Crocodile : Poisson, Viande et Nutrition

Reptile aux allures préhistoriques, ce très lointain cousin des oiseaux primitifs et des dinosaures a une solide réputation de tueur. Depuis 65 millions d'années, le crocodile s'adapte à tous les changements.

Les habitudes alimentaires et le comportement social des crocodiles du Nil

Les crocodiles du Nil vivent en communautés réunissant des groupes distincts d'animaux de même âge et de même sexe. Tous respectent une hiérarchie stricte, excepté en période de grande sécheresse. Les crocodiles de tous âges se retrouvent alors sur les seuls points d'eau qui restent et les comportements de territorialité ou de hiérarchie s'estompent. Les mâles les plus grands et les plus agressifs dominent, vivant en permanence sur leur territoire, à proximité les uns des autres. Le territoire est à la fois terrestre et aquatique, l'animal défendant une portion de berge le long d'un point d'eau.

La position de la tête, du dos et de la queue donnent des informations importantes sur le statut social d'un crocodile et sur ses intentions. Ainsi, un mâle dominant nage ostensiblement à la surface de l'eau, tandis qu'un animal moins élevé dans la hiérarchie ne laisse dépasser que la tête, et se tient toujours prêt à s'immerger complètement. Devant un animal dominant, il relève le museau hors de l'eau et entrouvre ses mâchoires. Il est très rare que les crocodiles se combattent, même lors de grands rassemblements d'animaux.

Pour faire fuir son rival, le crocodile dominant se contente en général de rester immobile, tête et queue dressées, en gonflant son corps le plus possible afin d'exagérer sa taille. Si cela ne suffit pas, il attaque, mordant son adversaire à la base de la queue et derrière les pattes. Les préliminaires amoureux commencent souvent quatre à cinq mois avant la ponte. C'est la femelle qui fait les premiers pas, visitant tour à tour les territoires de plusieurs mâles et se présentant à eux tête et queue complètement immergées. Elle doit bien marquer sa soumission à son partenaire, particulièrement agressif en cette période.

Pour communiquer, les crocodiles du Nil peuvent émettre des signaux vocaux, dont certains à peine audibles par l'homme. Ces sons, toussotement, sifflement, meuglement ou rugissement répétitif très puissant, sont produits en contractant fortement les muscles de la poitrine pour faire passer l'air, par à-coups ou en continu, le long du larynx jusque dans les fosses nasales.

Les besoins nutritionnels du crocodile du Nil

Un crocodile du Nil adulte ne fait, en moyenne, que 50 repas par an, parce qu'il utilise l'énergie apportée par son alimentation de façon beaucoup plus efficace que les autres animaux. Il stocke environ 60 % de la nourriture qu'il absorbe dans le gras de la queue, dans l'abdomen et le long du dos. Un vieux crocodile peut ainsi rester deux ans sans se nourrir, de même qu'un nouveau-né quatre mois ; le crocodile adulte mange plutôt pendant les saisons chaudes.

Les plus grands se nourrissent d'oiseaux, de poissons ou de mammifères (buffle, zèbre ou antilope), et parfois de charognes qu'ils repèrent à l'odeur. Au Kwazulu-Natal, vers avril ou mai, les jeunes crocodiles profitent de la migration des mulets qu'ils chassent à plusieurs en se plaçant en demi-cercle, bouchant ainsi le passage aux poissons. Lorsqu'il pêche seul, le crocodile nage lentement, recourbant la queue pour créer un arc avec son corps. Un coup de gueule latéral de son museau plat, et les petits poissons qui se sont laissés prendre dans ce filet sont avalés sans être mâchés.

Le crocodile fait glisser les gros poissons dans sa gorge en levant la tête verticalement. Mais, en général, il évite les efforts superflus. Son long corps dissimulé dans l'eau, il guette, immobile, pendant de longues journées, des proies éventuelles venues se désaltérer. Seules ses narines et le haut de sa tête émergent. Parfois, d'un coup de queue, il décroche d'une branche un nid d'oiseaux.

Lorsqu'une antilope ou un buffle approche sur la berge boueuse, le crocodile glisse silencieusement et, de ses puissantes mâchoires, saisit une patte ou le museau de sa proie qu'il déséquilibre, l'assomme ou lui casse les pattes d'un coup de sa lourde tête. Puis il l'entraîne dans l'eau pour la noyer. Et le festin commence. Le crocodile déchiquette l'animal et avale tout sans mâcher, os compris. S'il ne peut déplacer seul une proie trop grosse, un ou plusieurs congénères l'aident.

La zoologiste E. Hamard, en 1979, a étudié les estomacs de plusieurs dizaines de crocodiles du Nil et a ainsi montré que leur régime alimentaire variait en fonction de leur taille. Ainsi, les insectes constituent 70 % de la nourriture des jeunes crocodiles de moins de 0,30 m et encore 30 % de celle des animaux de 1,50 m ; mais ils ne font plus partie de l'alimentation des crocodiles de plus de 3,50 m. Lorsqu'ils mesurent entre 1,50 m et 3,50 m, les crocodiles consomment surtout des poissons et des mollusques. Les grands crocodiles mesurant plus de 3,50 m se nourrissent principalement de mammifères (de 15 à 40 %) et de poissons (de 35 à 80 %).

La reproduction et la survie des jeunes crocodiles

Peu avant la ponte, les femelles deviennent agressives et se disputent parfois les meilleurs sites de nidification. Elles creusent leur nid sur la partie terrestre commune à plusieurs domaines, dans le sable ou la terre meuble du rivage, à plus ou moins grande distance de l'eau, mais presque toujours au-dessus du niveau des hautes eaux. À l'aide des pattes postérieures, chaque femelle creuse un puits de 30 à 45 cm de profondeur ; une fois le puits creusé, la femelle s'installe, cloaque au-dessus du trou et pattes traînantes, et pond de 16 à 80 œufs.

L'oviposition dure de 20 minutes à une heure. Sitôt la ponte terminée, la mère recouvre le trou, tassant le sol sur les œufs. Dans ce nid où les œufs vont incuber, la température n'est pas la même au centre et à la périphérie. Il semble que cette différence ait une influence sur la détermination du sexe des petits (des chercheurs ont observé que les femelles étaient le produit de températures basse ou très élevée, alors que les mâles naissaient de températures intermédiaires ; la période critique a lieu pendant la première moitié de l'incubation).

L'incubation dure de 84 à 90 jours. Pendant tout ce temps, la femelle jeûne et ne cesse de surveiller le nid. Elle ne s'éloigne que pour boire de temps en temps ou pour se mettre à l'ombre. Le mâle reste lui aussi à proximité du nid, sans toutefois s'en approcher. À la fin de la période d'incubation, les petits crocodiles, prêts à sortir de leur coquille, poussent de légers glapissements. Leur mère les dégage, creusant le nid des pattes et du museau, et les saisit délicatement dans sa gueule.

La peau de sa gorge s'enfonce sous leur poids, formant une poche. Chaque nouveau-né pèse environ 50 g. La femelle les transporte ainsi jusqu'à la rivière où elle les lâche dans une eau peu profonde. Le nid une fois dégagé, aucun œuf n'est laissé à l'intérieur. Pendant les six à huit premières semaines de leur vie, les jeunes crocodiles sont regroupés dans des crèches. Celles-ci sont situées sur la terre ferme, dans un endroit un peu retiré.

Les petits se débrouillent seuls, mais leur mère ou toute femelle adulte veille, attentive au moindre de leurs cris et répondant immédiatement à ces appels. À cette époque, les petits sont des proies faciles et recherchées par toutes sortes de prédateurs. Au contraire des adultes, les jeunes crocodiles ont besoin de la protection d'un abri pour ne pas se faire manger par plus gros qu'eux. Après la période de crèche, ils s'éloignent du groupe des adultes pour se chercher un terrier en commun. Celui-ci est généralement assez éloigné du bord de l'eau.

Parmi ces jeunes apprenant ensemble à se nourrir, s'instaure une hiérarchie où les plus grands décident pour les autres.

Habitat et adaptation

Aujourd'hui, la plupart des crocodiles habitent les régions tropicales, mais les aires de répartition de quelques espèces comme le crocodile du Nil débordent sur des régions subtropicales plus tempérées. Amphibies, ces reptiles ont des habitats mixtes composés d'une zone de terre ferme et d'une partie aquatique d'eaux dormantes ou vives. Ils affectionnent particulièrement les mangroves, les marais et l'embouchure des rivières où ils disposent d'une nourriture abondante, de berges bien ensoleillées et d'une végétation touffue pour s'y cacher.

Ces habitats recèlent cependant deux pièges mortels pour des reptiles : le sel est en trop grande concentration pour eux dans les eaux des mangroves littorales et des estuaires et la chaleur y est très forte. La thermorégulation corporelle et la présence de glandes à sel leur permettent d'échapper à ces deux périls. Les reins des crocodiles sont incapables d'excréter la grande quantité de sel contenue dans l'eau et dans leur nourriture.

Les glandes à sel pallient cette incapacité et excrètent le surplus de sel avant qu'il pénètre dans le corps du reptile. Chez Crocodylus porosus, l'espèce la plus concernée, elles sont placées dans la bouche et se présentent comme des glandes salivaires modifiées. Les chercheurs s'interrogent sur l'existence de telles glandes chez tous les crocodiles même s'ils vivent en eaux douces.

Les crocodiles prennent la température du milieu ambiant : ils sont poïkilothermes. Pour maintenir une température interne constante (thermorégulation), ils adoptent des méthodes qui varient selon l'espèce, le sexe, la taille, la santé et le statut social. L'exposition au soleil des muqueuses buccales produit un refroidissement par évaporation. À jeun, le crocodile cherche un endroit frais pour économiser de l'énergie.

Prédateurs et rôle écologique

Le crocodile adulte, protégé par son impressionnante cuirasse, a pour seuls ennemis l'homme et... ses propres congénères. Il en va tout autrement des œufs et des petits. La phase importante de la nidification a lieu sur la terre ferme. La majorité des espèces choisit des bancs de sable non inondables pour nidifier. Ces nids terrestres ont l'inconvénient d'être très facilement accessibles aux divers oiseaux et mammifères, mais surtout aux lézards, qui les pillent. Le plus redoutable de ces prédateurs est le varan du Nil.

Profitant de l'inattention des parents, il fouille et déterre les nids avec son long museau. S'il est surpris par un crocodile, sa rapidité lui permet de s'enfuir. Il reviendra plus tard. Les œufs sont très recherchés en Afrique noire et en Nouvelle-Guinée autant pour être consommés que pour leurs vertus médicinales. Nouveau-nés et jeunes crocodiles sont également des proies faciles pour les gros poissons comme les silures et les requins d'estuaire ; pour les grands oiseaux comme les rapaces, les hérons, les marabouts, les cormorans et les spatules.

Les félins, les chacals, les hyènes, les mangoustes et les genettes apprécient aussi ces jeunes animaux. Dès qu'il atteint la maturité sexuelle, le crocodile n'a plus rien à craindre de ces prédateurs, mais il devient alors l'hôte de nombreux parasites. Un oiseau, le pluvian d'Égypte, vivrait ainsi sur le dos du crocodile du Nil et pénétrerait dans sa gueule pour becqueter les fragments de nourriture restés dans les dents du reptile. L'entomologiste Villiers ne nie pas une certaine association entre les deux animaux, mais il émet des doutes sur ce que trouve l'oiseau entre les dents du reptile.

En tant que grands prédateurs, les crocodiles ont un rôle clef dans le maintien de la stabilité de la chaîne alimentaire en participant au recyclage des substances nutritives. Les crocodiles sont aussi des « nettoyeurs ». Leur rôle de charognard, à l'occasion, peut avoir une importance considérable en cas d'épidémie, surtout pour les poissons, qu'ils protègent aussi en assurant la régulation des populations de leurs prédateurs : loutres et poissons ichtyophages.

Anatomie et adaptations du crocodile

Comme chez la plupart des reptiles, les écailles qui couvrent tout son corps sont des reliefs épidermiques, et sont donc différentes de celles « détachables » des poissons. Elles sont jointives et quadrangulaires sur le dos et sur le ventre, et espacées les unes des autres sur les flancs. Les écailles ventrales sont alignées sur 26 ou 32 rangées qui s'échelonnent du collier ventral à l'anus. Les flancs ne sont revêtus que de petites plaques réparties sur 16 ou 17 rangées transversales et sur 6 à 8 rangées longitudinales.

La main est palmée uniquement à la base, mais les orteils sont reliés par une véritable palmure. Un crocodile peut avancer très rapidement et atteindre 17 km/h sur plusieurs kilomètres en effectuant une sorte de galop. Le corps, étiré vers l'avant, est comme poussé par les pattes postérieures. Les pattes antérieures reçoivent le poids du corps et amortissent la fin du « saut ». Une sorte de baguette cartilagineuse part de la dernière vertèbre et forme la queue.

Les anatomistes considèrent le crocodile comme faisant partie des reptiles les plus évolués. Il possède, à l'égal des mammifères, un cœur divisé en quatre cavités qui effectue de 22 à 47 pulsations par minute ; il se caractérise par de grandes oreillettes recouvrant en partie les ventricules et présente une autre différence avec celui des reptiles « inférieurs » : il est séparé en deux chambres distinctes par une cloison interventriculaire complète.

Grâce à cette paroi, le sang oxygéné est séparé du sang veineux. Ces deux flux sanguins peuvent cependant se mélanger lorsqu'un clapet, appelé foramen de Panizza et situé entre les crosses aortiques, s'ouvre et fait communiquer les ventricules. En rétrécissant ou en dilatant ses vaisseaux sanguins, le crocodile peut régler le flux de son sang et régler par le même fait la température des diverses parties de son corps.

La bouche est isolée du pharynx du reptile par le repli gulaire, un tissu recouvrant le pli osseux du palais. C'est une sorte de voile qui empêche l'eau de pénétrer dans la gorge. Le crocodile peut ainsi rester sous l'eau la gueule ouverte, sans que ses poumons ou son œsophage soient noyés. Il continue de respirer la gueule remplie d'eau grâce à des fosses nasales qui conduisent l'air au-delà du repli.

Les deux poumons, de forme ovoïde, sont subdivisés en cavités et ressemblent à des éponges. L'air qui arrive de l'extérieur les emplit par succion, comme aspiré par le piston d'une seringue. Ce rôle de piston est joué par le foie, lui-même tiré vers l'arrière sous l'effet des muscles qui se contractent. Le crocodile peut en même temps fermer sa glotte et son repli gulaire, formant ainsi un circuit clos.

Le pharynx s'abaisse, ce qui aspire l'air et le fait pénétrer dans la cavité olfactive. Selon les chercheurs Pooley et Gors, l'air stimulerait la partie du cerveau commandant le sens de l'odorat, particulièrement développé chez le crocodile du Nil. À l'extrémité du museau, les narines transmettent aussi les stimuli chimiques, émis par les proies ou les partenaires sexuels, directement à des sacs olfactifs qui les analysent.

Diversification du régime alimentaire chez les crocodiliens

Une nouvelle analyse menée sur 146 dents fossilisées appartenant à 16 crocodyliformes éteints a donné de surprenants résultats : les ancêtres des crocodiles sont devenus herbivores à au moins trois reprises au cours de leur histoire.

« Cela montre que cette stratégie alimentaire portait ses fruits, » explique Melstrom, directeur de l'équipe qui a présenté les résultats dans la revue Current Biology. « Et je pense qu'à mesure que nous découvrirons d'autres dents, nous trouverons potentiellement d'autres groupes devenus herbivores de façon indépendante. »

Pour leur analyse, Melstrom et son coauteur Randall Irmis, également rattaché à l'université de l'Utah, ont adopté une méthode spécialement conçue pour comparer les dents dissemblables, empruntée à des paléontologues ayant étudié par le passé les mammifères anciens.

« Dans cette méthode, il suffit de compter le nombre de surfaces distinctes sur chaque dent, » explique Melstrom. « Nous les considérons distinctes si elles sont orientées dans des directions différentes. »

D'après les recherches précédentes menées sur des mammifères et des reptiles vivants, les scientifiques savent que les carnivores ont plutôt tendance à avoir des dents composées de peu de surfaces distinctes. À l'opposé on trouve des animaux dont les dents sont pleines de coins et recoins, ce qui augmente le nombre de surfaces distinctes et crée donc divers espaces pouvant être utilisés comme différents outils destinés à broyer toutes sortes de parties de plantes robustes.

« Ces dents appartiennent presque systématiquement à des animaux qui se nourrissent de plantes dont les feuilles, les branches et les tiges requièrent bien souvent une longue mastication avant d'être digérées, » nous informe Melstrom. Les dents des crocodiles actuels presque entièrement carnivores sont généralement plutôt simples, poursuit Melstrom, mais certaines espèces éteintes étaient dotées de dents composées parfois de 20 surfaces distinctes.

Cela suggère qu'ils procédaient également à une mastication minutieuse ou qu'ils adoptaient des comportements leur permettant de se contenter de certains plantes nutritives difficiles d'accès. « L'une des structures dentaires les plus complexes que nous ayons étudiées est celle du Simosuchus, un petit crocodyliforme au museau quasi-rectangulaire, comme si quelqu'un lui avait frappé la tête avec une pelle, » décrit Melstrom.

Ces dents étaient remarquablement similaires à celles de l'iguane marin des Galapagos dont le régime alimentaire repose essentiellement sur le broutage des algues poussant sur les rochers. « Simosuchus n'était pas un animal aquatique mais vivait probablement près de l'eau, il n'est donc pas insensé d'imaginer qu'il se nourrissait d'une façon similaire, » suggère Melstrom.

Étonnamment, l'étude de Melstrom a permis d'établir sans équivoque qu'il existait non pas un groupe solitaire de végétariens mais bien au minimum trois groupes indépendants composés d'une variété de « masticateurs » au comportement complexe, ce qui suggère qu'au cours de l'évolution, la transition vers un régime herbivore s'est opérée plusieurs fois.

Aussi performants qu'ils aient pu être autrefois, les crocodyliformes herbivores n'ont pas pour autant survécu à l'extinction de masse responsable de la disparition des trois quarts des espèces qui peuplaient la Terre il y a 66 millions d'années, alors que les crocodiliens modernes sont parmi les rares espèces tétrapodes à ne pas avoir succombé à la catastrophe.

D'ailleurs, depuis cet événement, aucun crocodile herbivore n'a vu le jour, peut-être parce que les mammifères leur ont volé leur place dans cette niche écologique.

« Le fait de devenir herbivore implique forcément un certain type de spécialisation, » fait remarquer Attila Ősi, paléontologue non impliqué dans l'étude mais auteur de la découverte d'une grande partie des dents utilisées dans celle-ci. Lorsque les plantes que vous avez l'habitude de manger disparaissent, cela peut vite devenir un problème.

Quoi qu'il en soit, même les crocodiles modernes ne sont pas exclusivement carnivores. De nombreuses espèces ont été observées de temps à autre en train de déguster des fruits, parfois même en les cueillant directement dans l'arbre. Il est donc clair que les crocodiliens sont plus flexibles qu'on ne le pense et que les crocodiles actuels sont bien mieux adaptés que ne le laisse entendre le surnom trompeur de « fossiles vivants » qui leur est donné.

Le Crocodile du Nil

Avec des mâles pouvants mesurer jusqu'à 6 mètres, le crocodile du Nil est le plus grand crocodile d'Afrique, et probablement le second plus grand au monde après le crocodile marin. Il est présent dans 26 pays, au centre, à l'est et au sud du continent.

Dans l'Egypte ancienne, Sobek, le dieu des eaux et de la fertilité, était représenté avec une tête de crocodile. Aujourd'hui encore, le Nil et toutes ses créatures sont importants pour les Nubiens. Ce peuple a dû quitter ses terres ancestrales au moment de la construction du barrage d'Assouan. Mais les Nubiens de certains villages tentent de faire perdurer la tradition en élevant des crocodiles du Nil dans leurs propres maisons.

Si une cohabitation pacifique entre le crocodile du Nil et les humains semble ponctuellement possible, Cette espèce n'en reste pas moins dangereuse. D'après CrocBITE, entre 2010 et 2020 le nombre d'attaques mortelles était de 696 pour un total de 1005 attaques (69% de décès).

Comme la plupart de ses congénères, les crocodiles du Nil ont été chassés de manière intensive pour leur peau entre les années 1940 et 1970. La peau de cette espèce fait partie des plus recherchées avec celle du crocodile marin et de certains alligators. Elle est donc aussi l'une des plus chères. Grâce à cette protection, la plupart des populations ont pu se reconstituer. Le statut de conservation de l'IUCN est celui de "Préoccupation mineure".

La couleur des adultes est assez variable allant du brun au gris. Leur ventre est toujours de couleur claire. Comme chez la plupart des crocodiles, les mâles sont plus grands que les femelles.

Le crocodile du Nil est situé au plus haut dans la chaîne alimentaire. Il est carnivore, opportuniste et se nourrit essentiellement de crustacés, de poissons, d'amphibiens et de lézards. Les individus les plus gros peuvent également chasser des mammifères.

Comme pour les autres crocodiles, les individus de cette espèce doivent réguler leur température corporelle en alternant entre périodes d'immersion dans l'eau et période au soleil. L'alternance entre les deux permet de conserver une température entre 19°C et 29°C.

Dans ses déplacements, le crocodile est aussi agile sur terre ferme que dans l'eau. Bien que solitaires, ces crocodiles sont capables de communiquer entre eux via des rugissements. Ce grondement est principalement utilisé pendant la saison des amours.

Les adultes n'ont pas de prédateurs mais les juvéniles sont particulièrement vulnérables. La reproduction est saisonnière, pendant la saison des pluies de novembre à avril. La femelle creuse ensuite un nid sur la berge, à l'image des tortues. Elle y pond de 35 à 50 œufs qui incuberont 75 à 95 jours avant l'éclosion. La mère va défendre son nid pendant toute la période.

Le sexe des crocodiles est déterminé par la température du nid : les mâles naissent quand la température est entre 31 et 34 °C. Les femelles naissent avec des températures plus basses, ou plus élevées. Quand l'éclosion approche, les jeunes réalisent des cris pour alerter la mère. Cette dernière dégage alors le nid et aide les petits à sortir des œufs. À la naissance, ces derniers mesurent une vingtaine de centimètres.

Plus de la moitié des œufs de crocodiles n'écloront pas, en raison d'infertilité, d'une température de nid trop élevée, d'une inondation qui emporterait le nid, etc. Les nouveaux-nés eux seront une proie facile pour des poissons, des oiseaux.

Le crocodile du Nil est très dangereux avec près de 70% des attaques ayant été mortelles entre 2010 et 2020 d'après CrocBITE (outil de recensement des attaques de crocodiles mis en place par le groupe de spécialistes de crocodiles de l'IUCN. Avec la reconstitution des populations dans certaines zones, les contacts avec l'homme sont plus fréquents ce qui génère une hausse du nombre d'attaques. C'est pourquoi les programmes de cohabitation hommes-crocodiles sont essentiels.

Le crocodile du Nil a fait l'objet d'une chasse intensive jusque dans les années 1970s pour sa peau très recherchée par l'industrie du cuir. L'IUCN note toutefois que les densités de population des crocodiles du Nil sont positivement corrélées à la création d'espaces protégés.

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