Pain au Chocolat ou Chocolatine : Un Débat Français

Pain au chocolat ou chocolatine ? Deux noms pour une seule viennoiserie et des débats à n'en plus finir ! Pas de débat sur l’appellation "viennoiserie", qui vient de la ville de Vienne.

Origines de la Viennoiserie

Dès le XVIIème siècle, peut-être avant, les ouvriers autrichiens maîtrisent la fabrication de produits réalisés à partir de pain, comme le kipferl, l’ancêtre du croissant. À son arrivée en France en 1770, il n’est pas impossible que Marie-Antoinette d’Autriche ait rapporté quelques viennoiseries dans ses bagages.

Ce sont ensuite deux Autrichiens, August Zang et Ernest Schwarzer, qui ouvrent en 1837 leur "Boulangerie viennoise" au 92 rue de Richelieu dans le IIème arrondissement de Paris. Ils importent chez nous leur savoir-faire et commercialisent les premiers croissants… ainsi que leur version chocolatée, le Schokoladencroissant, ou Schokoladen, pour faire plus court.

L'Émergence du Terme "Chocolatine"

Avec l’accent autrichien, le "d" se prononce "t". Résultat : les Parisiens se mettent à utiliser le mot qu’ils entendent, soit "chocolatine". Au début du XXème siècle, les boulangers français se réapproprient le Schokoladencroissant et remplacent la pâte à pain par de la pâte feuilletée.

Il faut un nouveau nom, pourquoi pas avec le mot "pain" pour faire le lien avec leur métier. Ils pensent tout simplement à "pain au chocolat", l’expression rappelant le traditionnel goûter des enfants. La confusion est née.

La Division Linguistique : Nord contre Sud

Le nouveau nom est adopté par les Français, mais pas tous ! Dans une grande partie du sud du pays, en Aquitaine et en Occitanie, des irréductibles ont préféré garder l’appellation d’origine. De quoi renforcer le clivage nord/sud.

Depuis, le débat sur le nom de cette viennoiserie alimente partout les conversations : "et toi, tu dis quoi ?" Ce dernier a pris une telle ampleur qu’en mai 2018, des élus LR ont lancé un amendement "chocolatine", dans le but de consacrer ce nom face à son éternel concurrent dans les régions qui l’utilisent.

"La valorisation des produits de qualité et de tradition, qui forment une richesse agricole, artisanale et commerciale dans nos territoires et notre pays passe souvent par une appellation populaire qui contribue fortement à sa notoriété. (…) Une telle évolution, légère, de la Loi, permettra de redonner ses lettres de noblesse à de nombreux produits locaux.

L’Assemblée Nationale a rejeté cet amendement. Le ministre de l’Agriculture, Stéphane Travert, a précisé qu’il n’était pas au niveau du Parlement. Il y a des sujets plus importants. Qu’on dise "chocolatine" ou "pain au chocolat", l’essentiel c’est qu’on se comprend et qu’on continue de faire vivre nos boulangeries.

Variations Régionales et Internationales

En Espagne, le "pain au chocolat/chocolatine" porte le nom de "napolitana" (napolitaine) - sans que les linguistes sachent bien pourquoi, d'ailleurs - et parfois celui de "caña", probablement en référence au "bâton" ou "barre" de chocolat inséré en son coeur, avant cuisson.

En Belgique, on emploie plus volontiers le mot « Couque au chocolat », mais « pain au chocolat » est aussi connu, alors que « chocolatine » est très marginal.

Dans les pays germanophones, on emploie plus volontiers le terme « Schokoladencroissant ». Dans les pays anglophones, notamment les USA, l’Australie, la Nouvelle-Zélande, on dit « chocolate croissant », notamment dans les grandes enseignes comme Starbucks.

Au Mexique et en Amérique Latine, quand on en trouve, on parle de chocolatine. Sinon, un peu partout on trouve le terme « pain au chocolat » directement en français sans le traduire.

Analyse Linguistique et Historique

Selon Nicolas Berger, auteur d’une encyclopédie du chocolat, le mot pain au chocolat désignait à l’origine un morceau de pain dans lequel on fourrait un bout de chocolat pour le goûter des écoliers. Lorsque les viennoiseries ont été reprises et réinterprétées par les pâtissiers français au début du XXème siècle, en utilisant notamment de la pâte levée feuilletée, certains auraient repris ce terme.

Dans la pâtisserie française traditionnelle, et ce depuis Antonin Carême et son Traité élémentaire et pratique de la pâtisserie moderne et ancienne, on appelle « petit pain » ou « pain » toutes les pâtes fourrées. Or le pain au chocolat utilise une pâte levée feuilletée, plus proche de celle qu’on retrouve dans les croissants, les vol-au-vent ou les galettes des rois.

Table: Popularité des termes en France

Terme Pourcentage d'utilisation (France)
Pain au chocolat 84%
Chocolatine Moins de 20% (principalement Sud-Ouest)

Conclusion

On devrait dire chocolatine, mais on ne va pas faire changer 40 millions de personnes comme ça, pas vrai ? Surtout qu’il reste la question du pain au raisin, qui lui non plus ne devrait pas s’appeler comme ça.

Tout ce débat reste théorique au fond, alors il faut le prendre à la rigolade ! Surtout qu’on ne saura probablement jamais la vérité sur l’origine de ces deux noms, à moins qu’un grand historien décide de se pencher à fond sur la question ! Alors, rigolez et mangez !

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