Il Était un Gâteau: Histoire et Tradition de la Pâtisserie Française

Des noms d’un autre temps, des visuels désuets, mais un goût unique et régressif. Une poignée d’artisans pâtissiers préservent le savoir-faire des gâteaux d’antan. Enrobés de pâte d’amande, riche en fruits confits et parfumés au kirsch, souvent fourrés à la crème au beurre et recouverts d’un glaçage épais et sucré, ces gâteaux anciens sont le socle de la pâtisserie actuelle.

Sans réfrigération, sans conservateurs, les artisans de l’époque ont su régaler des générations et bâtir la pâtisserie de demain. Des fondamentaux qu’il ne faut pas oublier. Figue, gland, moka, conversation, mais aussi jalousie, mussipontain ou encore pastis, chacun réveille un souvenir d’enfance. En voici une sélection.

L'Ambassadeur: Un Gâteau Relancé par les Pâtissiers du Plaza

Les pâtissiers du Plaza relancent un gâteau oublié : l’ambassadeur. Enveloppé dans un voile de pâte d’amande, décoré d’une rose aux rondeurs désuètes, ce petit gâteau remet à l’honneur le parfum des fruits confits au kirsch déposés sur une génoise moelleuse. « C’est un dessert qui fait écho à l’histoire de la pâtisserie d’antan, quand il n’existait pas de techniques de réfrigération. Nous avons donc cherché à le reproduire avec exactitude : un pain de gêne imbibé d’un sirop de vanille, des fruits confits macérés au kirsch et une pâte d’amande maison.

La Pomme de Terre de Jean-Paul Hévin

Qui se souvient encore de la fameuse pomme de terre, que les boulangeries proposaient fièrement dans leurs vitrines dans les années 1980 ? Loin des codes de la pâtisserie actuelle, cette gourmandise affichait alors une belle rondeur poudrée de cacao et surmontée de trois petits pignons. Depuis des années, Jean-Paul Hévin la remet au goût du jour dans une exquise version, responsable de surcroît. « J’ai toujours adoré cette association de pâte d’amande et de chocolat. Elle a marqué les esprits par son utilisation dans les fêtes foraines et fait partie de scènes culte dans une multitude de films.

La Tarte à la Crème Revisité par Benoît Castel

Voici la bien nommée tarte à la crème ! Tout le monde la connaît sans l’avoir jamais vraiment testée. Benoît Castel lui offre ses lettres de noblesse en s’inspirant des codes du saint-honoré. « Je voulais remettre à l’honneur le goût de la crème fraîche épaisse d’Isigny et ses notes un peu acides.

La Figue de Bernachon: Un Incontournable

La figue est un incontournable de la maison Bernachon. Une pâtisserie à l’ancienne riche en saveurs, enrobée de pâte d’amande fondante. « Nous la réalisons chaque jour avec des biscuits cuillères que nous garnissons de crème pâtissière et de fruits confits macérés au kirsch. La pâte d’amande maison vient ensuite recouvrir le biscuit fourré, puis nous déposons la figue sur le côté.

La Tarte Bourdaloue Réinterprétée par Pierre Hermé

Pour la rentrée, Pierre Hermé réinterprète un grand classique de la pâtisserie française : la tarte Bourdaloue. « Cet entremets fait partie d’une collection dans laquelle j’ai cherché à évoquer nos plus intimes souvenirs gourmands.

Le Moka: Un Classique Alsacien

L’incontournable moka, disparu de la plupart des pâtisseries, trône toujours en bonne place au Relais des Trois Épis. Aujourd’hui réalisé sur commande, il est encore de tous les mariages et communions en Alsace. « C’est un biscuit qui était présent dans toutes les familles pour les fêtes, avec une génoise imbibée de rhum ou de kirsch et une crème au beurre. J’apprécie particulièrement celui au café, qui rappelle le goût du café servi en Alsace avec un petit verre de kirsch. La génoise est imbibée au kirsch, la crème au beurre parfumée avec une essence de café, que je réalise selon la recette apprise chez Pelletier.

Le Sphinx de Félix Bonnat: Un Pionnier du Gâteau au Chocolat

Félix Bonnat crée le «Sphinx» en 1906, à l’époque des grandes découvertes en Égypte. Il s’agit alors du premier véritable gâteau au chocolat car, auparavant, les pâtisseries à ce parfum contenaient moins de 5% de cacao. « Désormais emblématique de la maison, le sphinx n’a pas évolué et nous le réalisons chaque jour à partir de la même recette. Pour l’époque, il était très riche en chocolat. Le socle est un biscuit joconde - que l’on dressait alors à la poche afin d’éviter que le biscuit ne se dessèche - sur lequel on dépose une ganache pâtissière à 60% de cacao.

La Conversation Remise au Goût du Jour par Sébastien Gaudard

Imaginée à la fin du XVIIIe siècle pour la sortie du livre de Madame d’Épinay, Les Conservations d’Émilie, la conversation est un gâteau oublié de tous ou presque. Sébastien Gaudard le remet au goût du jour en 2021 pour répondre à l’un des vœux de Bernard Pivot lors de la sortie de son roman Mais la vie continue. « Lorsque François Busnel m’a contacté pour que je réalise une conversation pour Bernard Pivot, je me suis mis en quête de cette recette oubliée. Une pâte feuilletée garnie de frangipane recouverte de bandelettes de pâte posées en croisillons avec, dans les interstices, de la meringue, qui devient craquante à la cuisson.

Le Puits d'Amour: Un Hommage à la Marquise de Pompadour

Attribuée au cuisinier Vincent La Chapelle au XVIIIe siècle, la recette du puits d’amour aurait été inventée en hommage à la marquise de Pompadour. Le petit réceptacle, alors en pâte à chou ou en pâte feuilletée, était à l’époque garni de gelée ou de marmelade de groseille. Au fil des ans, la crème pâtissière et la crème chiboust viennent remplacer la gelée, donnant une saveur moins sucrée au gâteau.

Salammbô ou Gland: Un Chou à la Crème Inoubliable

Incontournable chou à la crème recouvert d’un sucre cuit craquant pour le salammbô ou d’un fondant coloré en vert et de vermicelles au chocolat pour le gland, ce chou à la crème a fait saliver des générations de gourmands dans les années 1980. Selon les sources, son histoire diffère. Le Traité de pâtisserie de Darenne et Duval décrit le salammbô comme un chou oblong garni de crème pâtissière à la vanille, glacé au sucre cuit décoré de pistaches hachées. Le Grand Larousse gastronomique en donne une définition qui se rapproche davantage de celle du gland, avec une crème pâtissière parfumée au kirsch, un fondant vert et des vermicelles au chocolat.

Salammbô ou gland, peu importe, on le regrette. Bertrand Gavet fait perdurer cette tradition le week-end en le réalisant avec crème pâtissière au kirsch et sucre cuit craquant.

Autres Classiques de la Pâtisserie Française

Les grands classiques de la pâtisserie nous sont si familiers que tout un chacun sait les nommer devant une vitrine de pâtisserie ou les identifier sur une carte de restaurant. Leurs patronymes ont pourtant de quoi aiguiser la curiosité en nous contant les histoires à l’origine de leurs légendes.

  • Paris-Brest: En 1891, le rédacteur en chef du quotidien parisien Le petit journal crée une course cycliste reliant la Capitale à la ville de Brest. Inspiré par cet événement sportif au fort retentissement et qui passe près de sa boutique, un jeune boulanger-pâtissier de Maisons-Laffitte, Louis Durand, invente un dessert en forme de couronne de pâte à choux coupée en deux et fourrée de crème pâtissière.
  • Opéra: Gâteau multicouche au fameux glaçage de chocolat, l’opéra est un dessert dont deux grands noms se disputent la paternité, la maison Dalloyau et Gaston Lenôtre.
  • Religieuse: Si son nom tient à la forme des moules où il est cuit, son origine est plus mystérieuse. Il aurait été inventé par des religieuses bordelaises au 17e siècle.
  • Baba au Rhum: Chassé de son trône de Pologne en 1709, Stanislas Leszczynski se réfugie en France où il devient duc de Lorraine. Il y apprécie une spécialité locale, le Kouglof, qui lui rappelle le Babka de son pays natal, une brioche en forme de couronne. Comme il trouvait la recette trop sèche à son goût, son pâtissier, Nicolas Stohrer, l’imbibe de vin de Malaga et y ajoute de la crème pâtissière et des raisins secs. Le Baba est né.
  • Financier: Inventé au Moyen Âge par des religieuses de Nancy qui utilisaient des jaunes d’œufs comme fixateur de peinture et ne voulaient pas gaspiller les blancs, cette recette moelleuse à base de poudre d’amande est tombée dans l’oubli jusqu’à ce qu’un pâtissier parisien la remette au goût du jour, dans les années 1890.
  • Tarte Tatin: À la fin du 19e siècle, l'auberge des sœurs Tatin, à Lamotte-Beuvron (Loir-et-Cher), est une table réputée. Accaparée par l’affluence dominicale, l’une des sœurs oublie de mettre une pâte sous les pommes de sa tarte.
  • Gâteau Royal (Trianon): Le gâteau Royal, également connu sous le nom de Trianon, est une pâtisserie française élégante qui séduit les gourmets par son harmonie de textures et de saveurs chocolatées. Composé d’une dacquoise aux amandes, d’un croustillant praliné et d’une mousse au chocolat, ce dessert est devenu un incontournable des grandes occasions.

Le Gâteau Nantais: Un Voyage dans l'Histoire et les Saveurs

Aujourd’hui, on s’attaque à un autre pilier de la pâtisserie bretonne : le gâteau nantais. Symbole de Nantes, il a été popularisé par la marque LU. Un dessert moelleux, riche en amandes et en rhum, si populaire en Bretagne, qu’il existe un concours du gâteau nantais, organisé depuis 2015 par l’association Mémoire de l’Outre-Mer.

Les Origines du Gâteau Nantais

Le gâteau nantais serait un gâteau de voyageurs. Les plus connues parlent d’un gâteau né avec le commerce triangulaire qui s’effectuait à partir du port de Nantes, vers le continent africain et les Antilles, au XVIIe siècle. Réalisé à l’époque avec du sucre de canne et imbibé de Rhum des Antilles, il aurait été inventé en 1820 par M. Rouleau, un maître fouacier (une personne qui réalise des fouaces, un pain en forme de couronne), qui était installé dans le quartier Saint-Clément, à Nantes.

Le gâteau nantais, qui est tombé progressivement dans l’oubli au fil des années, a retrouvé sa popularité grâce à la marque LU. En 1910, l’entreprise française de biscuits décide de le produire, jusque dans les années 1970.

Les Bases du Gâteau Nantais

Un gâteau nantais, c’est avant tout un gâteau moelleux. Pour Josselin Debotté, artisan pâtissier et cogérant de la pâtisserie Debotté, à Nantes, sa base est considérée comme un pain de Gênes (un gâteau italien à base d’amandes).

Pour Josselin Debotté, il est important de « beurrer votre moule en amont de la préparation du gâteau nantais. Un moule beurré et fariné permet au gâteau de ne pas coller à la cuisson, pour un démoulage propre et sans casse. La suite de la préparation de l’appareil à gâteau est ensuite assez simple. Un mélange de beurre pommade (un beurre très mou, mais qui n’est pas fondu), auquel on ajoute du sucre semoule. Ensuite, des œufs battus, que l’on incorpore progressivement, avant d’y ajouter de la farine, et de la fleur de sel. Enfin, le clou du gâteau : le rhum.

Pour le gâteau, « le rhum ambré est meilleur, car il a beaucoup plus de goût », indique Josselin Debotté. On l’utilise à de nombreuses reprises dans la recette : dans l’appareil à gâteau, puis à sa sortie du four avec lequel on va l’imbiber, et enfin dans le glaçage qui vient décorer le dessert.

Ingrédients du Gâteau Nantais

Pour réaliser un gâteau nantais (3-4 personnes), il vous faudra :

  • 250 g de beurre
  • 300 g de sucre semoule
  • 200 g de poudre d’amandes
  • 80 g de farine
  • 300 g d’œufs entiers battus
  • 5 g de sel fin
  • 65 g de rhum ambré

Préparation

  1. Battez le beurre pommade dans un mixeur, avant d’ajouter le sucre semoule, et la poudre d’amandes.
  2. Ensuite, incorporez progressivement des œufs (battus).
  3. Mélangez le tout jusqu’à ce que la pâte gonfle un peu.
  4. Ajoutez la farine tamisée et le sel, jusqu’à ce qu’elle soit bien incorporée.
  5. Enfin, versez le rhum dans la pâte.

Faites attention à ne pas trop travailler la pâte. Il faut arrêter de la mélanger quand elle se décolle un tout petit peu des bords.

Placez le tout dans un moule beurré et fariné, et faites cuire dans un four préchauffé à 170°C, pendant 40-45 minutes.

Imbibition du Gâteau

Pour imbiber le gâteau, il vous faudra :

  • 60 g de sirop à 30
  • 60 g de rhum ambré

Dès que le gâteau est cuit, sortez-le du four. Avec un pinceau, imbibez-le avec le mélange de sirop à 30 (30 g d’eau, de sucre et de rhum), et de rhum ambré.

Confiture d'Abricot et Glaçage

Ensuite, recouvrez le gâteau imbibé avec de la confiture d’abricot chaude. Pour cela, faites-la chauffer à feu doux dans une casserole, jusqu’à ce qu’elle soit liquide, et plus facile à appliquer. Avec une louche, recouvrez le gâteau de confiture, avant de l’étaler avec une spatule sur tout le gâteau, côtés compris.

Enfin, pour réaliser le glaçage, il vous faudra :

  • 15 g de rhum ambré
  • 15 g d’eau
  • 180 g de sucre glace

Mélanger tous les ingrédients, et faites chauffer l’ensemble au micro-ondes. Le mélange doit être blanc, et bien homogène. Attendez que le gâteau soit froid, pour appliquer le glaçage sur le dessus. À l’aide d’une louche, répartissez le glaçage sur le dessus du gâteau, avant de le répartir à la spatule, de l’intérieur vers l’extérieur.

Conservation et Dégustation

Le gâteau nantais se conserve très longtemps. Vous pouvez le consommer immédiatement si l’envie vous en prend, mais il sera bien meilleur après quelques jours de repos, afin de laisser le temps au rhum et à la confiture de parfumer plus encore le dessert. Vous pouvez le conserver au frigo, ou à l’air libre. Faites juste attention à le couvrir, dans une boîte par exemple.

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