Rabah Zaoui : L'ascension d'un Maître Artisan Pizzaïolo

Connaissez-vous Rabah Zaoui, ce chef renommé dans l’univers de la restauration et de la pizza ? Voilà 30 ans qu’il exerce ce métier, mais c’est surtout la passion qui le guide. La créativité est pour lui une récompense de tous les jours, ainsi que le fait de voir ses clients satisfaits, voire impressionnés. C’est par son travail acharné que Rabah Zaoui a remporté de nombreuses distinctions lors de divers concours. On retiendra cependant son titre de Champion du Monde et de France de la Pizza en 2010, ainsi que les titres de Maître Restaurateur et d’Artisan de France.

Le pizzaïolo de l’avenue Franklin-Roosevelt, champion du monde et de France de la discipline, élève depuis 16 ans la pizza au rang de plat noble. L’architecture intérieure facilite par conséquent la tâche du chef : on s’y sent vite chez soi. Du temps de son premier restaurant à Peyriac-Minervois, il avait listé avec une nutritionniste les taux de glucides, lipides, acides gras... etc contenu dans ses pizzas.

Rabah Zaoui élabore ses pizzas en s’inspirant de la cuisine gastronomique. En outre, convivial, il va discuter avec ses clients pour mieux les connaître et ainsi deviner leurs envies, afin de s’en inspirer et leur offrir une expérience personnalisée. Selon lui, il faut aimer son métier, mais aussi le partager afin de devenir un pizzaiolo confirmé.

Un parcours atypique et inspirant

AJIR GRAND EST s’est rendu à Paris pour rencontrer Rabah ZAOUI, qui est champion du monde de la pizza et de la convivialité. Le parcours de Rabah est atypique, car il est un rapatrié d’Algérie. Sa famille n’a débarqué en France qu’en 1966. Rabah et ses frères étaient très sportifs dans le pays du rugby. Il nous a expliqué son parcours depuis l’Algérie avec son accent chantant de l’Occitanie.

Si tout le monde connaît le Carcassonnais Rabah Zaoui pour ses pizzas, quasiment personne ne sait son histoire. C'est après trois ans de travail que cette figure carcassonnaise sort son premier livre autobiographique, intitulé Itinéraire d'un enfant de Harki, né sous la bonne étoile "5 francs en poche".Ce bouquin de 140 pages, écrit avec l'aide de l'écrivain Yvan Tetelbom et édité par "Libre 2 lire", retrace son parcours et celui de sa famille, son père étant ancien Harki (musulman recruté comme auxiliaire de l'armée française durant la guerre d'Algérie).

Quelques années après la guerre d'Algérie, qui s'est déroulée de 1954 à 1962, le père de Rabah Zaoui, Djerouni Zaoui, est emprisonné quatre mois dans son pays pour avoir été au côté des Français. Après sa libération, plus le choix, il faut partir. "Il est rentré chez nous, a dit à ma mère de prendre une couverture, et on est parti en bateau dans la nuit pour rejoindre la côte française. Une fois arrivée au port de Marseille, la fratrie de cinq enfants (l'une de ses sœurs est restée en Algérie) est rapatriée au camp de Saint-Martin-des-Puits, où résident une vingtaine de familles de Harkis. Ils y resteront 12 ans, dans des conditions particulièrement difficiles : à sept dans 27 m². Sur place, deux instituteurs originaires de Saint-Hilaire viennent donner des cours aux enfants. Les adultes, eux, travaillent pour l'Office national des forêts (ONF). Au fur et à mesure du temps, les familles trouvent du travail et un logement.

Enfant de Harki, son père était chef cuisinier à l’armée, arrivé en France par le camp de Saint-Martin-des-Puy dans le canton de Fabrezan, puis Villeneuve et enfin Rieux-Minervois où Rabah Zaoui a grandi dans les années 80 et fréquenté le collège, il découvre le rugby à XIII. Pour rendre au rugby ce qu’il lui a donné, Rabah Zaoui est un habitué des matchs de l’ASC et de l’USC et n’hésite pas de temps en temps à offrir la bourriche à l’école de rugby.

Rabah a entamé sa carrière dans la gastronomie pure lui permettant de se former et ainsi devenir Chef cuisinier. Le saviez-vous ? Sa maman reste son modèle absolu.

L'art de la pizza selon Rabah Zaoui

"Un pizzaïolo va s’exprimer sur un fond de pâte, disposer les ingrédients selon ses humeurs et selon les saisons, cette pâte on va la farder de plein de choses... ça devient une œuvre", s’enthousiasme le quinquagénaire du signe du bélier (« un fonceur ! ») qui n’a de cesse d’élever la préparation de la pizza au rang d’art et de défendre bec et ongle la noblesse de ce produit, que le Français consomme sans arrière-pensées, 10 kg par habitant et par an, contre seulement 5 kg en Italie. Sa force, c’est de travailler la pâte à pain d’un côté et de cuisiner les ingrédients (foie gras, chutney de figue, tomates cerise marinées, mesclun...) à part, pour littéralement assembler les saveurs. L’image de l’artiste à la palette de couleurs s’impose.

