Alimentation Parentérale et Chambre Implantable : Un Guide Complet

Lorsque l’alimentation par voie orale n’est pas suffisante et qu’il semble difficile ou impossible de l’améliorer, une nutrition artificielle peut être proposée. La nutrition artificielle va apporter les nutriments dont l’organisme a besoin, mais aussi des vitamines, des minéraux, des fibres et de l’eau. Une nutrition artificielle peut être provisoire ou définitive, totale (pas de nourriture par la bouche) ou partielle.

Qu'est-ce que l'alimentation parentérale ?

L'alimentation parentérale (ou nutrition parentérale) permet d'apporter au corps tous les éléments dont il a besoin pour fonctionner correctement. Les nutriments, vitamines et autres oligo-éléments injectés par voie intraveineuse sont directement utilisables par les organes : ils passent par le système sanguin, court-circuitant le système digestif. De fait, cette technique d'alimentation nécessite des conditions d’asepsie irréprochables.

L'alimentation parentérale est une méthode de nutrition artificielle administrée par voie intraveineuse (par le biais d'un cathéter veineux). Comme son nom l'indique, elle ne stimule pas du tout le tube digestif. On l'utilise en dernier recours, lorsque le patient n'est pas en mesure d'obtenir macronutriments et micronutriments dont il a besoin par la bouche ou par nutrition entérale (sonde d'alimentation).

Alimentation parentérale partielle ou totale

La nutrition parentérale peut être administrée en soutien partiel ou total de l'alimentation orale. La nutrition parentérale partielle ne subvient qu'à une partie des besoins nutritionnels journaliers de chaque patient, en complétant une alimentation orale. La nutrition parentérale totale, elle, subvient à l'intégralité des besoins nutritionnels journaliers.

Nutrition entérale ou parentérale : quelles différences ?

Il existe trois types de nutrition artificielle, aussi dite nutrition clinique : la nutrition entérale, la nutrition parentérale et la nutrition orale. L'alimentation entérale consiste à administrer une solution nutritionnelle dans le tube digestif du patient par l'intermédiaire d'une sonde d'alimentation (sonde d'alimentation naso-gastrique ou sonde de stomie). Si possible, on préfère toujours la nutrition entérale à la nutrition parentérale.

En effet, la nutrition parentérale a plusieurs inconvénients par rapport à la nutrition entérale:

  • elle est plus coûteuse ;
  • elle affaiblit le système immunitaire et provoque davantage de complications ;
  • et elle ne préserve ni la structure, ni le fonctionnement du système gastro-intestinal.

Composition de la solution d'alimentation parentérale

Les solutions d'alimentation parentérale sont généralement préparées à l'avance de façon industrielle et présentent une composition fixe. Mais il est également possible de préparer des solutions "à la carte" en pharmacie ou en laboratoire. Dans ce cas, le contenu de la solution est discuté par un médecin, un pharmacien et un diététicien agréé qui déterminent les besoins journaliers de chaque patient. Quelles que soient les proportions, la solution contient un mélange de nutriments essentiels :

  • Des glucides, qui apportent les calories nécessaires aux corps. La solution contient donc du glucose (sucre) sous la forme de dextrose.
  • Des protéines, qui fournissent des calories et garantissent le développement musculaire, la réparation des tissus, la lutte contre les infections et le bon fonctionnement des cellules. Elles sont constituées d'acides aminés.
  • Des lipides (graisses), qui fournissent des calories et de l'énergie, assurent diverses fonctions cellulaires, préviennent notamment les carences en acides gras essentiels, maintiennent la chaleur corporelle et stockent certaines vitamines.
  • Des électrolytes, qui assurent des fonctions osseuse, nerveuse, organique et musculaire. Les solutions de nutrition parentérale contiennent donc du calcium, du potassium, du phosphore, du magnésium, du sodium, du chlorure et de l'acétate.
  • Des vitamines A, B, C, D, E et K.
  • Des minéraux et des oligo-éléments comme le zinc, le fer, le cuivre, le chrome, le manganèse et le sélénium.
  • Et enfin de l'eau, qui permet de garantir l'hydratation des patients.

Enfin, il est important de souligner que le contenu des solutions de nutrition parentérale varie en fonction des troubles éventuels de chaque patient, de leurs antécédents et de leur âge.

Indications de l'alimentation parentérale

La nutrition parentérale peut être envisagée en cas de trouble nécessitant une mise au repos importante du système digestif, lorsque la nutrition entérale n'est pas possible :

  • une occlusion intestinale ;
  • une péritonite généralisée ;
  • un syndrome du grêle court chirurgical ;
  • certains stades de rectocolite ulcéro-hémorragique ;
  • certains troubles gastro-intestinaux pédiatriques (des anomalies congénitales gastro-intestinales, des épisodes de diarrhée ou de vomissement prolongés, etc).

Administration de l'alimentation parentérale

L’alimentation parentérale nécessite d'injecter des éléments nutritifs directement au travers d'une veine. Deux types de cathéters peuvent être utilisés :

  • Un cathéter veineux périphérique, utilisé sur une courte durée.
  • Ou un cathéter veineux central, utilisé à plus long terme.

Quand l’alimentation parentérale est dure plusieurs semaines ou plusieurs mois, les médecins utilisent parfois des cathéters dits "tunnelisés" (placés sous la peau) ou des chambres implantables, appelées "port-à-cath" (de petits boîtiers également placés sous la peau). Ce type de matériel permet de limiter les remplacements de cathéters - et surtout de réduire les risques d’infection.

Une fois sélectionnée et élaborée, la poche d’alimentation est perfusée par cathéter ou chambre implantable à l’aide d’une pompe qui détermine la vitesse d’administration. Des examens sanguins sont ensuite réalisés pour surveiller la réponse de l'organisme.

Nutrition parentérale à domicile

Les patients peuvent bénéficier d'une alimentation parentérale à domicile. Leurs aidants et eux devront donc apprendre plusieurs gestes techniques sous le contrôle de professionnels assermentés :

  • stocker, manipuler et activer la solution ;
  • ajouter la multivitamine et/ou les médicaments nécessaires dans la poche de perfusion ;
  • connecter et déconnecter la pompe ;
  • entretenir le cathéter ;
  • prévenir les infections.

Le St. Jude Children's Research Hospital prodigue de nombreux conseils aux familles :

  • Anticiper la livraison et le stockage de la solution de nutrition artificielle.
  • Stocker impérativement toutes les poches dans le réfrigérateur.
  • Retirer la poche du réfrigérateur environ 2 heures avant de l'utiliser.
  • Connecter la nutrition parentérale au même moment chaque soir.
  • Tenez une liste de fournitures pour savoir combien d'articles vous possédez et quand en recommander.
  • Stocker vos fournitures dans un endroit sûr pour trouver facilement ce dont vous avez besoin.
  • Gardez toujours une liste des coordonnées de votre médecin, pharmacien, diététicien et de la société de perfusion à domicile.

Complications potentielles

Près de 5 à 10 % des patients sous nutrition parentérale totale sont en proie à des complications liées à l'accès veineux central. Des anomalies glycémiques (hyperglycémie / hypoglycémie) ou des dysfonctionnements hépatiques surviennent aussi chez plus de 90 % des patients.

Récapitulatif des principales complications :

  • Une hémorragie artérielle ou une perforation de la plèvre lors de la mise en place du cathéter ou d’un port-à-cath.
  • Des infections, des thromboses ou des obstructions (caillots sanguins) liées à l'utilisation des cathéters.
  • Des anomalies du métabolisme du glucose.
  • Des complications hépatiques comprennent des troubles hépatiques, une hépatomégalie douloureuse et une hyperammoniémie.
  • Des carences en vitamines et les changements des électrolytes.

Chambre Implantable Percutanée (CIP)

La chambre implantable percutanée (CIP) est un dispositif médical constitué d’un boîtier et d’un cathéter, implanté sous la peau lors d’une courte intervention chirurgicale. Le boîtier, situé au niveau du thorax, est relié par le cathéter à une veine centrale. En évitant la mise en place de perfusions répétées dans des veines périphériques fragiles et susceptibles de devenir inutilisables, les chambres implantables augmentent le confort du patient et préservent son capital veineux.

Les chambres implantables permettent principalement d’administrer des traitements de longue durée (généralement plus de 3 mois) qui nécessitent un accès répété au réseau veineux, soit de manière continue, soit de manière intermittente.

Contre-indications

Lors de l’évaluation de l’installation d’une chambre implantable, il faut prendre en compte plusieurs contre-indications potentielles. Ces contre-indications aident à garantir la sécurité du patient et à éviter des complications postopératoires.

Procédure d'Implantation

En général, cette procédure est réalisée en ambulatoire, ce qui signifie que le patient peut rentrer chez lui le jour même, qu’il ne passera pas de nuit à l’hôpital. L’opération est généralement pratiquée sous anesthésie locale ou sous hypnose, bien que, dans certains cas, une anesthésie générale soit requise. L’intervention dure entre 15 et 30 minutes.

Suivi Post-Opératoire

Avant la sortie, remettre au patient une carte d’identification du dispositif, un livret d’information et un carnet de surveillance, contenant des informations essentielles sur la date et le lieu de l’implantation, les précautions à prendre et les dates des injections.

Surveillance et Complications Potentielles

Inspecter le point de ponction : vérifier l’absence de rougeur, chaleur, induration, œdème, écoulement ou douleur localisée, signes potentiels d’infection ou d’extravasation. Avant de poser l’aiguille, pendant ou après l’utilisation de l’aiguille, l’infirmier(e) doit être capable de reconnaître un dysfonctionnement, d’en identifier la cause et de prendre les premières mesures.

Voici un tableau récapitulatif des risques, causes, prévention et conduites à tenir en cas de complications liées à la chambre implantable :

Risques Causes Prévention Conduites à tenir
Difficulté à localiser la chambre Morphologie du patient, chambre profonde. Repérer la zone à ponctionner avant la pose. Effectuer une palpation profonde, analyser la dernière radiographie de thorax, faire contracter le muscle pectoral en demandant au patient de passer la main derrière la tête.
Suspicion d’infection Contamination lors de la pose, de ponctions ou de manipulations. Pratiquer une asepsie rigoureuse. Poser l’aiguille de Huber en soin stérile. Contrôler l’étanchéité du système clos. Manipuler avec des compresses imbibées d’antiseptique alcoolique. Prévenir le médecin, ne pas insérer l’aiguille dans le dispositif, contextualiser ses apparitions. Observer : cellulite au niveau du trajet du cathéter, abcès de la poche sous-cutanée, signes d’inflammation. Si fébricule : prélever une paire d’hémocultures en périphérique et sur CIP selon le protocole ou sur prescription. Laisser l’aiguille en place.
Extravasation Désunion entre le site et le cathéter, mauvais repérage du septum, mauvaise insertion de l’aiguille. Piquer de manière franche et perpendiculaire au plan cutané en enfonçant l’aiguille jusqu’au fond de la chambre. Vérifier le reflux, le débit du soluté. Rincer entre chaque produit. Contrôler le point d’injection, la bonne position de l’aiguille et sa fixation. URGENCE. Prévenir le médecin, ne pas insérer l’aiguille, contextualiser ses apparitions. Suivre le protocole interne du service avec des kits prêts à l’emploi si disponibles.
Œdème des membres supérieurs Suspicion de thrombose veineuse ou stase sur une compression tumorale. Bien rincer après chaque utilisation de la chambre implantable de manière pulsée avec un volume supérieur à 10 mL. Mettre en route le soluté à un débit cohérent. Retirer l’aiguille de Huber en pression positive. Prévenir le médecin. Si l’aiguille est en place, ne pas la retirer. Objectiver l’œdème pour surveiller son évolution. Sur protocole ou prescription : traitement anticoagulant, écho-doppler.
Embolie gazeuse Non-purge des tubulures. Non-fermeture des robinets. Réaliser la purge de la tubulure avant tout raccordement, ainsi que de la seringue pré-remplie lors des rinçages. Fermer le(s) robinet(s). Utiliser uniquement des seringues Luer Lock®. S’assurer de l’intégrité et du vissage du matériel et des connexions. Pose et dépose de l’aiguille en décubitus dorsal si possible. URGENCE. Prendre les constantes du patient, avertir le médecin, fermer les arrivées d’air.
Douleurs lors de l’injection Déplacement du cathéter, extravasation, fissure ou perforation de gros vaisseaux. Insérer doucement, mais avec assurance l’aiguille. URGENCE. Stopper l’injection, alerter le médecin, ne pas retirer l’aiguille.

Il est crucial de maîtriser les étapes liées à l’utilisation des chambres implantables, notamment la pose et le retrait de l’aiguille de Huber, ainsi que la réalisation de prélèvements sanguins.

Impact sur la vie quotidienne

Procédure complexe, la nutrition parentérale implique un certain nombre d’ajustements qui impactent significativement le quotidien des patients. Ils doivent généralement éviter de manger par voie orale, pour ne pas compromettre l’équilibre nutritionnel prévu par la nutrition parentérale. Lorsque le recours à la nutrition parentérale s’inscrit dans la durée, elle se pratique à domicile. Elle impose alors l’adoption de nouvelles habitudes.

La Nutrition Parentérale À Domicile (NPAD) impose la gestion et le respect d’une routine de soins, avec des horaires de perfusion et le suivi de protocoles spécifiques. Pour cette gestion, patients et leurs soignants à domicile doivent notamment acquérir des compétences spécifiques :

  • préparation des solutions,
  • manipulation des équipements d’administration,
  • surveillance des signes de complications éventuelles.

Le passage à la nutrition parentérale peut également avoir un impact émotionnel sur les patients :

  • sentiment de perte par rapport à l’alimentation orale normale,
  • stress lié à la gestion quotidienne du traitement.

Une étroite collaboration avec leur équipe médicale permet aux patients de s’adapter aux changements qu’ils vivent, en gérant aussi bien les aspects pratiques qu’émotionnels. Le soutien des proches est également crucial pour les aider à maintenir une qualité de vie optimale.

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