Le Régime Alimentaire du Lion: Un Prédateur au Cœur de la Savane

« Roi des animaux », « seigneur des steppes », « souverain de la vie et de la mort », autant d'épithètes que le lion doit certainement à sa crinière flamboyante, à son port de tête altier et à ses rugissements terrifiants. Cet article explore en détail le régime alimentaire du lion, ses habitudes de chasse et son rôle crucial dans l'écosystème de la savane.

La Vie Sociale et la Chasse

Les lions se distinguent des autres félins par leur pratique de la chasse en groupe et leur structure sociale en harde ou troupe. Les lions sont les seuls félins à vivre en groupe social. Contrairement à d'autres sociétés animales très hiérarchisées, les lions et les lionnes d'une même troupe jouissent de droits égaux et fondent leur survie sur des liens étroits. Ils passent la majorité de leur existence en parfaite harmonie avec leurs compagnons. Une troupe se maintient plusieurs années.

La taille d'une troupe est très variable, pouvant aller de 2 à 40 individus. Des recherches menées dans les parcs de Serengeti (Tanzanie) et de Kruger (Afrique du Sud) montrent qu'une troupe moyenne comprend 13 animaux ; elle est composée de 4 à 5 femelles adultes, 3 à 4 pré-adultes, 2 à 3 jeunes et de 1 à 2 mâles adultes. La vie en bande sur un territoire dont la faune et la topographie sont bien connues offre un environnement stable et protecteur qui limite le taux de mortalité et augmente les chances de survie des jeunes.

Les lionnes restent généralement toute leur vie dans le même groupe, de mère en fille. Elles chassent et élèvent ensemble leurs petits. Si les jeunes mâles (et, quelquefois, de jeunes femelles) n'ont pas quitté spontanément la tribu à l'âge de 3 ans et demi au plus tard, ils sont chassés. Ils partent seuls ou, le plus souvent, par deux ou trois individus du même âge, et deviennent nomades. Cette émigration contribue à maintenir l'équilibre entre les effectifs du groupe et la quantité de proies disponibles. Les jeunes lions errants rôdent aux alentours des autres troupes, guettant les signes de faiblesse ou de vieillesse des mâles dont ils prendront la place.

Contrairement à leur image d'indolents parasites abandonnant les tâches aux femelles, les mâles assurent la surveillance et la défense du territoire. La taille des territoires varie avec le paysage, l'abondance des proies et l'importance de la troupe. Lors de l'intrusion d'un étranger au groupe, les lions évitent généralement le combat. Grâce à quelques attitudes d'intimidation, ils jugent rapidement la force de l'adversaire, qui battra en retraite s'il se sent en position d'infériorité. Un combat entre adversaires de même force se solde souvent par la mort du vainqueur et du vaincu.

L'observation d'une troupe de lions sur 7 ans met en évidence le système de régulation du groupe pour maintenir un nombre relativement stable de femelles et de jeunes constituant la troupe. À la fin de la 1re année, le groupe originel de mâles est chassé par un nouveau groupe, lequel est à son tour chassé environ 3 ans plus tard. On constate, à cette deuxième rotation (4e année), le départ de 5 jeunes adultes (3 femelles et 2 mâles) et la mort de 8 petits nés dans l'année (sans doute tués par les nouveaux mâles ayant pris possession de la troupe). Puis, l'année suivante, une très forte natalité rétablit la moyenne normale de population totale de femelles et de jeunes.

Les Techniques de Chasse du Lion

Dans la savane, milieu ouvert, les lions sont facilement repérables par leurs proies. De plus, un animal vigoureux peut venir à bout d'un chasseur solitaire. Un jeune buffle du Cap a été observé lutter avec une lionne pendant 90 minutes… et ne perdre que la queue. Les lionnes assurent de 80 à 90 % de la chasse. Les mâles, plus lourds et plus repérables par leur corpulence et leur crinière, sont moins efficaces et y participent peu. Ils se servent de leur force pour s'approprier les proies abattues par les femelles.

