Vente de Produits Alimentaires à Date Courte : Comprendre la Réglementation

L'inflation croissante amène les consommateurs à revoir leurs habitudes et à chercher des solutions pour un panier de course abordable. Dans ce contexte, les produits alimentaires avec des dates de péremption courtes, souvent proposés à prix réduits, suscitent un intérêt particulier. Cependant, il est crucial de comprendre la réglementation en vigueur pour éviter tout risque pour la santé et contribuer à la lutte contre le gaspillage alimentaire.

Comprendre les Dates Limites : DLC et DDM

Il existe deux types de dates limites pour les produits alimentaires : la date limite de consommation (DLC) et la date de durabilité minimale (DDM). Il est essentiel de les distinguer pour consommer les produits en toute sécurité et éviter le gaspillage inutile.

Seul le dépassement de la DLC comporte un risque pour la santé.

La Date Limite de Consommation (DLC)

La DLC est la date après laquelle la consommation d'un produit devient dangereuse pour la santé. Elle est indiquée sur les produits alimentaires très périssables et emballés, tels que les viandes déjà découpées, les charcuteries, les plats cuisinés réfrigérés et les yaourts. Cette date est fixée par le fabricant, sauf pour quelques produits où la réglementation sanitaire s'impose.

La DLC est indiquée par la mention : "À consommer jusqu'au..." suivie de l'indication du jour, du mois et éventuellement de l'année, ou d'une référence à l'endroit où la date est indiquée sur l'emballage du produit. Ces mentions sont suivies d'une description des conditions de conservation à respecter. Par exemple, sur une salade en sachet prête à consommer, on peut lire : "DLC : À consommer jusqu'au 18/11/2024".

Non, ce n'est pas possible car une fois la DLC dépassée, le produit peut être altéré ou dangereux pour votre santé.

Le professionnel qui ne respecte pas la DLC et vend des produits périmés s'expose à des sanctions. Il peut également être tenu responsable en cas de problème de santé lié à la consommation du produit périmé.

En cas d'erreur d'étiquetage du fabricant sur la DLC, celui-ci a l'obligation de rappeler ses produits et de les déclarer sur Rappelconso.

Le fait de vendre une denrée alimentaire impropre à la consommation est puni d'une peine d'amende.

Les sanctions diffèrent selon que le produit périmé est proposé à la vente par simple négligence ou avec une intention de tromper le consommateur.

Vente par Négligence

Il est interdit de proposer un produit à la vente le lendemain de la DLC. Le vendeur des produits périmés risque une amende de 1 500 € par produit périmé proposé à la vente. En cas de litige, il faut alerter la direction de protection des populations (DDPP) de son département.

Intention de Tromper

Il est interdit de proposer un produit à la vente le lendemain de la DLC. Le vendeur qui vend volontairement des produits périmés en cherchant à tromper ses clients commet un délit de tromperie. C'est notamment le cas si des produits périmés ont été vendus avec une nouvelle étiquette comportant une date plus récente. C'est ce qu'on appelle la remballe.

La personne responsable d'un délit de tromperie (commerçant, chef de rayon...) risque une peine allant jusqu'à 7 ans de prison et 750 000 € d'amende. Si les faits sont graves, l'amende peut être portée jusqu'à 10 % du chiffre d'affaires moyen annuel, calculé sur les 3 derniers chiffres d'affaires annuels connus à la date des faits.

Le magasin peut aussi être poursuivi en tant que personne morale pour des infractions commises par ses salariés en son nom. Par exemple, si la direction a donné des consignes au chef de rayon pour éviter les pertes financières. Dans ce cas, l'entreprise risque une amende de 3 750 000 € maximum. Elle risque aussi tout ou partie des sanctions suivantes :

  • Affichage de la décision judiciaire dans le magasin ou dans les médias
  • Interdiction d'exercer l'activité en cause (la boucherie par exemple) à titre définitif ou pour 5 ans
  • Fermeture définitive ou pour 5 ans de l'établissement

En cas de litige, il faut alerter la direction de protection des populations (DDPP) de son département.

Le professionnel qui ne respecte pas son obligation de déclaration auprès de Rappelconso s'expose à une amende de 5e classe (1 500 € maximum).

La Date de Durabilité Minimale (DDM)

La date de durabilité minimale est une date indicative. Une fois la date dépassée, le produit perd de ses qualités gustatives ou nutritives (baisse de la teneur en vitamines par exemple), mais il n'est pas dangereux pour la santé. C'est le cas, par exemple, des produits secs, stérilisés ou déshydratés (café, lait, jus de fruits, gâteaux secs, boîtes de conserve...).

Pour certains produits, la mention de la DDM n'est pas obligatoire. Par exemple, fruits et légumes frais, vins, vinaigres, sel, sucres en morceaux, chewing-gums.

La date de durabilité minimale des produits est précédée de l'une des mentions suivantes : "À consommer de préférence avant le ..." quand la date comporte l'indication du jour, "À consommer de préférence avant fin ..." dans les autres cas.

La précision de la date dépend de la durabilité du produit :

  • Inférieure à 3 mois: Le fabriquant peut uniquement indiquer le jour et le mois sur le produit.
  • Entre 3 mois et 18 mois: Le fabricant peut uniquement indiquer le mois et l'année sur le produit.
  • Supérieure à 18 mois: Le fabricant peut uniquement indiquer l'année sur le produit.

Un produit peut être proposé à la vente avec une DDM dépassée. Cela n'est pas une infraction (c'est-à-dire un fait interdit par la loi).

Date de Congélation

La date de congélation correspond à la date à laquelle le produit a été congelé ou à la date de 1re congélation si le produit a été congelé à plusieurs reprises.

Cette date doit obligatoirement figurer sur les produits suivants :

  • Viandes et préparations de viandes congelées
  • Produits non transformés de la pêche congelés (poissons, fruits de mer...)

La mention "Produit congelé le..." doit figurer sur l'étiquetage suivie du jour, du mois et de l'année ou d'une référence à l'endroit où la date est indiquée.

Le Gaspillage Alimentaire en France et dans le Monde

En France, chaque année, 10 millions de tonnes de nourriture sont perdues ou gaspillées tout au long de la chaîne alimentaire. Ces 10 millions de tonnes d'aliments représentent 16 milliards d'euros, soit 50 kg et 240 euros par Français chaque année. Ce gaspillage se produit à différents moments de la chaîne de production :

  • 32 % au moment de la production effective.
  • 14 % au moment de la distribution dans les supermarchés, épiceries ou magasins de proximité.

Une partie des aliments est aussi directement jetée par les consommateurs. En effet, chaque Français jette 7 kg d'aliments non consommés et encore emballés par an. L'autre partie de ces aliments qui sont jetés concerne les restes de repas (à hauteur de 25 %), les fruits et légumes non consommés (dans la même proportion), le pain (14 %) et enfin les boissons (5 %).

Selon l'Organisation pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), 1,3 milliard de tonnes de nourriture sont perdues ou jetées chaque année, ce qui correspond à 30 % des aliments produits sur la planète. Concrètement, cela représente 45 % de tous les fruits et légumes, 35 % de tous les poissons et produits de la mer, 30 % de toutes les céréales, 20 % de tous les produits laitiers et 20 % de toute la viande et la volaille.

La Législation Française Contre le Gaspillage Alimentaire

Ces dernières années, la France s'est dotée d'une législation anti-gaspillage renforcée : pacte national, loi Garot, loi Egalim, loi AGEC. Depuis 2013, la lutte contre le gaspillage à tous les niveaux de la chaîne est devenue une priorité. L'objectif est clair : réduire le gaspillage de 50 % par rapport à son niveau de 2015 dans les domaines de la distribution alimentaire et de la restauration collective d'ici 2025 et d'ici 2030 dans les domaines de la consommation, de la production, de la transformation et de la restauration commerciale.

Lancé en juin 2013, ce pacte national réunit l'ensemble des parties prenantes tout au long de la chaîne alimentaire, et pose les jalons de la lutte contre le gaspillage en France. L'objectif affiché est de réduire de moitié le gaspillage alimentaire à l'horizon 2025.

C'est en février 2016 qu'est entrée en vigueur la première loi française relative à la lutte contre le gaspillage alimentaire.

  1. Favoriser la prévention du gaspillage.
  2. Utiliser les invendus par le don ou la transformation.
  3. Utiliser les restes alimentaires à des fins de compost ou de valorisation énergétique.

Entrée en vigueur en novembre 2018, la loi Egalim a pour but de fournir un meilleur cadre aux relations entre les acteurs de la chaîne de production alimentaire.

  1. Renforcer la qualité sanitaire, environnementale et nutritionnelle des produits.
  2. Favoriser une alimentation saine, sûre et durable pour tous.

La possibilité de faire des dons alimentaires est étendue à la restauration collective et à l'industrie agroalimentaire.

Autres mesures mises en place : l'encadrement des taux de remise des produits anti-gaspillage au sein de la grande distribution, et l'obligation faite aux restaurateurs de fournir des « doggy bags » aux clients qui en font la demande.

La loi Egalim a été complétée en 2021 par la loi Egalim 2, pour renforcer la protection des agriculteurs et modifier les obligations relatives aux dates de durabilité minimale, comme détaillé plus bas.

Entrée en vigueur en février 2020, la loi AGEC (acronyme pour Anti-Gaspillage pour une Économie Circulaire) pose un objectif principal de réduction des déchets.

La loi AGEC met notamment fin à l'élimination des invendus non alimentaires : produits électriques et électroniques, vêtements et chaussures, meubles, livres, produits d'hygiène et de puériculture devront être donnés à des associations ou à des structures de l'économie sociale et solidaire. À défaut de don, le recyclage est encouragé.

Les sanctions envers ceux qui détruisent ou détériorent les invendus alimentaires sont renforcées : l'amende sera modulable en fonction de la taille du commerce et peut aller jusqu’à 15 000 € par manquement pour une personne morale.

Par ailleurs, les initiatives vertueuses sont valorisées grâce à la création d'un label national Anti-Gaspillage Alimentaire. Ce label peut être accordé à toute personne morale qui contribue aux objectifs nationaux de réduction du gaspillage alimentaire. Il est délivré par des organismes certificateurs sélectionnés et agréés par l'État.

Si l'arsenal juridique contre le gaspillage a des conséquences pour le consommateur, il vise en premier lieu les industriels et les distributeurs, qui sont largement mis à contribution. Ainsi, depuis la loi Garot, les magasins doivent respecter des règles spécifiques au quotidien.

Par exemple, les surfaces commerciales de plus de 400 m² ont l'obligation de nouer un partenariat avec une association d'aide alimentaire pour lui faire don de ses invendus alimentaires, au lieu de les jeter ou de les détruire.

Les distributeurs alimentaires ont également l'interdiction de rendre impropres à la consommation des invendus encore consommables.

La loi AGEC pose également l'interdiction d'éliminer les produits non alimentaires, comme les produits d'hygiène quotidienne, les vêtements et les chaussures, les objets électroniques, l'électroménager ou les livres : ces derniers doivent faire l'objet d'un don en priorité.

S'ils n'en ont pas l'obligation, les distributeurs ont la possibilité de vendre les denrées alimentaires dont la date de péremption est bientôt dépassée, à un tarif réduit.

Pour limiter les pertes, ils peuvent également faire don de ces denrées alimentaires à des associations.

Depuis la loi Garot de 2016, les magasins de plus de 400 m² de surface commerciale ont l'obligation de donner tout ou partie de leurs invendus à au moins une association caritative.

Le point de vente doit nommer un responsable du don en interne, et garantir la traçabilité et la qualité des produits donnés. Ensuite, une convention de partenariat avec une ou plusieurs associations d'aide alimentaire habilitées à recevoir des dons doit être mise en place pour le don des denrées consommables non vendues.

Enfin, depuis février 2020, la loi AGEC interdit la destruction des invendus non alimentaires. Les vêtements, les chaussures, l'électroménager, les produits d'hygiène, de beauté et de puériculture, les livres et les meubles ne peuvent désormais plus être détruits.

En donnant leurs invendus, les entreprises, qu'elles soient assujetties à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés, bénéficient d'une réduction d'impôt. 60 % de la valeur des produits donnés, pour un montant total de dons inférieur à deux millions d'euros, dans la limite de 20 000 € ou de 5 ‰ (5 pour mille) du chiffre d'affaires, si ce dernier montant est plus favorable.

Compléter l'Information sur la DDM

Le décret n° 2022-1440 du 17 novembre 2022 précise de quelle manière les opérateurs peuvent désormais compléter l’information sur la date de durabilité minimale d’un produit alimentaire afin d’informer les consommateurs que le produit reste consommable après cette date.

Le règlement n° 1169/2011 concernant l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires (dit règlement INCO) exige, s’agissant des denrées alimentaires préemballées, que le consommateur soit informé sur la DDM ou la DLC.

Lorsque le produit alimentaire est microbiologiquement très périssable et donc susceptible de présenter, après une courte période, un danger immédiat pour la santé humaine, une DLC doit être communiquée.

À l’inverse, la DDM, indiquée sous la forme « à consommer de préférence avant », signifie que l’aliment pourra être consommé en toute sécurité après cette date mais que ses qualités organoleptiques pourraient être altérées (goût, texture, aspect…).

La date se compose de l’indication, en clair et dans l’ordre, du jour, du mois et, éventuellement, de l’année. L’annexe X du règlement INCO prévoit également que, pour certains produits (vins, fruits et légumes frais qui n’ont pas fait l’objet d’un épluchage, découpage ou d’autres traitements similaires, sel, vinaigres…), l’inscription d’une DDM n’est pas requise.

Plusieurs facteurs peuvent expliquer une approche précautionneuse des producteurs, indiquant volontairement une date de consommation plus courte que la date réelle à laquelle le produit ne doit effectivement plus être consommé. Cette approche vise notamment à pallier une diminution de la qualité du produit, laquelle est susceptible d’inciter le consommateur à le jeter.

Une mauvaise rotation des stocks : dans les relations entre producteurs et distributeurs, les producteurs sont généralement contraints de livrer les produits lors de leur premier tiers de temps de vie afin qu’ils puissent être vendus plus longtemps. Une partie de la production est donc susceptible d’être jetée en raison du fait que les produits n’ont pas pu être livrés avant cette échéance du « tiers de vie ».

Au stade de la distribution, les produits plus anciens sont parfois relayés au fond du rayon, cachés derrière des produits plus récents.

Un manque de sensibilisation des différents acteurs : les distributeurs ne sont pas toujours suffisamment sensibilisés sur la possibilité de donner, voire de vendre, des produits dont la DDM est dépassée. Parallèlement, le manque de pédagogie vis-à-vis des consommateurs conduit ces derniers à considérer les produits à DDM dépassée comme périmés.

La formule « pour une dégustation optimale » avait été proposée dans le cadre du « pacte sur les dates de consommation » lancé en 2020 par l’entreprise Too Good to Go qui œuvre depuis plusieurs années contre le gaspillage alimentaire et signé par plus de 60 parties prenantes (institutions, industriels, distributeurs, fédérations, associations…). Cette formulation avait été plébiscitée par deux tiers des répondants à une étude consommateur.

Ainsi, pour les produits alimentaires fabriqués hors de France, la modification attendue du règlement INCO devrait être déterminante et permettre le maintien d’informations uniformes sur le marquage de la date dans toute l’Union européenne.

Modification de la formulation et de la présentation du marquage de la date de consommation (terminologie, format, présentation visuelle) afin d’améliorer la compréhension des différences entre enjeux de sécurité alimentaire et altération de la qualité uniquement. Une proposition de révision du règlement INCO devrait être publiée en 2023. La France sera alors peut-être contrainte de modifier ce nouveau décret pour assurer une complète harmonisation de l’information sur les dates de consommation au niveau européen.

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