Le pica est un trouble du comportement alimentaire (TCA) souvent méconnu. En effet, il se manifeste par la consommation compulsive de substances non nutritives. Ainsi, il peut s’agir de terre, de papier ou même d’objets métalliques et de bien d’autres choses.
La maladie de Pica est un trouble psychiatrique répertorié dans le DSM V (manuel de référence en psychiatrie) parmi les troubles du comportement alimentaire. Ce trouble peut affecter des personnes de tous les âges, sexes et milieux sociaux. Cependant, bien que plus fréquent chez les enfants, les femmes enceintes et les personnes atteintes de certaines conditions de santé mentale, le pica peut toucher n’importe qui.
Contrairement à d’autres TCA, le poids et la silhouette des personnes atteintes de pica peuvent ne pas être des indicateurs fiables de la présence du trouble. Ainsi, cela rend le pica souvent invisible. Cependant, ses conséquences sur la santé physique et mentale peuvent être graves.
Il est essentiel de souligner que le pica n’est pas un choix alimentaire inhabituel. En réalité, il est souvent le symptôme d’un problème psychologique ou émotionnel profond. D’où l’importance d’un diagnostic et d’un traitement précoces.
La maladie de Pica est, par définition, un trouble psychiatrique, répertorié parmi les troubles du comportement alimentaire (Manuel DSM V). Autrement dit, un trouble des conduites alimentaires conduisant à consommer régulièrement des choses qui ne sont pas des aliments.
Qu'est-ce que le Pica ?
Le pica est un trouble du comportement alimentaire souvent mal compris. Il peut avoir des conséquences graves sur la santé et le bien-être de ceux qui en souffrent. Ce trouble peut également être perçu comme une forme d’addiction. Il est décrit comme une “toxicomanie sans substance” en raison de l’impulsion irrésistible de consommer certains types de nourriture et du manque total de contrôle éprouvé pendant les crises.
Définition détaillée
Le pica est un trouble du comportement alimentaire caractérisé par la consommation persistante de substances non nutritives et non alimentaires. Aussi, pour poser un diagnostic, ce comportement doit se produire sur une période d’au moins un mois et à un âge où cette activité est inappropriée (généralement au-delà de 18 mois).
Pour rappel, un aliment est une substance susceptible d’être digérée et qui détient des propriétés nutritives (de l’énergie, des nutriments et/ou des fibres). Ce n’est pas donc pas le cas des éléments consommés dans le cadre du pica.
Les substances consommées peuvent varier très largement : de la terre, du papier, du savon, des cheveux, de la gomme, des cailloux, et même du métal ou du verre…
Dans la plupart des cas, les personnes atteintes de la maladie de Pica ingèrent des matériaux non toxiques, mais ce n’est pas toujours le cas. Dans la majorité des cas, les personnes atteintes de la maladie de Pica ne mangent pas de substances qui les mettent en danger.
Les patients ont tendance à manger des matériaux non toxiques et qui ne mettent pas en péril leur santé. Il peut s’agir :
- de papier ;
- de l’argile ;
- de la poussière ;
- de la terre (géophagie) ;
- de sable ;
- de la craie ;
- de la ficelle ;
- de la laine ;
- du plastique ;
- de la céruse ;
- des cendres ou des mégots de cigarettes (cette forme de pica peut donner lieu à une addiction et à une intoxication à la nicotine) ;
- du givre, de la neige, de la glace (pagophagie) ;
- des cheveux : nous parlons alors de trichophagie. La trichophagie est souvent associée à la trichotillomanie : les cheveux sont arrachés avant d’être mangés. Toutefois, il peut aussi s’agir de poils, de cils ou de sourcils. Plus largement, on rencontre des mangeurs de peaux mortes, de croûtes, d’ongles…
- des matières fécales. Nous parlons alors de coprophagie. C’est notamment le cas lorsque la maladie de Pica est associée à un trouble psychotique ou à une démence.
La trichophagie consiste à arracher ses propres cheveux, puis à les ingérer.
Qui est concerné ?
La maladie de pica peut toucher des individus de tous âges, bien qu’elle soit plus courante chez les enfants, les femmes enceintes et les personnes atteintes de certaines conditions de santé mentale, comme l’autisme et la schizophrénie. En outre, on constate une présence plus élevée de ce trouble au sein des populations défavorisées, bien qu’il puisse concerner n’importe quel groupe socio-économique.
