Aujourd'hui, nous partons dans le Gers, à la rencontre de Noémie, une éleveuse passionnée de porcs noirs. Après des études à SciencePo Paris et une carrière en sciences politiques à Londres, Noémie a décidé de s'engager dans une reconversion professionnelle suite à des soucis de santé liés à la pollution urbaine. C’est une vraie prise de conscience quant à l’impact de la nourriture et de la production alimentaire sur l’environnement et sur la santé publique.
Une Approche Globale et Engagée
Noémie s’oriente donc vers un métier qui correspond profondément à ses valeurs. Sa mission sera désormais de produire une nourriture saine et joyeuse, sans intrants de synthèse, avec un fort engagement territorial. Noémie a à cœur d’offrir les meilleures conditions de vie à ses porcs.
- Élevage de porcs noirs en plein air certifié bio.
- Tout est fait maison : les naissances, l’élevage, la découpe et la charcuterie.
- Vente directe sur les marchés.
L'importance des Races Rustiques
La France compte plusieurs races rustiques de porcs, chacune porteuse de l’histoire de son terroir. Noémie explique son choix d’élever le porc noir. Le porc noir élevé par Noémie, originaire de Gascogne, a une croissance particulièrement lente, en moyenne deux fois plus longtemps que les porcs roses classiques. Cette espèce est certes moins rentable que le porc rose des élevages industriels (comme la race Large White, Landrace) mais elle a la chair plus savoureuse et grasse.
En effet, le porc noir produit deux fois moins de porcelets par portée, grandit deux fois plus lentement : ses coûts de production sont donc au minimum 10 fois plus élevés que ceux du porc rose classique. Ce choix, Noémie l’a fait pour défendre la “génétique des races rustiques qui concourt à l’indépendance alimentaire de nos territoires”.
“J’élève cet animal pour rendre au terroir ce qui lui appartient […] et préserver la diversité des saveurs face à la tristesse de la standardisation du goût”. Ce qui nous interpelle, c’est qu’aujourd’hui des cochons de race rustique, vivant au grand air, sans manger de pesticides, il en existe en France 1 pour mille.
Un Élevage Respectueux de l'Environnement
Démarche Agroforestière
Démarche agroforestière avec plantation en janvier 2021 de 1300 arbres en haies champêtres sur la colline où pâtureront les porcs à partir de l’été après clôturage aux normes de la parcelle. Ainsi, elle leur a construit des cabanes en bois, des petits parcs, et a planté plus de 1300 arbres afin de leur permettre de pâturer sur toute la colline.
- Plantation de haies champêtres pour transformer une colline nue en bocage.
- Les porcs peuvent pâturer de manière extensive.
Transformation Artisanale et Vente Directe
Et parce que tout est fait maison, chaque mois, elle endosse son tablier de bouchère pour faire elle-même sa découpe et ses salaisons. La recette est traditionnelle, avec l’utilisation des techniques de transformation fermière anciennes, sans aucun conservateur, ni additif ni sel nitrité. Porc de race rustique locale à croissance lente, ce qui confère un goût particulier à la viande et au gras. Transformation faite par mes soins à l’ancienne sans conservateurs, sans sels nitrités.
La vente directe est pour Noémie un moment vraiment particulier : exercice au début redouté, elle finit par y trouver une forme solennelle d’engagement. “Le marché est notre agora, le lieu privilégié pour informer les consommateurs en direct”. Ce qu’elle essaie de créer au contact de ses clients (ils sont une centaine), c’est une communauté qui se rend mutuellement service.
Défis et Perspectives
Ferme en cours d’installation, donc en phase d’investissement et de création de la clientèle / gamme de produits, qui devrait permettre de dégager un revenu l’année prochaine. Installée en plein hiver, Noémie se confronte vite à la dureté du métier et des conditions physiques : manoeuvrer, soigner, nourrir ses cochons, puis se rendre à la CUMA (Coopérative d’Utilisation de Matériels Agricoles) à près de 30 minutes de route, pour transformer en viande les cochons qui ont été abattus, découper les pièces, sceller sous vide, étiqueter et tout nettoyer.
Ces marathons de découpe et de marché sont très éprouvants. A terme, cette dureté ainsi que la pression économique accentuée par la hausse des coûts de production et le besoin d’équilibre poussent Noémie à revoir son organisation, en fonction de ses capacités et de ses limites.
Un Accord Mets-Vin Inattendu
“Voici un accord mets-vin assez atypique et 100% Gascogne, que nous avons tenté il y a peu lors d’une dégustation croisée avec mon ami vigneron Michel Maestrojuan du domaine Entras. Il s’agissait d’une dégustation d’une côte de porc noir qui se mange…rosée à cœur (le porc noir se mange rosé, comme un canard ! Et pas du tout comme un porc rose dont la chair se mange blanche et bien cuite à cœur). L’idée de l’accord est de combiner la chair délicate du porc avec le côté vineux (gras et texture) du rosé de saignée de Michel. C’est un vin rosé totalement atypique, charpenté et complexe, inscrit sur le territoire du Côte de Gascogne.
L'Importance du Collectif
Dès le choix du lieu de son installation, la dimension collective de son projet se confirme. Elle rejoint plusieurs agriculteurs engagés dans une démarche de diversification (maraîchage, élevage caprin, ovin) sur une ferme historiquement dédiée à de l’élevage intensif.
Pour la jeune agricultrice, penser la complémentarité agronomique des activités agricoles est nécessaire : chaque culture rend des services à l’autre et vice versa. “Trouver des débouchés pour le fumier des cochons, valoriser grâce à eux les sous-produits comme le petit-lait ou les légumes abîmés”. Et entre chaque membre du collectif (où chacun conserve son activité indépendante), la coopération permet de mutualiser du matériel et de s’entraider.
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