“Je compare ma pâte à pizza à une casserole, un récipient qui va venir recevoir des ingrédients que j’aurais au préalable préparé. Cette pâte doit être de bonne qualité, à la fois dans sa force, dans son goût et dans sa qualité de digestibilité. Chacun a sa façon de travailler mais je dirais qu’en tant que cuisinier, j’ai plus de facilitées peut-être à percevoir le goût et le mélange des saveurs.

En voyageant à travers vos créations, nous pouvons en conclure que vos pizzas sont réellement travaillées. Au final est-ce que pour vous, la pizza est un moyen d’expression comme l’est un tableau pour un peintre ? Oui, tout à fait ! Je dis toujours que dans ma cuisine, je suis le chef d’orchestre. Moi-même j’ai un piano… 4 feux, une baguette en bois et je propose à mes clients un spectacle à la carte. J’émerveille leurs yeux et je fais applaudir leurs papilles avec mes assiettes telles que des aquarelles !

Automne 2010, Salsomaggiore province d’Emilie Romagni dans le nord de l’Italie, 5 à 600 pizzaiolos représentant une trentaine de nations s’affairent aux fourneaux. « Il fallait faire vite” se souvient Rabah Zaoui. “On n’avait qu’un quart d’heure pour préparer sa pizza ». Le carcassonnais qui a longtemps habité le minervois, désormais installé route de Toulouse à l’enseigne de son nom, présente au jury son chef d’oeuvre baptisé « Douce France ». Une pizza parfaite, ça il ne le saura que plusieurs heures plus tard, composée de crème de cèpes, foie gras poêlé, parmesan et, « paillètes d’or 24 carats » comme il le dit sans livrer son secret pour bluffer les jurés. C’est aussi bon que beau. Au pays des descendants de Léonard (de Vinci) qui est en même temps le berceau de cette préparation d’origine modeste comme toutes les grandes recettes identitaires, cette synthèse subtile va faire mouche. « Quand j’ai entendu mon nom et que je devenais champion du monde raconte t-il, j’ai cru que mon coeur allait s’arrêter de battre ».

L'école de pizza de Rabah Zaoui

À Carcassonne, Rabah Zaoui a créé une école de pizza. Désirant dispenser son savoir et son expérience, ce roi de la pizza a créé une école professionnelle dans la préfecture audoise. Depuis six ans, Rabah Zaoui a ouvert sa pizzeria gastronomique avenue Franklin Roosevelt, à Carcassonne.

"On ne s’improvise pas pizzaïolo. Beaucoup ont terni l’image de la profession. J’ai souhaité redonner ses lettres de noblesse à cette spécialité incontournable", déclare-t-il. Après les perturbations liées au Covid et la fermeture de son école durant les trois mois d’été, notre Audois a sonné la rentrée et repris les formations en cette mi-octobre : "Ici, j’enseigne les différentes techniques pour préparer la pâte, manipuler le matériel de cuisson, maîtriser la découpe de légumes, choisir et réaliser l’assemblage des différents ingrédients pour le goût et l’esthétique de la garniture, appliquer les normes d’hygiène et de sécurité alimentaire. Peu importe la pizza, qu’elle soit basique, classique aux trois couleurs de l’Italie comme la Margarita, ou gastronomique à base de truffes, de foie gras et de paillettes d’or".

Rabah Zaoui, maître artisan pizzaiolo et maître restaurateur explique aux jeunes qui se cherchent un métier et aux plus âgés en reconversion professionnelle, qu’il a commencé bouilleur de cru à la cave de Rieux, puis plongeur dans un restaurant, puis préparateur de salades et desserts, et enfin chef de cuisine, maître restaurateur ("on n’était que 14 dans l’Aude"), maître artisan... Depuis, il est devenu juré ici et là, mais ne pense qu’à une chose : défendre son titre, comme pour conforter ses choix.

Ses stages de quatre jours permettent une autre approche de la pizza. Comme il se plaît à le dire, "les pizzas ne se bouffent pas mais se mangent et se savourent". À l’issue, chacun se voit remettre une attestation de fin de stage qui est éligible au CPF (Compte Personnel de Formation).

Titres et Récompenses

Rabah Zaoui a obtenu plusieurs titres et récompenses, dont :

  • Maître Restaurateur en 2008
  • Maître Artisan Pizzaïolo en 2011
  • Champion du « France Pizza Tour » à Paris
  • Champion du monde pizza à deux en Italie
  • Champion Coupe de France Pizza Teglia (Pizza plaque)
  • Vice Champion Coupe de France pizza classique
  • Vice Champion de France Pizza Teglia

Ces titres étant décernés par l’état. Ses participations aux concours de pizzas m’ont permis d’être récompensé. J’ai également participé au championnat du monde à Las Vegas en février 2010.

Promu maitre artisan par la Chambre des Métiers, il consacre une partie de son temps à la formation des jeunes pour le plaisir de partager et de transmettre un savoir. Mais c’est devant son four à bois, qu’il continue à interroger la palette des gouts en expérimentant de nouvelles déclinaisons. « Je me suis rapproché de la cuisine semi-gastro” constate t-il ses compositions reprenant sur le modèle de la pizza des standards de la cuisine régionale, telles que le cassoulet, par exemple, autre plat de résistance. Mais il ne perd jamais de vue la Margarita du prénom de la reine d’Italie, aux trois couleurs du drapeau transalpin, le blanc de la mozzarella, le vert du basilic le rouge de la tomate, qu’il sert avec un plaisir entier.

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