La consommation de viande de porc est proscrite dans plusieurs religions, notamment chez les musulmans, les juifs et les chrétiens d’Éthiopie.
Mais pourquoi a-t-on à un moment de l’histoire décrété que cette viande était impure ?
Raisons religieuses de l'interdiction
La raison principale pour expliquer pourquoi les juifs ne mangent pas de porc semble se trouver dans la Torah.
Pour les Musulmans l’interdit de manger du porc est selon Malek Chebel le plus massif et le plus ancien.
Dans le Deutéronome, on trouve un verset qui indique que les juifs doivent considérer le porc comme un animal impur.
Les Saintes Écritures sont souvent la raison avancée pour expliquer pourquoi les juifs ne mangent pas de porc.
Le Lévitique fait partie des livres de l’Ancien Testament, le livre sacré des juifs, qui interdit la consommation de viande de porc dans le judaïsme.
En effet, il autorise les juifs à manger seulement des animaux qui ruminent.
Le porc n’est pas un ruminant, il est donc exclu de la liste des produits alimentaires kasher.
Les musulmans ne mangent pas de porc parce que le Coran l’interdit à cinq reprises, explique Önder Günes, porte-parole de la Fédération d’organisations islamiques de Suisse (FOIS).
Le verset 173 de la sourate 2 est particulièrement clair à ce sujet: « Certes, il vous est interdit la chair d’une bête morte, le sang, la viande de porc et ce sur quoi on a invoqué un autre qu’Allah ».
« Les animaux morts, le sang, la chair du porc, tout ce qui a été tué sous l’invocation d’un autre nom que celui d ‘Allah, les animaux suffoqués, assommés, tués par quelque chute ou d’un coup de corne ; ceux qui ont été entamés par une bête féroce, à moins que vous ne les ayez purifiés par une saignée ; ce qui a été immolé aux autels des idoles ; tout cela vous est défendu. (…)» (Sourate 5 La table servie (Al-Maidah), verset 3).
Cependant un autre verset (XVI, 115) introduit une exception à cet interdit : « Il vous a été interdit la bête morte, le sang, la chair du porc et tout ce qui a été immolé à un autre Dieu qu’Allah.
Dans la Torah et dans le Coran, écrit des siècles plus tard, le porc est banni des assiettes.
« Dieu vous a seulement interdit la bête morte, le sang, la viande de porc », peut-on lire dans le Coran (sourate 2, verset 173).
Mais pourquoi le rejet de cet animal rose ?
Bien malin celui qui pourra vous livrer une explication définitive.
Car les historiens sont partagés.
On est rapidement surpris par la quantité d'hypothèses qui circulent dans la littérature scientifique ou sur les blogs.
L'histoire derrière l'interdiction
S’il existe des preuves archéologiques que des porcs ont été élevés et mangés en Mésopotamie, les Saintes Écritures ont fini par interdire aux juifs de manger du porc.
En effet, l’élevage et la consommation de porcs n'étaient plus rentables au Moyen-Orient.
La religion n’a été utilisée que pour éviter tout doute.
La raison pour laquelle l’élevage et la consommation de porc n'étaient plus des pratiques intéressantes pour les communautés mésopotamiennes primitives est que la population a commencé à croître.
Cette croissance a obligé les humains à consommer les produits qui étaient destinés à l’alimentation des porcs, comme le blé ou le maïs.
De plus, les porcs ne prennent pas de poids s’ils ne mangent que de l’herbe, contrairement aux moutons et aux vaches.
Il y a des preuves que dans l’Antiquité, le cochon était consommé en Mésopotamie.
L’archéologie a trouvé des traces d'élevage de porcs dans certaines régions.
Mais cette pratique a disparu, et elle a été interdite par différentes religions, dont le judaïsme.
Pour comprendre pourquoi les juifs ne mangent pas de porc, il y a donc deux aspects à analyser : le religieux et l'historique.
L’interdiction prétendument divine de la consommation de porc chez les juifs aurait tout simplement sanctionné, sans susciter de critiques, une tendance agricole qui n’était plus productive et efficace.
Pour certains anthropologues, l’argument religieux selon lequel les juifs ne mangent pas de porc est apparu après une série de changements sociaux et environnementaux qui ont cessé de rendre profitable l’élevage de ces animaux.
Découverte archéologique à Jérusalem
C'est une découverte étonnante qu'ont fait des archéologues dans la Cité de David, à Jérusalem, en Israël.
Dans le dernier numéro de la revue The academic journal Near Eastern Archaeology, ils révèlent avoir mis au jour le squelette entier d'un cochon vieux d'il y a 2 700 ans.
Celui-ci se trouvait dans un bâtiment à seulement quelques dizaines de mètres du Mont du Temple, le lieu le plus sacré du judaïsme.
Et malgré la forte interdiction de consommer du porc dictée par les lois juives, il était fort probable que l'animal était gardé pour être mangé.
Le Dr Joe Uziel, archéologue principal à l'Autorité des antiquités d'Israël et l'un des auteurs de l'étude, indique : "Nous faisions des fouilles sur les pentes orientales de la Cité de David et nous avons découvert un bâtiment datant de la seconde moitié de l'âge du fer, également connu sous le nom de période du Premier Temple.
Nous avons commencé à exposer l'une des pièces, où nous avons vu plusieurs récipients écrasés au sol et bientôt nous avons trouvé le squelette d'un petit animal coincé entre le mur et les récipients".
