L'histoire fascinante du Palais des Pâtes

La pasta est bien plus qu'un simple plat : c'est un héritage vivant, universel et profondément italien. Née du blé, du vent et des mains, elle est longtemps façonnée pour durer et devient un symbole de convivialité, d’unité et de quotidien partagé. L’histoire de la pasta, c’est celle d’un dialogue entre nécessité et imagination, territoire et transmission.

Origines et Mythes des Pâtes

L’histoire de la pasta commence bien avant l’Italie moderne. Des archéologues ont retrouvé en Chine un bol de nouilles de millet datant de 4000 ans. Pourtant, la filiation entre ces nouilles asiatiques et les pâtes italiennes reste à ce jour sans lien prouvé. En Italie, les premières traces de pâtes remontent à l’Antiquité. Les lagane, citées par Cicéron, Sénèque puis Apicius, étaient des bandes de pâte sans levain, souvent bouillies, parfois superposées. Il s’agissait bien de pâtes alimentaires sous leur forme fraîche, artisanale et éphémère.

C’est en Sicile, au XIIe siècle, qu’apparaît une étape cruciale. Le géographe arabe Al-Idrîsî, en 1154, décrit la fabrication à grande échelle de itriyya - des pâtes sèches - dans le village de Trabia. Ces filaments de pâte, produits et exportés, se conservent aisément. Le climat méditerranéen et la culture du blé dur favorisent leur développement.

Le mythe selon lequel Marco Polo aurait rapporté les pâtes de Chine au XIIIe siècle est désormais écarté. Les textes italiens attestent l’existence de pâtes bien avant son retour en 1295. Dans son livre « Le devisement du monde », Marco Polo déclarait que les "pâtes chinoises étaient aussi bonnes que celle qu’il avait mangé tant de fois en Italie".

Évolution des Pâtes à travers les Siècles

À Rome, au Ier siècle, Apicius nous propose les premières recettes de lagane : de fines feuilles superposées, associées à des farces parfumées. Ces ancêtres des lasagnes ne sont pas encore gratinées, mais leur structure est déjà là. Avec le reflux des dominations musulmanes au XIIIe siècle, la pasta gagne les villes du Nord et du Centre. En Ligurie, les trofie, nées, selon la légende, au temps des Croisades, sont le fruit d’un savoir-faire transmis par les femmes.

À Naples, dès le XVe siècle, les maccheroni s’extrudent grâce à la presse en bronze. Les ruelles s’emplissent de séchoirs, les artisans s’organisent, la production se diversifie. En 1570, Bartolomeo Scappi, cuisinier du pape Pie V, mentionne dans son Opera des préparations sucrées ou salées à base de pâte : vermicelli, tagliolini, lasagne, roulades et beignets. La pasta y apparaît baroque, multiple, façonnée au gré des fastes pontificaux.

Au XIIIe siècle, Salimbene de Adam, moine franciscain facétieux, confesse dans ses chroniques son plaisir à déguster de « ghiotte lasagne » (lasagne gourmandes) lors des fêtes. Dans un passage du Decameron, Boccace décrit un pays fabuleux où les montagnes sont de parmesan râpé, et où les habitants passent leur temps à rouler des maccheroni et des ravioli. Enfin, à Naples, Polichinelle, personnage de le Commedia dell’arte, ne jure que par les maccheroni. Il les cache, les dévore, les brandit comme des trophées.

La Pasta : IcĂ´ne d'un Peuple

À partir du XVIIIe siècle, la pâte glisse du palais à la rue. À Naples toujours, les maccaronari, vendeurs ambulants de maccheroni, deviennent des figures familières. Armés d’un réchaud et d’un chaudron, ils nourrissent les foules. La pasta devient l’aliment du peuple - et paradoxalement, c’est ce qui en fait un symbole national. Au XIXe siècle, alors que l’Italie s’unifie, elle se cherche des repères communs. Les dialectes divisent, la pasta rassemble. On la produit à Naples, mais on la consomme jusqu’à Turin ou Florence.

L’industrialisation joue un rôle déterminant. Les premières grandes fabriques de pâtes apparaissent. On perfectionne les techniques de séchage avec l’air chaud artificiel. Les moules s’améliorent, les formats se standardisent. La boîte en carton remplace le sachet en toile. Dans les affiches publicitaires de l’époque, la pasta s’entoure d’angelots, de cuisiniers ronds et de slogans rêveurs. Les manuels scolaires en vantent les vertus. Et pourtant, dans cette montée en puissance, elle ne perd jamais son ancrage populaire. Elle reste le repas des dimanches, des grandes tablées, des familles bruyantes.

Nourriture humble et géniale, la pasta traverse les siècles en gardant ce qui fait sa force : sa plasticité, sa simplicité, sa profondeur culturelle. Elle a épousé les âges, les techniques, les migrations. Aujourd’hui encore, certains territoires perpétuent cet art avec une exigence rare. À Gragnano, en Campanie, la tradition se mêle à l’excellence : la pâte y est encore trafilata al bronzo, lentement séchée à basse température, selon des gestes séculaires.

