Pâques est une fête joyeuse et pleine de traditions, et l'une des plus douces d'entre elles est sans aucun doute la dégustation de délicieux chocolats. À l'approche des fêtes pascales, les étals se parent de créations chocolatées aux formes variées. Œufs, lapins et cloches en chocolat envahissent les vitrines des pâtisseries, grands magasins et boutiques spécialisées. Mais pourquoi le chocolat est-il devenu un symbole incontournable de Pâques ?
Une tradition ancienne aux racines multiples
L'association entre Pâques et le chocolat remonte à plusieurs siècles et est le fruit de diverses traditions et croyances. Les traditions pascales mêlent symboles religieux chrétiens et héritages pré-chrétiens, tous convergeant vers des thématiques de renouveau printanier et de résurrection.
L'œuf : Symbole de vie et de renouveau
Bien avant que le christianisme n’associe l’œuf aux célébrations pascales, cet objet naturel attirait déjà les civilisations anciennes par sa symbolique puissante. L’œuf, par sa nature même, incarne parfaitement les notions de vie, de naissance et de renouveau. Sa coquille dure et apparemment inerte qui abrite une vie nouvelle prête à éclore en fait un symbole universel de renaissance et de fertilité. Les échanges d’œufs décorés constituaient un rituel printanier répandu bien avant l’avènement du christianisme.
Au printemps, les Égyptiens et les Perses avaient pour habitude de teindre des œufs et de les offrir pour symboliser le renouveau de la vie. Dans l’antiquité gauloise aussi, «les druides teignaient les œufs en rouge en l’honneur du soleil», selon cette dernière, qui rappelle que c’est «très probablement de l’interdiction faite par l’Église, jusqu’au XVIIe siècle, de consommer des œufs pendant le Carême» qu’est née la tradition des œufs de Pâques.
Le Carême et l'interdiction des œufs
Une autre explication de l'association entre Pâques et le chocolat remonte à la période de Carême dans la tradition chrétienne. Dès le IVe siècle, l’Église a institué cette période de jeûne et d’abstinence de quarante jours précédant Pâques. Pendant les 40 jours précédant Pâques, il était interdit de consommer des œufs, du lait et du sucre. Jusqu’au XVIIe siècle, les prescriptions religieuses interdisaient aux fidèles la consommation d’œufs pendant cette période pénitentielle. Pour les conserver jusqu’à la fin du Carême, les œufs étaient souvent cuits puis décorés, transformant une nécessité pratique en tradition festive. Le dimanche de Pâques, qui marquait la fin des restrictions alimentaires, ces œufs étaient partagés et consommés avec joie, symbolisant le retour à l’abondance après la période de pénitence.
Comme il était interdit de consommer des œufs pendant les quarante jours qui précédaient Pâques, on se retrouvait avec des quantités d’œufs immangeables et qu’il fallait écouler. On prit donc l’habitude de décorer les œufs pondus à cette période et de se les offrir.
L'arrivée du chocolat en Europe
L'introduction du chocolat en Europe a également contribué à son association avec Pâques. L’histoire du chocolat remonte à 4 000 ans avant J.-C, dans l’antique Méso Amérique qui incluait, entre autres, le Mexique d’aujourd’hui, où les premiers cacaoyers, les « arbres des dieux » ont été trouvés. Les peuples aztèques et mayas, qui attribuent la découverte du chocolat aux dieux, cultivent le cacaoyer dès le VIe siècle. Le « cacau », le fruit de l’arbre à cabosse, tenait lieu de monnaie d’échange dans ces civilisations anciennes, qui associaient le chocolat avec leur divinité de la fertilité : une déesse, Xochiquetzal, chez les Aztèques, et un dieu, chez les Mayas. Le précieux produit permettait, selon eux, de lutter contre différentes affections, dont la fatigue. Il est vrai que le chocolat contient de la théobromine et de la caféine, deux stimulants naturels.
Le chocolat est rapporté en Europe dans les cales des conquistadors espagnols, après la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb en 1492. Mais c’est Hernan Cortès qui, en 1519, a fait découvrir le breuvage chocolaté à la cour d’Espagne. Au 17e siècle, le chocolat est devenu une boisson prisée dans les cercles aristocratiques, et sa popularité a continué à croître au fil des siècles.
Dans l’Hexagone, c’est à Bayonne qu’il fait son apparition, en 1615, à l’occasion du mariage d’Anne d’Autriche, fille du roi d’Espagne Philippe III, avec Louis XIII. Louis XIV l’introduit ensuite à la cour du château de Versailles, après son mariage avec Marie-Thérèse d’Autriche à Saint-Jean-de-Luz. La reine aime, en effet, à se faire préparer du chocolat « à l’espagnole » par ses servantes.
L'évolution du chocolat de Pâques
La transformation de l’œuf naturel en gourmandise chocolatée marque une évolution majeure dans l’histoire des traditions pascales. Ce changement n’est devenu possible qu’avec les avancées techniques et la démocratisation du chocolat en Europe. Jusqu’au XVIIIe siècle, le chocolat restait principalement consommé sous forme de boisson, privilège des classes aisées. Les premières expériences liant œufs et chocolat apparaissent au XVIIIe siècle, lorsque certains confiseurs commencent à vider des œufs de leur contenu pour les remplir de chocolat liquide. Ces innovations techniques ont permis aux confiseurs du XIXe siècle de créer les premiers œufs entièrement en chocolat.
En 1659, David Chaillou, premier « chocolatier » français reconnu par Mazarin, incorpore le chocolat à la pâte de ses gâteaux et biscuits : le chocolat vient de faire son entrée dans la pâtisserie. Il faudra attendre 1674, pour voir naître le premier chocolat à croquer et 1780, pour que la première fabrique de chocolat s’installe en France.
L’idée de réaliser des œufs au chocolat daterait du XVIIIe siècle. Ce n’est toutefois qu’en 1873 qu’elle voit réellement le jour. L’apparition de moules et les nouvelles techniques de travail du cacao permettent en effet alors de créer de petits sujets en forme d’œufs. Cette invention permettra à Joseph Fry de réaliser en 1873 des œufs de Pâques en chocolat.
Les symboles de Pâques : Cloches, lapins et plus encore
La distribution mystérieuse des œufs de Pâques nécessitait des explications pour les enfants. Ainsi sont nées deux grandes traditions concernant les « messagers » qui apportent ces friandises : les cloches volantes dans les pays latins catholiques et le lapin de Pâques dans les régions germaniques et anglo-saxonnes. La tradition des cloches de Pâques trouve son origine dans une pratique liturgique réelle : le silence des cloches durant la période la plus solennelle de la Semaine sainte.
Dans les régions germaniques, en Suisse, au Royaume-Uni et dans l’Est de la France, ce n’est pas aux cloches qu’est attribuée la distribution des œufs de Pâques, mais à un animal particulièrement prolifique : le lapin. Le lapin ou le lièvre de Pâques est associé à la déesse païenne Ostara (ou Eostre), divinité germanique du printemps et de l’aube, qui a d’ailleurs donné son nom à la fête de Pâques dans les langues germaniques (Easter en anglais, Ostern en allemand).
La chasse aux œufs : Une tradition ludique
La chasse aux œufs représente sans doute l’aspect le plus joyeux et participatif des célébrations pascales modernes. Cette tradition découle naturellement des récits expliquant aux enfants l’apparition miraculeuse des œufs par l’intermédiaire des cloches ou du lapin de Pâques. Les origines précises de cette pratique restent difficiles à dater. En revanche, des références à des jeux impliquant la recherche d’œufs cachés apparaissent dans des documents européens dès le XVIe siècle.
Ce qui était initialement une pratique domestique s’est progressivement étendu à la sphère communautaire et publique. Dès la fin du XIXe siècle, des chasses aux œufs collectives commencent à être organisées dans des parcs et espaces publics, d’abord aux États-Unis puis en Europe.
Le chocolat de Pâques aujourd'hui
Aujourd'hui, manger du chocolat à Pâques est devenu bien plus qu'une simple tradition. C'est un symbole de célébration, de joie et de partage. Outre son association avec les célébrations pascales, le chocolat est également apprécié pour ses qualités gustatives et ses bienfaits pour le moral. Les tendances actuelles montrent un intérêt croissant pour les chocolats de Pâques artisanaux et éthiques, reflétant l’évolution plus générale des comportements de consommation.
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