Diversification Alimentaire et DME : Recettes et Conseils pour Bébé

La diversification alimentaire est définie comme l’introduction d’aliments autres que le lait maternel ou infantile chez un nourrisson. L’Organisation Mondiale de la Santé préconise l’allaitement maternel exclusif pendant 6 mois, puis la diversification alimentaire tout en poursuivant l’allaitement jusqu’à 24 mois et plus [3].

Introduction Progressive des Aliments

De manière classique, la diversification alimentaire se fait à la petite cuillère, en commençant avec des aliments réduits en purée lisse (céréales, légumes, fruits, puis viandes, œuf, poisson, etc…). Petit à petit, les textures des recettes proposées deviennent plus granuleuses et les aliments ne nécessitent plus forcément d’être mixés mais seulement écrasés (fourchette, presse-purée, etc.).

Les premiers morceaux doivent être proposés dans une petite assiette séparée de l’assiette d’aliments mixés donnés à la cuillère, afin que le bébé s’y habitue progressivement et les prenne avec ses doigts de manière autonome. À cet âge, l’enfant n’a pas encore ses molaires et il mâche avec ses gencives.

Il faut éviter de retarder cette proposition de morceaux au-delà de 10 mois sous peine de rendre l’alimentation plus difficile secondairement, de limiter le répertoire alimentaire, de voir l’enfant refuser de nouveaux aliments en particulier des légumes plusieurs années plus tard, sans oublier le risque de problèmes orthodontiques [6,7].

La proposition d’un biscuit et/ou d’une croute de pain dans la main du bébé peut se faire dès l’âge de 6 mois, sous la surveillance d’un adulte, mais le plus souvent vers 8 à 9 mois. L’enfant commence progressivement à manger seul avec ses mains certains aliments portionnés, mous, puis avec des couverts pour une autonomie acquise vers 24 mois.

La Diversification Menée par l'Enfant (DME)

Depuis les années 2000, une nouvelle mode est apparue, celle de la DME. Le bébé se nourrit de manière autonome, avec ses mains, sans l’introduction de purées : la cuillère n’est jamais utilisée, du moins dans la description initiale de la DME [9]. On met devant le nourrisson les mêmes aliments que ceux du repas familial, en portions de la taille d’un doigt (en anglais « finger food ») [10,11]. Il choisit ce qu’il veut manger et en quelles quantités.

Cette méthode a débuté dans des pays anglo-saxons sous le terme « Baby-Led Weaning » ou BLV (Royaume Uni, Nouvelle Zélande, USA) ou sevrage induit par le bébé (SIB) au Canada. Cependant, la large diffusion de la DME via les réseaux sociaux amène les pédiatres à recevoir des familles recherchant des informations pour appliquer cette méthode pour leur enfant. Ce phénomène de mode est important et certaines familles pourraient se sentir en décalage en ne l’appliquant pas.

La DME est apparue en Angleterre au début des années 2000 avec un essor important lors de la publication, en 2008, du livre de Gill Rapley, infirmière de formation, qui s’est intéressée à l’alimentation des nourrissons. Elle est considérée comme pionnière dans la DME [9]. Le développement de cette pratique en Angleterre a conduit le système de santé à faire des recommandations d’utilisation de la DME de façon généralisée.

Les bases de la DME sont donc décrites par G. Rapley dans son livre, dont le titre est explicite de l’état d’esprit : « BLW : helping your baby to love good food » (DME : aider votre bébé à aimer la bonne nourriture).

L’enfant est mis à table avec sa famille et les aliments proposés sont les mêmes que ceux du reste de la famille (à condition que ce soit une alimentation « saine » selon G. Rapley).

Actuellement, les publications ayant trait à la DME sont nombreuses. Elles permettent de revenir sur certaines des allégations de G. Rapley mais aussi de discuter de nos inquiétudes, en tant que pédiatres, confrontés à des familles souhaitant utiliser la DME.

Il faut remarquer que les publications les plus récentes étudient des bébés nourris avec une méthode qu’on appellera « DME modifiée », puisque les parents sont éduqués et accompagnés pour éviter différentes carences, en énergie et en fer en particulier, et être particulièrement vigilants pour éviter tout accident d’inhalation de morceaux d’aliments.

Erickson et al. ont réalisé une étude en Nouvelle Zélande en 2018, sur 2 groupes de nourrissons : 105 en diversification classique et 101 en DME modifiée. Il n’y avait pas de différence statistique sur les apports énergétiques à 7 mois, 12 mois et 24 mois [15].

Par contre, il est important de noter que les nourrissons en DME reçoivent plus de graisses saturées et de sel à 7 mois en comparaison avec les enfants en diversification traditionnelle. Or, les recommandations nutritionnelles restent unanimes quant aux excès de sel chez le nourrisson [16]. Qu’en est-il des apports en acides gras essentiels et en acides gras polyinsaturés à longues chaînes (principalement oméga 3), surtout si le bébé choisit de ne pas consommer de poisson [17] ?

Daniels et al. ont réalisé une étude en Nouvelle Zélande en 2018 comparant 2 groupes de nourrissons : 105 ayant une diversification traditionnelle et 101 ayant une DME modifiée. Ils n’ont pas observé de différence d’apports en fer.

Au total, il n’existe pas d’étude comparant une DME sans modification à un groupe d’enfants en diversification traditionnelle telle que recommandée par les sociétés savantes.

Fangupo et al. ont publié en 2016 une étude réalisée en Nouvelle Zélande, comparant 2 groupes : des nourrissons en DME modifiée (éducation parentale pour limiter le risque d’accident par inhalation) et des nourrissons en diversification traditionnelle. En conclusion, ce qui prévient les inhalations est probablement l’éducation parentale.

Brown et al ont réalisé une étude au Royaume Uni en 2017. Il s’agissait d’une enquête observationnelle sur 1151 enfants comparant ceux nourris en DME classique et ceux nourris de façon traditionnelle. Mais dans cette étude, on notait l’absence de définition claire de la DME (beaucoup d’enfants déclarés en DME recevaient jusqu’à 10 % en purée). On ne peut donc pas conclure à la sécurité réelle de la DME.

Taylor et al. ont publié en 2018 la seule étude randomisée, comparant un groupe d’enfants en DME modifiée et un groupe témoin en diversification traditionnelle. Ils n’ont pas observé de différence statistique entre les 2 groupes concernant les apports alimentaires et l’Indice de Masse Corporelle (IMC).

Lors d’une diversification traditionnelle il a été montré qu’on observe moins de sélectivité et un régime alimentaire plus diversifié lorsque les parents varient les sortes d’aliments proposées chaque jour selon les recommandations, et qu’ils renouvèlent la présentation d’un aliment refusé jusqu’à 8 fois par leur bébé [27,28].

De plus, pour les études, ce centre utilise une version modifiée de la DME où les familles reçoivent une éducation spécifique à la DME par des professionnels de santé [29].

La diversification alimentaire classique inclut une phase d’introduction progressive des morceaux chez les nourrissons entre 8/9 et 12 mois. Pris par l’enfant lui-même avec ses doigts au début, ces derniers doivent être séparés de l’alimentation mixée.

Une diversification classique mais actualisée, telle que proposée dans nos menus-types, respecte les recommandations scientifiques actuelles tant nutritionnelles que comportementales, et permet de développer l’apprentissage du goût et des saveurs. Elle semble bien préférable à la DME, pour les raisons citées dans cet article.

Car, finalement, la DME est une conceptualisation un peu excessive d’un comportement naturel de parentalité : tout parent suffisamment observateur de son enfant, suffisamment confiant, suffisamment soucieux de l’éducation nutritionnelle qu’il souhaite transmettre, saura instinctivement donner, dès que son enfant sait prendre et porter à sa bouche, de petits bouts de légumes fondants, un quignon de pain, de petits bouts de fromage, etc.

La Diversification Menée par l’Enfant et Mode de Garde

Il n’est pas nécessaire et obligatoire de faire la DME tout le temps. SI votre enfant est gardé à l’extérieur et que la DME n’est pas possible par exemple, on peut alterner purée chez l’assistant(e) maternel(le) et DME à la maison le soir et les week-ends. On peut aussi démarrer avec les purées (c’est parfois le cas pour les bébés prématurés ou ayant un tonus postural faible ou encore un reflex nauséeux très prononcé) et poursuivre en DME à tout moment. Votre bébé a de grandes capacités notamment au niveau sensoriel et vous pouvez lui faire confiance pour faire la différence entre une purée et des morceaux.

Recettes Adaptées à la DME

La diversification via la DME demande une autre vigilance sur la texture et la forme des aliments proposés.

  • Attention aux aliments crus : les crudités même râpées sont difficiles à gérer pour un bébé : il faut attendre plusieurs mois pour que l’enfant gère bien la mastication pour aller sur des éléments crus. Par exemple : carottes, pommes, celeri…
  • Attention aux aliments petits et ronds : olives, raisin, raisins secs, tomate cerise, mais, petit pois, petites pates types coquillettes, cacahuètes, fruits rouges, rondelle de saucisse, bonbons bien sur…à on les coupe en 4 ou on attend quelques mois voire quelques années avant de les proposer.
  • Attention aux aliments friables : les aliments dont un morceau peut se détacher et poser un risque d’étouffement à l’enfant.
  • Attention aux aliments avec une texture collante : certains aliments comme les purées d’oléagineux par exemple peuvent coller au palais, la salade verte, le pain de mie ou la mie du pain : pour cela on les mélange et les incorpore dans une recette.
  • Attention aux fruits et légumes avec la peau : la peau peut se détacher et se coller au palais ou dans la gorge.
  • Attention aux fromages en bâton : la texture ne convient pas car des morceaux peuvent se détacher.

On démarre donc toujours la DME avec des aliments facilement écrasables entre la langue et le palais (vous pouvez faire ce test vous-même avant de proposer à votre enfant pour vérifier la texture). Les textures crousti-fondante (texture qui croustille mais qui fond sans avoir besoin de macher) comme le pain des fleurs sont aussi ok dès le début.

Taille des Morceaux en Fonction de l'Âge

La taille des morceaux va évoluer au fil des semaines, de l’arrivée des dents et de la dextérité motrice de votre enfant.

  • Entre 6 et 8 mois, le bébé attrape les aliments avec l’ensemble de la main : on prévoit donc des morceaux assez gros de légumes, de fruits ou préparation (diamètre d’une banane environ) pour qu’il puisse bien l’attraper et que l’aliment dépasse de son poing fermé.
  • Vers 8 ou 9 mois, l’enfant commence à utiliser son pouce pour attraper les objets et les aliments. On peut alors passer à des éléments plus petits. Il va moins écraser les aliments. On reste toutefois sur des textures molles. La taille va progressivement passer d’une balle de ping pong à un dé en fonction de ses capacités.
  • Vers 9-10 mois : il va pouvoir utiliser son pouce de façon plus fine, croiser les mains et donc croiser la langue. Cela va lui permettre de manger des aliments plus petits.

Recettes DME Faciles

Voici quelques idées de recettes adaptées à la DME :

  • Légumes vapeur : Couper des légumes en bâtonnets ou en cubes et cuire à la vapeur sans trop cuire.
  • Légumes rôtis au four : Assaisonner les légumes avec des épices et rôtir au four.
  • Galette de légumes :
    1. Choisir 150g de légumes coupés en morceaux que l’on précuit à la vapeur 5-6 min
    2. Passer les légumes au mixeur : on doit obtenir une texture proche du boulghour pas une purée
    3. Ajouter ½ yaourt nature, 1 cuillère à soupe de farine, un peu de fromage râpé et des épices comme du curry par exemple.
    4. On forme les galettes que l’on trempe dans de la chapelure.
    5. On a plus qu’à faire revenir les galettes pendant quelques minutes dans une poêle bien chaude.
  • Boulettes de viande : Mélanger de la viande hachée avec des légumes et des épices, puis former des boulettes et cuire à la poêle.
  • Tartinades : Préparer des tartinades de légumes ou de légumineuses pour que bébé puisse tremper des aliments dedans.
  • Pancake de légumes : Mélanger de la purée de légumes avec un œuf, de la farine et du lait, puis cuire comme des pancakes.
  • Flan de maïs : Mélanger du maïs, des champignons, un œuf et de la ricotta, puis cuire au four.
  • Omelette : Couper en lanières.
  • Soupe de lentilles : Faire cuire des lentilles corail avec des légumes et des épices, puis mixer pour obtenir une soupe lisse.
  • Muffin fondant : Mélanger des ingrédients comme de la farine, des légumes et du poisson, puis cuire dans des moules à muffins.

Conseils pour une DME Réussie

  • Toujours surveiller bébé pendant les repas.
  • Proposer des aliments adaptés à son âge et à ses capacités.
  • Ne jamais forcer bébé à manger.
  • Varier les aliments pour une alimentation équilibrée.
  • Être attentif aux réactions de bébé et aux éventuelles allergies.

La DME permet à l’enfant de rapidement gagner en autonomie dans la découverte alimentaire, ce qui est bénéfique pour son éveil, et aux parents de rapidement partager les mêmes repas que leur enfant. Hormis les quelques règles de sécurité quant à la texture et la forme et taille de certains aliments, il n’y a pas de raison de mettre nombre d’interdit et de se priver parce que le mode de garde ne le pratique pas par exemple.

Aliments à Éviter Avant 5 Ans

Il est crucial de connaître les aliments à éviter pour assurer la sécurité de votre enfant, que ce soit en diversification classique ou DME :

  • Le miel (interdit avant 12 mois pour cause de risque de botulisme)
  • Toutes les viandes crues ou peu cuites (les viandes doivent être cuites à cœur)
  • Tous les poissons, mollusques et coquillages crus (comme pour la viande, ils doivent être cuits à cœur)
  • Les œufs doivent également être cuits entièrement (pas de jaune coulant)
  • Le lait cru et fromages au lait cru
  • Les germes et pousses crues

D’une manière générale tous les aliments issus de produits animaux doivent être suffisamment cuits pour éviter tout risque de contamination bactérienne : les bactéries seront détruites à la cuisson. On recommande même d’attendre l’âge de 10 ans pour proposer des viandes moins cuites.

Diversification Alimentaire : quand et comment introduire la viande

Le démarrage de la diversification se fait en accord avec le médecin de votre bébé. C’est lui qui vous indiquera quand introduire la viande. Après avoir commencé à habituer son organisme par l’introduction des céréales, légumes et fruits, et s’il est prêt, votre bébé pourra alors découvrir la viande durant son 5eme mois.

On privilégie les viandes blanches et maigres plus faciles à digérer : la dinde, le poulet, le veau en escalope ou filet, ainsi que le jambon blanc de dinde ou de porc, avec le moins de sel possible. On termine par la viande rouge. La charcuterie est déconseillée. Comme pour le reste, on propose une viande à la fois pour permettre à son bébé de développer ses goûts et distinguer les différentes saveurs, sans la mélanger à la purée.

S’assurer de bien dénerver la viande avant de la mixer, et vérifier qu’il n’y ait pas de petit cartilage dedans. La cuisson vapeur est recommandée. Comme pour les adultes, la digestion de la viande sollicite davantage l’organisme : on évite de la proposer le soir pour ne pas perturber le sommeil de son enfant.

Quantités de viande à donner

La viande apporte du zinc, du fer et des vitamines, déjà présents dans le lait, il n’est donc pas nécessaire d’en donner en grande quantité !

  • à partir de 2 ans : 30g de viande le midi, soit 6 cuillères à café

Tableau récapitulatif des textures et tailles des aliments

Âge Texture Taille des morceaux
6-8 mois Ferme et fondante Diamètre d'une banane
8-9 mois Molles D'une balle de ping pong à un dé
9-10 mois Plus petits Adaptée à la pince (pouce et index)

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