Manger Trop de Viande et Risque de Cancer : Ce Qu'il Faut Savoir

De nombreux rapports d’expertise scientifique internationaux et français ont établi un lien entre la consommation de viandes rouges ou de viandes transformées (incluant la charcuterie) et le risque de développer un cancer. En France, une expertise collective coordonnée par l’Institut National du Cancer (INCa) en 2015 confirmait le résultat de ces évaluations, en concluant à une augmentation du risque de cancer du côlon-rectum associée à la consommation de viandes rouges ou de charcuteries.

Définitions

Les viandes rouges correspondent généralement à l’ensemble des viandes de boucherie : viandes de bœuf, de porc, de veau, d’agneau, de cheval et autres types de viandes (mouton, chèvre…).

Les charcuteries correspondent aux viandes conservées par fumaison, séchage, salage (saucisses, lardons, bacon, y compris le jambon).

Niveau de Preuve Scientifique

Dès 1997, le World Cancer Research Fund (WCRF) et l’American Institute for Cancer Research (AICR) ont évalué les niveaux de preuve des associations entre consommation de viandes rouges et viandes transformées et risque de cancer. En 2015, un groupe d’experts du CIRC a classé :

  • La consommation de viandes transformées comme cancérogène pour l’homme (Groupe 1)
  • La consommation de viandes rouges comme probablement cancérogène pour l’homme (Groupe 2A).

Le 29 mars 2018, le CIRC a publié une monographie portant sur « viandes rouges et viandes transformées ». Dans le cas du cancer colorectal (sur lequel portent la majorité des études), la consommation de viandes rouges ou de viandes transformées est associée à une augmentation du risque de ce cancer. Ces résultats sont concordants avec ceux des autres rapports d’expertise collective internationale publiés par le World Cancer Research Fund et l’American Institute for Cancer Research, qui ont réalisé une revue exhaustive de la littérature scientifique.

Leur dernier rapport publié en 2018 juge que l’augmentation du risque de cancer colorectal associée à la consommation de viandes transformées est « convaincante ».

Focus sur les mécanismes

Plusieurs mécanismes peuvent expliquer l’augmentation du risque de cancer associée à une consommation excessive de viandes rouges et charcuteries.

Parmi les principaux, on peut citer en premier lieu l’excès de fer héminique (fer contenu dans l’hème, structure chimique trouvée notamment dans l’hémoglobine, et très présent dans les viandes rouges). Celui-ci génère un stress oxydant qui oxyde les graisses (lipides), formant des composés cancérogènes.

Ensuite, les composés N-nitrosés liés à l’emploi de sels nitrités pour conserver les viandes transformées entraîne la formation de composés génotoxiques (c’est-à-dire toxiques pour l’ADN). De même, les sels nitrités présents dans certaines charcuteries entraînent, au cours de la digestion, la formation de composés N-nitrosés qui sont génotoxiques. En 2010, un groupe d’experts du CIRC a classé comme probablement cancérogène pour l’homme (Groupe 2A) les nitrates (issus de l’activité agricole) et les nitrites (agent de conservation en salaison) ingérés.

Par ailleurs, le chauffage excessif au cours de la cuisson peut lui aussi mener à l’oxydation des lipides et à la formation de composés génotoxiques. Ainsi, en 1993, un groupe d’experts du CIRC a conclu qu’un composé néoformé au cours de la cuisson (2-amino-3-methylimidazo[4,5-f]-quinoline) est probablement cancérogène pour l’homme (groupe 2A).

De plus, en 2018, le dernier rapport d’expertise du WCRF et de l’AICR conclut à un niveau de preuve suggéré pour l’augmentation du risque de cancer de l’estomac par le mode de cuisson au grill et au barbecue de la viande et du poisson.

Par ailleurs, des chercheurs ont fait mariner de la viande dans un mélange aqueux d’extrait d’olive et de raisin (riche en antioxydants), puis l’ont fait consommer à un groupe de rats et de souris de laboratoire, tandis qu’un second groupe recevait de la viande non marinée. Résultat : dans le premier groupe, l’augmentation de la cancérogenèse colorectale et l’oxydation des lipides dans les contenus fécaux était moins augmentée que dans le second. Ces pistes intéressantes devront bien sûr être confirmées.

Consommation de viandes rouges et charcuteries en France

En France, par rapport aux repères établis par Santé publique France, 32 % des 18-54 ans mangent trop de viandes rouges (plus de 500 g/semaine) et 63 % mangent trop de charcuteries (plus de 150 g/semaine). En 2014, la moyenne de consommation de viandes rouges chez les adultes de 18 à 79 ans vivant en France est de 47 g/jour soit 329 g par semaine. Elle est plus importante chez les hommes (428 g/semaine) que chez les femmes (239 g/semaine). La consommation moyenne de charcuteries est de 27 g/jour soit 189 g par semaine, 239 g chez les hommes et 146 g chez les femmes.

Des différences socioéconomiques et régionales existent. La consommation de viandes rouges est plus importante chez les personnes ayant un faible niveau d’étude.

Recommandations et Alternatives

En 2019, Santé publique France a publié les nouvelles recommandations nutritionnelles destinées à la population adulte française [9]. Elles ont pour objectif d’aider les adultes à faire de meilleurs choix alimentaires et à adopter un mode de vie plus actif. Ces recommandations sont concordantes avec celles de l’INCa.

On y apprend notamment qu’il est recommandé de limiter la consommation de charcuteries à 150 g par semaine et celle de viandes rouges à 500 g par semaine. Cette limitation doit s’inscrire dans le cadre d’une alimentation équilibrée et diversifiée, c’est-à-dire riche en fruits et légumes, donc en antioxydants.

Pour s’informer et se faire accompagner, il est recommandé de réduire autant que possible la taille des portions et la fréquence de consommation, de privilégier la volaille et en alternant dans la semaine avec du poisson, des œufs et des légumes secs.

Ainsi, pour diminuer les risques de surconsommation et obéir à tous nos besoins, il est recommandé de varier et de diversifier les sources de protéines en alternant, viande, volaille, œufs, poisson, coquillages et crustacés.

Il est possible de remplacer la viande par d’autres sources de protéines tels que les œufs ou le poisson. Il est toutefois nécessaire de prendre quelques précautions car les apports en fer et vitamine B12 ne seront pas couverts. De plus, il faut consommer plus de poissons, œufs ou légumineuses pour espérer assimiler la même quantité de protéines.

Il est bien sûr possible de trouver des protéines dans d’autres aliments :

  • Les légumes secs ou légumineuses : associées aux céréales, les légumineuses sont une source de protéines aussi intéressante que la viande. Par exemple, une demi-tasse de haricots secs et quatre tasses de riz complet ont une teneur en protéines équivalente à… 500 g de steak !
  • Les poissons : ils contiennent autant de protéines que la viande et renferment de "bonnes graisses", en particulier les oméga-3 ;
  • Les œufs : remarquable source de protéines, on leur reproche leur teneur en cholestérol. Chez les personnes en bonne santé, le cholestérol alimentaire n’est que très peu corrélé au taux de cholestérol sanguin. La consommation de quelques œufs par semaine ne peut donc pas engendrer d’excès de cholestérol sanguin ;
  • Les produits laitiers : le parmesan renferme 40 g de protéines pour 100 g, l’emmental 30 g/100 g.

Outils et Ressources

Plus généralement, plusieurs outils déployés par Santé publique France sont disponibles pour faciliter la mise en pratique des recommandations nutritionnelles :

  • Le site mangerbouger.fr, avec notamment « La fabrique à menus », propose des idées de menus de saison variés pour manger équilibré toute la semaine en accord avec les repères nutritionnels.
  • Le Nutri-Score, logo à 5 couleurs apposé sur la face avant des emballages, informe les consommateurs sur la qualité nutritionnelle des produits. De « A » pour les produits les plus favorables sur le plan nutritionnel à « E » pour les produits les moins favorables.

Tableau Récapitulatif des Recommandations

Type de Viande Recommandation
Viande rouge Limiter à 500g par semaine
Charcuterie Limiter à 150g par semaine

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