Additifs Alimentaires : Le Danger Potentiel de l'E270 et Autres Additifs

Il existe des centaines d'additifs alimentaires utilisés dans l'industrie agroalimentaire. Malgré leurs caractéristiques modernes, les additifs alimentaires sont employés depuis des siècles. La conservation des aliments a commencé quand l'homme a appris à protéger chaque récolte jusqu'à la récolte suivante et à conserver viande et poisson en les salant ou en les fumant. Les Égyptiens ont utilisé des colorants et des arômes pour augmenter l'attrait de certains produits alimentaires et les Romains ont eu recours au salpêtre (ou nitrate de potassium), aux épices et colorants pour la conservation et l'amélioration de l'apparence des aliments. De tout temps, les cuisiniers ont régulièrement employé la levure en tant qu'agent levant, des épaississants pour les sauces, les sauces au jus et colorants comme la cochenille pour transformer des matières premières de bonne qualité en des produits alimentaires sûrs, sains et agréables à manger.

Rôle et Réglementation des Additifs Alimentaires

On ajoute des additifs alimentaires aux aliments dans le but de conserver ou bien améliorer leur fraîcheur, leur goût, ainsi que leur texture. Parmi les additifs alimentaires, on distingue les colorants, les antioxydants, les conservateurs, les émulsifiants, les gélifiants, les épaississants, les édulcorants et les exhausteurs de goût, dont certains peuvent être nocifs pour la santé. Leur usage vise à améliorer la texture des produits tout en prolongeant leur durée de conservation.

L'utilisation des additifs est strictement réglementée selon le principe dit "de listes positives". Autrement dit : ce qui n'est pas expressément autorisé est interdit. Le code utilisé est fixé au niveau européen. Il se compose de la lettre "E" suivie d'un numéro permettant d'identifier facilement la catégorie.

Pour être autorisé, un additif alimentaire ne doit présenter, au vu des données scientifiques disponibles, aucun risque pour la santé des consommateurs au niveau d'utilisation envisagé. Une procédure d'évaluation est établie par le groupe scientifique sur les additifs alimentaires et les sources de nutriments ajoutés aux aliments (ANS). Les additifs risquant d'être cancérogènes sont évalués par le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC). La plupart des additifs ne peuvent être utilisés que dans les quantités limitées dans certaines denrées alimentaires. Si aucune limite quantitative n'est prévue pour l'utilisation d'un additif alimentaire, il doit être utilisé selon la bonne pratique de fabrication, c'est-à-dire seulement autant que nécessaire pour réaliser l'effet technologique désiré.

Types d'Additifs et Leurs Fonctions

  • Conservateurs : Aident à la conservation en empêchant la présence et le développement de microorganismes indésirables (par exemple : moisissures ou bactéries responsables d'intoxications alimentaires). On distingue les conservateurs antimicrobiens et les conservateurs antioxydants.
  • Antioxydants : Évitent ou réduisent les phénomènes d'oxydation qui provoquent entre autre le rancissement des matières grasses ou le brunissement des fruits et légumes coupés. Ils sont souvent utilisés dans les fruits et légumes peu transformés comme les salades prêtes à l'emploi, les fruits frais coupés et les jus de fruits frais.
  • Exhausteurs de goût : Renforcent le goût des aliments.

Focus sur l'Acide Lactique E270

Qu'est-ce que l'Acide Lactique E270 ?

L’acide lactique, de formule chimique C3H6O3, joue un rôle important dans de différents processus biologiques. Certains additifs alimentaires peuvent être d’origine naturelle. C’est notamment le cas des composés chimiques extraits d’animaux, de végétaux ou de minéraux. En revanche, d’autres peuvent être d’origine synthétique et sont créés, soit par une réaction chimique, soit par une réaction enzymatique. L’acide lactique est d’origine naturelle, car il provient de la dégradation du lactose contenu dans le lait suite à l’action des bactéries. Comme l’acide malique, on le trouve également dans certains fruits et légumes.

Fonctions de l'Acide Lactique E270

Concernant leurs fonctions, les additifs alimentaires sont classés selon un code. Celui des conservateurs commence par E2XX. Tel est le cas de l’acide lactique, dont le code est E270.

  • Conservateur : L’acide lactique joue le rôle d’un agent bactériostatique, c’est-à-dire qu’il stoppe la multiplication des bactéries dans les aliments afin de préserver leur qualité gustative et leur aspect. Sa présence dans les denrées alimentaires permet également d’éviter les phénomènes d’oxydation qui peuvent favoriser leur altération.
  • Acidifiant : Il s’agit d’un acidifiant, puisqu’il accentue la saveur acide dans les aliments.
  • Exhausteur de goût : L’additif 270 est aussi un exhausteur de goût, car il permet une amélioration considérable de la qualité organoleptique d’un aliment tout en renforçant son goût et sa perception gustative.

L'Acide Lactique E270 est-il dangereux pour la santé ?

Si certains additifs alimentaires peuvent être très dangereux pour la santé, causant notamment des cancers, des migraines, des allergies ou encore des retards de croissance pour les enfants, ce n’est pas le cas pour l’acide lactique. Cet additif alimentaire présente peu, voire aucun effet secondaire et c’est la raison pour laquelle il est autorisé en France en étant listé au Codex Alimentarius comme étant un régulateur de l’acidité. D’ailleurs, son dérivé, le lactate de sodium E235, est aussi autorisé dans les denrées alimentaires, et ce, sans aucune dose journalière admissible fixe.

Dans quels produits trouve-t-on l’acide lactique E270 ?

L’acide lactique est naturellement présent dans de nombreux aliments. Il peut toutefois être rajouté de manière synthétique dans certains aliments par le biais d’une hydrolyse de lactonitrile. Cet additif se trouve généralement dans les produits laitiers et les corps gras (yaourts, fromages, beurre végétal, margarine, crème, etc.), dans les sauces industrielles (mayonnaise, ketchup, sauce-huitre, etc.), dans les plats préparés, dans les glaces, mais aussi dans les produits céréaliers transformés, entre autres.

On retrouve les additifs alimentaires dans la liste des ingrédients dans lesquels ils ont été rajoutés, soit en toute lettre, soit avec leur code. Par exemple :

  • Acide benzoïque ou E210
  • Acide lactique ou E270
  • Sulfate de sodium ou E514
  • Acide propionique ou E280

Utilisations de l’additif E270

L’utilisation de l’acide lactique se voit principalement dans l’industrie agroalimentaire. En cosmétique, l’acide lactique permet l’élimination des cellules mortes de la peau et l’hydratation des cheveux grâce à ses propriétés permettant de diminuer le pH des produits tels que les shampoings et les autres produits cosmétiques.

Risques Potentiels d'Autres Additifs Alimentaires

De plus en plus d’études épidémiologiques suggèrent un lien entre une consommation élevée d’aliments ultra-transformés et un risque accru d’obésité, de maladies cardiométaboliques et de certains cancers. Une étude britannique aurait établi un lien, chez les enfants âgés de 3 ans environ, entre le risque d'hyperactivité et l'ingestion d'aliments contenant des additifs comme l'acide benzoïque. L'hyperactivité se traduit par une incapacité à rester en place, à se concentrer et une impulsivité.

Certains additifs, pourtant autorisés, sont reconnus comme potentiellement cancérigènes. Il s'agit :

  • de colorants : E123, E131, E142
  • de conservateurs : les dérivés benzoïques E210 à 219 et les dérivés nitrés E249 à 252
  • avec des doutes pour certains édulcorants

Voici une liste d'additifs alimentaires à surveiller :

  • E150 : colorant caramel ammoniacal E150c ou sulfite d'ammonium E150d, potentiellement cancérigène à cause de son composé le 4-méthylimidazole (4-MEI). Les colorants E150b (caramel de sulfite caustique), E150c (caramel ammoniacal), E150d (caramel au sulfite d'ammonium) sont ajoutés aux aliments pour leur donner une coloration brune plus prononcée. Ils sont présents dans de nombreux produits (petits-déjeuners, soupes, confiserie, assaisonnement, bouillons de cuisson...) et notamment les boissons : Coca-Cola, sodas, bières... Étant donné leurs propriétés similaires, l'ANS a établi une dose journalière acceptable groupée de 300 mg par kg de poids corporel par jour (mg/kg pc/jour) applicable aux quatre colorants. Il a toutefois défini une DJA plus restrictive de 100 mg/kg pc/jour pour le colorant E150c. Ce dernier pourrait affecter le système immunitaire.
  • E171 : (dioxyde de titane ou TiO2 ou CL 77891). Cet additif chimique, à l'état de nanoparticule, permet de blanchir et de conserver les couleurs. Il se retrouve dans les crèmes solaires, les cosmétiques, les dentifrices et les bombons comme les célèbres M&Ms.
  • E172 : (Hydroxydes de fer), nanoparticule pouvant être préjudiciable pour la santé.
  • E173 : (aluminium). Ce colorant est utilisé pour apporter une couleur argent sur des dragées et des décorations de pâtisseries enrobées de sucre, ainsi que pour donner un fini argenté à des pilules et comprimés. Il est également présent dans l'eau du robinet. L'aluminium est potentiellement toxique pour les cellules nerveuses et serait notamment impliqué dans les maladies d'Alzheimer et de Parkinson.
  • E210 à E213 : (acide benzoïque et ses dérivés), susceptible de déclencher des crises d’asthme chez les individus sensibles. Par exemple, E211 (benzoate de Sodium) est un allergène également responsable de cas du syndrome d'hyperactivité chez les enfants.
  • E214 à E219 : Méthylparabène ou 4-hydroxybenzoate de méthyle (E218) et son sel de sodium (E219) ; éthylparabène ou 4-hydroxybenzoate d'éthyle (E214) et son sel de sodium (E215) ; propylparabène ou 4-hydroxybenzoate de propyle (E216) et son sel de sodium (E217).
  • E220 à E228 : (sulfites inorganiques), susceptible de déclencher des crises d’asthme chez les individus sensibles.
  • E249 : ou nitrite de potassium. Ce conservateur a de nombreux effets pervers : entrave le transport de l'oxygène par le sang, peut entrainer des difficultés respiratoires, favorise les allergies, détruit les vitamines A, B1 et B2.
  • E250 : ou nitrite de sodium. Ce conservateur et colorant est utilisé pour donner une couleur rose aux produits de charcuterie, donnant le sentiment au consommateur que le produit est frais. Il est présent dans pratiquement toutes les charcuteries où il se combine avec les protéines de la viande pour donner des nitrosamines, hautement cancérigènes.
  • E251 : ou nitrate de Sodium. Comme pour les nitrites, cancérigéne.
  • E280 : ou acide propionique, induit des changements comportementaux chez les rats de laboratoire : hyperactivité et perte de la sociabilité. Cet acide est soupçonné de contribuer à la régression autistique.
  • E320 : ou butylhydroxyanisole (BHA). Cet additif est utilisé pour éviter aux matières grasses de rancir. Le BHA est un cancérigène possible selon les données du CIRC et un perturbateur endocrinien. Le BHA est difficilement biodégradable et a un haut potentiel de bioaccumulation dans l'environnement.
  • E321 : ou butylhydroxytoluène (BHT). Comme le BHA, il s'agit d'un antioxygène utilisé pour retarder l'oxydation des aliments, notamment des matières grasses, et éviter leur rancissement. Il se retrouve dans de nombreux plats cuisinés et chewing-gums. Comme le E320, le 321 a été classé "cancérogène possible pour les humains" (par le CIRC et l'OMS).
  • E324 : ou Ethoxyquine. Ce pesticide synthétisé par Monsanto en 1950 est un antioxydant utilisé pour conserver notamment le saumon mais aussi dans l'alimentation du bétail.
  • E441 : ou gélatine. Provient principalement de couennes de porcs et de peaux de bovins. Elle apporte de l'élasticité aux bonbons mous, de la consistance à la crème dans les gâteaux et de l'onctuosité aux desserts lactés.
  • E407 : (carraghénane) : cet additif alimentaire utilisé comme épaississant et émulsifiant, pourrait favoriser le développement de maladies inflammatoires chroniques de l’intestin, d’ulcères et augmenter les niveaux de sucre dans le sang.
  • E450 : diphosphates. L’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) notait en 2013 les risques pour la santé (principalement cardiovasculaires) d’une surconsommation de phosphates.
  • E551 : (dioxyde de silicium).
  • E621 : (glutamate monosodique ou glutamate de sodium). Cet additif alimentaire qui donne du goût aux aliments est présent dans pratiquement tous les produits de viande transformés.
  • E951 : (aspartame). Cet édulcorant artificiel remplace le sucre dans plus de 2 500 produits dits "light". L'aspartame est classé comme possiblement cancérigène.
  • E900 : ou dimethylpolysiloxane.
  • E160b : issu de la cire du fruit rouge du rocou, un petit arbre d'Amérique tropicale. Riche en bêta-carotène, en vitamine E, contient beaucoup de sélénium, magnésium et calcium.
  • E163 : les anthocyanes sont des colorants d'origine naturelle de couleur rouge ou bleue.
  • E330 : acide citrique. Dans les produits de qualité, il est le plus souvent d'origine naturelle et végétale, extrait de la moisissure Aspergillus niger. Mais dans la plupart des boissons industrielles c'est un produit chimique de synthèse.
  • E960 : ou glycosides de stéviol. La Stévia, un édulcorant « naturel ».

Les émulsifiants figurent parmi les additifs les plus couramment utilisés dans les aliments ultra-transformés. Ils sont souvent ajoutés aux aliments industriels transformés et emballés tels que certaines pâtisseries, gâteaux et desserts, yaourts, glaces, barres chocolatées, pains industriels, biscottes, margarines et plats préparés, afin d’améliorer leur apparence, leur goût, leur texture et leur durée de conservation. Ils comprennent notamment les mono- et diglycérides d’acides gras, les carraghénanes, les amidons modifiés, les lécithines, les phosphates, les celluloses, les gommes et les pectines.

Étude NutriNet-Santé et Additifs Émulsifiants

Des chercheurs et chercheuses de l’Inserm, d’INRAE, de l’Université Sorbonne Paris Nord, d’Université Paris Cité et du Cnam, regroupés au sein de l’Équipe de recherche en épidémiologie nutritionnelle (Cress-Eren), ont entrepris d’étudier les possibles liens entre les apports alimentaires en additifs émulsifiants et la survenue des cancers. Ils ont analysé les données de santé de 92 000 adultes participant à l’étude de cohorte française NutriNet-Santé, en évaluant spécifiquement leur consommation de ce type d’additifs alimentaires.

Pour la première fois au niveau international, une équipe de chercheuses et chercheurs français s’est intéressée aux relations entre les apports alimentaires en émulsifiants et le risque d’apparition de plusieurs localisations de cancers dans une grande étude en population générale. Les participants ont renseigné en ligne tous les aliments et boissons consommés et leur marque (pour les produits industriels), sur au moins 3 journées d’enregistrements alimentaires, avec la possibilité de réactualiser leurs données de consommation tous les 6 mois. Ces enregistrements ont été mis en relation avec des bases de données afin d’identifier la présence et la dose des additifs alimentaires (dont les émulsifiants) dans les produits consommés. Des dosages en laboratoire ont également été effectués pour fournir des données quantitatives.

Au cours du suivi, les participants ont déclaré la survenue de cancers (2 604 cas diagnostiqués), et un comité médical a validé ces déclarations après examen des dossiers médicaux. Plusieurs facteurs de risque bien connus pour les cancers, notamment l’âge, le sexe, le poids (IMC), le niveau d’éducation, les antécédents familiaux, le tabagisme, l’alcool et les niveaux d’activité physique, ainsi que la qualité nutritionnelle globale de l’alimentation (par exemple, les apports en sucre, en sel, en énergie) et le statut ménopausique ont été pris en compte.

Les résultats de l'étude NutriNet-Santé suggèrent une association entre l’ingestion de certains additifs émulsifiants et un risque accru de cancers, en particulier du sein et de la prostate. Après analyse des données françaises de 92 000 adultes, les chercheurs ont constaté que des apports plus élevés en monoglycérides et diglycérides d’acides gras (E471) étaient associés à des risques accrus de cancers au global (une augmentation de 15 % du risque chez les plus forts consommateurs - 3e tertile - par rapport aux plus faibles consommateurs - 1er tertile), de cancers du sein (une augmentation de 24 % du risque), et de cancers de la prostate (une augmentation de 46 % du risque). D’autre part, les femmes ayant des apports plus élevés en carraghénanes (E407 et E407a) avaient 32 % de plus de risque de développer des cancers du sein, par rapport au groupe ayant des apports plus faibles.

Tableau récapitulatif des résultats de l'étude NutriNet-Santé :

Additif Émulsifiant Association avec le Risque de Cancer Augmentation du Risque
Monoglycérides et diglycérides d’acides gras (E471) Cancer au global 15% (plus forts consommateurs)
Monoglycérides et diglycérides d’acides gras (E471) Cancer du sein 24%
Monoglycérides et diglycérides d’acides gras (E471) Cancer de la prostate 46%
Carraghénanes (E407 et E407a) Cancer du sein (femmes) 32%

Cette étude constitue une première exploration de ces relations mais d'autres investigations sont désormais nécessaires pour établir des liens de causalité. Les chercheurs ont évoqué plusieurs limites de leur étude, telles que la prédominance des femmes dans l’échantillon, un niveau d'éducation plus élevé que la population générale, ainsi que des comportements généralement plus favorables à la santé parmi les participants de l’étude NutriNet-Santé. L’étude bénéficie néanmoins d’une taille d’échantillon considérable et les chercheurs ont pris en compte un grand nombre de facteurs susceptibles d’induire des biais de confusion. Ils ont en outre utilisé des données fines et uniques sur les expositions aux additifs alimentaires, avec un niveau de détail allant jusqu’aux marques des produits industriels consommés.

Les chercheurs vont s’intéresser aux variations de certains marqueurs sanguins et du microbiote intestinal en lien avec la consommation de ces additifs, pour mieux comprendre les mécanismes sous-jacents. Elle va également s’intéresser aux impacts sur la santé des mélanges d’additifs et de leurs potentiels « effets cocktails ».

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