Comprendre le Gaspillage Alimentaire : Définition, Enjeux et Solutions

Le gaspillage alimentaire est un problème important de notre époque, avec des conséquences délétères sur l’environnement, l’économie et la société. Chaque année, des millions de tonnes de nourriture finissent à la poubelle alors qu’elles pourraient nourrir des populations ou être utilisées à d’autres fins. Face à cette situation alarmante, il est crucial d’agir à tous les niveaux, du producteur au consommateur.

Qu'est-ce que le gaspillage alimentaire ?

Le gaspillage alimentaire se définit comme l’ensemble des aliments destinés à la consommation humaine qui, à un moment de la chaîne alimentaire, sont perdus, jetés ou dégradés. En France, cette problématique est d’une ampleur significative.

Chiffres clés du gaspillage alimentaire en France

En France, chaque année près de 20% de la nourriture produite finit à la poubelle. En d’autres termes, c’est aussi chaque année 10 millions de tonnes de nourriture gâchée, soit 16 milliards d’euros et 15 millions de tonnes équivalent CO2, soit 3% des émissions de gaz à effet de serre de l’activité nationale.

En 2021, le pays a généré 8,8 millions de tonnes de déchets alimentaires, soit environ 129 kg par habitant. Parmi ces déchets, 4,3 millions de tonnes étaient des aliments encore comestibles, représentant un gaspillage alimentaire de 63 kg par personne.

Toutes les étapes de la chaîne alimentaire y contribuent :

  • 1,24 millions de tonnes pour la production primaire (14%)
  • 1,72 millions de tonnes dans la transformation (20%)
  • 633 000 tonnes dans la distribution (soit 7%)
  • 1,08 millions de tonnes dans la restauration (12%)
  • 4,08 millions de tonnes dans les ménages (47%)

Les ménages sont responsables de 42 % de ce gaspillage, suivis par les industries agroalimentaires (25 %), la production primaire (12 %), la restauration (12 %) et la distribution (9 %).

La France se situe légèrement en deçà de la moyenne européenne (près de 60 millions de tonnes de déchets alimentaires sont produites au niveau européen, soit 131 kg par habitant).

Les enjeux du gaspillage alimentaire

Les enjeux liés à ce gaspillage sont multiples :

  • Sur le plan environnemental, il contribue au gaspillage des ressources naturelles (terres cultivables, eau, etc.), et des émissions de gaz à effet de serre qui pourraient être évitées. Ces dernières sont évaluées par l’Ademe à 3 % de l’ensemble des émissions nationales.
  • Économiquement, il représente une perte financière considérable. Selon la FAO, les conséquences économiques directes du gaspillage de produits agricoles (à l’exclusion du poisson et des fruits de mer) sont estimées à 750 milliards de dollars par an dans le monde, soit l’équivalent du tiers de notre PIB national. En France, le coût du gaspillage de denrées du champ à la poubelle représenterait 16 milliards d’euros annuels, d’après l’ADEME, soit 240€ par an et par personne si l’on rapporte ce chiffre à l’ensemble de la population française.
  • Socialement, il soulève des questions éthiques, surtout dans un contexte où une partie de la population est en situation d’insécurité alimentaire.

Les étapes de la chaîne alimentaire et les sources de gaspillage

Les déchets sont générés à chaque étape de l’alimentation humaine, depuis la production jusqu’à la consommation en passant par la distribution.

  • Production agricole : Une partie de la récolte est perdue à cause de problèmes logistiques, de maladies ou d’un manque de main-d’œuvre. Les normes d’aspect et de taille peuvent aussi entraîner des pertes.
  • Transformation : Des pertes surviennent lors du processus de transformation des aliments, par exemple, des parties de pommes de terre sont jetées lors de l’épluchage mécanique.
  • Distribution : Les produits peuvent être endommagés pendant le transport ou la mise en rayon. Des commandes inadaptées à la demande des clients peuvent également entraîner des surplus et la péremption de certains produits.
  • Consommation (Domestique et Restauration) : Une part importante du gaspillage alimentaire se produit au niveau domestique : aliments mal conservés, restes de repas jetés, mauvaises interprétations des dates de péremption. Dans la restauration, le gaspillage peut provenir de portions trop importantes, d’une mauvaise gestion des stocks, et de plats non consommés.

Le cadre réglementaire et les objectifs de réduction du gaspillage alimentaire

Face à l’ampleur du problème, la France s’est dotée d’un cadre réglementaire pour lutter contre le gaspillage alimentaire.

  • Loi AGEC (Anti-Gaspillage pour une Économie Circulaire) : Promulguée en 2020, cette loi fixe des objectifs ambitieux de réduction du gaspillage alimentaire. Elle vise à réduire de 50 % le gaspillage alimentaire par rapport à son niveau de 2015 :
    • En 2025 pour les secteurs de la distribution alimentaire et de la restauration collective.
    • D’ici 2030 pour les secteurs de la consommation, de la production, de la transformation et de la restauration commerciale
  • La loi Garot (2016) : Cette loi a révolutionné le secteur de l’aide alimentaire en institutionnalisant le don et en permettant aux associations d’accéder à de nouveaux gisements. Elle hiérarchise les actions à mener : prévention, don, valorisation pour l’alimentation animale, compost ou méthanisation.
  • La loi EGALIM III (2023): Elle précise l’obligation de mettre en place une démarche de lutte contre le gaspillage alimentaire pour l’ensemble de la restauration collective.

Label National Anti-Gaspillage Alimentaire

Afin de distinguer les acteurs engagés, l’État a mis en place ce label. Il vise à valoriser les pratiques de réduction du gaspillage alimentaire, à garantir un niveau réduit de gaspillage aux consommateurs et à encourager des pratiques plus durables. Il existe 3 niveaux de labellisation :

  • 1 étoile : Atteste d’un engagement dans la démarche de lutte contre le gaspillage alimentaire.
  • 2 étoiles : Atteste d’une maîtrise de la lutte contre le gaspillage alimentaire.
  • 3 étoiles : Atteste de l’atteinte d’un niveau exemplaire dans la lutte contre le gaspillage alimentaire.

Comment agir concrètement ? Les solutions à portée de tous

Réduire le gaspillage alimentaire est à la portée de tous. Voici une série d’actions que vous pouvez mettre en œuvre à titre individuel:

À la Maison :

  • Planifier vos repas : Établissez une liste de courses en fonction de ce que vous avez déjà et des repas que vous comptez préparer. Une bonne liste de course comme alliée anti gaspi c’est la base pour éviter les restes ! Pensez donc à lister les aliments dont vous avez besoin avant de vous rendre au supermarché, quitte à acheter de la nourriture en plus petite quantité.
  • Vérifier régulièrement vos réserves de nourriture : Que ce soit dans vos fonds de placards, dans votre frigo, ou dans votre congélateur, pensez à vérifier régulièrement vos réserves de nourriture pour éviter d’acheter certains produits en double.
  • Conserver correctement vos aliments : Apprenez les techniques de conservation adaptées à chaque type d’aliment (au réfrigérateur, au congélateur, dans un endroit sec, etc.). La congélation est une astuce anti gaspi très facile pour conserver les aliments quelques semaines ou mois de plus ! Fruits et légumes, plats cuisinés, viandes… trouvent aisément leur place au frigo.
  • Cuisiner les restes : Ne jetez pas les restes de repas, utilisez-les pour créer de nouveaux plats ou pour un déjeuner rapide. La cuisine anti gaspi connaît un grand succès depuis plusieurs années : consommer le produit dans son entièreté et réutiliser les restes pour en faire de nouvelles recettes, voici les fondements de cette cuisine pleine de bons sens.
  • Comprendre les dates de péremption : Faites la différence entre la date limite de consommation (DLC) et la date de durabilité minimale (DDM). La mention « à consommer de préférence avant » de la DDM signifie que le produit reste consommable après la date indiquée. Saviez-vous que les produits à Date de durabilité minimale (DDM) peuvent encore être consommés minimum 3 mois après la date indiquée ? En France, 20% du gaspillage alimentaire est dû à une mauvaise compréhension des dates de péremption, d’où l’intérêt de bien comprendre à quoi elles correspondent.
  • Acheter des fruits et légumes « moches » : Ne les boudez pas, ils sont tout aussi bons que les autres et moins chers.
  • Pratiquer le « batch cooking » : Préparez plusieurs repas en une seule session pour éviter de gaspiller des aliments frais.
  • Faire du compost : Utilisez les déchets de cuisine (épluchures, marc de café…) pour enrichir votre jardin ou votre balcon. Vous pouvez même faire du lombricompost en intérieur.
  • Utiliser des « doggy bags » au restaurant : Emportez les restes de votre repas pour les consommer plus tard.
  • Paniers Surprise : Panier anti gaspi de boulangerie, de primeur, de supermarché ou de restaurant, les Paniers Surprise ne manquent pas sur notre application ! L’occasion de manger un bon repas tout en évitant que la nourriture soit gaspillée.

Au travail ou dans les cantines, les restaurants :

  • Adapter les portions : Privilégiez les portions adaptées à votre appétit ou demandez des demi-portions.
  • Mettre en place un tri des déchets : Séparez les déchets organiques des autres déchets pour faciliter leur valorisation (compostage, méthanisation).
  • Proposer des options anti-gaspillage : Offrez des plats à base de restes, des salades composées avec les légumes invendus, ou des desserts à base de fruits mûrs.
  • Éduquer les convives : Sensibilisez-les à l’importance de la lutte contre le gaspillage et aux gestes simples à adopter.
  • Adopter une démarche d’amélioration continue : Mesurez régulièrement le gaspillage, analysez les causes et mettez en place des actions correctives.

Au Niveau Local/Collectif :

  • Soutenir les initiatives locales : Encouragez les circuits courts, les producteurs locaux et les associations de lutte contre le gaspillage alimentaire.
  • Participer aux événements anti-gaspillage : Disco Soupe, ateliers de cuisine, projections de films…
  • Créer un jardin partagé : Cultivez ensemble des fruits et légumes pour créer du lien social et réduire votre empreinte environnementale.
  • Mettre en place des actions de sensibilisation : Organisez des ateliers, des conférences ou des jeux pour informer votre communauté sur le gaspillage alimentaire.

Le rôle des acteurs de l'économie sociale et solidaire dans la lutte contre le gaspillage alimentaire

L’économie sociale et solidaire (ESS) peut jouer un rôle important dans la lutte contre le gaspillage alimentaire. De nombreuses structures de l’ESS ont développé des initiatives innovantes et efficaces pour réduire le gaspillage, tout en créant des emplois et en favorisant l’inclusion sociale.

  • Récupération des Invendus : Des associations récupèrent les invendus des marchés, des supermarchés ou des producteurs pour les redistribuer aux personnes dans le besoin ou les transformer en nouveaux produits.
  • Transformation et Revalorisation : Des conserveries solidaires transforment les fruits et légumes abîmés en confitures, soupes ou compotes. D’autres structures proposent des ateliers culinaires pour apprendre à cuisiner les restes.
  • Sensibilisation et Éducation : Les acteurs de l’ESS mènent des actions de sensibilisation auprès du grand public, des écoles et des entreprises pour informer sur les enjeux du gaspillage et promouvoir des pratiques plus durables.
  • Création d’Emplois d’Insertion : De nombreuses structures de l’ESS emploient des personnes éloignées du marché du travail, favorisant ainsi leur réinsertion sociale et professionnelle.
  • Logistique et Stockage : Certaines structures ont développé une logistique de collecte et de redistribution des invendus, assurant ainsi une meilleure gestion des denrées alimentaires.

Agir dans les Cantines Scolaires : Une Opportunité pour Éduquer et Changer les Comportements

Les cantines scolaires représentent un lieu idéal pour agir contre le gaspillage alimentaire et pour sensibiliser les jeunes générations.

Les mesures législatives françaises pour lutter contre le gaspillage alimentaire

De la loi Garot en 2016, et à la loi EGalim en 2018, jusqu'à la loi Climat et Résilience en 2021, la France a pris de nombreuses dispositions législatives pour lutter contre le gaspillage alimentaire.

Au fil des années, l'arsenal législatif français s'est renforcé. Désormais, l’interdiction de rendre impropre à la consommation des denrées encore consommables s’applique aux industries agroalimentaires, aux grossistes, aux distributeurs et à la restauration collective.

Dès 2013, la France a mis en œuvre un Pacte national de lutte contre le gaspillage alimentaire. Renouvelé en 2017, il réunit l’ensemble des acteurs de la chaine alimentaire, dans le but de réduire de 50% le gaspillage alimentaire d’ici 2025 pour les secteurs de la distribution et de la restauration collective, et d’ici 2030 pour les autres secteurs.

Voici quelques dates clés :

  • 11 février 2016 - La loi dite « Garot » établit une hiérarchie dans les actions pour la lutte contre le gaspillage alimentaire.
  • 21 octobre 2019 - En application de la loi EGAlim, une ordonnance relative à la lutte contre le gaspillage alimentaire est publiée au journal officiel.
  • 10 février 2020 - La loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire (loi AGEC) précise la définition du gaspillage alimentaire et fixe des objectifs de réduction.
  • 20 octobre 2020 - Le décret n° 2020-1274 du 20 octobre 2020 relatif aux dons de denrées alimentaires prévus à l'article L. 541-15-6 du code de l'environnement, à leur qualité et aux procédures de suivi et de contrôle de leur qualité.
  • 22 août 2021 - Loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets - Article 256.

TAG:

En savoir plus sur le sujet: