Dans le Pacifique Sud, Wallis-et-Futuna, collectivité d’outre-mer français (COM), n’échappe pas à la tendance régionale en ce qui concerne l'alimentation et ses conséquences sur la santé.
Selon les chiffres du dernier recensement agricole, il y a 22 116 porcs à Wallis et Futuna sur plus de 2000 exploitations. La production répond à une forte demande pour les événements religieux et coutumiers.
Plus de 50% pour la coutume, le reste pour l'autoconsommation et la commercialisation. Un vrai potentiel.
Taleka Takasi fait partie des éleveurs patentés de l'île. Son élevage a maintenant 7 ans et compte plus d'une soixantaine de têtes. Cette mère de famille souhaiterait développer son activité, mais elle se heurte au problème de débouchés.
Au fur et à mesure, qu'elle s'investit dans le secteur, Taleka constate que l'activité, telle qu'elle est pratiquée sur le territoire n'est pas du tout rentable. Même si les prix fixés généralement sont déjà très élevés.
Lors des périodes de communions, j'arrive à vendre les plus grosses pièces. Pendant l'année, ce sont les porcelets de 25 kilos qui partent comme des petits pains.
Pour les sacs de granulés, je dépense entre 250 et 300 000 xfp par mois. Le seul domaine pour qui l'élevage de porcs rapporte énormément, c'est l'importation des sacs de granulés. Chaque année, ce sont plus de 200 tonnes importés sur le territoire.
Pour faire face à cette dépendance, le lycée agricole a mis en place un projet de fabrication d'ensilage de manioc.
Patita HANISI est également éleveur. Il est membre du groupement des éleveurs. La solution selon lui, c'est de concrétiser le fameux projet d'abattoir dont on parle depuis des années sur le territoire.
L'abattoir est toujours en projet, le groupement est en relation avec la CCIMA pour cela. L'abattoir est une structure essentielle si l'on veut développer la filière porcine.
C'est le coût apparemment qui bloque, c'est très cher. De plus, il faudrait que nous soyons plus nombreux dans le groupement. Pour l'instant, nous ne sommes que 3 personnes.
Un des aspects importants de l'alimentation à Wallis et Futuna est la consommation de viande en conserve, notamment le "Tini pipi". Le Tini pipi a même réussi à se faire une place de choix dans les mets traditionnels.
L’obstacle le plus consensuellement identifié aux politiques de prévention et de prise en charge par les acteur.e.s du secteur de la santé à 'Uvea (Wallis) et à Futuna est avant tout d’ordre « culturel » : c’est la « culture » polynésienne qui encouragerait l’obésité par une valorisation de l’embonpoint, associé à la maternité pour les femmes et au pouvoir pour les hommes.
Les enquêtes ethnographiques confirment l’évolution contemporaine des normes corporelles dans le Pacifique Sud, sous l’influence conjuguée des politiques de santé publique et des normes de beauté promues à l’échelle globale (Brewis et al., 1998 ; Brewis and McGarvey, 2000 ; Craig et al., 1996 ; Hardin, McLennan, Brewis, 2018 ; Schuft, Massiera, 2011).
Les enquêtes épidémiologiques (Linhart et al., 2015) indiquent ainsi que, à Wallis et à Futuna, la prévalence de l’obésité et du diabète devient vraisemblablement majeure autour des années 1990, ce qui correspond à la généralisation de l’accès à une nourriture importée et ultra-transformée et aux congélateurs (actuellement, un foyer sur deux en est équipé5 voir Michoudet, 2019), et donc à la fin de la précarité alimentaire dans un environnement marqué jusque-là par une saison des cyclones particulièrement redoutable pour les produits de l’agriculture vivrière.
L'étude de Girin et al. (2014) indique que 87 % de la population adulte y est en surpoids ou obèse, et que 18 % de la population adulte est affectée par le diabète de type 2, réputé imputable au surpoids et à l’obésité.
Selon l’OMS, parmi les dix pays dont la proportion de population considérée comme obèse est la plus importante, neuf sont des États indépendants du Pacifique : les îles Cook, les Palau, Nauru, Samoa, Tonga, les îles Marshall, Niue, les Kiribati et Tuvalu affichent des taux d’obésité de leurs populations compris entre 40 et 50 % - un chiffre qui double aisément dès lors que l’on y ajoute la part des personnes considérées comme en surpoids.
Le Pacifique est ainsi la région du monde où, entre 1975 et le début des années 2000, la population adulte a connu le taux le plus important d’augmentation de l’indice de masse corporelle, calculé par décennie (Brewis, Hardin, McLennan 2018 ; Finucane et al., 2011 ; Ng et al., 2014 ; Sundborn et al., 2010).
Les aliments locaux, tels que le taro, l'igname, le kape et le fruit à pain, sont riches en fibres, pauvres en matières grasses, en sel et en sucre. Ils sont donc considérés comme bénéfiques selon les normes nutritionnelles actuelles.
À Wallis, l’expression sino kovi [littéralement, « le corps mauvais »] est couramment utilisée pour désigner les corps maigres, non pas en tant que les corps minces seraient « laids » en soi, mais bien plutôt pour indexer l’idée de maladie.
Très souvent, ce sont des personnes âgées dénutries qui sont ainsi qualifiées, dans une expression de pitié et non de mépris.
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