Le lion (ou, plus fréquemment, la lionne) chasse en général à l'aube ou au crépuscule, ou encore à la faveur de la nuit. À l'affût, tapi derrière les hautes herbes, il attend qu'un animal ait baissé la tête pour brouter, manifeste des signes d'inattention ou se trouve en position isolée. Il risque alors une approche discrète jusqu'à 30 mètres environ, puis il charge et projette violemment sa proie à terre. Pesant de tout son poids sur elle, il la saisit à la gorge. Les lionnes maintiennent souvent leur proie par le museau jusqu'à ce que celle-ci étouffe.

Le pourcentage de tentatives réussies varie également selon l'espèce pourchassée : environ 14 % s'il s'agit d'alertes damalisques, 38 % pour les zèbres et les gnous, proies préférées des lions, et 47 % pour les balourds phacochères. La chasse nocturne se solde par 33 % de succès, contre 21 % pour la chasse diurne, et les attaques dans les buissons (41 %) ont 3,5 fois plus de chances de réussir que les attaques en terrain découvert (12 %). Les lions ont deux fois plus de chances de capturer leurs proies quand ils chassent à plusieurs (2 animaux ou plus) que lorsqu'ils chassent en solitaire.

Cela est vrai que les proies soient légères, telles les gazelles de Thomson, ou grosses comme les gnous ou les zèbres, auxquels un lion s'attaque moins souvent seul (un tiers des gnous et zèbres chassés) que lorsqu'il est en groupe. Globalement, les chances de réussite restent assez faibles : en moyenne, un quart des attaques seulement aboutissent. Pour assurer leur ration quotidienne (5 kg pour une femelle, 7 kg pour un mâle), lions et lionnes se montrent opportunistes en matière de régime alimentaire. En période de sécheresse, ils mangent même des animaux morts de maladie ou des restes d'autres prédateurs.

Partage de la Nourriture et Comportement Alimentaire

Les proies abattues sont généralement partagées par tous les membres de la troupe. Le système de répartition de la nourriture obéit à la loi du plus fort, ce qui explique que les mâles soient très souvent les premiers à se rassasier. Bien que brèves, les querelles autour d'une carcasse sont fréquentes et dépendent de la taille des prises et de la faim de chacun. Quand la savane regorge de proies, les bagarres sont de faible intensité et tous, même les lionceaux, mangent à leur faim, parfois en même temps. En saison sèche, où les ressources alimentaires sont bien inférieures, le groupe se dispute âprement la moindre petite carcasse.

En moyenne, une femelle a besoin de 5 kg de viande par jour et un mâle de 7 kg. Mais, dans la nature, les prises sont irrégulières et les lions restent parfois 2 ou 3 jours sans rien consommer. Toutefois, lorsque là chasse a été bonne, ils sont capables d'ingurgiter jusqu'à 20, voire 30 kg de viande en une seule fois. Après s'être alimentés, et parfois au cours d'un festin particulièrement copieux, les lions s'abreuvent toujours. Ils vont alors boire un à un, laissant la proie au soin des autres membres de la troupe.

Reproduction

Les femelles sont réceptives plusieurs fois par an, en dehors des périodes de gestation et d'allaitement. Le premier mâle à rencontrer une femelle en chaleur reste à proximité d'elle et, par sa seule présence, maintient les autres mâles à distance. Les observateurs décrivent très peu de rivalité entre les mâles pour une femelle en chaleur. En guise de préliminaires, mâle et femelle frottent leur tête l'une contre l'autre et se reniflent sous l'aine. Dès que la femelle se montre conquise, le couple s'écarte du groupe ; un accouplement d'une vingtaine de secondes a lieu, pendant lequel le lion feule sourdement, mordille et lèche le cou de la femelle, qui ronronne.

Au moment de l'accouplement, le lion maintient fermement le cou de la lionne entre ses dents, puis il se retire brusquement lorsque la femelle menace en grognant de lui décocher un coup de patte ou de le mordre. L'accouplement se répète jusqu'à 50 fois en 24 heures, de jour comme de nuit. Les lionnes changent parfois de partenaire au cours des chaleurs, qui durent de 2 à 8 jours. Malgré la fréquence des accouplements, les chances de procréation restent faibles, car il n'y a naissance que toutes les cinq périodes de chaleur.

La Vie des Lionceaux

Après une courte gestation de 102 à 110 jours, la lionne met bas de 2 à 4 petits, à l'écart de la troupe, dans un abri rocheux, un fourré épais ou au milieu de hautes herbes. Les lionceaux naissent les yeux fermés et pèsent moins de 2 kg, ce qui représente 1 % à peine du poids adulte. Leurs yeux s'ouvrent au bout de 10 à 15 jours et les dents de lait poussent au bout de 3 semaines. À l'âge de 6 semaines, ils gambadent autour de l'abri et goûtent leurs premiers aliments solides en grappillant sur la nourriture de leur mère. Durant ces premières semaines, la mère est constamment sur le qui-vive et se montre très protectrice à l'égard de sa portée.

La lionne allaite souvent d'autres petits que les siens. On a vu des lionceaux de quatre mères différentes téter ensemble la même lionne. L'allaitement dure environ 6 mois. La dentition définitive apparaît entre le 9e et le 12e mois. Quand leur mère part en chasse, une autre mère (sœur, cousine ou fille) ou même un mâle reste avec les lionceaux, mais sans leur accorder de soin particulier. Dès l'âge de 14 semaines, les jeunes lionceaux suivent les femelles dans leurs chasses. Tout en restant à distance, en compagnie éventuelle des mâles ou des femelles âgées ou faibles, ils apprennent les techniques de chasse en observant les lionnes.

Chez les lions, la mortalité infantile est élevée. Elle est due à plusieurs facteurs. Un quart des décès de petits pourrait être attribué à la sous-alimentation. En effet, les petits doivent faire preuve de beaucoup de ruse et d'habileté pour subtiliser quelques petits morceaux de viande. La mortalité juvénile est également liée aux accidents, à la prédation par les hyènes et les guépards, ainsi qu'aux infanticides pratiqués par les lions mâles adultes (autres que le père), en particulier lorsque, ayant éliminé des mâles plus âgés, ils prennent la tête d'une troupe pour « laisser la place » à leur propre descendance. À l'arrivée de nouveaux mâles, le taux de mortalité des lionceaux augmente et reste élevé, tandis que le taux de natalité chute et reste faible. Les lionnes sans petits acceptent aisément les nouveaux venus, mais pas les mères.

Habitat et Conservation

Le lion fut l'un des mammifères les plus répandus, mais il est aussi l'un des carnassiers dont les effectifs ont régressé le plus vite à cause de la civilisation. L'extension des zones agricoles et du réseau routier, l'extermination de ses proies, sa mise à mort par crainte ou pour le plaisir de la chasse l'ont peu à peu effacé de nombreuses régions. Les lions des parcs nationaux et des réserves de l'Ouganda, du Kenya, de Tanzanie et du parc Kruger, dans le Transvaal, sont les seuls à jouir d'une relative sécurité. Autrefois, l'aire de répartition du lion s'étendait des montagnes à la savane, de la brousse aux zones côtières les plus chaudes jusque dans les régions semi-désertiques.

Les lions peuplent de préférence les zones ouvertes de l'est de l'Afrique, c'est-à-dire les savanes et prairies herbacées, broussailleuses ou arborées. Quelques arbres parasols, des acacias et des baobabs lui assurent les zones d'ombre nécessaires. La savane, milieu très riche en espèces végétales, offre un grand choix alimentaire à tous les ongulés herbivores, qui ne migrent qu'à la saison sèche. Le développement des prairies est assuré par l'alternance de sécheresse et de pluies annuelles violentes.

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