

On peut noter, par ailleurs, qu'une seule galette en France ne contient pas de fève, celle de l'Élysée.

Au palais de l’Élysée, on déguste aussi la galette de L’Épiphanie chaque année. La tradition a été instaurée en 1975 par Valéry Giscard d’Estaing, une manière de saluer les savoir-faire artisanaux de la profession. Depuis, chaque année, le président de la République reçoit des artisans et maîtres boulangers à l’Élysée pour partager une galette à la frangipane de taille gargantuesque.

L’année dernière, la pâtisserie, confectionnée par le boulanger parisien Jean-Yves Boullier, mesurait 1,15 m de diamètre et comportait cinq kilos de pâte ! Mais sa vraie spécificité tient au fait qu’elle ne comporte ni fève, ni couronne.

La galette des rois à l'étranger

En Espagne, on profite du « Jour des trois Rois » pour échanger les cadeaux de Noël puisque, originellement, ce sont les rois mages qui apportèrent des présents, 12 nuits après la naissance de l’enfant Jésus. La veille, des carrosses paradent dans les rues. On lance fruits confits et des bonbons, prémices du lendemain.

En Italie, l’Épiphanie est aussi l’occasion de recevoir ou non des cadeaux et quelques gourmandises : une sorcière issue du folklore italien, la « Befana », profite du 6 janvier pour apporter des sucreries aux enfants sages, et… du charbon aux autres !

En Allemagne, la tradition de l’Épiphanie est musicale ! Il est coutume de voir, dans les régions à dominante catholique comme la Bavière, des « Sternsinger », ou « chanteurs à l’étoile » : ces jeunes choristes déguisés en Rois mages passent de maison en maison, munis d’un bâton de pèlerin surmonté d’une étoile. Leurs chants ont vocation à récolter des dons et quelques friandises au passage.

En Russie, le 6 janvier est le jour de la fête de Noël selon le calendrier orthodoxe. Selon la tradition, le père Gelo distribue des cadeaux avec Babushka, une vieille femme qui l’aide dans sa distribution. Il est également courant pour les orthodoxes de prendre un bain glacé dans des cours d’eau bénis préalablement par des prêtres.

En Bulgarie et en Grèce on plonge également dans les eaux d’un lac, à la recherche d’une croix lancée par un prêtre orthodoxe. En Roumanie, des courses de chevaux sont organisées. Les cavaliers sont bénits par des prêtres.

Aux États-Unis, il y a sans doute moins de fabophiles qu’en France, et pour cause : les galettes commercialisées là-bas sont dépourvues de fèves ! La raison ? La peur d’un mauvais procès intenté par un client qui risquerait de s’étouffer ou de se casser une dent… Si les Américains souhaitent une fève, ils doivent ainsi la demander à part et la placer eux-mêmes dans le gâteau.

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