Avez-vous déjà entendu parler de lean, "purple drank", "drank", "syrup" ou "dirty sprite" ? Ce cocktail composé de plusieurs substances psycho-actives est considéré comme une drogue avec des risques de dépendance.
Qu'est-ce que le Lean ou Purple Drank ?
La lean ou purple drank est un mélange à visée psychotrope qui peut prendre plusieurs formes et être composé de différentes substances. Elle est en général réalisée à partir de sirop contre la toux à base de codéine et d'un antihistaminique (prométhazine) associé à du soda parfois même à de l'alcool. Le purple drank peut aussi être retrouvé sous d’autres termes tels que la “lean" ou le "sizzurp”.
Le purple drank, ou lean, est donc composé à la fois de sirops antitussifs (à base de codéine et de prométhazine) et de soda. Consommé dans une recherche d’effets euphorisants et relaxants, le purple drank est également consommé dans un cadre festif pour atteindre un état de détente.
Les Effets Recherchés et les Risques
Les effets recherchés par le consommateur sont une sensation d'euphorie, de relaxation, un léger vertige, une désorientation et même des hallucinations : "Une impression de flotter hors de son corps", note le Dr Louise Carton, psychiatre et addictologue.
Risques en Cas de Surdosage
En cas de surdosage, il y a un risque de toxidrome anticholinergique, c'est-à-dire une intoxication générale liée aux propriétés des molécules utilisées dans ce mélange. "On peut notamment observer de la fièvre, une augmentation ou une diminution de la pression artérielle, une augmentation de la fréquence cardiaque, des muqueuses sèches, des pupilles dilatées, une rétention urinaire, une constipation… Le tout associé à une agitation, des problèmes d'élocution, des éléments délirants et des convulsions", décrit-elle.
En tant que dépresseur du système nerveux central, la codéine prise à des doses élevées dans le purple drank a pour principal danger de perturber la respiration, et provoquer l’endormissement. En raison de la surdose de codéine, le purple drank est potentiellement mortel si vous faites une overdose. De plus, l’addiction au purple drank est un des principaux risques à moyen et long termes. Il est possible de développer une tolérance au produit, résultant en une augmentation graduelle des doses.
Réglementation et Prévention
Aujourd'hui, la vente libre des médicaments qui composent la lean n'est plus autorisée en France. "Plusieurs dispositions réglementaires prises par les autorités de santé ont permis de diminuer l'ampleur de ce phénomène : les médicaments à base de codéine et de dextrométhorphane sont disponibles uniquement sur ordonnance depuis 2017 ; condition identique pour les médicaments à base de prométhazine depuis 2020. La consommation de lean est encore présente avec des cas graves encore rapportés, peut-être du fait de falsification d'ordonnances…", souligne L.
À cause de l’usage récréatif de certains médicaments utilisés pour le purple drank, comme la prométhazine (un antihistaminique), ces derniers sont désormais seulement disponibles sur ordonnance. Depuis 2019, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) alerte sur le mésusage et le surdosage volontaire de ces produits à base de codéine / prométhazine.
De cette manière, c’est une pratique dangereuse à cause du détournement des médicaments qui le composent de leur usage initial, et du dépassement des doses recommandées pour ces mêmes médicaments.
Codéine : Indications et Sécurité
La codéine est un alcaloïde contenu dans le pavot somnifère (Papaver somniferum). Sa structure est très proche de celle de la morphine. Elle est utilisée comme analgésique (anti-douleur) soit seule soit associée à du paracétamol ou de l’ibuprofène et comme antitussif (contre la toux). Elle induit également des effets euphorisants modérés, responsables de son potentiel d’abus.
Environ 10 % de la dose de codéine administrée est transformée en morphine. Cette transformation est sous la dépendance d’enzymes du foie (le CYP2D6) dont il existe de nombreux sous-types. Selon le sous-type dont on est doté, on sera un métaboliseur lent, ce qui rend la codéine peu efficace, ou rapide voire ultra-rapide, ce qui entraîne un risque de surdose de morphine même pour une dose faible de codéine. On estime que 80% de la population est métaboliseur rapide et 2% ultra-rapide.
