Il n’y a pas de supermarché pour les animaux. Pour vivre et grandir, chaque être vivant a besoin de se nourrir, mais il est aussi le plat préféré d’un autre ! Des mers froides jusqu’aux plus chaudes, il existe des relations alimentaires entre tous les organismes marins : c’est ce qu’on appelle les chaînes alimentaires, qu’on appelle la chaîne alimentaire ou réseau trophique.
Qu'est-ce que la Chaîne Alimentaire Marine ?
La chaîne alimentaire marine, loin d'être une simple succession linéaire d'organismes, est un réseau complexe et dynamique d'interactions trophiques. Elle décrit le flux d'énergie et de nutriments à travers l'écosystème marin, depuis les producteurs primaires jusqu'aux prédateurs apex. Comprendre ce réseau est crucial pour appréhender la santé et la stabilité des océans, impactés par des facteurs anthropiques croissants.
Au sein de la chaîne alimentaire, chaque être vivant a une place définie, les végétaux se développent grâce à la lumière et servent de nourriture aux herbivores, qui à leur tour sont mangés par les carnivores. A leur mort, les grands prédateurs et tous les organismes vivants sont consommés et dégradés par de très petits organismes que l’on appelle les bactéries, les champignons et autres. Ils décomposent la matière morte pour produire des particules qui seront absorbées par les végétaux.
La chaîne alimentaire maintient l'équilibre de l'écosystème qui regroupe les êtres vivants et l’environnement dans lequel ils vivent et interagissent. De nombreuses relations alimentaires lient les espèces de l’écosystème entre elles car certaines espèces, par exemple, mangent des herbivores et des carnivores - on parle alors de « réseau trophique ».
Les Niveaux Trophiques de la Chaîne Alimentaire Marine
Niveau 1 : Les Producteurs Primaires - La Base de la Pyramide
Au cœur de la chaîne alimentaire marine se trouve le phytoplancton, un ensemble microscopique d'algues et de cyanobactéries. Ici, le phytoplancton ou plancton végétal. On le trouve près de la surface, car ces algues microscopiques sont des producteurs, comme toutes les plantes. C’est-à-dire qu’elles produisent leur matière organique à partir de la photosynthèse - elles ont donc besoin de lumière ! Pour leur croissance, elles puisent dans le milieu océanique les sels minéraux qui leur sont nécessaires. Elles n’ont pas besoin de consommer d’autres êtres vivants.
Ces organismes photosynthétiques, à la base de la pyramide trophique, convertissent l'énergie solaire en matière organique, grâce à la photosynthèse. Ce processus vital fournit la matière première pour l'ensemble de la chaîne alimentaire. La production primaire du phytoplancton est influencée par de nombreux facteurs, tels que la lumière, la température, la disponibilité des nutriments (nitrates, phosphates, silicates) et la salinité. Une compréhension fine de ces facteurs est essentielle pour prédire la productivité océanique et l'impact du changement climatique.
En plus du phytoplancton, les macroalgues (algues brunes, rouges, vertes) et les phanérogames marines (herbiers marins) contribuent significativement à la production primaire dans certains écosystèmes côtiers. Ces organismes, plus visibles que le phytoplancton, forment des habitats essentiels pour de nombreuses espèces animales, offrant nourriture et protection.
Niveau 2 : Les Consommateurs Primaires - Les Herbivores
Viennent ensuite les animaux que l’on appelle les consommateurs. Eux dépendent d’autres êtres vivants pour se nourrir. Sa distribution et son abondance varient considérablement selon les régions et les saisons, influencées par la disponibilité de nourriture et les conditions environnementales. Le zooplancton joue un rôle crucial dans le transfert d'énergie du phytoplancton vers les niveaux trophiques supérieurs. Certains mollusques, crustacés, harengs, sardines, morues, maquereaux, se nourrissent par exemple de zooplancton.
Dans les zones côtières, de nombreux herbivores benthiques (vivant sur le fond) se nourrissent de macroalgues et d'herbiers marins. Parmi eux, on trouve des gastéropodes, des crustacés, des poissons et des échinodermes (oursins, par exemple). Ces herbivores contribuent au maintien de la biodiversité des habitats côtiers et jouent un rôle important dans le contrôle de la croissance des algues.
Niveau 3 & 4 : Les Consommateurs Secondaires et Tertiaires - Les Prédateurs
Les consommateurs secondaires se nourrissent des consommateurs primaires, et les consommateurs tertiaires se nourrissent des secondaires, et ainsi de suite. Cette structure pyramidale illustre la progression de l'énergie à travers la chaîne alimentaire. On retrouve une grande diversité d'espèces à ces niveaux, incluant des poissons, des céphalopodes, des oiseaux marins, des mammifères marins (phoques, dauphins, baleines), etc. Les interactions prédateur-proie sont complexes et dynamiques, régulant les populations et influençant la structure des communautés.
Exemples de consommateurs secondaires : Sardines se nourrissant de zooplancton, certains crustacés se nourrissant d'autres crustacés plus petits.
Exemples de consommateurs tertiaires : Thon se nourrissant de sardines, dauphins se nourrissant de poissons plus petits.
Niveau 5 : Les Prédateurs Apex - Au Sommet de la Chaîne
Les prédateurs apex occupent le sommet de la chaîne alimentaire, sans prédateurs naturels significatifs. Ils jouent un rôle clé dans le maintien de l'équilibre des écosystèmes, régulant les populations des niveaux trophiques inférieurs. Exemples : requins, orques, certains oiseaux de mer.
Enfin, tout en haut de la chaîne alimentaire, les grands carnivores comme les thons, bars, espadons, dauphins, cachalots, requins ou orques se nourrissent des petits carnivores. Souvent mal aimés, les requins jouent pourtant un rôle essentiel au sein du réseau trophique. Ils régulent les populations des plus petits carnivores ou se nourrissent d’animaux malades ou morts. Ils participent ainsi au nettoyage des océans !
La disparition ou la diminution des populations de prédateurs apex peut avoir des conséquences dramatiques sur l'ensemble de la chaîne alimentaire, entraînant des déséquilibres et une perte de biodiversité.
Décomposeurs : Le Recyclage de la Matière
Les décomposeurs, tels que les bactéries et les champignons, jouent un rôle crucial dans le recyclage de la matière organique. Ils décomposent les organismes morts et les déchets, libérant les nutriments dans l'environnement, qui seront ensuite utilisés par les producteurs primaires. Ce processus de recyclage est essentiel pour le maintien de la productivité de l'écosystème marin.
Comme il faut toujours débarrasser la table, un dernier groupe d’êtres vivants intervient. Ce sont les décomposeurs, comme les crabes, les homards, d’autres mollusques, les vers annelés ou encore les bactéries. Ils vont faire disparaitre la matière organique, autrement dit les plantes et les animaux morts, en les décomposant. Ces déchets sont alors transformés en éléments minéraux, qui vont ensuite, à leur tour, être absorbés par les producteurs comme le phytoplancton ! Et le cycle redémarre.
Exemples Concrets de Chaînes Alimentaires Marines
Voici quelques exemples concrets illustrant la complexité des réseaux trophiques marins:
- Phytoplancton → Zooplancton → Sardines → Thon → Requin
- Herbier marin → Oursin → Loutre de mer
- Phytoplancton → Krill → Baleine à fanons
Il est important de noter que ces exemples ne représentent qu'une petite partie de la complexité des interactions au sein des écosystèmes marins. De nombreuses espèces peuvent occuper plusieurs niveaux trophiques, et les relations prédateur-proie sont souvent complexes et fluctuantes.
Impacts Humains et Perturbations de la Chaîne Alimentaire
Les activités humaines ont des impacts majeurs sur la chaîne alimentaire marine. La surpêche, la pollution (plastiques, produits chimiques), le changement climatique (acidification des océans, réchauffement) et la destruction des habitats (récifs coralliens, mangroves) perturbent les équilibres fragiles de cet écosystème. Ces perturbations peuvent entraîner des effondrements de populations, des invasions d'espèces, et une diminution de la biodiversité, avec des conséquences importantes pour les écosystèmes et les populations humaines qui dépendent des ressources marines.
Dans les récifs coralliens, le triton géant se nourrit d'une étoile de mer très grande elle aussi : Acanthaster (ou l'étoile de mer couronne d'épine). Celle-ci est surtout très vorace, et se nourrit de grande quantité de coraux. Le triton est le seul animal à pouvoir se nourrir de cette grande étoile de mer, celle-ci est toxique pour les autres animaux. La surpêche du triton et sa forte diminution, entraine une explosion du nombre d'Acanthaster car elles n'ont alors plus ou très peu de prédateurs qui les mangent.
Les êtres vivants dépendent les uns des autres. Dans le réseau trophique marin, tous les êtres vivants, proies et prédateurs, dépendent les uns des autres. Si une espèce disparaît à cause d’une maladie, de la surpêche ou du réchauffement climatique, c’est tout l’équilibre qui est brisé.
Le requin par exemple a disparu en Tasmanie, et ce n’est pas sans conséquence : privés de prédateurs, les poulpes prolifèrent. Leur population augmente dans l’écosystème. Et comme ces derniers se nourrissent de langoustes, ils vont toutes les dévorer au risque de les voir disparaître. C’est aussi le cas sur la côte est des États-Unis : sans requins, la mourine, une espèce de raie, a proliféré et elle dévore tous les bivalves comme les praires, huitres ou palourdes.
Le Plancton : Base de la Vie Marine
Le phytoplancton constitue LA base de l’alimentation de tous les êtres vivants marins : 1 tonne de phytoplancton nourrit 100 kg de zooplancton qui donnent 10 kg d’alevins de poissons et de crustacés qui permettent de produire 1 kg de petits poissons. Et enfin, ce kilogramme donne 100 g de thon.
Si le plancton disparaît… c’est tout l’Océan qui est en danger ! Qui dit pas de plancton, dit pas de poisson ! Or ce sont plus de 3 milliards d’êtres humains qui dépendent de cette source de protéine.
L'Arctique : Un Écosystème Fragile
Comparé aux autres océans, l’Arctique est plutôt pauvre en espèces. Même au contact de la glace, des algues poussent (phytoplancton) et les animaux du zooplancton (copépodes, etc.) viennent les brouter. Cette manne attire les poissons, eux-mêmes proies des oiseaux de mer, des cétacés et des phoques. Au cœur de la banquise arctique, vents et courants créent des zones d’eau libre - c’est-à-dire libre de glaces - appelées polynies. Leur présence permet une abondante activité de la vie marine (plancton, poissons, oiseaux et mammifères marins).
TAG: