Cet article explore les caractéristiques distinctives et les méthodes d'élevage associées au porc de Touraine, une race porcine locale.
Le Contexte Agricole
Dans le cœur du Berry, les vignobles de Sancerre bénéficient d'un climat et d'un sol favorables. Non loin de la Loire, sur des coteaux pouvant atteindre 50% d'inclinaison, les vignes bénéficient d'un environnement de choix depuis l'Antiquité.
Innovations Agricoles et Changements Techniques
Les techniques sans labour et la fertilisation sans phosphore sont deux innovations techniques agricoles très souvent liées l'une à l'autre, et qui croisent dans leurs origines des justifications et des entités communes. Tout d'abord, ce sont des innovations que l'on pourrait qualifier d'innovations « par retrait ». Elles ne se structurent en premier lieu non pas sur l'introduction d'un nouvel artefact auprès des agriculteurs, mais sur la suppression, le retrait d'objets et de pratiques qu'ils manient déjà : le labour et le travail du sol en l'occurrence, pratiques souvent décrites comme fondatrices de l'activité agricole et de l'identité paysanne (Haudricourt, Delamarre, 1986), et les engrais phosphorés, un des trois piliers de la fertilisation chimique généralisée à partir de la modernisation d'après-guerre.
Ensuite, dans les deux cas, les promoteurs de ces innovations argumentent et justifient le retrait à partir d'une double perspective. La première repose sur l'idée qu'il est urgent de ne plus avoir recours aux charrues et aux engrais phosphorés car ceux-ci détruiraient les sols (érosion, tassement, réduction de l'activité biologique) et provoqueraient une contamination des eaux souterraines. La seconde renvoie à un principe de substitution de ces objets techniques par des objets vivants, de nature - essentiellement le sol, sa macro et microfaune, ses champignons microscopiques, et les racines des plantes - qui permettent, à condition qu'on leur offre des conditions favorables pour se développer, de remplir les fonctions des objets techniques incriminés. Ainsi, les fonctions du labour visant à améliorer la structure du sol, de l'acide phosphorique à nourrir la plante, peuvent-elles être remplies par des organismes vivants comme les lombrics ou les micro-organismes du sol. L'idée est donc d'intervenir le moins possible sur le milieu cultivé pour le stimuler et l'inciter à remplir par lui-même certaines fonctions, au travers notamment du rétablissement d'équilibres biologiques.
Si l'idée est bel et bien de supplanter dans les deux cas l'action de la nature à celle d'outils ou d'intrants, de nouveaux artefacts sont tout de même introduits pour rendre possible le retrait opéré. Ainsi le non-labour dans sa forme la plus aboutie - le semis direct (sans aucun travail du sol -, n'est-il possible que grâce à l'utilisation de semoirs spécifiques permettant de semer dans un sol non-travaillé et couvert des résidus végétaux de la récolte précédente, auparavant enfouis par le travail du sol. De même, ce semis direct n'est le plus souvent réalisable que grâce à l'usage d'herbicides chimiques permettant de détruire les mauvaises herbes auparavant éliminées mécaniquement. C'est d'ailleurs très souvent, que ce soit sur le continent américain ou en Europe, les firmes produisant ces machines agricoles et ces herbicides qui ont joué un rôle central dans la mise au point et la diffusion des techniques sans labour (Ekboir, 2003). Il en va de même pour la fertilisation sans phosphore : cette dernière est défendue en France et en Europe par quelques entreprises produisant et commercialisant des fertilisants minéraux - dont la formulation est tenue secrète- ayant pour fonction de dynamiser l'activité biologique du sol. Le rôle central de ces objets et des firmes qui les commercialisent alimente bien souvent un discours critique sur l'efficacité agronomique et environnementale de ces innovations, sur l'objectivité de leurs promoteurs, ou sur l'idée même de « retrait », dès lors que de nouveaux artefacts sont introduits.
Les promoteurs de ces techniques et leurs clients agriculteurs opposent à ces doutes l'idée que les artefacts en question sont avant tout des « activateurs », des facilitateurs de l'activité biologique et de son développement, dont ils sont beaucoup moins perturbateurs que les pratiques précédentes. Ils argumentent également, agriculteurs en tête, autour de l'avantage économique que représentent ces innovations : si elles requièrent l'investissement dans de nouveaux outils ou intrants, elles permettent par ailleurs de faire l'économie d'achats d'engrais, de carburant, d'usure de matériel ou de temps de travail dont le labour est un grand consommateur. De sorte que si les praticiens mettent en avant la question écologique dans la motivation du changement technique, ils reconnaissent aisément que la question économique a été centrale voire prépondérante, comme c'est le cas en non-labour. À noter que les utilisateurs des fertilisants-activateurs sont le plus souvent des non-laboureurs, mettant en avant la cohérence de l'association du produit avec ces pratiques quant à leurs impacts sur l'activité biologique des sols.
L'abandon du labour et celui de la fertilisation phosphorique sont donc des innovations de ruptures. Elles touchent à des pratiques essentielles des itinéraires techniques agricoles, profondément inscrites dans les systèmes de normes professionnelles et symboliques, et au cœur des recommandations délivrées par les organismes d'appuis techniques agricoles (instituts techniques, chambres d'agriculture, coopératives). D'un point de vue opérationnel, faire travailler la nature à la pace des techniques, remplacer une charrue par un vers de terre, pourrait sembler en apparence tâche facile, puisque reposant sur des processus déjà existants dans les sols. Or il n'en est rien : l'irruption de ces objets et l'attribution qui leur est faite d'une fonction productive et rationalisée soulèvent de nombreux problèmes aux agriculteurs et aux acteurs qui les accompagnent dans ces changements.
Ainsi la conduite sans labour implique une refonte bien plus large des pratiques techniques qu'un simple changement de préparation avant semis. Elle pose des problèmes de gestion des résidus et débris de la récolte précédente : ceux-ci, restant au sol, viennent gêner le fonctionnement des semoirs, favorisent le développement des limaces au printemps en conservant l'humidité, ou ralentissent le réchauffement du sol et donc le démarrage des cultures. Le sol non-travaillé, couvert de végétation, devient également un abri apprécié de certains mammifères qui peuvent endommager les cultures. Les pailles deviennent ainsi des actants qui surgissent au cœur du processus d'innovation et qui interrogent le praticien, comme en témoigne l'un deux : « à partir du moment où y’a des débris, c’est plus pareil ». C’est donc une multitude de problèmes que les praticiens doivent solutionner par tâtonnements (sur les dates de semis par exemple), par essais-erreurs, ou par échanges entre pairs. Les repères n’y sont plus, les règles qui valaient auparavant deviennent obsolètes, et les premières années sont l’occasion de revers fréquents. Mais pour les agriculteurs concernés, il est surtout particulièrement difficile d’évaluer si ces objets de la nature auxquels on a délégué une partie du travail font justement bien leur travail ! Comment évaluer l’activité de micro-organismes enfouis sous le sol, ou invisibles à l’œil nu ? Comment apprécier l’impact de ces derniers alors même que les référentiels manquent, que bien souvent les relais classiques du conseil agricole font peu de cas de ces entités ? La boîte noire que constituait le sol, jusqu’à présent considéré comme un simple support de la production, se retrouve subitement ouverte et libère avec elle de nombreuses intrigues.
Tout agriculteur savait en effet apprécier la qualité d’un lit de semences alors qu’il avait retourné son sol avec la charrue, et qu’il avait affiné la structure en brisant les mottes avec des outils à disques ou à dents. Sur quoi se baser dès lors que plus rien n’a été fait sur ce sol, qu’il est recouvert de débris végétaux, qu’il ne ressemble en rien à ce qui était connu et maîtrisé, et enfreint au passage les codes esthétiques d’un travail bien fait ? De même pour les utilisateurs de fertilisants-activateurs, que faire lors de l’apparition d’une maladie sur un blé et que voisins et conseillers techniques incriminent précisément à la vue du problème le choix d’avoir abandonné les apports phosphoriques ? L’un deux évoque : « maintenant je dors tranquille, mais les 7-8 premières années, plus mettre d’acide phosphorique…. ». Les agriculteurs se retrouvent en perte de repères pour guider leur action, et surtout pour juger de celle des objets de nature auxquels ils ont confié la mission de mener à bien la production. Cette incertitude pratique, cognitive, est d’ailleurs le plus souvent renforcée par une pression sociale émanant de l’environnement professionnel, voire familial, un phénomène de déviance résultant de l’abandon du labour ou du phosphore. Ainsi, ces agriculteurs évoquent : « Je suis le mouton à 5 pattes.
Il importe donc de comprendre comment les opérateurs font face à cette incertitude, en mettant au jour les réagencements sociotechniques qu'ils opèrent avec leur environnement. Nous allons chercher à identifier les nouveaux types de repères qu'ils puisent dans leur environnement pour apprécier les situations, pour les mettre en équivalence, et de façon symétrique pour construire de nouveaux liens avec leur environnement socioprofessionnel ou le reste de la société.
L’idée de laisser agir la nature pose aux agriculteurs des problèmes pour analyser, et comprendre ce que ces entités font effectivement comme travail dans les parcelles cultivées. Les agriculteurs rencontrés insistent sur la nécessité d’observer dans les parcelles les indices offrant des informations sur l’état du milieu et les processus en cours. Le temps dégagé par l’abandon du labour est d’ailleurs souvent mis à profit pour ce travail d’observation, devenant un élément à part entière de l’organisation des tâches. Dans un environnement appauvri en repères (Dodier, 1993), l’opérateur se lance, seul ou accompagné, dans une collecte d’indices lui permettant de s’approprier localement la nouvelle configuration de son espace de travail. Ainsi un agriculteur évoque : « faut pas oublier que c’est un métier où il faut avant tout observer. Et à partir de là y’a rien de standard. On travaille avec du biologique ».
Les effets positifs du non-labour et des fertilisants-activateurs sur le sol sont en effet très souvent saisis par les sens, comme par exemple le toucher. Ainsi les agriculteurs entrant dans une parcelle et la foulant font souvent référence à la porosité des sols, à leur caractère spongieux comme en témoigne l'un d'eux évoquant sa première rencontre avec un sol en semis direct : « j'avais jamais vu un sol aussi souple ». De même l'odorat est sollicité, lorsqu'il est fait référence à l'odeur du sol chargé en humus, dont la matière organique s'est accumulée grâce à la dégradation des pailles par les micro-organismes du sol. Mais, plus que tout, ce sont les indices visuels qui sont mobilisés. Le fait de voir par soi-même, au-delà des théories, constitue une expérience essentielle. Il s'agit d'être attentif à la couleur du sol, notamment lorsqu'il a bruni et qu'il témoigne là aussi de l'humus accumulé ; un agriculteur évoque : « Quand t'as un sol qui est brun et plein de vers de terre, c'est un signe de bonne santé. [...] C'est quand même beau. ». Sur le sol sont également relevées différentes traces laissées par les vers de terre et témoignant de leur passage, comme les turricules ou autres galeries : « en se promenant dans les champs, on voit bien, y'a plein de trous ». Lors de l'observation d'une fosse pédologique, les lombrics sont également saisis sur le vif et leur présence est toujours un élément remarquable et remarqué. Pour saisir plus spécifiquement l'impact du fertilisant-activateur sur le sol, c'est notamment l'absence de mousse verte et d'odeurs de fermentations qui est appréciée, ces dernières témoignant d'une activité microbienne équilibrée. Les racines des plantes sont enfin objet d'attention, chaque visite de parcelle ou profil pédologique étant l'occasion d'arracher une plante pour mieux en voir le système racinaire, ou pour mieux le pister dans les horizons inférieurs du sol. Les faits y sont le plus souvent interprétés dans le sens permettant d'illustrer l'effet positif des pratiques sur l'enracinement et le développement de la plante. Ainsi un vendeur de fertilisant-activateur évoque en déterrant une plantule : « regarde un peu le système réticulaire, c'est extraordinaire.
Au-delà du corps et des sens, un équipement spécifique est mobilisé pour apprécier les transformations du sol, et ce dans des conditions spécifiques. Différents outils sont mobilisés afin de pouvoir concrètement aller voir ou éprouver ce qui se
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