Informations Relatives à la Sécurité du Patient
- Contre-indications : Crise d'asthme, enfant de moins de 12 ans, hypersensibilité à la codéine, insuffisance respiratoire, etc.
- Précautions : Allaitement, altération de l'état de conscience, épilepsie, grossesse, etc.
- Interactions médicamenteuses : Risque majoré de dépression respiratoire avec l'oxybate de sodium, diminution de l'effet antalgique avec les morphiniques agonistes-antagonistes, etc.
Autres Composants du Lean
Le dextrométhorphane a une structure moléculaire proche de celle de la morphine. On le trouve dans un médicament contre la toux. Il n’agit pas sur les récepteurs opioïdes et n’a donc pas d’effets analgésiques. La prométhazine est une molécule utilisée dans le traitement de l’allergie et de l’insomnie passagère. Sa présence dans les cocktails n’est pas liée à ses effets psychoactifs, mais elle permet de lutter contre les démangeaisons provoquées par la codéine.
A ces molécules s’ajoute le paracétamol car il est présent dans de nombreux médicaments à base de codéine. Le paracétamol est un antalgique (anti-douleur) très répandu. Sa transformation par le foie conduit à la production de métabolites toxiques qui peuvent, en cas d’accumulation, provoquer une hépatite médicamenteuse pouvant devenir fatale.
Le cocktail produit des effets planants, proches de ceux du cannabis mais encore plus détendant. Des effets hallucinogènes dissociatifs peuvent également survenir en cas de cocktail contenant du dextrométhorphane. Leur gravité est fonction de la dose, les effets secondaires de la codéine s’ajoutant à ceux de la prométhazine.
Exemples de Cas et Prévention
Dans trois cas d’hospitalisation récemment rapportées en Ile de France, les jeunes concernés avaient absorbé un cocktail à base de 300 mg de codéine soit l’équivalent d’une bouteille de sirop, additionné de 250 à 750 mg de prométhazine, 10 à 30 comprimés dans la forme habituelle.
Pas besoin de faire appel à un dealeur ni de vider son porte-monnaie. C'est à l'officine au coin de la rue, ou même dans l'armoire à pharmacie familiale que certains ados trouvent désormais les ingrédients pour se shooter. Quelques médicaments vendus sans ordonnance, des glaçons, de la limonade et vous avez un cocktail explosif : le purple drank, que l'on appelle aussi lean ou sizzurp.
Le phénomène prend une ampleur telle que l'Ordre national des pharmaciens a décidé de tirer la sonnette d'alarme dans son journal interne du mois de mai en appelant les officines à la vigilance lorsqu'elles se retrouvent face à de jeunes minois, manifestement peu souffreteux, qui réclament, par exemple, de l'Euphon ou du Néo-Codion (sirops contre la toux) avec des cachets de Phénergan (contre les allergies ou les insomnies passagères).
Et, incroyable, la recette est très facilement accessible sur Internet, y compris sur des sites spécialisés dans l'élaboration de cocktails, à côté de celle du mojito ou du blue lagoon. Seule particularité, la mention surréaliste qui l'accompagne : « C'est un cocktail dangereux, qui entraîne une réelle addiction. A éviter absolument ! » Il en existe de nombreuses variantes, y compris avec alcool pour un effet encore plus appuyé. Et certains consommateurs associent aussi le purple drank avec du haschisch.
Tableau Récapitulatif des Composants et Effets
Composant | Effets Recherchés | Risques et Effets Secondaires |
---|---|---|
Codéine | Euphorie, relaxation, anti-douleur, antitussif | Dépendance, troubles respiratoires, somnolence, surdose mortelle |
Prométhazine | Antihistaminique (contre les démangeaisons), somnifère | Somnolence, confusion |
Dextrométhorphane | Hallucinogène (à haute dose) | Potentiellement mortel à très haute dose |
Paracétamol | Antalgique | Hépatite médicamenteuse en cas d'accumulation |
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