Distribution du Chocolat et Crise du Cacao

Le marché mondial du cacao représente 3 milliards de dollars par an avec un prix du cacao très variable qui a pu monter jusqu’à 3000 $/tonne dans les années 1970 mais qui depuis évolue entre 1000 et 2000 $/T. Après un pic en 1977, le cours du cacao a baissé pour s’effondrer au cours des années 1990. Les pays riches consomment encore le plus gros volume de cacao mais leur consommation reste stable, voire diminue.

Le chocolat est l’une des gourmandises préférées des Français, mais ce plaisir pourrait bientôt devenir un luxe inaccessible pour beaucoup. En effet, le cacao, ingrédient principal de nos tablettes, fait face à une crise sans précédent. Entre hausse des prix, crise économique, sociale et sanitaire, le marché du chocolat est sous tension.

Les Facteurs de la Crise

Plusieurs facteurs sont à l’origine de la crise du cacao. D’une part, la demande mondiale de chocolat continue d’augmenter, mais l’offre de cacao ne suit pas, créant ainsi un déséquilibre sur le marché. La crise sanitaire a également bouleversé les chaînes de production et de distribution, entraînant des retards et des hausses de coûts. D’autre part, les pratiques spéculatives autour des matières premières, dont le cacao, ont accentué cette crise.

La spéculation est un autre facteur qui contribue à la crise du cacao. De nombreux investisseurs achètent des contrats à terme sur le cacao, pariant sur une augmentation des prix en raison de la pénurie annoncée. Cette spéculation amplifie les fluctuations des prix et rend le marché encore plus volatile. En conséquence, les cours du cacao atteignent des sommets, ce qui impacte directement le prix des produits chocolatés pour les consommateurs. Les producteurs, quant à eux, ne profitent pas de cette hausse, car ils vendent souvent leur cacao à des prix fixés à l’avance par des contrats.

Le changement climatique est l’un des principaux responsables de la crise actuelle du cacao. La culture du cacao est très sensible aux conditions climatiques, et le réchauffement de la planète perturbe directement sa production. De plus, le cacao nécessite une humidité spécifique pour prospérer, et la diminution des précipitations dans certaines zones met en danger la production. Les catastrophes naturelles, comme les tempêtes et les inondations dues à de fortes pluies, sont également plus fréquentes et endommagent gravement les plantations.

Outre le changement climatique, la déforestation et le vieillissement des plantations jouent un rôle majeur dans la crise du cacao. Pour répondre à la demande mondiale, de nombreuses forêts tropicales ont été détruites pour laisser place à des cultures de cacao, ce qui a appauvri la terre. De plus, les plantations de cacaoyers vieillissent, ce qui réduit leur productivité. Les arbres anciens produisent moins de fèves et sont plus vulnérables aux maladies. Pour renouveler les plantations, les producteurs devraient réinvestir, mais beaucoup n’en ont pas les moyens financiers.

Production et Répartition des Revenus

Le cacao est majoritairement produit par de petits exploitants dans des pays africains, principalement l’Afrique de l’Ouest avec la Côte d’Ivoire et le Ghana, qui assurent la majorité de la production mondiale. Cependant, bien que ce soit l’une des cultures les plus importantes de la région, la majorité des bénéfices générés par le commerce du cacao n’atteignent pas les producteurs locaux. Cette concentration du marché profite surtout aux géants de l’industrie, tandis que les exploitants eux-mêmes peinent à couvrir leurs coûts de production. La pauvreté reste omniprésente dans les régions productrices de cacao, et les petits producteurs sont souvent contraints d’accepter des conditions de travail difficiles et des revenus dérisoires.

La Côte d’Ivoire et le Ghana représentent ensemble plus de la moitié de la production mondiale de cacao. Ces deux pays sont donc des acteurs incontournables du marché du chocolat, et toute fluctuation dans leur production a un impact direct sur le cours du cacao. De plus, le cacao étant la principale source de revenus pour de nombreux agriculteurs dans ces pays, les variations des prix internationaux affectent directement leurs moyens de subsistance. Pour faire face à cette situation, la Côte d’Ivoire et le Ghana ont tenté d’instaurer un prix plancher du cacao afin de garantir un revenu minimum aux producteurs.

Impact sur les Consommateurs et l'Industrie

Les prix élevés du cacao impactent donc directement le coût de production des produits chocolatés, et les fabricants n’ont d’autre choix que de répercuter ces hausses sur les consommateurs. La crise du cacao met en lumière les nombreux défis auxquels est confrontée l’industrie du chocolat. Entre dépendance envers certains pays producteurs, dérèglement climatique, spéculation et inégalités sociales, la filière est sous pression. La raréfaction de cette ressource précieuse pourrait transformer le chocolat en un produit de luxe dans les années à venir.

L'Action d'ETHIQUABLE

Le cacao représente la première filière d’importation chez ETHIQUALE. Le chocolat correspond environ à de 35% de nos ventes. En 10 ans de travail sur le terrain, nous avons monté 7 filières cacao équitable et bio en partenariat avec des organisations de producteurs. Ce sont 240 familles paysannes en Equateur, 1500 au Pérou, 2000 en Haïti, 450 à Madagascar, 280 en Côte d’Ivoire et 540 au Nicaragua. Quelques 80 000 personnes dépendent de près ou de loin des actions menées par ces coopératives soutenues par ETHIQUABLE.

Près de 40 millions d’individus vivent de la culture du cacao. Plus de 90% d’entre eux sont des paysans qui exploitent moins 10 hectares et gagnent moins de 5 dollars par jour et par travailleur. À l’autre bout de la chaîne, plus de 90% de la transformation et de la distribution de cacao et de chocolat sont contrôlés par dix entreprises multinationales. Les cinq plus grandes entreprises de broyage de fèves de cacao, Cargill (14,5%), ADM (13,5%), Barry Callebaut (12,5%), Petra Foods (7%) et Blommer (5,3%) contrôlent plus de la moitié de la transformation primaire du cacao.

Face à cette extrême concentration des entreprises à l’aval de la filière cacao, les petits producteurs sont atomisés, dispersés, sans capacité d’agir pour défendre leurs intérêts. Au cours des deux dernières décennies, le retrait des Etats dans la régulation des filières a contribué à creuser cette asymétrie entre producteurs et industriels. Cette situation explique qu’en valeurs ajustées, les prix réels perçus par les producteurs ont été constamment en baisse depuis les années 70. Avec des revenus de 100 à 500 USD par an et par travailleur, les familles de cacaoculteurs sont restées dans une grande précarité. Les plus fragiles d’entre-eux parce qu’ils ont moins de terre et une trop faible productivité se situent en dessous du seuil de pauvreté.

Le Commerce Équitable comme Solution

Dans un tel contexte de concentration du marché, le commerce équitable que nous défendons ne peut pas se limiter à un prix plus rémunérateur. Il doit s’inscrire dans une vision plus large de renforcement des organisations de producteurs pour améliorer leurs capacités de négociation et défendre leurs intérêts dans les filières. Nos prix stables et rémunérateurs, nos actions d’accompagnement ou nos préfinancements permettent d’assurer la viabilité économique des coopératives, mais leur donne aussi la possibilité de former des femmes et des hommes, pour qu’elles-ils puissent demain peser sur l’avenir de la filière.

Au delà d’une action locale, le commerce équitable peut contribuer à modifier les rapports de force entre acteurs du marché. En appuyant l’émancipation des organisations de producteurs, il peut contribuer à plus d’équité, mais aussi plus de démocratie dans les filières.

Le commerce équitable que nous défendons a pour moteur principal l’empowerment, le renforcement des capacités et de l’autonomisation des organisations de producteurs. Là où les producteurs ne sont pas organisés, il doit favoriser la création de nouvelles organisations et accompagner leur phase de démarrage. C’est ce que nous avons fait, par exemple, dans la région d’Esmeraldas en Equateur en permettant à la jeune coopérative FONMSOEAM de se structurer et d’acquérir progressivement des capacités.

Pour ETHIQUABLE une organisation de producteurs doit parvenir à maîtriser la fonction d’exportation. La confier à un exportateur au nom de l’efficacité ou du réalisme économique, nous semble contraire au but recherché, celui de favoriser l’autonomie des producteurs au sein de la filière. A Madagascar, par exemple, pays où les filières d’exportation sont dominées par des commerçants efficaces et puissants, se lancer dans une première exportation de façon autonome était un enjeux considérable pour la coopérative Lazan’ny Sambirano.

Tendances du Marché du Chocolat en France

Le marché des chocolats en France est largement dominé par les grandes surfaces, qui représentent environ 70 % des ventes. Les grandes surfaces détiennent la majorité du marché et réalisent environ 85 % des ventes de chocolat. Elles se distinguent par leur facilité d’accès et leur offre variée, allant du chocolat basique au plus haut de gamme. Leur position de leader est toutefois challengée par les attentes des consommateurs qui privilégient l’artisanal et le bio.

Les chocolatiers-confiseurs, avec près de 4 000 points de vente en France, jouent un rôle essentiel dans la distribution de chocolat de qualité supérieure. Des enseignes comme Léonidas, Jeff de Bruges et De Neuville se développent avec des réseaux sous franchise. Ces chocolateries se distinguent par une offre premium et une forte implantation dans les centres-villes, bien qu’elles soient confrontées à la concurrence des grandes surfaces et des boulangeries.

Les boulangeries artisanales représentent une part non négligeable du marché des chocolats, notamment lors des périodes de fêtes. Elles proposent souvent des produits de qualité, parfois faits-maison, qui séduisent une clientèle locale à la recherche d’authenticité. Toutefois, elles sont limitées par une gamme de produits plus restreinte et une distribution plus locale.

Le marché du chocolat suit plusieurs tendances centrées sur l’éthique, le bio et la santé. Les consommateurs sont de plus en plus sensibles aux produits issus du commerce équitable et aux labels bio. Le chocolat équitable, désormais présent en grande distribution, et les produits certifiés agriculture biologique connaissent un essor important, avec des marques comme Cémoi qui cumulent plusieurs labels écoresponsables, allant même jusqu’à proposer des emballages certifiés FSC.

Tableau Récapitulatif : Structure du Marché Français du Chocolat

Acteur Part de Marché (Approximative) Caractéristiques
Grandes Surfaces 70% Facilité d'accès, offre variée
Chocolatiers-Confiseurs ~30% Offre premium, implantation en centre-ville
Boulangeries Artisanales Variable Produits de qualité, souvent faits maison

TAG: #Chocolat

En savoir plus sur le sujet: