Troubles de l'oralité alimentaire (TOA) : Comprendre, Reconnaître et Traiter

Manger est un besoin vital, un acte social, un plaisir partagé ainsi qu’un éveil de tous les sens. Moment de plaisir, l’instant du repas tourne au calvaire pour certains enfants. Le responsable : les troubles de l’oralité alimentaire (TOA) ou la dysoralité.

Qu'est-ce que le trouble de l'oralité alimentaire ?

Le TOA regroupe l’ensemble des dysfonctionnements oraux qu’un enfant rencontre au moment de sa nutrition. Autrement dit, toutes les difficultés d’alimentation par voie orale. Contrairement à la normale, ici, le tout-petit fait face à une anomalie d’ordre sensoriel ou bien moteur, qui l’empêche de se nourrir correctement. Ces troubles de l’oralité poussent l’enfant à manger très peu, soit à se limiter uniquement à certains aliments. Par exemple, ceux qu’il arrive facilement à avaler (comme les aliments liquides). Néanmoins, il est utile de préciser qu’il ne s’agit pas de néophobie. À vrai dire, ils sont bien différents. Le TOA résulte d’un trouble déficitaire des sens ou de la fonction motrice qui entraîne l’incapacité du tout-petit à se nourrir convenablement. Pour certains, la dysoralité se remarque très tôt, dès la période de la tétée. Alors que pour d’autres, le problème se manifeste bien plus tard, notamment au cours des différentes étapes alimentaires.

Causes des TOA

Plusieurs causes interdépendantes se cachent derrière les troubles de l’oralité alimentaire. Concrètement, comment explique-t-on l’existence de cette anomalie chez les tout-petits ? Les T.O.A peuvent être d’origines variées .

Il s’agit d’une difficulté à traiter les informations sensorielles et à les interpréter. Pour cause, l’enfant réagit anormalement aux stimuli buccaux. Ce mode d’alimentation risque de favoriser les troubles de l’oralité s’il est pratiqué très tôt ou à long terme. Les tout-petits qui souffrent de malformations congénitales et de pathologie digestive sont plus sujets au TOA. Vous l’aurez compris, plusieurs facteurs expliquent la présence du TOA.

Les enfants souffrant de malformations abdomino-thoraciques sont particulièrement concernés par ces difficultés. En effet, ils sont pris en charge dès leur naissance, et doivent bénéficier de soins médicaux qui perturbent le développement normal de l'oralité alimentaire. Il s'agit essentiellement de chirurgie néonatale, d'hospitalisations successives, de soins invasifs autour de la bouche, et d'une nutrition artificielle précoce (entérale et parentérale). Le développement psychomoteur et sensoriel ne peut pas se faire dans les conditions habituelles, ce qui perturbe sensiblement l'oralité alimentaire.

Mais au-delà de cet indéniable facteur de risque, il faut souligner que les TOA peuvent apparaître chez des enfants de tout âge, touchés ou non par une pathologie associée. En effet, les causes sont multiples et variables d'un enfant à l'autre.

  • Neurologique: handicap, tumeur, encéphalite, accident vasculaire cérébral, etc.
  • Digestive: RGO (reflux gastro-œsophagien), mauvais transit, douleurs abdominales, troubles de la déglutition, intolérances/allergies alimentaires, dysphagie, etc.
  • Traumatique: cardiopathie, nutrition artificielle, bébé prématuré, lien mère-enfant perturbé, réanimation, etc.
  • Respiratoire: pathologies pulmonaires, asthme, bronchiolites qui se répètent, etc.
  • Sensorielle: sensorialité exacerbée ou hyposensorialité.
  • Familiale ou environnementale: stress, troubles alimentaires chez les parents, antécédents familiaux, carences affectives, etc.
  • Anatomique: anomalie praxique de la langue, atrésie de l’œsophage, sténose, hernie, etc.

Symptômes des TOA

Les troubles de l'oralité (ou dysoralités) alimentaires peuvent se manifester dès la vie in utero, peu après la naissance, ou plus tard au cours de la petite enfance. Selon l'âge, les causes et les enfants, les symptômes et les difficultés rencontrées peuvent varier. Ces signes peuvent apparaître isolément ou de façon groupée chez l’enfant. Ils doivent être recherchés lors de tout examen clinique. Dès leur repérage, parlez-en en équipe.

Parmi les signes cliniques des TOA les plus fréquents, on peut citer :

  • Le réflexe hyper-nauséeux.
  • Les régurgitations.
  • Le RGO (reflux gastro-œsophagien sévère).
  • Les vomissements.
  • La toux.
  • Des temps d'allaitement et de repas excessivement longs : plus de 30 à 45 minutes.
  • L'absence d'exploration orale et tactile (entre 0 et 2 ans).
  • Le refus de certains aliments, de certaines textures ou de la petite cuillère.
  • Des réactions de dégoût face à la nourriture, une aversion pour certains aliments.
  • Une sélectivité alimentaire : l'enfant consomme moins de 20 aliments différents.
  • Une tendance à garder les aliments en bouche sans les avaler.
  • Une absence de plaisir à manger ou à téter, des conflits récurrents aux heures de repas.
  • Un besoin viscéral de se laver les mains au moindre contact avec de la nourriture.

Chez certains enfants qui présentent un trouble de l'oralité alimentaire, les besoins nutritionnels ne sont pas couverts, ce qui peut engendrer diverses complications. Par ailleurs, ces troubles s'accompagnent souvent d'autres difficultés majeures : troubles sensoriels (ouïe, goût, toucher, etc.), oro-moteurs (problème de mastication, de succion, de déglutition, etc.), des troubles du langage ou encore psychoaffectifs.

Diagnostic des TOA

Généralement, c'est au médecin traitant ou au pédiatre de poser le diagnostic de TOA. Pour ce faire, ce professionnel de santé s'appuie sur l'interrogatoire et le ressenti des parents, et sur l'examen clinique. Il se met en quête de signes évocateurs, et d'éventuelles causes pouvant les expliquer (traumatismes, maladies, nutrition artificielle, difficultés praxiques, hypersensibilité, etc.).

Pour affiner son diagnostic et proposer une prise en charge adaptée et pluridisciplinaire, il doit faire appel à d'autres professionnels formés (ergothérapeutes, psychologues, orthophonistes, psychomotriciens, etc.). Il prescrit aux parents un bilan orthophonique qui évalue le développement oral et global de l'enfant : capacités praxiques, habitudes alimentaires, comportement sensoriel, etc. Selon les cas, d'autres bilans peuvent être utiles : bilan psychologique, éducatif, psychomoteur, etc.

Mais il ne faut pas seulement identifier le trouble de l'oralité alimentaire. Il est également important de mesurer son intensité et de prendre conscience de toutes ses conséquences pour l'enfant. Les médecins portent leur attention sur : les conduites d'exploration de l'enfant, sa sensibilité oro-faciale/corporelle, l'investissement de sa sphère orale, etc. Ainsi, ils peuvent établir un tableau clinique complet.

Le diagnostic d’un expert reste le meilleur moyen de savoir si la dysoralité touche votre enfant ou non. En résumé, on observe un manque d’appétit flagrant, une absence de plaisir et des problèmes comportementaux lors de l’alimentation.

Le diagnostic et la prise en charge doivent se mettre en place le plus tôt possible, afin de préserver le lien parent/enfant et d'améliorer la qualité de vie de l'enfant. Notez qu'en cas de suspicion de cause organique, des examens complémentaires peuvent être réalisés par le médecin/pédiatre.

Traitements et Prise en Charge

La prise en charge commence par la réalisation d’un diagnostic effectué par un professionnel de santé. Si le dépistage confirme l’existence de troubles de l’oralité, généralement, le traitement s’axera sur la sensibilité alimentaire.

La prise en charge des troubles de l'oralité alimentaire vise à booster l'appétence de l'enfant, et à améliorer son état nutritionnel. Elle doit intégrer les parents, et impliquer une approche globale et multidisciplinaire (psychologue, orthophoniste, psychomotricien, kinésithérapeute, ergothérapeute, etc.).

Pour ce faire, l’orthophoniste va effectuer un travail au niveau de la langue, du souffle et des lèvres. Afin de faciliter le contact avec les aliments dans la bouche, il va également stimuler les cinq sens du tout-petit. Dans la plupart des cas, l’intervention de plusieurs professionnels de santé s’avère nécessaire.

Des séances d'orthophonie et d'ergothérapie personnalisées sont importantes pour aider l'enfant à progresser, et pour donner des clés aux parents.

Quelques conseils pour aider votre enfant :

  • Implication de l'enfant à la préparation des repas.
  • Bon positionnement de l'enfant lors du repas.
  • Jeux et jouets tactiles et sensoriels : balles tactiles ou vibrantes, jouets à mâcher, ateliers « patouille », billes d'eau, jeux de souffle, dînette, jeux de bruitages, etc.
  • Alimentation à la demande.
  • Activités qui favorisent la coordination mains-bouche : grimaces, comptines, etc.
  • Découverte des odeurs au quotidien.
  • Massages : pour que l'enfant se réapproprie son corps.

Pour favoriser le plaisir lors des temps de repas, on peut également trouver de chouettes outils dans le commerce ou sur internet, comme des couverts rigolos (texturés ou non). Pensez aussi à des assiettes avec compartiments ou avec un dessin à découvrir au fur et à mesure que l’assiette se vide, ou encore, des assiettes présentées comme un jeu de plateau avec récompense à la clé.

Prévention

Comme nous parlons d’un dysfonctionnement multifactoriel, il est difficile de le prévenir. Par contre, améliorer la sensorialité de votre enfant peut aider à réduire les risques.

Pour prévenir les troubles de l'oralité alimentaire, il est possible de mettre en place certaines mesures, comme inciter l'enfant à s'approprier sa bouche et l'ensemble de son corps : massages, caresses, etc.

Conclusion

Les troubles de l'oralité alimentaire nécessitent une prise en charge multidisciplinaire, un suivi en orthophonie, et l'application de mesures préventives. L’orthophoniste commencera par évaluer votre enfant pour estimer si celui-ci souffre bien d’un TOA. Il étudiera le passé alimentaire de l’enfant et toutes ses habitudes orales. L’orthophoniste aide l’enfant à se réapproprier les matières et les textures qu’il rejette. « Guérir » n’est pas le terme approprié, car les troubles de l’oralité alimentaire ne sont pas une maladie.

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