Comme ils n'étaient pas sûrs de quel animal il s'agissait, ils ont fait appel au Dr. Lidar Sapir-Hen, une archéologue spécialiste de l'université de Tel Aviv.
"Elle a été capable de nous dire qu'il s'agissait d'un porc juste en regardant la photo du squelette", rapporte Joe Uziel.
La pièce dans laquelle le petit cochon a été retrouvé contenait les restes d'un feu, ainsi qu'une grande quantité d'os d'autres animaux, comme du bétail ou des moutons, présentant des traces de dépeçage et de cuisson.
Le cochon, quant à lui, semblait être encore en vie lorsque le bâtiment s'est effondré sur lui, probablement à cause d'un tremblement de terre.
Les archéologues pensent donc que, même si le petit cochon n'est pas mort de la main de l'homme, c'est qu'il a été tué avant par la catastrophe naturelle.
La pièce dans laquelle il a été retrouvé servait sans aucun doute possible à la préparation des repas.
Il aurait donc été abattu par la suite pour être consommé.
De plus, ce n'est pas la première fois que du cochon a été retrouvé dans Jérusalem.
Parmi les restes d'animaux retrouvés dans les fouilles, 2% sont ceux de porcs.
Cela suggère donc que si manger du porc n'était pas très courant, certaines personnes le faisaient, malgré l'interdiction de leur religion.
"Bien que la consommation de porc n'était clairement pas préférée dans la Judée, la présence d'un squelette articulé d'un petit cochon semble indiquer que non seulement le porc était consommé en petites quantités, mais que les porcs étaient élevés à cette fin dans la capitale", ont affirmé les chercheurs dans la revue.
Plusieurs éléments suggèrent que le bâtiment appartenait à de riches propriétaires.
Cela veut également dire que la classe sociale n'explique pas pourquoi certaines personnes consommaient du porc.
Le cochon, tabou durant l'Égypte ancienne ?
Remontons aux sources du tabou sur le cochon.
Dès l'Égypte ancienne - donc bien avant l'apparition des trois grands monothéismes -, le cochon aurait eu une mauvaise image.
Dans les Textes des sarcophages du Moyen Empire, le cochon est accusé d'un « crime cosmique » : il a blessé l'œil du dieu Horus, dieu de la Lune.
Ses phases d'obscurcissement sont alors interprétées comme des blessures infligées par ses ennemis.
Or, le porc est justement l'un des avatars de Seth, dieu du chaos et du désordre.
Résultat ?
L'animal aurait été jugé impur et banni des temples et des rituels.
Beaucoup soutiennent que c'est ici que l'interdiction du porc chez les juifs trouve sa source.
« Mais à partir de cet épisode, on a bâti une aversion de toute l'Égypte antique pour cet animal.
En réalité, il n'y avait pas d'interdiction de consommation.
On peut dire que c'est un animal qui n'est pas valorisé et très rarement donné en offrande.
Mais il était tout de même consommé », nuance Youri Volokhine, auteur de l'ouvrage Le Porc en Égypte ancienne.
Autres Hypothèses
L'hypothèse la plus répandue sur Internet - et que vous a sûrement déjà raconté votre oncle historien du dimanche - veut que cette interdiction soit liée à des préoccupations sanitaires.
Le porc mal cuit serait trop dangereux.
Il s'agirait d'un conseil de bienveillance de Dieu lui-même.
Aux États-Unis aujourd’hui, une majorité des Américains de confession juive mangent du porc.
Pour beaucoup d'historiens ayant travaillé sur la question, le refus de consommer du porc est une façon, pour les juifs d'abord et les musulmans ensuite, de se distinguer des autres.
Une sorte de revendication identitaire, même si le mot est anachronique.
Le cochon serait un moyen de se distinguer, également pour les chrétiens.
Une autre piste de recherche est souvent citée : la consommation du porc est évitée car ce sont des animaux trop difficiles à élever.
Ces petits êtres aux courtes pattes ne sont pas adaptés aux conditions rudes du désert du Moyen-Orient.
Animaux autorisés et interdits dans le judaïsme
Les lois alimentaires juives, appelées kashrut, sont détaillées dans la Torah et spécifient quels animaux peuvent être consommés et comment ils doivent être préparés.
Les animaux terrestres doivent avoir des sabots fendus et ruminer pour être considérés comme casher.
Les exemples d'animaux casher comprennent le bœuf, le mouton et le cerf.
En ce qui concerne les animaux aquatiques, ils doivent avoir des nageoires et des écailles.
Les poissons comme le saumon, la truite et le hareng sont généralement considérés comme casher.
En revanche, les fruits de mer tels que les crustacés et les mollusques ne sont pas autorisés.
Voici un tableau récapitulatif :
Type d'animal | Casher (Autorisé) | Non Casher (Interdit) |
---|---|---|
Terrestre | Bœuf, Mouton, Cerf (avec sabots fendus et ruminants) | Porc (sans sabots fendus et non ruminant) |
Aquatique | Saumon, Truite, Hareng (avec nageoires et écailles) | Crustacés, Mollusques (sans nageoires ni écailles) |
Il est important de noter que différentes communautés juives peuvent interpréter ces lois de manière légèrement différente, mais les principes généraux restent les mêmes.
Pour des informations plus précises, il est recommandé de consulter un rabbin ou une autorité compétente en matière de kashrut.
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