Les femmes enceintes sont aussi à risque de développer une maladie de Pica. Dans ce cas, pica n’est pas associé à une autre affection mentale. Les symptômes disparaissent généralement après l’accouchement.
Statistiques
Les statistiques sur le pica sont relativement limitées en raison de la nature souvent cachée du trouble. Cependant, certaines études estiment que jusqu’à 25-33% des enfants entre 18 et 36 mois présentent un certain degré de comportement lié à ce TCA à un moment donné, bien que la plupart en sortent naturellement.
Chez les adultes, les chiffres sont plus difficiles à obtenir. Mais le pica est généralement considéré comme rare dans la population adulte générale. Il est cependant plus fréquent chez les personnes atteintes de troubles du développement ou de conditions de santé mentale.
Causes du Pica
Comprendre les causes de la maladie de pica est essentiel pour aborder efficacement ce trouble complexe. Les raisons pour lesquelles une personne développe ce trouble du comportement alimentaire peuvent être multiples et souvent interconnectées. En effet, les causes pouvant contribuer à l’apparition du pica sont psychologiques, environnementales et biologiques.
À ce jour, aucun élément ne se pose en faveur d’un facteur héréditaire. À l’heure actuelle, ce syndrome ne fait pas l’objet d’un grand nombre d’études. Il manque en réalité beaucoup d’informations et de modèles.
Causes psychologiques
Les causes psychologiques du pica restent largement méconnues, mais certains facteurs semblent jouer un rôle significatif. Le stress et l’anxiété, par exemple, peuvent être des déclencheurs pour certaines personnes. Les troubles de l’attachement, souvent observés chez les enfants ayant vécu des expériences traumatisantes ou ayant des relations parentales instables, peuvent également contribuer au développement de ce trouble des conduites alimentaires.
De plus, certaines conditions de santé mentale comme l’autisme, la schizophrénie et les TOC ont été associés à des épisodes de pica. Dans certains cas, le pica peut être une forme de comportement auto-destructeur ou un moyen de chercher de l’attention.
La maladie de Pica se retrouve dans le cadre :
- d’un trouble psychotique comme une schizophrénie ;
- d’un trouble de retard du développement comme un trouble envahissant du développement (TED) ou un trouble du spectre de l’autisme (TSA) ;
- d’un trouble anxieux chez l’enfant et l’adolescent. Dans ce cas, le patient mange des éléments non comestibles pour remplir un vide, un manque affectif ou encore attirer l’attention de son entourage s’il se sent délaissé…
Cette maladie peut également survenir chez les personnes qui ne souffrent pas de troubles mentaux, à l’adolescence notamment, dans le cadre d’un trouble de l’image de soi.
Causes environnementales
L’environnement social et physique d’une personne peut avoir un impact majeur sur le développement du pica. Les facteurs environnementaux peuvent inclure la pauvreté, le manque d’accès à une alimentation adéquate, ou l’exposition à des pratiques culturelles spécifiques.
Par exemple, dans certaines cultures ou communautés, manger de la terre ou d’autres substances non alimentaires est une pratique acceptée. Cela peut contribuer à la normalisation du comportement lié au pica. L’exposition à des environnements stressants ou traumatisants peut également aggraver le trouble.
Enfin, la consommation d’éléments non comestibles ne doit pas faire partie d’une tradition culturelle ou religieuse. Par exemple, l’ingestion de kaolin dans le Piémont de Géorgie est considérée comme une tradition et ne peut donc être retenue comme une manifestation du pica.
Causes biologiques
Dans certains cas, le corps peut chercher à compenser ces carences en incitant l’individu à consommer des substances non alimentaires. Cependant, il est crucial de noter que le pica n’est pas toujours directement lié à des carences nutritionnelles. Dans certains cas, des déséquilibres hormonaux ou des anomalies neurologiques peuvent également jouer un rôle dans le développement du trouble.
La maladie de Pica est le plus souvent symptomatique d’un trouble psychotique ou d’un retard mental. Plus rarement, on retrouve la maladie dans le cadre de structures névrotiques.
Conséquences du Pica
Les conséquences du pica peuvent être graves et toucher différents aspects de la vie des personnes souffrant de ce trouble, allant de la santé physique au bien-être psychologique. Il est donc crucial de comprendre ces conséquences pour mieux appréhender la complexité du trouble et l’urgence de sa prise en charge.
En pratique, le syndrome du Pica est vécu comme un trouble honteux et pour les patients il est compliqué d’en parler autour d’eux et aux professionnels de santé.
Conséquences physiques
Les conséquences physiques du pica peuvent être sévères et potentiellement mortelles, nécessitant une prise en charge médicale immédiate dans certains cas. La consommation de substances non alimentaires peut entraîner de nombreux problèmes de santé, notamment :
- Douleurs abdominales
- Nausées
- Vomissements
- Obstructions intestinales
- Perforations de l’estomac ou de l’intestin
- Intoxications par des sustances toxiqes, métaux lourds…
- Infections bactériennes ou parasitaires
- Carences nutritionnelles
Ces conséquences physiques peuvent avoir un impact majeur sur la santé et la qualité de vie des personnes affectées. Elles nécessitent souvent une intervention médicale pour prévenir des complications plus graves.
Les complications éventuellement rencontrées sont :
- une constipation chronique ;
- une occlusion intestinale ou perforation ;
- une anémie par carence en fer et/ou en vitamine B12 ou encore une carence en zinc (certains éléments ingérés comme de la terre peuvent altérer l’absorption des nutriments) ;
- un retard de croissance et de puberté chez l’enfant ;
- des troubles dentaires parfois importants (abrasions) ;
- des intoxications telles que :
- un empoisonnement par le plomb par ingestion de copeaux de peinture (saturnisme) ;
- une intoxication à la nicotine (en cas d’ingestion de mégots ou de cendres de cigarettes) ;
- une infection parasitaire liée à la consommation de terre ou de poussière.
En effet, certaines substances (type argile ou terre) peuvent interférer dans la bonne absorption de certains nutriments.
Conséquences psychologiques
Sur le plan psychologique, le pica peut avoir un impact très important sur la santé mentale et le bien-être émotionnel. Par conséquent, l’isolement social est une conséquence courante. La honte ou l’embarras liés à ce comportement peuvent amener les personnes à éviter les interactions sociales. Ce retrait peut à son tour exacerber d’autres conditions psychologiques comme la dépression ou l’anxiété.
On note aussi un impact sur l’estime de soi, le comportement associé au pica pouvant être source de jugement ou de stigmatisation. Cela peut affecter négativement l’image de soi et la confiance en soi.
De plus, le pica peut être un symptôme d’autres troubles psychologiques ou émotionnels. Cela complique souvent le diagnostic et le traitement. Par conséquent, la complexité des facteurs psychologiques associés au pica rend sa prise en charge particulièrement délicate. Cela souligne l’importance d’une approche multidisciplinaire pour le traitement.
Manifestation des symptômes dans la vie quotidienne
Le pica peut avoir un impact significatif sur la vie quotidienne de ceux qui en souffrent. Les comportements associés à ce TCA peuvent être chronophages et interférer avec les activités normales, comme le travail ou l’école. Par exemple, une personne peut passer beaucoup de temps à chercher et à consommer des substances non alimentaires, ce qui peut affecter sa productivité et ses relations.
La honte et le secret entourent ce TCA. Cela peut avoir un impact important sur la vie sociale du patient. Cela peut le mener à l’isolement social et accentuer ses troubles psychologiques.
De plus, le risque de complications médicales peut entraîner des visites fréquentes chez le médecin ou à l’hôpital, pouvant générer du stress et de l’anxiété.
Comment Soigner le Pica ?
La prise en charge du pica est un processus complexe qui nécessite une approche multidisciplinaire. Étant donné que les causes et les conséquences du pica peuvent varier considérablement d’une personne à l’autre, un traitement individualisé est préconisé. On recommande également de l’adapter au fil du temps.
En raison de son caractère multifactoriel, la prise en charge efficace de ce trouble alimentaire s’avère complexe. Le traitement de ce syndrome nécessite une équipe multidisciplinaire (psychiatre, psychologue, diététicien, travailleurs sociaux).
Au-delà des complications médicales qui nécessitent une prise en charge, un suivi psychothérapeutique par un professionnel formé aux TCA est indispensable pour prendre le chemin de la reconstruction.
Diagnostic du Pica
Le diagnostic du pica est souvent un processus délicat qui implique une évaluation complète de la santé physique et mentale. Le pica est établi lorsque l’individu consomme de manière persistante des substances non alimentaires pendant une période d’au moins un mois.
Pour réaliser le diagnostic, le médecin procède à un examen clinique et interroge le patient sur ses habitudes alimentaires. Dans les faits, la maladie de Pica est souvent un diagnostic secondaire associé à d’autres troubles ou pathologies psychiatriques.
Il convient de noter qu’on ne pose pas généralement de diagnostic de pica chez les enfants de moins de deux ans. En effet, à cet âge, on considère comme normale l’ingestion de telles substances. De plus, le diagnostic n’est pas posé si la consommation de ces matériaux est une pratique culturellement acceptée pour l’individu concerné.
Pica est chronique : on considère, que ce comportement doit durer afin que le diagnostic soit constitué. En outre, il est important que le patient ne soit pas un enfant de moins de 2 ans. En effet, avant cet âge, le fait de porter à sa bouche des objets non comestibles et de tenter de les gouter voire de les avaler n’est pas considéré comme pathologique. Les nourrissons ne savent pas différencier ce qui est comestible ou non et ont tendance à vouloir goûter à tout.
Un médecin, un psychiatre ou encore un psychologue peuvent diagnostiquer le pica par une simple description des symptômes par le patient. Le diagnostic est constitué lorsque la personne décrit ingérer de façon répétée et persistante (depuis plus d’un mois) des éléments non comestibles. Attention ce diagnostic ne peut être retenu pour un enfant de moins de 2 ans ou si la consommation fait partie de la culture du patient.
Il est essentiel de procéder à une évaluation psychologique systématique afin d’identifier d’éventuels troubles simultanés qui pourraient contribuer au comportement associé au pica.
Il est préférable que le médecin ou le psychiatre vérifie l’état de santé du patient par certains examens complémentaires. Si le patient est pris en charge par un psychologue, il est recommandé à ce dernier de déléguer ce contrôle à un médecin. Les examens peuvent comprendre :
- un contrôle de l’IMC du patient (afin de déceler une éventuelle dénutrition) ;
- un bilan sanguin afin de déceler d’éventuelles carences ;
- des radiographies et des examens sanguins spécifiques ou analyses des selles en cas de symptômes digestifs.
Parfois le pica peut être décelé lors d’un passage aux urgences en cas de complications digestives ou d’intoxication sévère. Des radiographies peuvent alors être effectuées en cas de blocages au niveau du tube digestif. Des analyses de sang sont réalisées pour déterminer si la personne souffre d’intoxication par le plomb. Des analyses de selles sont pratiquées en cas de suspicion d’infection parasitaire.
Options de traitement disponibles
Un accompagnement psychologique est crucial pour traiter efficacement le pica. Ce soutien vise non seulement à améliorer l’image corporelle et l’estime de soi, mais également à identifier et à comprendre les facteurs sous-jacents qui ont conduit la personne à adopter des comportements alimentaires anormaux.
À travers ce travail thérapeutique et une meilleure compréhension de soi, l’individu apprend à gérer son mal-être et ses émotions en adoptant des comportements plus adaptés.
Différents types de thérapies ont montré leur efficacité dans le traitement du pica, qu’elles soient individuelles ou en groupe :
- La psychanalyse
- Les thérapies familiales et systémiques
- Les thérapies cognitivo-comportementales
Il est important de choisir la thérapie en tenant compte de la personnalité et de l’histoire de la personne, ce qui favorise une meilleure adhésion au traitement.
De plus, on recommande un suivi médical et nutritionnel pour traiter les complications physiques et encourager l’adoption de pratiques alimentaires plus saines.
Il n’y a pas de traitement spécifique de la maladie de Pica. Le traitement de pica passe par d’abord par la prise en charge du trouble psychiatrique sous-jacent (s’il y en a un).
Par ailleurs, la participation d’un médecin (un psychiatre ou un généraliste) au traitement est prépondérante afin de traiter les éventuelles carences nutritionnelles et les autres complications. Les carences font l’objet de supplémentations notamment. Enfin, les blocages du tube digestif peuvent nécessiter une intervention chirurgicale.
Le pica peut durer plusieurs mois voire années, puis disparaître spontanément, en particulier chez les enfants.
Bien que le pica puisse être un trouble difficile à surmonter, il n’y a pas de fatalité. Avec l’aide d’un spécialiste, il est possible de trouver une voie vers la guérison.
TAG: