Gaspillage Alimentaire: Causes, Conséquences et Solutions

La journée internationale de sensibilisation aux pertes et gaspillages de nourriture, instaurée par l’Assemblée générale des Nations unies, est célébrée pour la première fois le 29 septembre 2020.

Un tiers de la nourriture dans le monde est perdu ou gaspillé le long de la chaîne alimentaire. Comment réduire progressivement ce phénomène ?

Le gaspillage alimentaire représente un enjeu mondial qui soulève des défis d’ordre environnemental, social et économique.

Chaque année dans le monde, la quantité de pertes ou de gaspillage de denrées alimentaires destinées à la consommation humaine s’élève à plus d’un milliard de tonnes.

Le gaspillage alimentaire se définit par la perte ou la dégradation de la nourriture destinée à être consommée par l’homme.

Ce phénomène survient lors des différentes étapes de la chaîne d’approvisionnement alimentaire. De la récolte à la consommation, en passant par le transport, la transformation et la distribution, les causes du gaspillage sont multiples.

Dans un monde où les ressources naturelles viennent à manquer, le gaspillage des denrées alimentaires ne cesse pourtant de s’accroître.

Causes du Gaspillage Alimentaire

Un grand nombre de facteurs influencent le niveau de perte et de gaspillage des productions.

Les pertes alimentaires font référence à des situations dans lesquelles les produits agricoles ou alimentaires sont détériorés avant d’atteindre la dernière étape de production ou d’entrer dans le circuit de vente au détail.

Les pertes relèvent principalement de limitations financières, techniques et de gestion touchant les récoltes, les infrastructures et conditions de stockage, les systèmes d’emballage et de commercialisation, auxquels viennent s’ajouter les conditions climatiques favorisant la détérioration des aliments.

Les niveaux de pertes les plus élevés se retrouvent dans les pays en développement.

Le gaspillage alimentaire concerne les aliments éliminés dans le commerce de détail ou jetés par les consommateurs.

On estime que le gaspillage alimentaire est notamment le fruit d’une méconnaissance de la signification des dates inscrites sur le produit par le consommateur, de la non-adéquation des produits à des normes de qualité ou d’apparence strictes et de mauvaises pratiques d’achat et de conservation par les consommateurs.

Une proportion élevée de denrées alimentaires est encore perdue tout au long de la chaîne d’approvisionnement aujourd’hui.

L’empreinte matérielle mondiale augmente plus rapidement que la croissance démographique et la production économique. Bien que dans certains pays l’efficacité des ressources s’améliorent, ce progrès est compromis par l’augmentation de l’intensité des matières dans d’autres.

De nombreux obstacles peuvent survenir pendant la période des récoltes, avec d’importantes répercussions sur la productivité agricole.

Certains aliments, notamment ceux soumis à la chaîne du froid, requièrent une gestion rigoureuse. Des lacunes dans leur stockage peuvent engendrer d’importantes pertes.

Les exigences strictes des distributeurs augmentent les quantités de perte de certains aliments. C’est le cas notamment des fruits et légumes.

Les distributeurs rejettent certaines denrées pour des raisons esthétiques (taille, forme, couleur), alors qu’elles sont comestibles.

Le surplus de commandes de produits périssables conduit également à une augmentation des pertes alimentaires.

Dans les pays développés, les habitudes des consommateurs contribuent activement au gaspillage alimentaire. De nombreux aliments sont jetés à la poubelle alors qu’ils sont encore consommables.

Dates de consommation

La date limite de consommation, « à consommer jusqu’au », indique le dernier jour où le produit peut être consommé en toute sécurité, sans représenter de risque pour la santé.

La date de durabilité minimale, « à consommer de préférence avant le », informe le consommateur que la qualité du produit peut être altérée au-delà de cette date (texture, goût, apparence, etc.). Cependant, l’aliment ne représente aucun danger pour la santé.

Faire ses courses en optant pour le strict nécessaire peut se révéler être un véritable challenge. Face à la multitude de promotions sur l’alimentation et la vaste gamme des produits disponibles en rayon, les consommateurs sont incités à la surconsommation. Cette tendance engendre l’accumulation de produits superflus qui ne sont pas consommés et terminent en déchets alimentaires.

Exemples de gaspillage alimentaire

  1. A l’étape de production, les aliments sont triés et sélectionnés en fonction de leur aspect, de leur calibre ou de leur couleur.
  2. Les pommes de terre sont ainsi l’aliment le plus gaspillé pendant l’étape de transformation. Elles sont la base de beaucoup de plats préparés, où une partie importante du produit est jetée, au moment de l’épluchage puis de la taille.
  3. Il est rare que la phase de transport épargne la totalité des aliments présents dans une cargaison. Beaucoup sont abîmés dans les camions, les trains ou les bateaux, puis jetés à l’arrivée sur leur lieu de distribution. Le blé tendre arrive en tête des aliments les plus gaspillés au moment de la distribution.
  4. A la fin d’un repas, il nous est tous arrivé de jeter du pain rassis que l’on a pas eu le temps de consommer. A cette étape, les pertes alimentaires les plus importantes ont lieu sur les produits laitiers.
  5. Au restaurant, nous ne décidons pas de la quantité de nourriture dans nos assiettes. Or, ces portions non ajustées sont la cause principale de gaspillage alimentaire dans la consommation hors foyer.

Conséquences du Gaspillage Alimentaire

Les données sur l’impact environnemental sont alarmantes. Cela résulte de l’émission de méthane issu de la transformation des aliments (décomposition). Ce gaz épuise les ressources naturelles et vitales comme l’eau et la terre, conséquence d’une agriculture intensive répondant à une consommation croissante. Cette pratique accélère la pollution des sols et de l’eau, et requiert une énergie considérable pour produire des aliments qui ne seront finalement pas consommés.

La FAO (Food and Agriculture Organization) estime le coût du gaspillage alimentaire mondial à 2600 milliards de dollars par an. En France, cela représente une valeur de 16 millions d’euros.

Cette perte entraîne des coûts significatifs pour tous les acteurs de la chaîne d’approvisionnement, affectant les finances des ménages et des producteurs.

La production et la consommation alimentaires ont un poids conséquent sur l’environnement. Le secteur agricole représente 21% des émissions de gaz à effet de serre en France. Ce chiffre grimpe même à 36% si l’on prend en compte l’ensemble des activités agricoles et alimentaires (ex: la fabrication des emballages ou le transport de marchandises).

A cet égard, le gaspillage alimentaire représente à lui seul 3% des émissions de gaz à effet de serre de l’activité nationale. En France, ce sont 10 millions de tonnes de nourriture qui sont gâchées chaque année, représentant 16 milliards d’euros de perte.

Selon une étude de l’ADEME de 2016, 18% de la production alimentaire destinée à la consommation humaine serait gaspillée chaque année.

Répartition du gaspillage alimentaire

  • 32% pour la production agricole ;
  • 21% pour la transformation ;
  • 14% pour la distribution ;
  • 14% pour la restauration (collective et commerciale) ;
  • 19% pour la consommation à domicile.

Le gaspillage alimentaire a des impacts très importants sur l’environnement. Cela se traduit par un gaspillage de ressources naturelles (eau, surface agricoles…) mais aussi des pollutions liées à la production des aliments (utilisation de pesticides, engrais chimiques…) et à leur destruction.

D’après l’ADEME, l’empreinte carbone annuelle du gaspillage alimentaire serait de près de 15,5 millions de tonnes d’équivalent CO2 par an en France, ce qui n’a rien d’étonnant lorsqu’on sait que l’alimentation représente à elle seule 36% des émissions nationales de gaz à effet de serre.

Jeter des aliments, c’est aussi jeter de l’argent. Une facture salée qui, à l’arrivée, est réglée par le consommateur. En effet, chaque acteur tend à reporter les coûts économiques de ce gaspillage dans sa vente, ce qui se traduit au final par une hausse des prix alimentaires.

Et la note du gaspillage alimentaire ne se limite pas au prix de vente des produits : on la retrouve également dans les taxes ou redevances versées par le contribuable pour le service public de gestion des déchets.

Selon la FAO, les conséquences économiques directes du gaspillage de produits agricoles (à l’exclusion du poisson et des fruits de mer) sont estimées à 750 milliards de dollars par an dans le monde, soit l’équivalent du tiers de notre PIB national. En France, le coût du gaspillage de denrées du champ à la poubelle représenterait 16 milliards d’euros annuels, d’après l’ADEME, soit 240€ par an et par personne si l’on rapporte ce chiffre à l’ensemble de la population française.

La sécurité alimentaire de tous n’est pas assurée dans le monde alors même que nous produisons assez de denrées alimentaires pour combler les besoins énergétiques de chaque individu. Ainsi, aujourd’hui, 1 personne sur 9 souffre de sous-alimentation chronique dans le monde, soit 795 millions d’individus.

Solutions pour Lutter Contre le Gaspillage Alimentaire

Il existe cependant diverses solutions pour lutter contre les pertes et gaspillages alimentaires.

La réduction des pertes et gaspillage est un objectif central pour la FAO, puisqu’il concerne simultanément des problématiques de gestion des ressources, de réduction des émissions de CO2, de production agricole, de nutrition, d’innocuité et de qualité des aliments.

La lutte contre les pertes et gaspillages nécessite une approche transversale et intégrée de l’ensemble des acteurs et secteurs agricoles et alimentaires.

En France, seul un faible pourcentage de tous les gaspillages et pertes alimentaires est transformé en compost.

Le Pacte national de lutte contre le gaspillage alimentaire, créé en 2013, est un engagement collectif visant à « s’engager concrètement contre les dérives de la société de surconsommation » et de « retrouver du pouvoir d’achat ».

Dans plan de 2017-2020, le Pacte comporte 16 mesures issues de la réflexion menée avec les acteurs de la chaîne alimentaire et fondées sur l’engagement des acteurs de l’ensemble de la chaîne alimentaire.

La loi du 11 février 2016 relative à la lutte contre le gaspillage alimentaire (dite Loi Garot) dresse un cadre légal contre le gaspillage et permettra notamment de répondre à l’objectif fixé par le pacte national de 2013, sur la réduction de moitié du gaspillage alimentaire d’ici 2025.

La loi anti-gaspillage pour une économie circulaire, adoptée en février 2020, vise à renforcer les mesures existantes pour lutter contre le gaspillage alimentaire. La loi se fixe comme objectif de réduire le gaspillage alimentaire de 50 % par rapport à son niveau de 2015 dans les domaines de la distribution alimentaire et de la restauration collective d’ici 2025 et de 50 % par rapport à son niveau de 2015 dans les domaines de la consommation, de la production, de la transformation et de la restauration commerciale d’ici 2030. L’objectif est la fin progressive de tous les emballages en plastique à usage unique d’ici 2040.

Promulguée en 2016, la loi Garot est une des mesures mises en place pour lutter contre le gaspillage alimentaire. Elle met en avant deux dispositifs clés concernant les acteurs de la distribution alimentaire. La première mesure impose aux magasins de plus de 400 m² de donner leurs invendus alimentaires encore comestibles aux associations caritatives.

Adoptée en 2018, la loi EGALIM introduit des mesures visant à renforcer les relations commerciales entre producteurs et distributeurs. Les objectifs de cette loi sont multiples : lutter contre le gaspillage alimentaire, garantir une nourriture saine et durable, notamment en introduisant des produits biologiques en restauration collective, et en améliorant l’éducation alimentaire (apprendre à en plus se nourrir de junk food).

Les agriculteurs sont encouragés à cultiver de façon responsable en répondant à la demande et en évitant la surproduction. L’objectif est de réduire le surplus de production qui risque de se transformer en déchets alimentaires.

En France, l’ADEME (l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie) œuvre activement contre le gaspillage alimentaire à l’échelle nationale. Leurs actions se traduisent par la mise en place d’une série de mesures : sensibilisation et information de tous les publics, valorisation des biodéchets et transition vers une alimentation durable.

La réduction du gaspillage alimentaire à la maison passe par un changement de nos habitudes de consommation. Cela implique des achats plus réfléchis, afin d’optimiser l’utilisation des ressources.

La lutte contre le gaspillage alimentaire représente un engagement collectif et des actions concrètes de la part de tous les acteurs du système agroalimentaire. Lorsqu’une prise de conscience est nécessaire face aux impacts écologiques, économiques et sociaux du gaspillage alimentaire, il est impératif d’adopter des comportements et des pratiques responsables pour obtenir des résultats.

Repenser le système alimentaire est un défi d’envergure mondiale.

Initiatives internationales

L’initiative mondiale de réduction des pertes et du gaspillage alimentaires, SAVE FOOD, a été initiée en 2011 par la FAO et la société Messe Düsseldorf GmbH. L’initiative vise à encourager le dialogue entre les industriels, les chercheurs, les politiques et la société civile sur le sujet des pertes et gaspillages alimentaires.

La FAO a également lancé, en collaboration avec le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) et plusieurs partenaires, la campagne « Pensez. Mangez. Préservez - Dites non au gaspillage alimentaire », destinée à soutenir l’initiative SAVE FOOD sur le volet de la prévention et de la réduction du gaspillage alimentaire. Cette campagne a vu la création d’un portail de partage de ressources et d’informations.

Enfin, la FAO et l’International Food Policy Research Institute (IFPRI) ont présenté en juillet 2020 une version complète de la plateforme technique sur l’évaluation et la réduction des pertes et du gaspillage alimentaire, en élaboration continue depuis son lancement en 2015.

Cette plateforme exploite et complète les mécanismes existants, notamment la Communauté mondiale de pratiques sur la réduction des pertes alimentaires qui est gérée conjointement par la FAO, le Fonds international pour le développement agricole (FIDA) et le Programme alimentaire mondial des Nations unies (PAM), ainsi que le Protocole sur les pertes et gaspillages alimentaires de l’Institut des ressources mondiales.

En concertation avec les Etats-membres, la FAO élabore actuellement un « Code volontaire pour réduire les pertes et gaspillages alimentaires ». L’objectif du Code est de présenter des principes directeurs et de normes de pratiques responsables afin de réduire les pertes et le gaspillage.

Le 29 septembre 2020, la FAO a célébré pour la toute première fois la Journée internationale de sensibilisation aux pertes et gaspillages de nourriture.

Dans le cadre du Sommet des Systèmes alimentaires de septembre 2021 et de son pré-Sommet à Rome en juillet 2021, les pertes et gaspillages alimentaires sont liés à la réforme nécessaire de la production comme de la consommation.

Le PAM s’implique dans la réduction des pertes que rencontrent les petits agriculteurs avant et pendant la phase de récolte du fait des ravageurs, des mauvaises conditions climatiques ou des mauvaises conditions de conservation des récoltes. En Afrique, le PAM a introduit un programme de stockage en partenariat avec le secteur privé qui permet aux producteurs de conserver leurs aliments pour une durée étendue, ce qui permets d’éviter les pertes importantes susceptibles de survenir avant même que ces produits soient transportés.

L’Alliance de la Ferme au Marché (Farm to Market Alliance, FtMA) a aussi été créée par le PAM dans le but de garantir des meilleurs moyens de subsistance aux petits producteurs en les aidant à opérer une transition de leur activité vers une agriculture commerciale. Outre une aide technologique et une facilitation de l’accès aux marchés et aux financements, cette alliance offre aux producteurs des solutions de planification et de stockage propres à réduire les pertes.

Le PAM s’engage aussi contre les pertes et les gaspillages des aliments avec sa campagne « Mettre fin au gaspillage » (Stop the Waste).

Le FIDA investit principalement dans la réduction des pertes agricoles dans les pays en développement. L’agence a mené des actions ciblées, comme celle intitulée « Objectif zéro gaspillage alimentaire chez les communautés de pêcheurs en Indonésie » ; il s’agissait, avec l’aide du Ministère indonésien des affaires maritimes et de la pêche, d’améliorer la qualité des captures et de donner accès aux technologies pour permettre de transporter du poisson sur de longues distances.

Astuces anti-gaspillage

  1. Préférez l’achat en vrac pour contrôler les quantités… et limiter les emballages. Souvenez-vous que les fruits et légumes un peu tordus sont tout aussi bons que les autres !
  2. En cas de doute sur la péremption d’un produit, référez-vous à la Date Limite de Consommation (“à consommer jusqu’au”) sur les emballages. Ne jetez pas les restes ! Gardez les fanes de poireaux, de carottes ou encore de radis pour les mijoter et les incorporer à d’autres plats, ou les queues de fraises pour faire des sirops délicieux.
  3. La conservation des aliments est une des clefs pour lutter contre le gaspillage alimentaire. Le produit qui génère le plus de gaspillage alimentaire est le pain ! Pensez à le transformer en croûtons, pain perdu ou chapelure lorsqu’il durcit. Pensez à la congélation, la salaison, la conservation dans l’huile (pour les olives, tomates séchées, aubergines ou champignons…).

Tableau des déchets alimentaires en France en 2022

Acteur Pourcentage des déchets alimentaires totaux
Ménages 42%
Industries agro-alimentaires 25%
Production primaire 12%
Restauration 12%

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