Diversité des Formes et Traditions Régionales

Les formes des pâtes et leurs noms ne sont pas dus au hasard mais sont bien le reflet de leur histoire et de notre gourmandise. C'est dans la région de Gênes qu'un fabricant aurait inventé les penne au XIXe siècle, à l'aide d'une machine coupant en diagonale. Tantôt lisses (penne lisce), tantôt striées (penne rigate), elles doivent leur aspect à une libre inspiration des plumes qui permettaient, jadis, d'écrire à l'encre (penne signifie en italien plume au sens de stylo).

Chaque parcelle de la botte a inscrit dans son patrimoine un type de pâtes et des recettes. La division de l'Italie en plusieurs États jusqu'à la seconde partie du XIXe siècle explique pour partie cette variété des cultures culinaires. Mais l'Italie n'a pas le monopole de la création de nouvelles pâtes. La France cultive également une inventivité certaine en la matière. La raviole en est un bon exemple. Elle est le fruit d'une riche histoire. Elle a pour origine les rissoles, petits carrés frits farcis confectionnés à travers l'Europe dès l'Antiquité. Au XIIIe siècle, elles prennent le nom de « raviole », en lien avec la rave qui remplace la farce de viande durant le Carême. Le sud-est français va conserver cette tradition culinaire. Elle va devenir, au XIXe siècle, une spécialité du Dauphiné et plus précisément de Romans. C'est alors, dans cette région, un plat de fête confectionné notamment par des spécialistes, les « ravioleuses ».

Parmi la multitude de variétés offertes au regard et au palais des consommateurs, certaines vont s'imposer comme des standards. Et on retrouve là aussi une création hexagonale, véritable star des repas pour enfants : la coquillette. Mise au point par l'industrie agroalimentaire au XIXe siècle, elle va s'imposer rapidement comme l'une des pâtes préférées des Français. Sa forme, sa taille, et même son nom : tout concourt à son succès auprès des plus jeunes ! Les plus grands ne la boudent pas pour autant, tant elle a, pour nombre d'entre eux, un irrésistible parfum d'enfance.

Autres stars incontournables : les spaghettis, issus quant à eux de l'Italie du sud, dont le nom vient de spago, qui signifie « ficelle », et dont la forme est déjà évoquée sous le terme vermicelli au XIIe siècle. Ou encore les macaronis dont les ancêtres siciliens, les cataneselle (originaires de la ville de Catane), s'imposèrent du temps de la domination arabe de l'île (IXe - XIe siècles). Pourquoi ces pâtes étaient-elles creuses en leur centre ? Tout simplement parce que cela permettait de les sécher plus vite.

Ravioli, penne, tagliatelle, lasagnes…. Rien que d’en parler on en a l’eau à la bouche ! Et la liste est encore longue. Selon la légende, c’est Marco Polo qui a introduit les pâtes en Italie, en rentrant de son voyage en Chine ; une version qui n’est pas totalement fausse. La première fois que les pâtes ont été introduites en France, c’est au XVIème siècle, suite à l’union de Henri II de France avec Catherine de Médicis. Les pâtes alimentaires ont évolué au fil du temps en toutes formes.

Pâtes Fraîches vs Pâtes Sèches

Il faut distinguer ensuite les pâtes fraîches des pâtes sèches. Les premières sont plus courantes dans le nord. On les prépare avec des œufs et souvent de la farine de blé tendre. Les pâtes fraîches dans le sud sont plus rares mais surtout elles sont réalisées sans œufs. Ainsi les orechiette dans les Pouilles, les busiate en Sicile. Plus au nord, en Ligurie, on prépare des trofie. Les Italiens ont enfin une importante tradition de pâtes au bouillon (in brodo). Elles sont souvent fraîches et farcies comme les tortellini et les agnolotti.

Gragnano : Capitale Mondiale des Pâtes

S’il existe un nombre très important de pâtes selon les régions italiennes, la ville de Gragnano est mondialement reconnue comme la capitale des pâtes. Elle est la première à avoir obtenu une indication géographique protégée (IGP). La qualité des matières premières, la farine de blé dur, l’eau provenant des sources alentour, peu minéralisée, ainsi que la fabrication sont à l’origine de cette réputation.

Certains chefs se plaisent même à les décliner sur leur carte, comme Nino di Costanzo du restaurant Dani Maison, 2-Étoiles sur l’île d’Ischia, au large de Naples. Le chef propose un très grand nombre de plats avec de nombreuses sortes de pâtes comme les fusilloni au lapin rôti, les pâtes à la sorrentine, les spaghettoni aux cinq tomates, les linguine à l’ail, persil, piment, crevettes et buffle, les raviolis de pintade…

En Italie, le choix est démesuré, il y a les longues et les courtes, les lisses et les rugueuses, les sèches et les fraîches… Chaque famille se décline en sous-familles selon les régions. Les longues peuvent être fines (capellini, spaghetti, vermicelli…) ou grosses (spaghettoni, bigoli, pici, bucatini…), pas toujours rondes et donc carrées (chitarra…) ou plates en ruban (fettuccine, lasagne, linguine, pappardelle, tagliatelle, trenette, pizzoccheri, mafaldine…). Rondes, tubulaires, striées...

Par exemple, les bucatini, plus grosses que les spaghetti, ont un trou central qui laisse passer l’eau, permettant de mieux les cuire à cœur. À chaque forme correspond un type de sauce. Dans la famille des pâtes courtes, il y a les tubulaires (cannelloni, macaroni, paccheri, rigatoni, tortiglioni…) qui peuvent être striées, « rayées » en italien (rigate), penne rigate, manicotti… Mais les pâtes courtes peuvent aussi prendre un très grand nombre d’autres formes comme celles d’un papillon (farfalle), de fleurs (fiori), des torsades (fusilli girandole, campanelle…) et des coquillages (conchiglie, lumaconi, pipe…).

Consommation de Pâtes à travers le Monde

En France, on consomme environ 8 kg par an, par habitant. Au Salvador, Pays de l’Amérique centrale, on se contente de 1 kg par an par habitant.

Chefs et Pâtes : Une Affaire de Passion

Peppe Guida est un célèbre chef italien à la tête de deux restaurants, Antica Osteria Nonna Rosa, 1 étoile Michelin et Villa Rosa La casa di Lella. Il est également l’auteur de quatre livres : « Questa Terra è La mia Terra », « Le Ricette di Casa Mia », « Del pane non butto via » et « Il mio mondo vegetale ». Peppe essaie de combiner la plus haute cuisine avec la simplicité des recettes inspirées de la tradition. Les bucatini di Gragnano IGP de Pastificio dei Campi, la nduja et sa burrata stracciatella est un des plats signatures du chef Peppe.

Le chef Luca Marchini a suivi sa passion pour la cuisine immédiatement après avoir obtenu son diplôme d’économie et de commerce. Il raconte à travers ses plats une histoire d’harmonie, d’équilibre, d’expérimentation et de lien avec ses racines territoriales. En janvier 2023, Luca nous partage dans une vidéo une recette de pâtes à la sauce tomate et aux copeaux de parmesan soufflés. C’est devenu un plat à la carte de son restaurant.

Cristina Ceccatelli a grandi en Toscane. Elle est propriétaire du restaurant Cristina’s à Sun Valley, ouvert en 1993, cinq ans après son déménagement aux États-Unis. Son restaurant ressemble à un charmant chalet. Situé dans une petite rue de la célèbre station de ski de Sun Valley, dans l’Idaho, Cristina’s est un endroit où les gens se rassemblent entre amis. Dans son ouvrage Cristina’s Tuscan Table, on y retrouve sa célèbre recette de spaghetti aux aubergines épicées.

Ernesto Prosperi est un chef italien réputé pour son restaurant Taverne Beim Baron situé à Osweiler au Luxembourg. Il est également l’auteur de l’ouvrage « Le palais des palais » édité en 2016. Dans ce livre, Ernesto met à l’honneur les pâtes artisanales Giovanni Fabbri pour la qualité de leur blé. Pour une qualité optimale, Giovanni Fabbri préconise un séchage lent et à basse température de ses pâtes.

Pierre Gagnaire est un curieux des produits issus de tous les terroirs de France et du monde. Globe-trotteur dans l’âme, sa cuisine se nourrit de la matière bien sûr, d’un travail longuement réfléchi, mais aussi de ses rencontres et du brassage des cultures. Rigoureux, travailleur et authentique, on retrouve ses qualités dans sa cuisine d’auteur. Dans son célèbre restaurant Piero TT situé dans le 7e arrondissement de Paris ainsi qu’à Courchevel, le chef Gagnaire propose des recettes italiennes qu’il réalise avec les pâtes artisanales du producteur des Pouilles Benedetto Cavalieri.

Denny Imbroisi est le plus italien des chefs parisiens. Il a vécu autant en France qu’en Italie, son pays natal. En 2012, il se fait connaître du grand public en participant à la saison 3 de « Top Chef ». Suite à ce concours, il intègre le restaurant gastronomique étoilé de la Tour Eiffel, le Jules Verne, en tant que sous-chef auprès d’Alain Ducasse. En mai 2015, il ouvre son premier restaurant l’IDA où il laisse parler sa créativité. Le plat signature de son restaurant est incontestablement sa recette de pâtes à la carbonara, considérée comme la meilleure de Paris.

Il est donc favorable de cuisiner des pâtes sèches artisanales. En effet, la qualité du blé favorisera votre digestion et la texture de vos pâtes. Comme nous le montre ces Chefs, on peut faire d’excellents plats très simples avec des ingrédients de qualité.

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